Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 3 - Chambre 1
ARRÊT DU 04 NOVEMBRE 2015
(n° 261 , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/22345
Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Octobre 2014 - Tribunal de Grande Instance de MELUN - RG n° 13/02344
APPELANTE
Madame [Q] [J] [Y] épouse [V], née le [Date naissance 1] 1944 à [Localité 3]
[Adresse 3]
[Localité 3]
représentée et assisté par Me Edouard GOIRAND, avocat au barreau de PARIS, toque : K0003
INTIMES
Monsieur [W] [P], né le [Date naissance 2] 1965 à [Localité 4]
[Adresse 2]
[Localité 1]
Madame [O] [P], née le [Date naissance 3] 1969 à [Localité 4]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentés par Me Alexandre DAZIN, avocat au barreau de PARIS, toque : W06
assistés de Me Lucille TEBOUL, avocat au barreau de PARIS, toque : W06
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 02 Septembre 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Evelyne DELBÈS, Président de chambre
Madame Monique MAUMUS, Conseiller
Madame Nicolette GUILLAUME, Conseiller, chargée du rapport
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Emilie POMPON
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Evelyne DELBÈS, Président et par Madame Emilie POMPON, Greffier présent lors du prononcé.
***
[C] [Y] est décédée le [Date décès 1] 1987, laissant pour lui succéder ses trois enfants M. [W] [P], Mme [O] [P] et Mme [N] [D], mineure au moment du décès. Elle était la fille de [B] [OX] et [H] [Y] et la soeur de Mme [Q] [Y] épouse [V].
Une assurance-vie leur ayant été réglée à la suite du décès de leur mère, M. [W] [P] et Mme [O] [P] ont chacun versé à leur tante, Mme [Q] [Y] épouse [V], une somme de 80.000 francs au mois de juin 1987, soit 160.000 francs (24.391,84 euros) en tout.
Par jugement du 14 octobre 2014, sur assignation délivrée le 17 juin 2013 par M. [W] [P] et Mme [O] [P] à Mme [Q] [Y] épouse [V] sur le fondement de l'article 1376 du code civil, le tribunal de grande instance de Melun a :
- condamné Mme [Q] [Y] épouse [V] à payer à M. [W] [P] et Mme [O] [P] la somme de 24.391,84 euros,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires
- condamné Mme [Q] [Y] épouse [V] aux entiers dépens avec la distraction conformément à l'article 699 du code de procédure civile,
- dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire.
Par déclaration du 7 novembre 2014, Mme [Q] [Y] épouse [V] a interjeté appel de cette décision.
Dans ses dernières conclusions du 4 juin 2015, elle demande à la cour de :
- la recevoir en son appel,
- dire qu'il appartient au demandeur en répétition de l'indu de faire la preuve du caractère indu du paiement reçu,
- dire que cette preuve n'est pas apportée,
- infirmer en conséquence le jugement entrepris,
- débouter M. [W] [P] et Mme [O] [P] de toutes leurs demandes,
- la décharger de toute condamnation,
- très subsidiairement, réduire la condamnation à 10.213,41 euros (33.500 francs x 2),
- condamner in solidum M. [W] [P] et Mme [O] [P] à lui payer la somme de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en cause d'appel et aux entiers dépens, incluant la taxe de 150 euros.
Dans leurs dernières conclusions du 23 février 2015, M. [W] [P] et Mme [O] [P] demandent à la cour de :
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions,
- débouter Mme [Q] [Y] épouse [V] de l'intégralité de ses demandes,
- condamner Mme [Q] [Y] épouse [V] à leur verser la somme de 2.500 euros chacun au titre des frais irrépétibles et au paiement des entiers dépens de l'instance, dont distraction au profit de Me Dazin, avocat, en application des dispositions des articles 699 et suivants du code de procédure civile.
Ces conclusions sont expressément visées pour complet exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.
SUR CE,
Considérant que, selon l'article 954 du code de procédure civile, les prétentions des parties sont récapitulées sous forme de dispositif et la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif ;
Considérant que Mme [Q] [Y] épouse [V] fait plaider qu'il appartient à M. [W] [P] et Mme [O] [P] de rapporter la preuve du caractère indu du paiement intervenu en 1987 ; qu'en raison du temps écoulé, elle ne dispose plus de toutes les preuves pour en démontrer le bien fondé ; que ce paiement est venu en remboursement des frais médicaux et autres qu'elle a engagés pour sa soeur gravement malade et sa nièce qu'elle a hébergées les deux années qui ont précédé le décès ; qu'elle produit plusieurs attestations qui visent à démontrer qu'il était entendu que l'assurance-vie devait en partie permettre ce remboursement ;
Considérant que subsidiairement, elle demande à la cour de réduire le montant de la condamnation en raison d'un paiement partiel intervenu ;
Considérant que M. [W] [P] et Mme [O] [P] soutiennent que leur tante aurait été indûment remboursée grâce au versement intervenu en 1987 et qu'elle ne rapporte aucune preuve des frais avancés (frais médicaux, achat de médicaments et autres frais liés à la vie courante), leur grand-père ayant au contraire assumé l'entretien de [C] [Y] et de son enfant mineur, la sécurité sociale prenant en charge les frais médicaux, l'hébergement étant une obligation naturelle entre soeurs, leur mère résidant d'ailleurs pour partie à [Localité 5], au [Localité 6] chez ses parents, à l'hôpital de [Localité 7] et donc très résiduellement chez l'appelante ; qu'ils contestent le versement allégué qui viendrait diminuer leur créance ;
Considérant que c'est à M. [W] [P] et Mme [O] [P] qui demandent la restitution des sommes qu'ils soutiennent avoir indûment payées, qu'il incombe de prouver le caractère indû du paiement ;
Considérant que la cour observe que plus de 25 ans après le paiement critiqué, [R] [Y], principal intéressé est décédé et ne peut plus témoigner ; que Mme [Y], bien que n'ayant pas à en rapporter la preuve, n'a plus la possibilité de s'adresser à sa banque pour justifier de sa créance par la production de ses relevés de compte ;
Considérant que les rares relevés de compte appartenant à [R] [Y] qui sont versés aux débats ne concernent que des dépenses de carburant ou de courses en grande surface à [Localité 5] qui sont insuffisants pour démontrer les allégations des intimés ; que l'attestation de M. [Y] [XH], trop imprécise en l'absence d'autres preuves (relevés de compte ou autres), ne le peut pas davantage ;
Considérant que si d'autres attestations produites par les intimés eux-mêmes apportent la preuve que la défunte a pu séjourner en 1985 et 1986 chez son père (Mmes [E], [S], [Z], [A], MM. [OX]), à l'inverse, d'autres attestations confirment l'hébergement de [C] [Y] par sa soeur (attestation de Mme [U] [K]) ainsi que le recours à une médecine parallèle onéreuse et non remboursée par la sécurité sociale (attestation de M. [I] [OX]) ;
Considérant que les intimés ne parviennent donc pas à démontrer qu'aucun frais n'a été engagé par l'appelante alors qu'elle a bien hébergé sa soeur et sa nièce et que des frais médicaux importants ont été engagés qui n'étaient pas remboursés par la sécurité sociale ;
Considérant qu'à l'inverse, Mme [Q] [Y], dont personne en 1987 ne contestait le bien fondé de la créance et sur laquelle ne repose pas la charge de la preuve, apporte néanmoins aux débats des témoignages qui attestent de l'hébergement chez elle de [C] [Y] et de sa fille mineure ; qu'elle produit des attestations nombreuses et concordantes, telles que celles de Mmes [F], [GY], [L], [QE], [T], MM [GC], [M], [G], [ZV] qui sont autant d'éléments confirmant l'hébergement et l'existence de frais engagés par elle-même au bénéfice de sa soeur, ainsi que la scolarisation de [N] à [Localité 3] entre avril 1985 et juin 1987 (attestation de M. [X], directeur d'école) ;
Considérant que faute de preuve du caractère indu du paiement intervenu, l'action engagée par M. [W] [P] et Mme [O] [P] ne peut aboutir et que le jugement sera réformé, les consorts [P] devant être déboutés de leur demande de restitution ;
Considérant que M. [W] [P] et Mme [O] [P] seront condamnés à verser à Mme [Q] [Y] une somme globale de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en cause d'appel ;
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement entrepris,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute M. [W] [P] et Mme [O] [P] de toutes leurs demandes,
Condamne in solidum M. [W] [P] et Mme [O] [P] à payer à Mme [Q] [Y] épouse [V] la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en cause d'appel et aux entiers dépens, incluant la taxe de 150 euros, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,