Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 5
ARRÊT DU 08 SEPTEMBRE 2015
(n°2015/ , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/15422
Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Mai 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 13/00071
APPELANTE
Société AREAS DOMMAGES Agissant poursuites et diligences au nom de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Sandra OHANA de l'AARPI OHANA ZERHAT Cabinet d'Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C1050
Assistée par Me Séverine CARDONEL, avocat au barreau de PARIS, toque : E1105
INTIMES
Monsieur [F] [T]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représenté par Me Luc COUTURIER de la SELARL HANDS Société d'Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : L0061
Assisté par Me Coline WARIN, avocat au barreau de PARIS, toque : T03
SARL GALERIE DE L'OBJET
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentée par Me Pierre BESSARD DU PARC, avocat au barreau de PARIS, toque : D0907
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 09 Juin 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Catherine LE FRANÇOIS, Présidente de chambre
Monsieur Christian BYK, Conseiller, entendu en son rapport
Mme Patricia LEFEVRE, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Madame Aouali BENNABI
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Catherine LE FRANÇOIS, présidente et par Catherine BAJAZET, greffier présente lors de la mise à disposition.
Monsieur [T] est propriétaire d'un immeuble sis [Adresse 1] (Yonne), dont la société GALERIE DE L'OBJET occupait une salle d'exposition.
Le 25 juillet 2006, l'immeuble ainsi que son contenu ont été intégralement détruits par un incendie dont l'origine est inconnue et dont le foyer était situé dans les locaux occupés par la société GALERIE DE L'OBJET.
À la suite d'un rapport d'expertise amiable, le montant total des travaux de reconstruction a été évalué à la somme de 432.089 euros. La société AXA, assureur de Monsieur [T], n'a indemnisé ce dernier du préjudice causé par l'incendie qu'à hauteur de 174.308 euros car la surface déclarée au moment de l'établissement du contrat d'assurance n'était pas conforme à la surface réelle de l'immeuble.
Estimant que l'incendie s'était déclaré dans les locaux mis à disposition de la société GALERIE DE L'OBJET, Monsieur [T] a demandé à l'assureur de cette dernière, la société AREAS, de l'indemniser du reliquat de son préjudice. L'assureur ayant refusé de faire droit à cette demande en faisant valoir qu'au jour de l'incendie, il n'assurait pas encore la société GALERIE DE L'OBJET, par arrêt du 9 octobre 2012, la cour de céans a jugé, sur le principe de la garantie, que celle-ci était due dans les limites contractuelles.
Par acte en date du 8 octobre 2008, Monsieur [T] a assigné la société GALERIE DE L'OBJET et son assureur, la société AREAS DOMMAGES, devant le Tribunal de grande instance de Paris qui, par jugement en date du 30 mai 2014, les a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, condamnés in solidum à lui payer la somme de 316.781 euros, condamné la société AREAS à garantir la société GALERIE DE L'OBJET des condamnations prononcées à son encontre ainsi qu'au paiement de la somme de 2.000 euros à Monsieur [T] et de la somme de 1.500 euros à la société GALERIE DE L'OBJET au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration du 18 juillet 2014, la société AREAS DOMMAGES a interjeté appel de cette décision et, aux termes de ses dernières conclusions du 20 octobre 2014, elle sollicite l'infirmation du jugement, de dire qu'il n'y a lieu d' appliquer ni la présomption de responsabilité de l'article 1733 du code civil ni les articles 1875 et 1880 du même code. A titre subsidiaire, il est demandé à la cour de limiter à la somme de 140.593 euros le solde du préjudice immobilier, à la somme de 23.508 euros le préjudice mobilier professionnel, M. [T] devant être débouté de sa demande au titre du préjudice mobilier personnel. Il est, en outre, réclamé la condamnation de Monsieur [T] et de tout succombant in solidum à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile.
Par dernières conclusions du 18 décembre 2014, Monsieur [T] demande
la confirmation du jugement en ce qu'il a jugé que la société GALERIE DE L'OBJET était responsable des dommages causés par l'incendie et que la société AREAS devait la garantir Il demande en conséquence leur condamnation solidaire à lui verser la somme de 396.479,68 euros à titre de dommages et intérêts, outre la condamnation de l'assureur à lui payer la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions en date du 13 mai 2015, la société GALERIE DE L'OBJET demande la confirmation du jugement et la condamnation de la société AREAS DOMMAGES à lui verser la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile .
L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 mai 2015.
CE SUR QUOI, LA COUR
Sur la responsabilité:
Considérant que la société AREAS DOMMAGES soutient que l'existence d'une convention de jouissance précaire est critiquable, qu'au demeurant, la présomption de responsabilité de l'article 1733 du code civil ne peut s'appliquer en présence d'une occupation conjointe des locaux par le bailleur et le preneur ;
Considérant, s'agissant des dispositions des articles 1375 et 1380 du code civil, qu'il estime celles-ci inapplicables, 'les parties n'ayant pas entendu placer leur contrat sous le régime du commodat' et que l'infirmation sur ce fondement est également encourue du fait que le premier juge a soulevé d'office ces dispositions sans respecter le principe du contradictoire ;
Que l'assureur ajoute qu'en tout état de cause, si la qualification du commodat était retenue, l'existence de l'incendie prouverait celle de la force majeure ou du cas fortuit et que, dans la mesure où l'origine de l'incendie est indéterminée, l'absence de faute est établie ;
Considérant que Monsieur [T], appuyé par la société GALERIE de l'OBJET, répond que la qualification devant être retenue est celle de contrat de prêt à usage et que l'assureur ne rapportant pas la preuve de l'absence de faute de la société GALERIE DE L'OBJET ou l'existence d'un cas fortuit ,il ne peut s'exonérer de son obligation de garantie ;
Considérant que l'appelante, en ne sollicitant pas la nullité du jugement, n'a pas tiré les conséquences de sa demande à voir constater que le premier juge a relevé d'office l'application des articles 1875 et 1888 du code civil sans respecter le principe du contradictoire, qu'il convient donc de la débouter de sa demande d'infirmation à ce titre ;
Considérant qu'il résulte du contrat souscrit le 4 janvier 2006 que M. [T] a mis à disposition de la GALERIE de l'OBJET des locaux à titre gratuit, qu'il s'agit donc, conformément à la définition donnée par l'article 1875 du code civil, d'un prêt à usage ;
Considérant qu'en application de l'article 1880 du même code, l'emprunteur , qui 'est tenu de veiller, en bon père de famille, à la garde et à la conservation de la chose prêtée', ne peut s'exonérer qu'en rapportant la preuve de l'absence de faute de sa part ou de l'existence d'un cas fortuit ;
Que tel n'est pas le cas lorsque, comme en l'espèce, s'agissant d'un incendie ayant pris naissance dans le local prêté , la destruction de la chose a une origine indéterminée, selon le rapport rédigé par l'expert de l'assureur, qu'il convient donc de confirmer de ce chef le jugement déféré ;
Sur les préjudices:
-préjudice immobilier
Considérant que la société AREAS DOMMAGES avance qu'il y a lieu de déduire de la somme de 432.089 euros un premier règlement d'AXA à hauteur de 174.308 euros puis un règlement complémentaire de 117.188 euros ;
Considérant que M [T] demande la condamnation solidaire des sociétés AREAS et GALERIE DE L'OBJET à lui verser la somme de 303.479,68 euros au titre du préjudice immobilier ;
Considérant que s'il n'est pas contesté que M. [T] a reçu de la société AXA la somme de 174 308 euros, qu'en revanche, l'appelante ne rapporte pas la preuve du paiement par cet assureur d'une indemnité complémentaire de 117 188 euros, qu'en effet, le fait que cette somme soit visée par AXA dans un courrier du 13 décembre 2006 n'établit pas la preuve de son paiement dès lors que celui-ci était subordonné à la reconstruction totale du bâtiment et à la présentation des factures justificatives ;
Qu'en conséquence, les sociétés GALERIE de L'OBJET et AERAS seront condamnées in solidum à payer à M. [T] la somme de 257 781 euros(432 089 euros -174 308 euros), le jugement été également confirmé sur ce point ;
-préjudice mobilier
Considérant que M [T] réclame un total de 93 000 euros ;
*professionnel
Considérant que , se basant sur la proposition de son expert, l'assureur propose la somme de 23 508 euros ;
Considérant que prenant compte de la nature des commerces exercés dans les lieux et du mobilier habituellement nécessaire à leur bonne marche ainsi que de la vétusté, la cour, approuvant la motivation du premier juge, confirme sa décision ;
*personnel
Considérant qu'AERAS conclut au débouté , faute de justificatif ;
Considérant qu'au vu des attestations produites, la cour, approuvant la motivation du premier juge, en confirme la décision ;
Sur les frais irrépétibles:
Considérant que l'équité commande de condamner la société AERAS à payer à M.[T] la somme de 2 000 euros, qu'en revanche, il ne convient pas de faire droit aux demandes tant de cette société que de la GALERIE de l'OBJET ;
PAR CES MOTIFS
Statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement déféré et, y ajoutant,
Condamne la société AERAS DOMMAGES à payer à M.[T] la somme de 2 000 euros au titrede l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute cette société et la société GALERIE de l'OBJET de leurs demandes à ce titre,
Les condamne in solidum aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE