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09/07/2015 | FRANCE | N°12/07312

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 09 juillet 2015, 12/07312


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRÊT DU 9 Juillet 2015

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/07312



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Juin 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MELUN - Section encadrement - RG n° 11/00545





APPELANT

Monsieur [B] [F]

[Adresse 1]

[Localité 2]

comparant en personne, assisté de Me Jean-pierre ARAIZ,

avocat au barreau de PARIS, toque : B0982





INTIMEE

SARL AXE LOGISTIQUE

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Annie GULMEZ, avocat au barreau de MEAUX,

en pré...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRÊT DU 9 Juillet 2015

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 12/07312

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 26 Juin 2012 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MELUN - Section encadrement - RG n° 11/00545

APPELANT

Monsieur [B] [F]

[Adresse 1]

[Localité 2]

comparant en personne, assisté de Me Jean-pierre ARAIZ, avocat au barreau de PARIS, toque : B0982

INTIMEE

SARL AXE LOGISTIQUE

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Annie GULMEZ, avocat au barreau de MEAUX,

en présence de M. [M] [J]

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du Code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 mars 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Martine ROY-ZENATI, Présidente, chargée d'instruire l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Martine ROY-ZENATI, Présidente

Madame Anne-Marie GRIVEL, Conseillère

Madame Murielle VOLTE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : M. Franck TASSET, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Martine ROY-ZENATI, Présidente et par M. Franck TASSET, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

M. [B] [F] a été engagé par contrat à durée indéterminée du 10 juillet 2002 par la société Axe Logistique, dont l'activité consiste à gérer les stocks de marchandises de ses clients et à expédier leurs commandes, en qualité de responsable informatique et production, statut cadre, niveau 3, coefficient 113 de la convention collective des transports routiers et activités auxiliaires du transport.

Il a été licencié pour motif économique le 7 juin 2007.

Contestant le motif de son licenciement, il a saisi le 25 juillet 2011 le conseil de prud'hommes de Melun d'une demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 26 juin 2012, notifié le 5 juillet 2012, le conseil l'a débouté de sa demande et débouté la sarl Axe Logistique de sa demande reconventionnelle en réparation de son préjudice.

M. [F] a interjeté appel le 16 juillet 2012.

Il demande à la cour de :

- condamner la société Axe Logistique à lui payer la somme de 150 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

-débouter la société Axe Logistique de ses demandes reconventionnelles,

- condamner la société Axe Logistique à lui payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Axe Logistique aux dépens.

Il soutient que le motif de la lettre de licenciement est sibyllin et ne mentionne pas la suppression de son poste ; qu'il n'a fait l'objet d'aucune recherche de reclassement ; qu'en réalité, la dirigeante de la société, Mme [J], avec laquelle il vivait en concubinage depuis plusieurs années, a cherché à le discréditer et à le remplacer, alors que où se séparait, par une société ID Concept, à qui elle a confié début 2007 un audit de l'installation informatique, mais dont les conclusions étaient nécessairement orientées puisque cette société a hérité de ce service en externalisation. Il conteste être l'auteur des actes de malveillance dont la société se prétend avoir été victime le 19 mai 2007.

La sarl Axe Logistique demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a reconnu le bien fondé du motif économique du licenciement de M. [F],

- l'infirmer en ce qu'il l'a déboutée de sa demande reconventionnelle,

- en conséquence, condamner M. [F] à lui régler la somme de 65 500 euros en réparation du préjudice que ses agissements lui ont causé,

- le condamner à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Elle soutient qu'en application des dispositions de l'article L. 1235-7 du code du travail, l'action engagée par M.. [F] le 25 juillet 2011 pour contester un licenciement économique notifié le 7 juin 2007 est prescrite. Elle fait valoir qu'il ressort de l'audit de son service informatique a mis en évidence la nécessité d'une réorganisation et qu'elle a proposé à M. [F] de se former aux nouvelles technologies dont elle souhaitait s'équiper mais qu'il a refusé ; que dans ces conditions le motif économique de son licenciement est réel et sérieux. Elle indique qu'elle a subi une panne de l'ensemble du système informatique le 21 mai 2007 et qu'il ressort clairement du rapport de la société d'intervention que les manipulations malveillantes ont été pratiquées au départ du poste 'PC DANY' se trouvant être l'ordinateur du responsable informatique et ont été pratiquées pendant le week end des 19 et 20 mai, soit le lendemain de l'entretien préalable de M. [F].

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats.

MOTIFS DE LA DECISION

Attendu que les dispositions de l'article L. 1235-7 du code du travail étant applicables aux contestations susceptibles d'entraîner la nullité de la procédure de licenciement pour motif économique en raison de l'absence ou de l'insuffisance d'un plan de sauvegarde de l'emploi, le moyen tiré de la prescription de l'action engagée par M. [F] n'est pas fondé ;

Attendu que la lettre de licenciement fixant les limites du litige, il convient de rappeler que M. [F] a été licencié par courrier du 7 juin 2007 aux motifs suivants :

'Nous vous avons exposé lors de notre entretien préalable du 18 mai 2007, au cours duquel nous vous avons remis la documentation établie par les Assedic sur la convention de reclassement personnalisé, les raisons pour lesquelles nous envisagions votre licenciement pour motif économique. Nous vous les rappelons ci-après :

La réorganisation de notre service informatique : changement de technologie du système d'exploitation, mise en place de la radio.

Afin d'éviter votre licenciement, nous avons activement recherché toutes le possibilités de reclassement dans l'entreprise mais nos tentatives se sont révélées infructueuses.

Compte tenu de ces éléments et du fait que vous n'avez pas fait connaître votre réponse sur la proposition de convention de reclassement personnalisé, nous sommes donc contraints de vous notifier votre licenciement pour motif économique.

La présentation de la présente lettre marque le point de départ de votre préavis d'une durée de trois mois que nous vous dispensons d'exécuter (...)' ;

Attendu qu'aux termes de l'article L. 1233-3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié, résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel de son contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ; que le juge prud'homal est tenu de contrôler le caractère réel et sérieux du motif économique du licenciement, de vérifier l'adéquation entre la situation économique de l'entreprise et les mesures affectant l'emploi ou le contrat de travail envisagées par l'employeur, mais ne peut se substituer à ce dernier quant aux choix qu'il effectue dans la mise en oeuvre de la réorganisation ; que le motif économique doit s'apprécier à la date du licenciement, mais qu'il peut être tenu compte d'éléments postérieurs à cette date pour permettre au juge de vérifier si la réorganisation était nécessaire ou non à la sauvegarde de la compétitivité ;

que l'article L. 1233-4 dispose que le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient ;

Attendu qu'il résulte des pièces versées aux débats qu'aux mois de janvier 2006 la société Axe Logistique a perdu un client, la société Pitney Bowles qui lui a reproché de ne pas disposer de la technologie et des compétences permettant de l'accompagner sur son projet; qu'au mois de novembre 2006, la MSA n'a pas retenu son offre de marché au motif qu'elle n'avait pas répondu de façon satisfaisante à son besoin d'informatique ; qu'au mois de novembre 2006 la société Alstom a lancé un appel d'offre relatif à la gestion logistique et au fonctionnement quotidien d'un nouveau magasin ; que pour se montrer compétitive et présenter un système performant, elle a souhaité installer un logiciel W MS Egov9, mais a fait réaliser préalablement par la société ID. Concept un audit de son service informatique dans le but d'évaluer si ses installations, ressources et compétences informatiques étaient adaptées aux nouvelles technologies dont elle envisageait de s'équiper ; que le rapport de la société mandatée a été le suivant :

' Conclusions sur le matériel : le réseau actuel est dimensionné pour recevoir les applications technologiques de nouvelle génération pilotage entrepôt (WMS) et pilotage radiofréquence (...) Compétences nécessaires pour la gestion et la maintenance de la nouvelle technologie: profil du poste : Ingénieur réseaux, Bac+( avec spécialisation dans le domaine des télécommunications (école d'ingénieurs ou université).

Conclusion sur les ressources humaines :

Vous avez actuellement un service informatique constitué d'une personne dont les compétences sont orientées maintenance de matériel informatique (maintenance de PC essentiellement).

Si vous souhaitez accompagner votre migration technologique vous devrez recourir à des compétences inexistantes à l'heure actuelle au sein de votre entreprise.

Le besoin devra être exprimé sur deux poste distincts :

1 Chef de projet (voir profil de poste ci-dessus) pour vous accompagner dans la mise en place de cette nouvelle technologie.

1 Responsable architecture et maintenance du réseau.' ;

que 9 mars 2007, la société Alstom a conditionné sa commande de prestations logistiques à la fourniture d'un système informatique permettant 3 niveaux de traçabilité la conduisant à la réorganisation du service informatique ; que la réalité du motif économique est dans ces conditions avérée de même que son caractère sérieux dès lors que la mutation technologique était nécessaire pour s'adapter aux exigences des appels d'offre de clients potentiels, celui de la société Alstom représentant un montant non négligeable ; que l'introduction d'une nouvelle technologie, que constitue le logiciel installé par la société, est un motif économique de licenciement alors même que la société ne rencontre pas de difficultés économiques ; que la qualification et le poste occupé par M. [F] est la maintenance informatique ; qu'il ressort de l'audit que la qualification requise pour l'installation du nouveau système est celle d'un ingénieur réseaux et pour sa maintenance un responsable 'architecture et maintenance' ; qu'il résulte nécessairement de ces transformations technologiques une incidence sur le poste occupé par M. [F] ; qu'en raison de l'insuffisance de ses compétences techniques, la société Axe Logistique lui a proposé une formation professionnelle ; que Mme [X] [P], comptable au sein de la société, atteste en effet :

'Au cours du mois d'avril 2007, j'au vu M. [B] [F], alors responsable informatique de notre société déménager de nombreux cartons de son bureau vers sa voiture. Durant cette période, il y avait de fréquentes disputes entre M. [B] [F] et Mme [M] [J] car M. [F] ne voulait pas entendre parler de trouver d'autres personnes pour le service informatique.

Il a également refusé une proposition de formation de 2 ans que lui avait faite Madame [J] et pour laquelle j'avais pris contact avec notre organisme de formation AGEFOS.

Au début du mois de mai, Monsieur [F] ne s'est plus présenté au bureau jusqu'au 18 mai 2007, date à laquelle M. [F] a été reçu par Madame [J]. (...)' ; que la cour relève sur ce point que la privation à tout accès informatique à compter du 9 mai 2007 invoquée par M. [F] ne résulte que de ses seules affirmations ;

qu'en outre, la sarl Axe Logistique produit un courrier de la société TOPHRANGER, avec laquelle elle entretenait des relations commerciales, du 6 février 2007 dont les termes sont les suivants : 'Nous avons bien reçu votre demande du 9 courant, relatif au reclassement de votre collaborateur, Monsieur [B] [F].

Nous avons étudié la possibilité de son intégration dans notre groupe et, comme nous vous l'avons indiqué téléphoniquement, il existe une possibilité de recrutement à un poste de responsable de maintenance informatique sur notre site de Melun.

Or, et malgré un premier contact téléphonique prometteur, ce Monsieur ne se manifeste plus.

Pourriez vous nous préciser s'il compte donner une suite à notre proposition, et dans le cas contraire, nous le faire savoir très rapidement (...)' ;

Attendu qu'il résulte de ce qui précède que l'employeur a satisfait à son obligation de proposition de formation et de reclassement du salarié, étant rappelé que le reclassement interne, s'agissant du seul poste du service informatique existant dans l'entreprise, qui ne fait pas partie d'un groupe, était impossible, et qu'il ne peut lui être imposé de lui délivrer une qualification nouvelle ni une formation initiale lui faisant défaut ; que le jugement sera dans ces conditions confirmé en ce qu'il a débouté M. [F] de ses demandes ;

Attendu que, outre les motifs pertinents des premiers juges, que la cour adopte, le rapport d'expertise produit aux débats par la société Axe Logistique ne permet pas davantage de retenir avec certitude l'imputabilité de la panne informatique du 21 mai 2007 à M. [F] en l'absence de preuve de la situation constatée et la traçabilité des interventions réalisées par la société ID Concept ; que le jugement sera également confirmé en ce qu'il a débouté la sarl Axe Logistique de sa demande reconventionnelle ;

Attendu que l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; que les dépens de l'instance d'appel resteront à la charge de M. [F] qui succombe  ;

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare M. [B] [F] recevable à agir ;

Confirme le jugement entrepris ;

Y ajoutant ;

Dit n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [B] [F] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 12/07312
Date de la décision : 09/07/2015

Références :

Cour d'appel de Paris K5, arrêt n°12/07312 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-07-09;12.07312 ?
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