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03/03/2016 | FRANCE | N°15/01437

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 03 mars 2016, 15/01437


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 03 Mars 2016

(n° 144 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/01437



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Janvier 2015 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de BOBIGNY RG n° 13/01593









APPELANT

Monsieur [T] [W]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Loc

alité 2] (CAMBODGE)

comparant en personne, assisté de Me Sabine MOUGENOT, avocat au barreau de PARIS, toque : E0406







INTIMEE

SAS DUPONT MEDICAL

[Adresse 2]

[Localité 3]

N° SIRET : 622 034 ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 03 Mars 2016

(n° 144 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/01437

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Janvier 2015 par le Conseil de prud'hommes - Formation de départage de BOBIGNY RG n° 13/01593

APPELANT

Monsieur [T] [W]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1954 à [Localité 2] (CAMBODGE)

comparant en personne, assisté de Me Sabine MOUGENOT, avocat au barreau de PARIS, toque : E0406

INTIMEE

SAS DUPONT MEDICAL

[Adresse 2]

[Localité 3]

N° SIRET : 622 034 460

représentée par Me Eric FILLIATRE, avocat au barreau de NANCY

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 21 Janvier 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marthe-Elisabeth OPPELT-RÉVENEAU, Conseillère faisant fonction de présidente

M. Mourad CHENAF, Conseiller

Madame Patricia DUFOUR, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Véronique FRADIN-BESSERMAN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Marthe-Elisabeth OPPELT-REVENEAU, Conseillère faisant fonction de présidente et par Madame Véronique FRADIN-BESSERMAN, greffier présent lors du prononcé.

Faits et procédure

La Sa Dupont Medical, entreprise spécialisée dans la fabrication de matériel médical, compte plusieurs sites, dont le siège situé à [Localité 4] (54) et un entrepôt situé à [Localité 5] (93), dans lequel travaillaient 16 salariés..

M. [W] a été embauché en qualité d'ouvrier spécialisé par contrat à durée indéterminée du 9 juillet 1984 et a travaillé en dernier lieu comme magasinier-cariste pour la Sa Dupont Medical, dans l'entrepôt de [Localité 5].

La fermeture de l'établissement de [Localité 5], exproprié par la puissance publique, a obligé l'entreprise à une restructuration interne, la conduisant, dans le cadre d'un PSE à proposer à tous les salariés de l'entrepôt de [Localité 5], de les reclasser dans le nouvel entrepôt créé à [Localité 4].

Ayant refusé cette proposition, M. [W] a, le 30 juillet 2012, été licencié pour motif économique.

Contestant la rupture, M. [W] a saisi le conseil des Prud'Hommes de Bobigny d'une demande tendant à obtenir le paiement d'une indemnité pour licenciement nul, subsidiairement sans cause réelle et sérieuse, des dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail, une majoration de l'indemnité conventionnelle de licenciement, outre une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile. A titre reconventionnel, la Sa Dupont Medical a réclamé le paiement d'une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par décision en date du 12 janvier 2015, le conseil des Prud'Hommes, statuant en sa formation de départage, a débouté partiellement M. [W] de ses demandes. Il a condamné la Sa Dupont Medical à lui payer les sommes suivantes, augmentées des intérêts au taux légal, capitalisés et avec exécution provisoire de droit :

- 3 000 € à titre de dommages et intérêts au titre de sa responsabilité contractuelle

- 3 982,55 € à titre de solde d'indemnité conventionnelle de licenciement

- 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

M. [W] a fait appel de cette décision dont il sollicite l'infirmation partielle. Soulevant la nullité du PSE, il demande à la cour de condamner la Sa Dupont Medical à lui payer les sommes suivantes, augmentées des intérêts au taux légal capitalisés :

- 80 000 € à titre d'indemnité pour licenciement nul, subsidiairement pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 80 000 € à titre de dommages et intérêts au titre de l'inexécution fautive du contrat de travail

- 3 982,55 € à titre de solde d'indemnité conventionnelle de licenciement

- 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

L'employeur conclut à l'infirmation partielle du jugement déféré, en conséquence, au débouté de M. [W] en toutes ses demandes et à sa condamnation à lui payer la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour plus ample exposé de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffier le 21 janvier 2016, reprises et complétées à l'audience.

Motivation

- Sur l'exécution fautive du contrat de travail

La cour, retenant les motifs pertinents des premiers juges, confirme leur décision, que ce soit sur la prétendue modification unilatérale de son contrat de travail ou sur la prétendue violation par l'employeur de son obligation de sécurité.

- Sur le licenciement

En application des articles L 1233-3 et 4 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification substantielle du contrat de travail consécutives notamment à des difficultés économiques, à des mutations technologiques ou à une réorganisation.

Si la réalité de la suppression ou transformation d'emploi ou de la modification substantielle du contrat de travail est examinée au niveau de l'entreprise, les difficultés économiques doivent être appréciées au regard du groupe ou du secteur d'activité du groupe auquel appartient l'entreprise concernée.

Lorsqu'elle n'est pas liée à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques, une réorganisation ne peut constituer un motif économique que si elle est effectuée pour sauvegarder la compétitivité du secteur d'activité. Enfin, les possibilités de reclassement des salariés doivent être recherchées à l'intérieur du groupe parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel. offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises.

La spécialisation d'une entreprise au sein d'un groupe ne suffit pas à exclure son rattachement à un secteur d'activité plus étendu, au niveau duquel doivent être appréciées les difficultés économiques.

En outre, pour un licenciement collectif d'au moins 10 salariés dans une période de 30 jours, dans une entreprise d'au moins 50 salariés, les articles L1233-61 et L1233-62 du code du travail, font obligation à l'employeur de mettre en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre.

Ce plan doit intégrer un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être éviter. Le PSE doit ainsi prévoir des mesures telles que : des actions en vue du reclassement interne des salariés, y compris, avec leur accord, sur des emplois de catégorie inférieure ; des créations d'activités nouvelles par l'entreprise ; des actions favorisant le reclassement externe à l'entreprise ; des actions de soutien à la création d'activités nouvelles ou à la reprise d'activités existantes par les salariés ; des actions de formation, de validation des acquis de l'expérience ou de reconversion de nature à faciliter le reclassement interne ou externes des salariés sur des emplois équivalents ; des mesures de réduction ou d'aménagement du temps de travail.

Selon l'article L1235-10 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi du 14 juin 2013, la validité du PSE est notamment appréciée au regard des moyens dont dispose l'entreprise ou, le cas échéant, le groupe.

En l'espèce, la partie appelante, qui reconnaît la réalité du motif économique de son licenciement, conteste, en revanche, le caractère loyal de la recherche de reclassement effectuée.

D'une part, elle remet en cause la validité du plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) au motif qu'il est indigent, en dehors des mesures légales obligatoires pour tout PSE, une seule mesure de reclassement ayant été prévue avec la mutation de tous les salariés de [Localité 5] vers le site de [Localité 4]. Manquent en particulier, selon l'appelant, des mesures en faveur des salariés âgés.

D'autre part, il conteste le bien fondé de son licenciement au motif que l'employeur n'a prévu aucun reclassement externe et soutient que l'employeur a fait un usage erroné des textes sur le licenciement économique alors qu'en l'espèce, en l'absence de suppression du poste de M. [W] la modification substantielle de son contrat de travail caractérisée par un changement de lieu d'affectation, devait faire l'objet d'une proposition de modification en application de l'article L1222-6 du code du travail, avant toute mise en oeuvre de la procédure de licenciement.

Sur la validité du PSE, au vu de l'ensemble des éléments produits aux débats, il convient, avec l'employeur de relever que le PSE a pour objet de sauvegarder l'emploi et qu'en l'espèce, tel a été le cas du PSE litigieux qui a prévu le reclassement de tous les salariés du site de [Localité 5] vers celui de [Localité 4], la fermeture de l'entrepôt de [Localité 5] constituant l'unique raison de la mise en oeuvre du PSE.

En outre, il n'est pas contesté par le salarié, que le PSE prévoyait une augmentation du salaire de 20% sans limitation de durée, des salariés ainsi transférés à laquelle s'ajoutaient une prime forfaitaire de déménagement de 2 000 € et une prime complémentaire de 300 €.

Il s'ensuit que c'est en conformité avec le texte précité que l'employeur, au vu des moyens dont il a disposé, a élaboré un PSE prévoyant un ensemble de mesures favorables à la préservation de l'emploi des salariés.

Contrairement à ce qu'affirme M. [W] ces mesures, bénéficiant à tous les salariés de l'entrepôt de [Localité 5], apparaissent suffisantes au regard de l'objectif de la préservation de l'emploi, y compris des salariés âgés.

Le PSE litigieux est donc valable.

Compte-tenu de la réorganisation de la Sa Dupont Medical , intervenue du fait de l'expropriation et de la fermeture consécutive de l'entrepôt de [Localité 5], il apparaît, au vu des éléments produits aux débats, que la seule possibilité pour l'employeur de sauvegarder l'emploi des salariés en cause, a été de procéder à une modification substantielle des contrats de travail, consistant en un changement de lieu d'exercice sur un site nouvellement créé à [Localité 4], lieu du siège social, sans autres possibilités de reclassement dans l'entreprise.

C'est ce qu'organise et prévoit utilement le PSE en cause, et le licenciement de M. [W] à la suite de son refus de rejoindre son poste à [Localité 4], a justifié, au regard des textes précités, son licenciement pour motif économique, sans qu'il puisse être reproché à l'employeur d'avoir méconnu les dispositions de l'article L1222-6 du code du travail, auxquelles il n'était pas contraint.

M. [W] ne peut donc qu'être débouté de sa demande au titre du licenciement.

- Sur l'indemnité conventionnelle de licenciement

En application de l'article L2261-1 du code du travail, la convention collective applicable est celle dont relève l'activité principale exercée par l'employeur.

Il n'est pas contesté que la convention collective applicable est celle de la métallurgie et que l'activité principale de l'employeur, en l'espèce, s'exerce en Meurthe et Moselle, lieu du siège social de l'entreprise et de ses principales activités.

Il s'ensuit que la convention collective applicable est celle des industries de la transformation des métaux de Meurthe et Moselle et non celle de la Région parisienne que revendique indûment le salarié.

M.[W] ne peut donc qu'être débouté de sa demande de majoration de l'indemnité conventionnelle de licenciement découlant de l'application de la convention collective revendiquée à tort.

Par ces motifs, la cour,

- confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qui concerne celles relatives à l'indemnité conventionnelle de licenciement

- l'infirme sur ce chef.

Statuant à nouveau et y ajoutant :

- déboute M. [T] [W] de sa demande de ce chef.

- condamne M. [W] aux dépens

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 15/01437
Date de la décision : 03/03/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°15/01437 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-03-03;15.01437 ?
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