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02/07/2015 | FRANCE | N°13/01185

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 02 juillet 2015, 13/01185


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 02 Juillet 2015

(n° 318 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/01185-MAC



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Décembre 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 11/15069





APPELANT

Monsieur [C] [U]

[Adresse 3]

[Adresse 4]

né le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 1]

compar

ant en personne, assisté de Me Gilbert FILIOR, avocat au barreau de PARIS, toque : R105







INTIMEE

SOCIETE CAFE DE FLORE

[Adresse 1]

[Adresse 2]

représentée par Me François-marie ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 02 Juillet 2015

(n° 318 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/01185-MAC

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Décembre 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 11/15069

APPELANT

Monsieur [C] [U]

[Adresse 3]

[Adresse 4]

né le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 1]

comparant en personne, assisté de Me Gilbert FILIOR, avocat au barreau de PARIS, toque : R105

INTIMEE

SOCIETE CAFE DE FLORE

[Adresse 1]

[Adresse 2]

représentée par Me François-marie IORIO, avocat au barreau de PARIS, toque : D0649

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Juin 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Marie-Antoinette COLAS, Conseillère, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Catherine METADIEU, Présidente

Mme Marie-Antoinette COLAS, Conseillère

Mme Marthe-Elisabeth OPPELT-RÉVENEAU, Conseillère

Greffier : Madame Véronique FRADIN-BESSERMAN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Catherine MÉTADIEU, présidente et par Madame Véronique FRADIN-BESSERMAN, greffier présent lors du prononcé.

Exposé du litige :

M. [U] a été engagé par la SAS Café de Flore suivant un contrat de travail à durée indéterminée du 6 octobre 1987, en qualité de garçon de café.

À compter du 29 octobre 2010, M. [U] a été en arrêt maladie.

Lors de deux visites successives à la médecine du travail les 11 mai et 1er juin 2011, le médecin du travail a conclu de la manière suivante : « inaptitude médicale au poste de serveur, secondaire à une maladie professionnelle . Apte à tout poste sans port de charge ».

Une première proposition de reclassement a été faite à M. [U] le 7 juin 2011 qu'il a refusée.

Après consultation du médecin du travail, la SAS Café de Flore a formulé une nouvelle proposition de reclassement, le 29 juin 2011, que M. [U] a refusée à nouveau.

Après avoir initié une procédure de licenciement, la SAS Café de Flore a notifié à M. [U] son licenciement pour cause réelle et sérieuse par lettre du 26 juillet 2011.

Contestant son licenciement, M. [U] a saisi le conseil des prud'hommes de [Localité 2] aux fins d'obtenir le solde de l'indemnité spécifique de licenciement outre diverses indemnités et primes.

Par un jugement du 10 décembre 2012, le conseil de prud'hommes de [Localité 2], section commerce a débouté M. [U] de l'ensemble de ses prétentions.

Appelant de ce jugement, M. [U] demande à la cour de l'infirmer, statuant à nouveau, de condamner la SAS Café de Flore à lui verser les sommes suivantes :

-26 905,01 euros au titre du solde d'indemnité spéciale de licenciement,

-8242,46 euros au titre de l'indemnité équivalente à l'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents,

-50 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-760,86 euros au titre de la prime d'habillage et de déshabillage,

-250 euros au titre de la prime liée à la réduction du taux de TVA,

-3600 euros pour les frais non compris dans les dépens de première instance,

-3000 euros pour les frais non compris dans les dépens de l'instance d'appel,

ces différentes sommes portant intérêts au taux légal, avec capitalisation des intérêts conformément à l'article 1154 du Code civil.

La SAS Café de Flore conclut à la confirmation du jugement déféré.

À titre subsidiaire, elle considère que l'indemnisation à revenir à M. [U] ne peut être supérieure aux sommes qu'il aurait perçues s'il avait été licencié pour inaptitude due à une maladie professionnelle, s'oppose à la demande de prime pour le temps de l'habillage et du déshabillage.

Elle explique avoir procédé au versement de la somme de 125 euros au titre de la prime liée à la réduction du taux de TVA, qu'elle admet devoir et réclame 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens développés, aux conclusions respectives des parties, visées par le greffier et soutenues oralement lors de l'audience.

Motifs :

Sur la demande de prime pour l' habillage et de déshabillage :

Au soutien de cette demande le salarié invoque les dispositions de l'article 7 de l'avenant numéro 2 de la convention collective nationale des hôtels cafés restaurants du 5 février 2007, qui expose que le temps d'habillage et de déshabillage est exclu de la durée du travail tel que défini à l'article 3. Ce texte prévoit que « lorsque le port d'une tenue de travail est imposé par les dispositions législatives ou réglementaires, par des clauses conventionnelles, par le règlement intérieur ou par le contrat de travail, que l'habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l'entreprise ou sur le lieu de travail, le temps nécessaire aux opérations d'habillage de déshabillage font l'objet de contreparties. Il appartient aux entreprises de définir lesdites contreparties sous forme, soit de repos, soit de contreparties financières[...]Cette contrepartie est précisée dans le contrat de travail. À défaut de contrepartie fixée par l'entreprise, le salarié comptant un an d'ancienneté dans l'entreprise bénéficie d'un jour de repos par an. [...] Lorsque l'activité de l'entreprise ne permet pas la prise du congé, le salarié perçoit une compensation en rémunération équivalente. »

M. [U] a fait valoir qu'entre 2007 et 2010, il n'a jamais bénéficié de la prime alors qu'il devait revêtir une tenue spécifique lors de son service.

La SAS Café de Flore confirme qu'une tenue spécifique était exigée pour l'exercice du travail mais soutient que le temps d'habillage et de déshabillage n'a jamais été exclu de la durée du travail, que ce temps n'a donc jamais généré la moindre perte de revenus pour le salarié.

Ces dispositions conventionnelles qui rejoignent les dispositions légales posées par l'article L. 3121 63 du code du travail s'imposent sauf s'il est établi que le temps d'habillage et de déshabillage a été assimilé à du temps de travail effectif et réglé comme tel.

Or, la SAS Café de Flore se limite à le soutenir sans le démontrer.

Dans ces conditions, le salarié est fondé à réclamer la contrepartie financière prévue conventionnellement.

Le jugement déféré sera donc infirmé sur ce point et la cour allouera à M. [U] la somme de 760,86 euros.

Sur la prime liée à la TVA :

Selon l'article 5 de l'avenant numéro 6 de la convention collective nationale des hôtels, cafés et restaurants du 15 décembre 2009, « le droit à la prime liée à la réduction du taux de TVA à 5,5 % dans la restauration est ouverts à l'ensemble des salariés des entreprises relevant du champ d'application du présent avenant sous réserve qu'ils remplissent de conditions cumulatives, avoir un an d'ancienneté à la date du versement de la prime, et être présent dans l'entreprise le jour du versement de la prime laquelle est égale à 2 % du salaire de base annuelle dans la limite de 500 euros par an pour un salarié employé à temps plein. Le premier versement de la prime doit avoir lieu l'échéance de la paie du 1er juillet 2010, les versements suivants se faisant chaque année à la même date de la même échéance de paie. »

Il est vain pour la SAS Café de Flore de soutenir qu'elle s'est affranchie du versement de cette prime pour l'année 2010, sur les conseils de son syndicat professionnel, au motif que le salaire de cette catégorie du personnel s'était trouvé améliorer par rapport à l'année de 1009 la suite du changement de base de calcul induit par la baisse de TVA.

La disposition conventionnelle s'imposant, c'est à juste titre que M. [U] a sollicité la somme de 250 euros pour les années 2010 et 2011. Elle lui sera allouée.

Sur le licenciement :

La lettre de licenciement du 26 juillet 2011, est ainsi rédigée:

« [....]Votre maladie a été prise en charge au titre des maladies professionnelles[...]Dans le cadre des visites de reprise après maladie professionnelle, le médecin du travail au cours des deux visites qui se sont déroulées les 11 mai et 1er juin derniers vous a déclaré inapte au poste de serveur, tout en estimant que vous étiez apte au poste sans port de charges. Nous avons alors immédiatement examiné avec le docteur [T], médecin du travail quelles étaient les possibilités de postes pouvant répondre à ses prescriptions. Nous vous avons proposé un poste d'officier cafetier réduit au seul poste de la machine à café. Par courrier du 27 juin 2011, le médecin du travail a confirmé que ce poste répondait à ses prescriptions. Malheureusement, et alors qu'aucun autre poste n'était disponible, vous avez catégoriquement refusé d'exercer cette nouvelle fonction. Ce refus a été réitéré lors de notre entretien du 18 juillet dernier. En ce qui nous concerne, nous considérons que, malgré l'existence de votre maladie professionnelle, votre refus est abusif. Nous sommes donc contraints par la présente de vous notifier votre licenciement pour cause réelle et sérieuse. Si votre inaptitude à certains postes a en effet été reconnue par le médecin du travail, nous avons pour notre part satisfait à notre obligation de reclassement.[...]En fonction de ce refus abusif, nous ne serons pas tenus de vous verser votre indemnité compensatrice de préavis ainsi que l'indemnité spéciale de licenciement auxquelles vous auriez droit en fonction de votre inaptitude liée à votre maladie professionnelle. »

Selon l'article L. 1226-10 du code du travail, lorsqu'à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutation, transformation de poste ou aménagement du temps de travail.

Il est admis et non contesté que l'inaptitude du salarié au poste de serveur est d'origine professionnelle, que compte tenu des préconisations médicales, deux propositions de postes de reclassement ont été successivement formulées, la deuxième proposition ayant été expressément soumise aux médecins du travail qui l'a reconnue conforme à ses préconisations.

Le salarié les a refusées.

Si la lettre de licenciement évoque l'inaptitude physique du salarié, elle ne mentionne pas l'impossibilité de reclassement, mais le refus abusif du salarié d'accepter un reclassement dans un poste aménagé .

Aussi, en licenciant M. [U] pour une cause réelle et sérieuse au motif que, même s'il s'agit d'une maladie professionnelle, le refus opposé par le salarié à la deuxième proposition conforme aux préconisations médicales est abusif, l'employeur a rendu le salarié responsable de la rupture.

Il s'en déduit que le licenciement de M. [U] est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris sera infirmé.

Sur les conséquences du licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Dès lors que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse l'employeur ne pouvant justifier le licenciement sur le refus du salarié, fût-il abusif du poste de reclassement, M. [U] est fondé à réclamer le solde de l'indemnité spéciale de licenciement, l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents.

Aucune objection sur les montants des indemnités n'étant formulée, la cour accordera les sommes réclamées à ces titres.

Par ailleurs, M. [U] peut aussi solliciter une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Compte tenu de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée au salarié ( 4121,43 euros) , de son âge (60 ans), de son ancienneté ( près de 24 ans), de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, étant observé qu'il a fait liquider ses droits à la retraite, la cour est en mesure d'allouer à M. [U], une indemnité de 24740 euros en application de l'article L.1235-3 du Code du travail.

Sur les demandes d'indemnités en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile :

L'équité commande d'allouer à M. [U] une indemnité de 800 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en première instance et de lui accorder une nouvelle indemnité de 1500 euros sur le même fondement pour les frais exposés par lui en cause d'appel.

La SAS Café de Flore qui succombe dans la présente instance sera déboutée de sa demande à ce titre et condamnée aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

Statuant contradictoirement et publiquement,

Infirme jugement déféré,

statuant à nouveau et ajoutant,

Condamne la SAS Café de Flore à verser à M. [U] les sommes suivantes :

-26 905,01 euros au titre du solde d'indemnité spéciale de licenciement,

-8242,46 euros au titre de l'indemnité équivalente à l'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents,

-24 740 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-760,86 euros au titre de la prime d'habillage et de déshabillage,

-250 euros au titre de la prime liée à la réduction du taux de TVA,

-800 euros pour les frais non compris dans les dépens de première instance,

-1500 euros pour les frais non compris dans les dépens de l'instance d'appel,

Rappelle que les créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la réception par la défenderesse de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes, que les créances indemnitaires portent intérêts au taux légal à compter de la notification du présent arrêt ;

Ordonne la capitalisation des intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil,

Déboute la SAS Café de Flore de ses demandes,

Condamne la SAS Café de Flore aux entiers dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 13/01185
Date de la décision : 02/07/2015

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°13/01185 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-07-02;13.01185 ?
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