Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 6
ARRET DU 9 JUILLET 2015
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/05357
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Février 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/13537
APPELANT
Monsieur [X] [A]
Né le [Date naissance 1] à [Localité 1] (TURQUIE)
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représenté et assisté de Me Pascale TOUBERT, avocat au barreau de PARIS, toque : A0035
INTIMEE
SA CRÉDIT INDUSTRIEL ET COMMERCIAL
RCS de PARIS sous le numéro B 542 016 381
Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée et assistée de Me Isabelle SIMONNEAU, avocat au barreau de PARIS, toque: D0578
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 12 Mai 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Marie-Paule MORACCHINI, Présidente de chambre
Madame Caroline FÈVRE, Conseillère
Madame Muriel GONAND, Conseillère
qui en ont délibéré
Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du code de Procédure Civile.
Greffier, lors des débats : Madame Josélita COQUIN
ARRET :
- Contradictoire,
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Marie-Paule MORACCHINI, président et par Madame Josélita COQUIN, greffier présent lors du prononcé.
Vu le jugement rendu le 5/2/2014 par le tribunal de grande instance de Paris qui a rejeté la fin de non recevoir formée par le CIC, rejeté la demande de sursis à statuer, rejeté les demandes de Monsieur [X] [A], condamné Monsieur [A] à payer la somme de 900 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens;
Vu l'appel interjeté par Monsieur [X] [A] à l'encontre de ce jugement;
Vu les conclusions signifiées le 26/6/2014 par l'appelant qui demande à la cour de condamner la banque CIC à lui payer la somme de 15.000 euros, la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner le CIC aux dépens ;
Vu les conclusions signifiées le 27/8/2014 par le CIC qui demande à la cour, vu l'article 112 du code de procédure civile, vu l'article L.511-33 du Code monétaire et financier, vu l'article L. 131-47 du Code monétaire et financier, vu l'opposition effectuée par le tireur le 9 février 2009, de confirmer le jugement déféré, en conséquence de juger qu'il n'a commis aucune faute engageant sa responsabilité, de juger que Monsieur [X] [A] n'a pas volontairement exercé une action devant le Juge des référés à l'égard de la SCI BARBUSSE afin de voir rétracter l'opposition enregistrée dès le 11 mai 2009, d'assigner cette société en paiement à la date de rejet du chèque et de prendre des mesures conservatoires et sûretés réelles, de juger qu'il est à l'origine du préjudice qu'il a subi en différant le paiement du chèque de 9 mois à compter de sa création, juger qu'il ne rapporte pas la preuve de la perte d'une chance d'exercer à l'égard du tireur du chèque litigieux, la SCI BARBUSSE, un recours cambiaire lui permettant d'en percevoir la somme de 15.000€, y ajoutant de le condamner à lui payer la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et les dépens ;
SUR CE
Considérant que Monsieur [A], gérant de la société locataire des murs, expose que dans le courant de l'été 2008, la SCI BARBUSSE, l'a informé de ce qu'elle envisageait de vendre ses locaux du [Adresse 3] et qu'elle lui a proposé de résilier amiablement le bail, moyennant la somme de 30.000 euros, ce qu'il a accepté ; que la dite somme devait être réglée par deux chèques, un chèque de 15.000 euros émis par Monsieur [T] dont l'encaissement n'a posé aucun problème, un autre chèque de 15.000 € qui devait être émis par le gérant de la SCI, Monsieur [R] [B];
Considérant qu'il précise que, le 3 juillet 2008, il a reçu de Monsieur [B] un chèque (N° 0590853) de 15.000 euros émis par la SCI BARBUSSE, et tiré sur la banque CIC, agence de [Localité 2], [Adresse 4] et signé par Monsieur [R] [B] ; que ce dernier lui a demandé d'attendre que la vente soit parfaite et les fonds versés, ce qui est advenu le 28 avril 2009 ;
Considérant qu'il indique qu'il a déposé le chèque le 29 avril 2009 à l'agence de [Localité 2] ; que le chèque a été rejeté par la banque le 11 mai 2009 pour le motif ' perte' ; que le CIC n'a jamais voulu justifier du motif du rejet puis a dit avoir perdu l'original du chèque et n'a délivré aucun certificat de non-paiement au porteur ; qu'il a déposé plainte pour escroquerie au parquet de Bobigny ; que cette plainte n'a pu prospérer faute de production de la lettre d'opposition ; qu'il a finalement eu communication du courrier d'opposition dans lequel il était indiqué que le chèque avait été perdu en février 2009 alors qu'il avait été émis en juillet 2008, ce qui démontre l'escroquerie ;
Considérant que par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 4/6/2012 l'avocat de Monsieur [A] a, vainement, mis en demeure le CIC d'avoir à recréditer sur son compte la somme de 15.000 € ;
Considérant que par acte extrajudiciaire en date du 25 juin 2012, Monsieur [X] [A] a assigné le CIC devant le tribunal de grande instance de Paris afin de le voir condamner sur le fondement de l'article L.131-35 du Code monétaire et financier et de l'article 1382 du Code civil au paiement d'une somme de 15.000 € majorée de celle de 2.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Considérant que c'est dans ces circonstances et conditions qu'est intervenu le jugement déféré ; que les premiers juges ont dit que Monsieur [A] avait intérêt à agir ; que la demande de suris à statuer dans l'attente de l'issue de la plainte pénale, dont il n'était pas justifiées, devait être rejetée ; que la responsabilité du CIC ne pouvait être engagée ;
Considérant que l'appelant soutient que le comportement de la banque est fautif; que pour refuser de payer un chèque, la banque devait d'abord vérifier la qualification juridique intrinsèque du motif d'opposition, et non pas sa réalité, pour déterminer s'il s'agissait bien d'un motif licite et qu'à défaut la banque s'expose à la sanction visée à l'article L163-1 du CMF ; qu'en l'espèce le chèque qui avait fait l'objet d'une remise volontaire, antérieurement à la date de la perte invoquée, ne pouvait pas être considéré comme ayant été perdu après cette remise ; qu'en outre la banque par son refus mal fondé de communiquer la lettre d'opposition lui a fait perdre une chance de mener à bien une action civile ou pénale ;
Considérant que Monsieur [A] ne verse aux débats aucune pièce, notamment émanant de la SCI BARBUSSE, susceptible d'étayer et de justifier ses explications en ce qui concerne la date et la cause de l'émission du chèque litigieux ; que la cour relève que dans la lettre de mise en demeure du 4 juin 2009 l'avocat de Monsieur [A] indiquait que ' Monsieur [B] avait lui même remis le chèque en remplacement d'un chèque personnel déjà non réglé ceci pour souligner que le gérant de la SCI BARBUSSE éprouve de grandes difficultés à régler son créancier', précision qui n'est pas reprise devant la cour ;
Considérant qu'il est constant que le chèque émis sur le compte de la SCI BARBUSSE a été mis à l'encaissement le 29/4/2009 et qu'il a été rejeté le 11 mai 2009, la banque ayant reçu le 9 février 2009 une opposition, pour perte, du titulaire du compte au paiement des chèques émis sous les numéros 0590850 à 0590863, le chèque litigieux portant le numéro 0590853 ; que cette lettre indiquait que le tireur avait pris connaissance des sanctions encourues si le motif précisé ci-dessus n'était pas le motif réel de l'opposition (amende de 375.000 € et emprisonnement de 5 ans) et dégageait le CIC de toute responsabilité quant à cette démarche et qu'il s'engageait à prendre à sa charge l'ensemble des frais auxquels le CIC serait exposé si il devait être inquiété ou assigné par le bénéficiaire du chèque ;
Considérant que selon l'article L. 131-35 alinéa 2,3 et 4 du code monétaire et financier, il n'est admis d'opposition au paiement par chèque qu'en cas de perte, de vol ou d'utilisation frauduleuse du chèque, de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaires du porteur. Le tireur doit immédiatement confirmer son opposition par écrit, quel que soit le support de cet écrit.
Tout banquier doit informer par écrit les titulaires de compte des sanctions encourues en cas d'opposition fondée sur une autre cause que celles prévues au présent article. Si malgré cette défense le tireur fait une opposition pour d'autres causes le juge des référés, même dans le cas où une instance au principal est engagée doit, sur la demande du porteur ordonner la mainlevée de l'opposition ;
Considérant qu'en l'espèce, l'opposition a été formulée par écrit et sur un support qui contenait l'information visée au texte précitée dont l'obligation pèse sur le banquier ; qu'il se déduit de cette lettre que le banquier a rempli son obligation d'enregistrement de l'opposition et d'information ;
Considérant, d'autre part, que le motif invoqué figure dans l'énumération légale; qu'en présence d'un cas légal d'opposition , le tiré n'a aucun pouvoir d'appréciation et est tenu de l'admettre sans en rechercher la réalité ;
Considérant que contrairement à ce que soutient l'appelant, le fait que la formule de chèque litigieuse supporte une date d'émission antérieure à la date d'opposition n'est pas en lui même évocateur d'un motif illicite de payer, le chèque déclaré perdu en février 2009 pouvant avoir été falsifié et antidaté, étant rappelé qu'il n'a été déposé à l'encaissement qu'en avril 2009 ; que le banquier tiré ne peut, par le simple dépôt d'un chèque frappé d'opposition à l'encaissement, déduire sa remise volontaire au bénéficiaire ;
Considérant que la banque n'avait pas à effectuer les vérifications préconisées par l'appelant ; qu'en refusant le paiement du chèque frappé d'opposition, le CIC s'est conformé aux dispositions de l'article L.131-35 du Code monétaire et financier, et n'a donc commis aucune faute ;
Considérant que l'article L131-35 alinéa 2 du CMF prévoit qu'il revient au porteur s'il estime non fondée l'opposition faite par le tireur de saisir le juge des référés, afin d'obtenir mainlevée de l'opposition ; que Monsieur [A] s'est abstenu d'exercer cette action au cours de laquelle, le CIC assigné, aurait produit la lettre d'opposition ; qu'il n'a pas non plus, assigné la SCI BARBUSSE en paiement de la somme de 15.000 € alors qu'il verse aux débats l'acte de vente notarié en faveur de la SCI DRANCY BARBUSSE dressé le 28 avril 2009, n'a pas non plus pris de mesures conservatoires ni effectué d'opposition au versement du prix de vente ;
Considérant qu'il aurait également pu engager l'action pénale en se constituant partie civile, ce qui aurait interrompu la prescription ;
Considérant qu'ayant négligé d'introduire toutes les actions civiles et pénales à l'encontre de cette société et les mesures conservatoires permettant d'assurer le recouvrement de sa créance, il est à l'origine du préjudice qu'il invoque ;
Considérant que le jugement déféré doit être confirmé et que Monsieur [A] doit être débouté de toutes ses demandes ;
Considérant que l'appelant, qui succombe et sera condamné aux dépens, ne peut prétendre à l'octroi de sommes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; que l'équité commande qu'il soit condamné à ce titre à verser la somme de 1.000€ au CIC ;
Considérant que les dispositions du jugement relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront confirmées ;
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement déféré,
Y ajoutant,
Condamne Monsieur [X] [A] à payer la somme de 1.000€ au CIC au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toutes autres demandes des parties,
Condamne Monsieur [X] [A] aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT