Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 5
ARRET DU 08 MARS 2016
(n° 2016/ 100 , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/08084
Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Mars 2014 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 12/039767
APPELANTE
La SELARL MDP, Mandataires Judiciaires Associés, représentée par Maître [H], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société EPARGNE SANS FRONTIERES
[Adresse 1]
[Localité 1]
N° SIRET : 407 670 223 00038
Représentée par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753
Assistée par Me Pierre-François MULLER de la SELARL SEIGLE BARRIE & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON
INTIMÉE
SA GENERALI VIE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège
[Adresse 2]
[Localité 2]
N° SIRET : 602 062 481 00190
Représentée et assistée par Me Yann PLAÇAIS, avocat au barreau de PARIS, toque : C0348
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 02 Février 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Catherine LE FRANCOIS, Présidente de chambre
Monsieur Christian BYK, Conseiller
Madame Patricia LEFEVRE, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Madame Catherine BAJAZET
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
- signé par Madame Catherine LE FRANCOIS, présidente et par Madame Catherine BAJAZET, greffier présent lors du prononcé.
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La société EPARGNE SANS FRONTIERES, a été inscrit à l'ORIAS en tant qu'intermédiaire d'assurance. Elle exerçait cette activité notamment pour le compte de la société GENERALI, sans contrat écrit, et disposait à ce titre de deux codes apporteurs : 7208 et GV 293 400. En contrepartie de cette intervention, la société EPARGNE SANS FRONTIERES a perçu des commissions versées pendant la durée des contrats au fur et à mesure du paiement par l'assuré des primes d'assurance à l'assureur.
Par jugement en date du 6 novembre 2008, le tribunal de commerce de LYON a déclaré la société EPARGNE SANS FRONTIERES en état de liquidation judiciaire et a désigné Maître [A] [H] en qualité de liquidateur. La société EPARGNE SANS FRONTIERES a cessé son activité de courtage et a fait l'objet d'une radiation du registre ORIAS le 6 mars 2009.
A la suite de cette radiation, la société GENERALI a suspendu l'activité des codes de courtage ainsi que le versement de toute commission de courtage au profit de la société EPARGNE SANS FRONTIERES.
Par acte d'huissier du 31 mai 2012, Maitre [H] mandataire judiciaire, agissant ès qualités de liquidateur de la société EPARGNE SANS FRONTIERES, a assigné la société GENERALI en paiement de la somme de 12.452,17€ avec intérêts légaux, devant le tribunal de commerce de Paris, qui, par jugement du 26 mars 2014, a débouté la SELARL MDP, prise en la personne de Maître [H], ès qualités de liquidateur de la société EPARGNE SANS FRONTIERES de ses demandes, débouté les parties de leurs plus amples demandes, dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile, et dit que les dépens seront supportés par la SELARL MDP, prise en la personne de Maître [H], ès qualités de liquidateur de la société EPARGNE SANS FRONTIERES.
Par déclaration du 10 avril 2014, la société MDP, en la personne de Maître [H], en qualité de mandataire judiciaire liquidateur de la société EPARGNE SANS FRONTIERES a interjeté appel.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 19 novembre 2015, elle sollicite la réformation du jugement, demandant à la cour, sous divers 'dire et juger' qui sont la reprise de ses moyens, de condamner la société GENERALI VIE à lui payer la somme de 6.097,45euros qu'elle reconnait devoir au titre des épargnes cumulées sous le code rapporteur 7208, ainsi que la somme de 6.354,72 euros qu'elle reconnait devoir au titre des épargnes accumulées sous le code apporteur GV283400 et celle de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 3 janvier 2016, la société GENERALI VIE sollicite la confirmation du jugement, demandant à la Cour de débouter la SELARL MDP de toutes ses demandes et de la condamner au paiement de la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 janvier 2016.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur l'application des articles L512-1, R511-2-I et R511-3-II du code des assurances
Considérant que
la SELARL MDP, prise en la personne de Maître [H], ès qualités de liquidateur de la société EPARGNE SANS FRONTIERES, qui conteste avoir poursuivi l'activité d'intermédiation par la conclusion de contrats d'assurance postérieurement à l'ouverture de la liquidation judiciaire, soutient que l'inscription à l'ORIAS n'est requise que pour l'activité d'intermédiation d'assurance mais qu'elle ne l'est pas pour la perception de la rémunération, sous forme de commissions, qui intervient postérieurement à la réalisation de l'intermédiation, pour laquelle seule l'inscription au registre du commerce est requise en application de l'article R 511-2-I du code de commerce, qu'elle ajoute que la finalité poursuivie par le législateur était de renforcer la protection des assurés et que postérieurement à la conclusion du contrat, seule subsiste la question de la rémunération qui n'intéresse que les rapports entre l'assureur et l'intermédiaire, que la loi ne fait pas interdiction à l'assureur de verser des commissions à un intermédiaire non immatriculé à l'ORIAS, que la société GENERALI n'est pas fondée à invoquer la décision de L'Autorité de Contrôle Prudentiel du 11 février 2009 alors que dans l'espèce qui lui avait été soumise, les intermédiaires en cause n'avaient jamais été inscrits à l'ORIAS ;
Considérant que la société GENERALI VIE, qui conteste avoir reconnu devoir à l'appelant les commissions litigieuses, soutient que l'immatriculation au registre de l'ORIAS est une condition impérative du droit à la perception d'une rémunération par l'intermédiaire d'assurance, que la catégorie des courtiers d'assurance ne bénéficie d'aucune dérogation à cette obligation d'immatriculation, que les inscriptions à l'ORIAS et au registre du commerce sont cumulatives, que l'interdiction faite à une entreprise d'assurance de rémunérer un intermédiaire non immatriculé est rappelée à l'article L.512-2 al 1 du code des assurances et que l'absence de vérification a été sanctionnée par une décision de l'Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution du 11 février 2009 ;
Considérant que le litige qui oppose les parties porte sur le versement des commissions, dont il n'est pas contesté par la société GENERALI qu'elles ont été générées par les contrats souscrits par l'intermédiaire de la société EPARGNE SANS FRONTIERES avant la procédure collective, en ce qu'elles continuent à être générées par ces contrats, postérieurement à la radiation du courtier du registre de l'ORIAS ;
Considérant qu'en application de l'article L.511-1 du code des assurances 'Est un intermédiaire d'assurance ou de réassurance toute personne qui, contre rémunération, exerce une activité d'intermédiation en assurance ou en réassurance ', que l'article L.512-1-1 du même code prévoit que 'Les intermédiaires définis à l'article L.511-1 doivent être immatriculés sur un registre unique des intermédiaires' ;
Considérant qu'en application de l'article R 511-2-1 du code des assurances, 'l'activité d'intermédiation en assurance ou réassurance ne peut être exercée contre rémunération que par les catégories de personnes suivantes : 1) les courtiers d'assurance ou de réassurance, personnes physiques et sociétés immatriculées au registre du commerce pour l'activité de courtage d'assurance (...)', que l'article R 511-3-II du même code prévoit que 'la rémunération allouée au titre de l'activité d'intermédiation ne peut être rétrocédée en totalité ou en partie qu'à l'un des intermédiaires mentionnés au I de l'article R 511-2';
Considérant qu'il résulte de l'application combinée de ces textes qu'alors que la rémunération constitue un critère de la définition de l'intermédiaire d'assurance, celui-ci est soumis, non seulement à l'obligation d'inscription au registre du commerce , mais doit également être immatriculé au registre de L'ORIAS, pour percevoir une rémunération due au titre de son activité d'intermédiation, y compris, comme en l'espèce, lorsque celle-ci est générée par des contrats, toujours en cours, souscrits, par son intermédiaire, avant sa radiation dudit registre, même si ces commissions ne rémunèrent que l'apport des contrats ;
Sur la continuation des contrats en cours
Considérant que la SELARL MDP, prise en la personne de Maître [H], ès qualités de liquidateur de la société EPARGNE SANS FRONTIERES soutient sur le fondement de l'article L.641-10 ancien du code de commerce, applicable aux procédures ouvertes avant le 1er janvier 2009 et de l'article L 622-13 du même code, que le liquidateur a seul compétence pour exiger la poursuite des contrats en cours et qu'aucune résolution de plein droit ne saurait intervenir du seul fait de l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire qu'elle soit assortie ou non d'un maintien de l'activité, qu'un cocontractant ne peut donc opposer aucune disposition légale ou contractuelle pour cesser d'exécuter la prestation à laquelle il est tenu à compter du jour de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire ;
Considérant que la société GENERALI VIE rétorque que l'article L.641-11-1 du code de commerce est inapplicable en ce que la suspension du versement des commissions de courtage trouve sa source non pas dans le jugement d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire mais dans le défaut d'immatriculation régulière sur le registre de L'ORIAS et que la question de la continuation des contrats en cours intéresse la procédure collective mais non la présente procédure ;
Mais considérant que la SELARL MDP, prise en la personne de Maître [H], ès qualités de liquidateur de la société EPARGNE SANS FRONTIERES n'est pas fondée à opposer à la société GENERALI VIE les dispositions des articles L.641-10 ancien et L.622-13 du code de commerce dès lors qu'il ne s'agit pas, en l'espèce, de la résiliation d'un contrat mais de la suspension du paiement des commissions que l'assureur indique vouloir reprendre dès que les droits auront pu être cédés au profit d'un intermédiaire immatriculé au registre de l'ORIAS ;
Sur l'inopposabilité des dispositions tirées du code des assurances à la procédure collective
Considérant que l'appelant soutient que les dispositions du code des assurances relatives à l'obligation d'inscription à l'ORIAS sont inopposables à la procédure collective en ce qu'il s'agit d'un actif de la société EPARGNE SANS FRONTIERES, qu'il incombe au liquidateur de procéder au recouvrement de l'actif du débiteur, en application de l'article L.622-20 du code de commerce et que, quand bien même l'inscription à L'ORIAS serait une obligation pour percevoir des commissions en situation normale, elle ne peut s'imposer lorsque le courtier se trouve confronté à une procédure collective, que les dispositions du code des assurances ne peuvent qu'être déclarées inopposables à la procédure collective, qu'il ajoute que le caractère irrecouvrable des commissions entraîne au bénéfice de l'assureur un enrichissement sans cause qui justifie la condamnation de celui-ci au paiement d'une somme équivalente au montant des commissions qui auraient dû être perçues ;
Considérant que l'intimée rétorque que le liquidateur qui este en justice à l'encontre de ceux qu'il estime être les débiteurs de son administrée ne dispose pas de droits supérieurs à ceux de son administrée, que l'article L.512-2 du code des assurances qui prescrit aux entreprises d'assurances de vérifier que les intermédiaires qu'ils rémunèrent sont inscrits au registre de l'ORIAS sont d'ordre public et que tout manquement à ce texte est constitutif d'un infraction pénale, qu'elle ajoute que le portefeuille de contrats de la société EPARGNE SANS FRONTIERES demeure parfaitement cessible, que les sommes revendiquées ne constituent pas un actif irrécouvrable alors qu'elle n'a jamais cherché à conserver les commissions suspendues ;
Considérant que l'obligation d'immatriculation au registre de l'ORIAS de l'intermédiaire d'assurance pour percevoir une rémunération due au titre de son activité d'intermédiation et l'interdiction faite à l'assureur de verser des commissions à l'intermédiaire qui n'est pas régulièrement immatriculé sont opposables au mandataire judiciaire qui, même s'il agit en recouvrement de l'actif dans l'intérêt des créanciers, peut se voir opposer une règle d'ordre public empêchant le versement de la créance à son administrée ;
Considérant que la suspension du versement des commissions du fait de la radiation de l'intermédiaire d'assurance du registre de l'ORIAS n'a pas pour effet de rendre les créances irrécouvrables ni de créer ou profit de la société GENERALI VIE un enrichissement sans cause alors que l' assureur ne fait que conserver ces sommes dans l'attente d'une cession du portefeuille de contrats au profit d'un acquéreur régulièrement immatriculé à l'ORIAS ;
Considérant en conséquence et sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur la poursuite du rôle du courtier postérieurement à la conclusion du contrat, il apparaît que la SELARL MDP, prise en la personne de Maître [H], ès qualités de liquidateur de la société EPARGNE SANS FRONTIERES ne peut qu'être déboutée de ses demandes, que le jugement déféré doit en conséquence être confirmé et qu'y ajoutant il y a lieu de débouter la SELARL MDP, prise en la personne de Maître [H], ès qualités de liquidateur de la société EPARGNE SANS FRONTIERES de sa demande de condamnation de la société GENERALI VIE au paiement des sommes dues au titre des codes apporteurs 7208 et GV283400 du 31 décembre 2011 à ce jour;
Considérant qu'il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile, que par contre la SELARL MDP, prise en la personne de Maître [H], ès qualités de liquidateur de la société EPARGNE SANS FRONTIERES sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel ;
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par mise à disposition de la décision au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
Déboute la SELARL MDP, prise en la personne de Maître [H], ès qualités de liquidateur de la société EPARGNE SANS FRONTIERES de sa demande de condamnation de la société GENERALI VIE au paiement des sommes dues au titre des codes apporteurs 7208 et GV283400 du 31 décembre 2011 à ce jour ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SELARL MDP, prise en la personne de Maître [H], ès qualités de liquidateur de la société EPARGNE SANS FRONTIERES aux dépens de la procédure d'appel.
LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE