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23/09/2015 | FRANCE | N°13/05944

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 1, 23 septembre 2015, 13/05944


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 3 - Chambre 1



ARRÊT DU 23 SEPTEMBRE 2015



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/05944



Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Février 2013 -Tribunal de Grande Instance de CRÉTEIL





APPELANTE





Madame [D] [O]

née le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 1] (94)

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[Adresse 1]



Représentée et assistée de Me David-Benjamin MEYER, avocat au barreau de PARIS, toque : E1990

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/014275 du 22/03/2013 accordée par le b...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 1

ARRÊT DU 23 SEPTEMBRE 2015

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/05944

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Février 2013 -Tribunal de Grande Instance de CRÉTEIL

APPELANTE

Madame [D] [O]

née le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 1] (94)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée et assistée de Me David-Benjamin MEYER, avocat au barreau de PARIS, toque : E1990

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/014275 du 22/03/2013 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

INTIMÉS

Madame [O] [M]

ès qualités d'administrateur provisoire de la succession de [Q] [V]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée et assistée de Me Amélie BLONDE de la SCP DEBRE THOMAS-COURCEL BLONDE, avocat au barreau de PARIS, toque : C0165

PARTIES INTERVENANTES

1°) Monsieur [S] [X] [Z] [F]

né le [Date naissance 2] 1952 à [Localité 2] (95)

[Adresse 3]

[Adresse 3] (RÉPUBLIQUE.DOMINICAINE)

2°) Madame [R] [K] veuve [R]

née le [Date naissance 3] 1935 à [Localité 3]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

3°) Madame [L] [G]

née le [Date naissance 4] 1942 à [Localité 3]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

4°) Monsieur [E] [G]

né le [Date naissance 5] 1943 à [Localité 3]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

5°) Monsieur [H] [F]

né le [Date naissance 6] 1947 à [Localité 3]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

6°) Madame [F] [F]

née le [Date naissance 7] 1951 à [Localité 3]

[Adresse 8]

[Adresse 8]

7°) Madame [C] [F] épouse [S]

né le [Date naissance 8] 1944 à LYON (69)

Le [Adresse 9]

[Adresse 9]

Représentés par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS,

toque : K0065, postulant

assistés de Me Stéphane DUMAINE-MARTIN, avocat au barreau de PARIS,

toque : D0062, plaidant

8°) Madame [B] [W] [C]

née le [Date naissance 9] 1989 aux [Localité 4] (93)

chez M [J]

[Adresse 10]

[Adresse 10]

Représentée et assistée de Me Véronique CHAUVEAU de l'AARPI CBBC, avocat au barreau de PARIS, toque : B0759

COMPOSITION DE LA COUR :

Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 02 juin 2015, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Evelyne DELBÈS, président,

Madame Monique MAUMUS, conseiller

Madame Nicolette GUILLAUME, conseiller

qui en ont délibéré

Greffier :

lors des débats : Madame Marie-France MEGNIEN

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Evelyne DELBÈS, président, et par Madame Emilie POMPON, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

* *

[Q] [V] est décédé le [Date décès 1] 2010 sans laisser d'héritier connu.

Il était propriétaire d'un bien immobilier sis [Adresse 11].

Les charges de copropriété n'étant plus payées, le syndicat des copropriétaires a obtenu, suivant ordonnance du 18 janvier 2011, la désignation de Maître [M] en qualité d'administrateur provisoire avec pour mission de :

- rechercher les ayants droit à la succession,

- administrer la succession tant activement que passivement,

- représenter la succession tant en demande qu'en défense dans toute instance engagée par le défunt ou dirigée contre lui,

- en général, faire le nécessaire à charge d'en référer au juge des requêtes.

Une ordonnance du 14 mars 2011 a complété cette mission pour autoriser l'administrateur provisoire à interroger le fichier Ficoba et à faire procéder par le ministère d'un commissaire-priseur à la vente aux enchères publiques des meubles et objets mobiliers et à appréhender les fonds ou titres dépendant de la succession.

Aux termes de l'enquête de police diligentée à la suite du décès de [Q] [V], une information a été ouverte pour homicide volontaire avec préméditation et au cours de l'instruction, Mme [D] [O] a reconnu avoir donné la mort à l'intéressé dont elle était la compagne.

Le défunt avait laissé deux testaments olographes, rédigés en des termes identiques et datés du 22 juin 2009, qui instituaient Mme [D] [O] légataire universelle.

Maître [M], ès qualités, s'est constituée partie civile, dans la procédure pénale.

Par acte du 15 février 2012, elle a aussi assigné Mme [O] devant le tribunal de grande instance de Créteil aux fins de révocation pour ingratitude des dispositions testamentaires prises en sa faveur par le défunt.

Par jugement du 12 février 2013, le tribunal de grande instance de Créteil a :

- déclaré Maître [M], ès qualités, recevable en son action,

- ordonné la révocation pour cause d'ingratitude des dispositions testamentaires prises par [Q] [V] en faveur de Mme [O],

- annulé en conséquence les testaments qu'il a souscrits en faveur de Mme [O] le 22 juin 2009,

- condamné Mme [O] à payer à Maître [M], ès qualités, une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Mme [O] a interjeté appel de cette décision par déclaration du 25 mars 2013.

Mme [B] [W] [C], d'une part, MM. [S] [F], [E] [G] et [H] [F] et Mmes [R] [K] veuve [R], [L] [G], [F] [F] et [C] [F] épouse [S], d'autre part, sont intervenus volontairement dans cette instance d'appel.

Par ordonnance du 20 janvier 2015, le conseiller de la mise en état s'est déclaré incompétent pour statuer sur la recevabilité de ces interventions volontaires et sur la demande de sursis à statuer de Mme [C], rejeté les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile dans le cadre de l'incident et dit que les dépens de celui-ci suivront le sort de ceux de l'instance au fond.

Dans ses dernières conclusions du 6 octobre 2014, Mme [O] demande à la cour de :

- la dire recevable en son appel,

- à titre principal,

- dire nulle l'assignation introductive d'instance du 15 février 2012,

- dire Maître [M], ès qualités, irrecevable en ses demandes pour défaut de pouvoir, de qualité et d'intérêt à agir,

- dire l'ensemble des parties intervenantes volontaires irrecevables en leur intervention ainsi qu'en leurs demandes pour défaut de preuve d'un quelconque intérêt à agir né et actuel ou d'une qualité à agir reconnue,

- dire prescrite l'action en révocation des testaments du 22 juin 2009,

- dire irrecevable l'action en révocation des dits testaments pour cause de pardon de [Q] [V],

- en conséquence,

- infirmer le jugement entrepris,

- statuant à nouveau,

- débouter Maître [M], ès qualités, et toutes les parties intervenantes de l'ensemble de leurs demandes,

- subsidiairement sur le fond,

- constater qu'elle se trouvait dans une relation d'emprise et de dépendance à l'égard de [Q] [V],

- constater qu'elle a agi sur la demande et sous l'emprise de celui-ci,

- constater que son discernement était altéré, voire aboli, lors des faits,

- dire qu'elle n'a pas fait preuve d'ingratitude à l'égard de [Q] [V] au sens de l'article 955 du code civil,

- en conséquence,

- débouter Maître [M], ès qualités, et toutes les parties intervenantes de l'ensemble de leurs demandes,

- en toute hypothèse,

- condamner Maître [M], ès qualités, et les intervenants volontaires aux entiers dépens.

Dans ses conclusions du 19 mai 2015, Maître [M], ès qualités, demande à la cour de :

- apprécier la qualité à agir de Mme [C],

- vu les articles 955 et 1046 du code civil,

- dire Mme [O] mal fondée en son appel et l'en débouter,

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

- condamner Mme [O] à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens avec application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions du 13 mai 2015, Mme [C] demande à la cour de :

- la déclarer recevable en son intervention volontaire,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a ordonné la révocation pour cause d'ingratitude des dispositions testamentaires prises par [Q] [V] en faveur de Mme [O] et annulé en conséquence les testaments souscrits en faveur de l'intéressée le 22 juin 2009.

Dans leurs dernières conclusions du 19 mai 2015, MM. [S] [F], [E] [G] et [H] [F] et Mmes [R] [K] veuve [R], [L] [G], [F] [F] et [C] [F] épouse [S] demandent à la cour de :

- les déclarer recevables en leur intervention volontaire en application des articles 325 et suivants et 544 code de procédure civile et 734 du code civil,

- déclarer Mme [C] irrecevable en son intervention volontaire par application de l'article 122 du code de procédure civile,

- confirmer le jugement entrepris ayant ordonné la révocation pour cause d'ingratitude des dispositions testamentaires prises par [Q] [V] en faveur de Mme [O] et annulé en conséquence les testaments qu'il a souscrits en faveur de cette dernière le 22 juin 2009, par application des articles 955 et 1046 du code civil,

- condamner Mme [O] à leur payer la somme de 4 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE

Sur la recevabilité de l'intervention volontaire de Mme [C] et des consorts [F] [K] [G]

Considérant que Mme [O] conteste la recevabilité de l'intervention de Mme [C] et de consorts [F] [K] [G] dont le lien de parenté avec le défunt n'est pas établi et qui ne justifient pas, en toute hypothèse, avoir accepté la succession ;

Considérant que Mme [C] expose que [I] [C], sa mère, et [Q] [V] ont vécu en concubinage durant la période légale de sa conception et soutient que le défunt s'est toujours considéré et comporté comme son père, annonçant la grossesse de sa compagne à ses amis, assistant à l'accouchement et participant au choix de son prénom, en étant aussi présent auprès de la crèche et des écoles qu'elle a fréquentées et en participant financièrement à son entretien et à son éducation ; qu'elle précise qu'elle a engagé une action en recherche de paternité qui est actuellement pendante devant le tribunal de grande instance de Bobigny ;

Considérant que force est de constater que le lien de filiation dont Mme [C] se prévaut à l'égard du défunt n'est à ce jour nullement établi ; que la cour n'est pas le juge de ce lien ; que l'intéressée est donc dépourvue de toute qualité et de tout intérêt né et actuel à agir en révocation des dispositions testamentaires de [Q] [V] ; que son intervention volontaire dans l'instance à cette fin sera donc déclarée irrecevable ; que le sursis à statuer qu'elle évoque dans les seuls motifs de ses écritures, sans en faire la demande dans le dispositif, ne s'impose pas, l'issue du présent litige qui n'a pas trait à la dévolution et à la liquidation de la succession ne dépendant pas de ce qui sera jugé sur l'action en recherche de paternité ;

Considérant qu'au vu du tableau généalogique de la succession de [Q] [V] établi par l'Etude de généalogie Andriveau, les consorts [F] [K] [G], issus des frères et soeurs de la mère du défunt, sont les héritiers par le sang de ce dernier ;

Considérant que les intéressés, qui font justement valoir que leur intervention volontaire dans la présente instance vaut acte d'héritier et acceptation de la succession, justifient de leur qualité et de leur intérêt à agir et seront dits recevables en leur intervention volontaire ;

Sur la nullité de l'assignation du 15 février 2012

Considérant que Mme [O] argue de la nullité de l'acte introductif d'instance du 15 février 2012 au motif qu'il a été délivré par Maître [M] à une époque où le mandat de l'intéressée avait pris fin sans être renouvelé et où elle était sans qualité et sans intérêt à agir ;

Considérant que cette demande doit être rejetée dès lors que Maître [M] produit l'ordonnance rendue le 14 mai 2012 qui a prorogé sa mission pour une durée d'un an à compter du 18 janvier 2012 et jusqu'au 18 janvier 2013 ;

Sur la recevabilité de l'action engagée par l'administrateur provisoire

Considérant que Mme [O] fait plaider que sa mission ne conférait pas à Maître [M] qualité et intérêt pour agir en révocation des testaments pour ingratitude, action à caractère personnel qu'elle ne pouvait pas engager sans y avoir été spécialement autorisée par le juge qui l'avait désignée ; qu'elle ajoute que

l'administrateur provisoire, qui la représentait en tant que seule héritière connue, se trouvait en conflit d'intérêt avec elle ; qu'elle argue en conséquence de l'irrecevabilité de l'action engagée par l'intéressée, ès qualités ;

Considérant que les héritiers du défunt étant devenus parties à l'instance pour solliciter en cette qualité la confirmation du jugement, la fin de non-recevoir opposée par Mme [O] a été régularisée ;

Sur la prescription de l'action en révocation

Considérant que Mme [O] fait plaider que son rôle supposé dans le décès de [Q] [V] était connu dès l'origine, de sorte que le délai de prescription de l'action en révocation a commencé à courir dès le décès, soit à compter du [Date décès 1] 2010 et qu'elle était donc prescrite le jour de son introduction, le 15 février 2012 ; qu'elle ajoute que Maître [M] qui a été désignée le 5 janvier 2011 a, au moins à compter de cette date, été en mesure d'avoir connaissance des faits d'ingratitude invoqués ;

Considérant que la révocation judiciaire des legs pour ingratitude prévue par l'article 1046 du code civil est calquée sur celle concernant les donations ; que conformément à l'article 957 du code civil, l'action en révocation d'une disposition testamentaire doit, en principe, être formée dans l'année du jour du délit imputé au bénéficiaire ou du jour que le délit aura pu être connu par le gratifiant ; que cependant, lorsque le disposant s'est trouvé dans l'incapacité d'agir avant le décès, le délai court du jour où les héritiers ont eu connaissance du délit imputé au légataire et du testament fait en faveur de celui-ci ; qu'en outre, lorsque le fait invoqué constitue une infraction pénale, ce point de départ peut être retardé jusqu'au jour où la condamnation pénale aura établi la réalité des faits reprochés ;

Considérant en l'espèce, que ce n'est que par un arrêt rendu au cours du mois de (20) février 2015 que la cour d'assises du Val-de-Marne a déclaré Mme [O] coupable des faits d'homicide avec préméditation et l'a condamnée à une peine d'emprisonnement avec sursis ; que l'action en révocation engagée le 15 février 2012 n'est donc pas prescrite ;

Sur la demande en révocation

Considérant que l'action en révocation des dispositions testamentaires de [Q] [V] est fondée sur l'article 955 1° du code civil, c'est-à-dire, pour cause d'ingratitude si le gratifié a attenté à la vie du testateur ;

Considérant que la fin de non recevoir tirée du pardon invoqué par Mme [O] ne peut pas prospérer, l'existence d'un pardon ne se concevant pas de la part d'un testateur décédé dans l'attentat perpétré contre lui ;

Considérant que Mme [O] soutient que l'élément intentionnel nécessaire à la caractérisation de l'ingratitude manque en l'espèce où elle n'a fait que ce que [Q] [V], qui l'avait écrit à plusieurs reprises, lui a demandé de faire et qu'elle n'avait pas sa raison au moment des faits, ce que les expertises psychiatriques ordonnées par le magistrat instructeur ont établi ;

Considérant que les intimés répliquent que le mode opératoire du crime établit l'intention de donner la mort de son auteur et qu'aucune pièce ne démontre que l'appelante aurait agi à la demande de [Q] [V] ;

Considérant que l'attentat à la vie du testateur suppose la volonté de tuer ;

Considérant qu'aux termes du rapport qu'ils ont établi le 26 novembre 2012, les Dr [Y] et [Q], désignés en qualité d'experts par le juge d'instruction à l'effet de procéder à l'examen psychiatrique de l'appelante, indiquent que celle-ci 'a vécu en autarcie', 'n'avait quasiment plus aucun contact avec son entourage, plus d'ami(e)s', que 'sa vie se situait en dehors de la réalité, tout comme ses préoccupations, qui étaient uniquement liées à la réalisation des désirs de son mentor', qu'elle 'présente des troubles de l'organisation psycho affective' et 'a adhéré de façon massive et pendant longtemps (...) à une emprise mentale mise en place par son compagnon', que l'infraction 'se situe dans une contexte psychotique partagé, ou nommé également délire à deux, lié à une situation d'emprise auprès d'un homme présentant vraisemblablement lui-même des troubles de l'organisation psychique' et que la 'situation d'emprise dans laquelle elle a évolué est venue altérer son discernement ainsi que le contrôle de ses actes' ; que le Dr [W] indique, dans un rapport d'expertise du 5 mars 2012, que 'Les faits qui lui sont reprochés sont liés à son adhésion aux idées délirantes de son compagnon ainsi qu'à la relation d'emprise et de domination que ce dernier a exercé sur elle (...) Ces anomalies psychiques ainsi que le délire induit ont (...) joué un rôle déterminant dans le passage à l'acte et dans son acceptation d'une aide au suicide. La demande formulée par la victime a représenté pour elle une contrainte à laquelle elle n'a pas pu résister' ; que cet expert concluait à une abolition du discernement de l'appelante au sens de l'article 122-1 du code pénal ; que Mme [O] produit un document manuscrit daté du mercredi 4 février signé '[Q] [V]' ainsi rédigé : 'J'ai décidé de me suicider. [D] [O], mon amie depuis 1974 m'aidera si j'ai besoin de son aide pour m'ouvrir les veines (...) P.S. Anticipant le cas où je perdrais connaissance j'ai également demandé à mon amie de prendre toutes les mesures qu'elle jugerait appropriées pour que je ne me retrouve pas dans un service de réanimation' ;

Considérant que les conclusions concordantes des experts judiciaires et la teneur de ce document établissent que les faits commis par l'appelante sur la personne du testateur, ont procédé non d'un acte délibéré de sa part, mais d'une contrainte exercée sur elle par le défunt qui la tenait sous son emprise ; que la volonté de tuer, nécessaire à la caractérisation de l'attentat visé par l'article 955 1° du code civil et susceptible d'entraîner la révocation du legs pour ingratitude fait donc défaut ;

Considérant en conséquence, que la cour dira n'y avoir lieu à révocation des dispositions testamentaires prises par [Q] [V] en faveur de Mme [D] [O] le 22 juin 2009 ;

Considérant que les demandes formées par Maître [M], ès qualités, et les consorts [K] [F] [G] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ne sont pas fondées et seront rejetées ;

Considérant que compte tenu des faits de l'espèce, il y a lieu de laisser à chacune des parties la charge des dépens qu'elle a exposés dans la présente instance ;

PAR CES MOTIFS

Dit Mme [C] irrecevable en son intervention volontaire dans l'instance,

Dit les consorts [F] [K] [G] recevables en leur intervention volontaire,

Déboute Mme [O] de sa demande en nullité de l'assignation du 15 février 2012 et rejette ses fins de non-recevoir tirées du défaut de qualité et d'intérêt à agir de Maître [M], ès qualités, et de la prescription,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Dit non fondée l'action en révocation des dispositions testamentaires prises par [Q] [V] le 22 juin 2009 en faveur de Mme [D] [O],

La rejette,

Déboute Maître [M], ès qualités, et les consorts [K] [F] [G] de leurs demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Laisse à chacune des parties la charge des dépens qu'elle a exposés dans la présente instance.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 13/05944
Date de la décision : 23/09/2015

Références :

Cour d'appel de Paris E1, arrêt n°13/05944 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-09-23;13.05944 ?
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