RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 3
ARRÊT DU 19 Janvier 2016
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/05181
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 30 Mars 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LONGJUMEAU RG n° 13/00468
APPELANTE
EURL AUTO ECOLE BUGATTI
[Adresse 1]
[Adresse 1]
N° SIRET : 420 066 045 00030
représentée par Me Jean-Pierre SALMON, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque : PN 137 substitué par Me Antoine CHRISTIN, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE
INTIMÉE
Madame [P] [M]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
née le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 1]
représentée par Me Frédéric TROJMAN, avocat au barreau de PARIS, toque : C0767 substitué par Me Ingrid TROJMAN DERY, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : BOB162
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 Novembre 2015, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Daniel FONTANAUD, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Daniel FONTANAUD, Président
Madame Isabelle VENDRYES, Conseillère
Madame Laurence SINQUIN, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier : Mademoiselle Marjolaine MAUBERT, lors des débats
ARRÊT :
- contradictoire.
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.
- signé par Monsieur Daniel FONTANAUD, Président et par Madame Marjolaine MAUBERT, Greffière en stage de pré-affectation à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
Par jugement du 30 mars 2015, le Conseil de prud'hommes de LONGJUMEAU a relevé qu'une relation de travail avait existé entre Madame [P] [M] et l'EURL AUTO ECOLE BUGATTI dans la période située entre le 20 novembre 2012 et le 25 février 2013, a dit que l'intéressée avait fait l'objet d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, fixé le salaire de Madame [M] à 1547 euros, et condamné la société LINAS MONTHLERY AUTO ECOLE BUGATTI, prise en la personne de son représentant légal, à payer à Madame [M] :
- 4641 euros au titre des rappels de salaires des mois de novembre 2012 à février 2013 et 464,10 euros au titre de congés payés afférents ;
- 1500 euros au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- 500 euros au titre de dommages et intérêts pour préjudice moral ;
- 800 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les premiers juges ont aussi ordonné la remise à Madame [M] d'une attestation pôle emploi, d'un certificat de travail et d'un reçu pour solde de tout compte dans un délai de 1 mois à compter de la notification de la décision sous peine d'une astreinte de 15 euros par jour de retard courant à l'expiration de la période susvisée et pour une durée maximum de 2 mois, le conseil de prud'hommes s'étant réservé le droit de liquider l'astreinte.
L'EURL AUTOECOLE BUGATTI en a relevé appel.
Par conclusions visées au greffe le 23 novembre 2015 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, l'EURL AUTOECOLE BUGATTI demande à la cour d'infirmer le jugement, de débouter Madame [M] de ses demandes, et de la condamner au paiement d'une amende civile de 3.000 euros'pour procédure abusive en application de l'article 32-1 du code de procédure civile et 3.000 euros'de dommages et intérêts pour procédure abusive au titre de l'article 1382 du code civil ainsi que 3.000'euros'au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions visées au greffe le 23 novembre 2015 au soutien de ses observations orales auxquelles il est expressément fait référence en ce qui concerne ses moyens, Madame [M] sollicite in limine litis la radiation du dossier pour non paiement des sommes dues au titre de l'exécution provisoire.
Sur le fond, Madame [M] demande la confirmation du jugement, sauf sur le quantum des sommes allouées au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse et celles allouées à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral. Elle sollicite 9.282 euros au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, 9.282 euros au titre des dommages et intérêts pour préjudice moral et de 2000 euros de dommages et intérêts pour non respect de l'exécution provisoire ainsi que 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats.
MOTIFS
Sur la demande de radiation ;
Aux termes de l'article 526 du code de procédure civile, "Lorsque l'exécution provisoire est de droit ou a été ordonnée, le premier président ou, dès qu'il est saisi, le conseiller de la mise en état peut, en cas d'appel, décider, à la demande de l'intimé et après avoir recueilli les observations des parties, la radiation du rôle de l'affaire lorsque l'appelant ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d'appel ou avoir procédé à la consignation autorisée dans les conditions prévues à l'article 521, à moins qu'il lui apparaisse que l'exécution serait de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives ou que l'appelant est dans l'impossibilité d'exécuter la décision.
Le premier président ou le conseiller chargé de la mise en état autorise, sauf s'il constate la péremption, la réinscription de l'affaire au rôle de la cour sur justification de l'exécution de la décision attaquée".
L'EURL AUTOECOLE BUGATTI ne justifie pas avoir exécuté la décision frappée d'appel en tout ou en partie malgré l'exécution provisoire de droit, mais la Cour observe que Madame [M] n'a pas sollicité la radiation avant l'audience de plaidoirie sur le fond de l'affaire prévue pour le 23 novembre 2015, constate que le dossier est prêt à être plaidé et examiné au fond par la Cour et qu'il n'y a pas lieu de procéder à une radiation qui n'aurait pour effet que de différer l'examen de l'affaire au fond.
Sur la rupture ;
'Principe de droit applicable :
Il résulte des articles L.1221-1 et suivants du code du travail que le contrat de travail suppose un engagement à travailler pour le compte et sous la subordination d'autrui moyennant rémunération. Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.
'Application du droit à l'espèce
En l'espèce, Madame [M] ne produit ni contrat de travail, ni lettre d'engagement, ni un quelconque écrit laissant supposer l'existence d'une relation de travail entre Madame [M] et l'EURL AUTOECOLE BUGATTI, et notamment l'existence d'un lien de subordination. Il est par ailleurs constant qu'il n'y a eu ni versement de salaire, ni établissement de bulletins de salaire. L'intéressée ne produit aucun élément sur l'existence d'un salaire qui aurait pu être convenu entre les parties, ni aucune réclamation de salaire de la part de Madame [M] pendant la relation de travail alléguée. Il n'y a, enfin, ni lettre de licenciement, ni lettre de démission, ni même de lettre prenant acte de la rupture d'un contrat de travail ou même de demande de résiliation judiciaire d'un contrat de travail.
Madame [M] fait état d'une relation de travail entre le 20 novembre 2012 et le 25 février 2013, soit pendant un peu plus de trois mois en qualité "d'assistante" sans même préciser en quoi consistait réellement ses fonctions, ni même indiquer quels étaient ses jours et horaire de travail.
Elle ne produit aucun document établissant qu'elle a reçu des instructions. Les attestations produites par Madame [M] de Messieurs [E] et [U] ne sont pas révélatrices de l'existence d'une prestation de travail. Il en est de même du courriel de Madame [N], qui indique simplement que Mme [M] a accompagné puis ramené des étudiants lors de leur passage d'examen du permis B le 15 novembre 2012 sur le site d'[Localité 2].
En l'espèce, ce n'est que le 27 mars 2013, soit postérieurement à la prétendue de travail que Madame [M] a adressé un courrier à Monsieur [G], gérant de l'EURL AUTOECOLE BUGATTI dans lequel celle-ci fait état de leur rencontre dans un cadre privé et d'une "proposition orale d'embauchage" pour "mars 2013".
Au vu des éléments produits au débat, il apparaît qu'en réalité, Madame [M] et Monsieur [G], qui se connaissaient, ont noué une relation intime dans le courant de l'année 2012. Cette relation explique la présence régulière de Madame [M] à l'auto-école, d'autant que Monsieur [G] admet avoir proposé de la former gratuitement afin que l'intéressée obtienne le diplôme et puisse devenir monitrice d'auto-école.
La situation a pris fin après que la compagne de Monsieur [G] depuis plus de quinze ans eut découvert la liaison en mars 2013, en particulier par un SMS produit au débat sans équivoque sur la nature de la relation entre Madame [M] et Monsieur [G].
Il résulte des éléments versés au dossier, en particulier de plusieurs courriers et messages, qu'à la suite de cette rupture, Madame [M] a eu à plusieurs reprises un comportement agressif et menaçant tant à l'égard de Monsieur [G] que de sa compagne, mais aussi notamment à l'égard d'une salariée de l'auto-école, à tel point que ceux-ci ont déposé plainte contre Madame [M]. Ces plaintes ont été suivies par une action prud'homale de Madame [M].
Les éléments versés au débat ne permettent pas d'établir l'existence d'un contrat de travail qui implique un lien de subordination caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les éventuels manquements de l'intéressé.
Le jugement du Conseil de prud'hommes sera donc infirmé et Madame [M] sera déboutée de l'ensemble de ses demandes.
Sur les demandes pour procédure abusive ;
Il ne sera pas retenu que Madame [M], qui a obtenu gain de cause en première instance, a agi en justice de manière abusive ou dilatoire, et l'intéressée ne sera pas condamnée à une amende civile, ni à des dommages-intérêts sollicités par l'EURL AUTOECOLE BUGATTI.
PAR CES MOTIFS
INFIRME le jugement en toutes ses dispositions, et statuant à nouveau,
DÉBOUTE Madame [M] de l'ensemble de ses demandes,
Y AJOUTANT,
Vu l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE Madame [M] à payer à l'EURL AUTOECOLE BUGATTI la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
DÉBOUTE les parties du surplus des demandes ,
LAISSE les dépens à la charge de Madame [M].
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT