Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 8
ARRET DU 08 AVRIL 2016
(n° ,18 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/23068
JONCTION AVEC LE NUMÉRO RG 16/586
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 16 Novembre 2015 - Président du TGI de PARIS
APPELANTES
Commune VILLE DE PARIS
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée et assistée de Me Bruno MATHIEU de la SELAS MATHIEU ET ASSOCIE, avocat au barreau de PARIS, toque : R079
Syndicat des copropriétaires RESIDENCE LYAUTEY SUCHET TOLSTOI 75016 PARIS Le Syndicat des Copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé RESIDENCE LYAUTEY SUCHET TOLSTOI, [Adresse 2], [Adresse 3], [Adresse 4] et [Adresse 5], représenté par son syndic, la société LE TERROIR, société par actions simplifiée au capital de 80.000 euros, immatriculée au RCS de PARIS sous le numéro 562 024 893, dont le siège se trouve [Adresse 6], représentée par ses représentants légaux, domiciliés audit siège en cette qualité ;
c/o SOCIETE LE TERROIR
[Adresse 6]
[Adresse 6]
Syndicat des copropriétaires RESIDENCE LYAUTEY SUCHET AUTEUIL 75016 PARIS 2°) Le Syndicat des Copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé RESIDENCE LYAUTEY SUCHET AUTEUIL, [Adresse 7], [Adresse 8], [Adresse 9] et [Adresse 5], représenté par son syndic, la société ALBERT STOOPS, société anonyme au capital de 64.000 euros, immatriculée au RCS de NANTERRE sous le numéro 612 009 001, dont le siège se trouve [Adresse 10], représentée par ses représentants légaux, domiciliés audit siège en cette qualité ;
c/O société ALBERT STOOPS
[Adresse 11]
[Adresse 10]
Représentés et assistés de Me Patrice LEBATTEUX de la SCP ZURFLUH - LEBATTEUX - SIZAIRE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0154
INTIMÉES
Syndicat des copropriétaires RÉSIDENCE LYAUTEY SUCHET TOLSTOI représenté par son syndic SAS LE TERROIR société au capital de 80000,00, inscrite au RCS PARIS N° 562 024 893, dont le siège social est [Adresse 6]7elle-même représentée par ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.
[Adresse 12]
square Tolstoi et 2 square Alfred Capus
75016 PARIS
Représenté et assisté de Me Patrice LEBATTEUX de la SCP ZURFLUH - LEBATTEUX - SIZAIRE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0154
SOCIÉTÉ IMMOBILIÈRE D'ECONOMIE MIXTE DE LA VILLE DE PARIS
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.
[Adresse 13]
[Adresse 13]
[Adresse 13]
Représentée par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753
Assistée de Me Edouard DE LAMAZE, avocat au barreau de PARIS, toque : P298
Commune VILLE DE PARIS
[Adresse 14]
[Adresse 14]
Représentée et assistée de Me Bruno MATHIEU,
avocat au barreau de PARIS, toque : R079
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 février 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Annie DABOSVILLE, Présidente de chambre, et Mme Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère, chargées d'instruire l'affaire.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Annie DABOSVILLE, Présidente de chambre
Mme Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère
Mme Odette-Luce BOUVIER, Conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Patricia PUPIER
ARRÊT :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Annie DABOSVILLE, présidente et par Mme Patricia PUPIER, greffière présente lors du prononcé.
La Ville de Paris est propriétaire de 116 lots de copropriété dans l'ensemble immobilier formé par les copropriétés voisines Lyautey Suchet Tolstoï et Lyautey Suchet Auteuil. Elle a formulé une offre de vente de ces lots à la Société Immobilière d'Economie Mixte de la Ville de Paris (SIEMP) afin que celle-ci les transforme en habitat social.
L'organisme France Domaines a alors été saisi, et a rendu un avis du 10 août 2015 dans lequel il estime que « la valeur vénale de marché des biens concernés est estimée à 7.500 euros par m² '', et que le prix de vente envisagé de 3.500 euros par m² n'appelait pas de sa part « d'objection à la réalisation de ce projet, compte tenu de la nature sociale de l'opération ''.
Par délibération n°2015 du 170 des 28, 29 et 30 septembre 2015, le Conseil de Paris a autorisé la Maire de Paris à céder à la SIEMP les lots de copropriétés dont la Ville est propriétaire dans l'ensemble immobilier, au prix de 3.500 euros le mètre carré de surface utile, soit un prix global prévisionnel de 13.328.105 euros, en vue de la location à titre de logements sociaux. Il a autorisé la Maire à signer tous les actes correspondant. Le notaire de la Ville a alors rédigé l'acte de réalisation et a adressé au syndic de l'immeuble le questionnaire vendeur le 12 novembre 2015, pour une vente prévue le 16 novembre 2015.
Estimant que cette vente menace les droits des copropriétaires, après autorisation par ordonnance du même jour, le syndicat des copropriétaires de la résidence Lyautey Suchet Tolstoï, a par acte du 13 novembre 2013 assigné la ville de Paris devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris, à heure indiquée, sur le fondement de l'article 809 du code de procédure civile, aux fins d'interdiction à la ville de Paris de vendre ses lots situés dans le groupe d'immeubles à la SIEMP au prix de 3.500 euros du mètre carré habitable, outre frais et dépens.
La Ville de Paris n'a pas comparu et ne s'est pas fait représenter.
Par ordonnance réputée contradictoire du 16 novembre 2015, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris, retenant notamment que la vente est prévue pour un prix de 3.500 euros par m², alors que le service France Domaines a estimé la valeur de marché de ces lots à 7.500 euros le m² ; qu'il apparaît dès lors, que la vente envisagée va fausser substantiellement le prix du marché en fournissant une référence de prix de vente erronée des biens, ce qui va porter atteinte aux droits des copropriétaires, a :
- Interdit à la ville de Paris de vendre ses lots situés dans le groupe d'immeubles à la Société Immobilière d'Economie Mixte de la Ville de Paris (SIEMP) au prix de 3.500 euros du mètre carré habitable ;
- Condamné la Ville de Paris à payer au syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé Résidence Lyautey Suchet Tolstoï, [Adresse 15], [Adresse 3], [Adresse 4] et [Adresse 16], 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Ordonné l'exécution sur minute de la présente décision ;
- Condamné la Ville de Paris aux dépens.
La Ville de Paris a relevé appel de cette décision par déclaration d'appel du 30 novembre 2015 (RG 15/23068). Par ordonnance du 4 décembre 2015, elle a été autorisée à assigner pour appel à jour fixe avant le 22 janvier 2016, ce qu'elle a fait par acte du 14 janvier 2016 (RG15/00635).
Par ailleurs, par acte du 30 novembre 2015, la SIEMP a assigné le syndicat des copropriétaires de la résidence Lyautey Suchet Tolstoï, le syndicat des copropriétaires de la résidence Lyautey Suchet Auteuil, et la ville de Paris, devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris statuant à heure indiquée, et formé tierce opposition contre l'ordonnance du 16 novembre 2015 aux fins de la voir rétracter et réformer, et d'ordonner la mise en cause du syndicat des copropriétaires de la résidence Lyautey Suchet Auteuil.
Par ordonnance contradictoire du 21 décembre 2015, le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris, retenant notamment que la tierce opposition de la SIEMP contre l'ordonnance du 16 novembre 2015 est recevable en ce qu'elle a été formée avant l'appel interjeté par la ville de Paris, et que la SIEMP n'a pas été appelée en intervention devant la cour d'appel alors qu'elle avait intérêt à former opposition en qualité d'acquéreur des lots ; que l'action du syndic était recevable en ce que les dispositions de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 lui permettent d'agir sans autorisation du syndicat des copropriétaires devant le juge des référés, et lui donnent qualité pour agir même contre certains des copropriétaires en vue de la sauvegarde des droits afférents à l'immeuble ; que la SIEMP démontre que le prix de la vente se justifie par la visée sociale de l'opération, et que la vente à bas prix n'affectera pas le marché en ce que ce type de vente est exclu de la base de donnée des notaires ; que l'arrivée de nouveaux occupants ne saurait porter atteinte à la destination de l'immeuble ; que le syndicat des copropriétaires pourra s'opposer à une éventuelle division des lots en temps voulu ; que ni la preuve d'un dommage imminent, ni celle d'un trouble manifestement illicite n'est rapporté a, par ces motifs :
- Rejeté les exceptions d'irrecevabilité ;
- Réformé son ordonnance du 16 novembre 2015 en ce qu'elle a :
* Interdit à la ville de Paris de vendre ses lots situés dans le groupe d'immeubles à la Société Immobilière d'Economie Mixte de la Ville de Paris (SIEMP) au prix de 3.500 euros du mètre carré habitable ;
* Condamné la Ville de Paris à payer au Syndicat des Copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé Résidence Lyautey Suchet Tolstoï, [Adresse 15], [Adresse 3], [Adresse 4] et [Adresse 16], 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Rendu opposable à la Ville de Paris sa décision ;
- Rendu opposable au syndicat des copropriétaires [Adresse 7], [Adresse 8], [Adresse 9] et [Adresse 17] représenté par son syndic la société Albert Stoops sa décision ;
- Condamné le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé Résidence Lyautey Suchet Tolstoï, [Adresse 2], [Adresse 3], [Adresse 4] et [Adresse 16] à payer à la Société Immobilière d'Economie Mixte de la Ville de Paris 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Rejeté le surplus des demandes ;
- Condamné Le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé Résidence Lyautey Suchet Tolstoï, [Adresse 2], [Adresse 3], [Adresse 4] et [Adresse 16] aux dépens.
Le syndicat des copropriétaires de la résidence Lyautey Suchet Tolstoï et celui de la résidence Lyautey Suchet Auteuil ont relevé appel de cette décision par déclaration d'appel en date du 7 janvier 2016 (RG 16/00586). Par ordonnance du 14 janvier 2016, ils ont été autorisés à assigner la SIEMP et la Ville de Paris à jour fixe pour l'audience du 25 février 2016 (RG 16/00015).
Les syndicats des copropriétaires, appelants dans cette instance, demandent à la cour aux termes de leurs conclusions en date du 25 février 2016 (RG 16/586) :
A titre principal :
- Annuler l'ordonnance de référé du 21 décembre 2015 ;
Subsidiairement :
- Infirmer l'ordonnance de référé du 21 décembre 2015 en toutes ses dispositions ;
- Débouter la SIEMP de l'ensemble de ses demandes ;
En outre et en tout état de cause,
- Déclarer la Ville de Paris irrecevable en l'ensemble de ses demandes, la Cour étant saisie de son appel ;
- Rejeter les demandes de la SIEMP de les voir condamner à payer une amende civile et des dommages et intérêts comme étant irrecevables ou mal fondées,
- Condamner la SIEMP à payer au syndicat de la résidence Lyautey Suchet Tolstoï 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner la SIEMP à payer au syndicat de la résidence Lyautey Suchet Auteuil 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner la SIEMP aux entiers dépens de la première instance et de l'appel, dont distraction au pro't de Maître Lebatteux conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Sur l'irrecevabilité de la tierce opposition, les appelants font valoir :
- Que la cour de cassation considère que lorsqu'un jugement est frappé d'appel, la tierce opposition est irrecevable, seule la voie de l'intervention en cause d'appel étant ouverte ; que la ville de Paris a relevé appel de l'ordonnance du 16 novembre 2015 par déclaration du 30 novembre 2015 ; que la tierce opposition était donc irrecevable ;
- Que l'appel contre l'ordonnance du 16 novembre 2015 a dessaisi le juge l'ayant rendu ; que le tribunal de grande instance de Paris ne pouvait donc plus statuer sur sa première décision ;
- Que c'est à tort que le premier juge a écarté la fin de non recevoir soulevée par le syndicat des copropriétaires au motif que la tierce opposition a été formée avant la déclaration d'appel, alors qu'à la date de l'audience toutes les parties et le juge avaient connaissance de l'appel interjeté par la ville de Paris ;
Sur l'absence de motif de réformation de l'ordonnance du 16 novembre 2015, les intimés font valoir à titre subsidiaire :
- que leur demande est recevable ; qu'une action conjointe des deux syndicats de copropriétaires de l'ensemble immobilier n'était pas nécessaire ; que ceux-ci sont voisins mais indépendants sur le plan juridique ; que la demande ne porte que sur l'interdiction de procéder à la vente des lots dont la ville de Paris est propriétaire dans la résidence Lyautey Suchet Tolstoï, et non sur ceux de la résidence voisine ; qu'aucune disposition légale ou règlementaire n'impose une action conjointe des deux syndicats de copropriétaires voisins ; que les appelants ne sont pas responsables de la confusion de la ville de Paris qui a dans sa délibération fait référence à un syndicat de copropriétaires unique dénomé Lyautey Suchet Auteuil Tolstoï, qui n'existe pas ; qu'au regard de l'article 55 du décret du 17 mars 1967, le syndic de copropriété pouvait agir en justice sans avoir besoin d'une habilitation ; qu'au regard de l'article 15 de la loi du 10 juillet 1965, le syndicat des copropriétaires a intérêt à agir, car la décision de la Ville de Paris de vendre ses lots à un bailleur social à un prix inférieur à celui du marché déprécie en effet la valeur de la résidence dans son ensemble, étant rappelé que chaque lot comprend une partie privative et une quote-part des parties communes ; que par ailleurs le préjudice des copropriétaires est collectif dans la mesure ou la dépréciation concerne tous les lots de la copropriété ;
- Qu'il existe un trouble manifestement illicite et un dommage imminent ; que les syndicats ont dans leur objet de préserver les intérêts collectifs et notamment de faire respecter les dispositions légales et réglementaires résultant de la loi du 10 juillet 1965 ; que les droits individuels des copropriétaires trouvent leurs limites dans la destination de l'immeuble et dans les droits des autres copropriétaires ; que contrairement aux affirmations de la Ville de Paris, la destination de l'immeuble ne se confond pas avec la destination ou la seule sauvegarde des parties communes et des parties privatives ; que cela ressort notamment de la définition de la destination de l'immeuble telle qu'elle ressort des travaux préparatoires de la loi du 10 juillet 1965 ; qu'aux termes de l'article 8 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1965, la destination de l'immeuble est définie par le règlement de copropriété ainsi que les caractères et la situation de l'immeuble ; que cette destination doit être appréciée au regard du standing particulièrement élevé de la résidence et de sa situation géographique ; que la transformation des lots appartenant à la Ville de Paris en logements sociaux fait craindre à la collectivité des copropriétaires une dégradation de leurs conditions de vie ; que cette dégradation va notamment résulter du projet de la SIEMP de diviser certains lots afin d'augmenter le nombre d'occupants de l'immeuble ; qu'elle est donc incompatible avec le respect de la destination de l'immeuble, même si le règlement de copropriété n'interdit pas expressément le logement social ; que par ailleurs la vente des lots au prix de 3.500 euros par m² alors qu'ils ont été estimés par le service France Domaines à 7.500 euros par m² va fausser les prix du marché en fournissant des références de prix de vente qui seront reprises en cas d'expropriation, de congé pour vendre, de saisie immobilière ou même en cas de vente amiable ;
que cela va considérablement dévaloriser l'ensemble des biens des copropriétaires ; qu'en effet aucun lot de copropriété n'a jamais été vendu à un prix aussi bas ; que cela porte donc atteinte à leur droit de propriété ce qui constitue un trouble manifestement illicite ; que les considérations politiques et économiques de la Ville de Paris relativement à l'intérêt général ne peuvent être opposées à une personne morale de droit privé qui est fondée à défendre ses intérêts personnels, notamment son droit de propriété qui est un droit fondamental ; que les procédures évoquées en assemblée générale soulevées par l'appelante ne font que démontrer que les copropriétaires se battent pour conserver le haut standing de leur résidence.
Par ses dernières conclusions régulièrement transmises le 11 février 2016 (RG 15/23068) , le syndicat des copropriétaires de la Résidence Lyautey Suchet Tolstoï, sise [Adresse 2], [Adresse 3], [Adresse 4] et [Adresse 5], représentée par son syndic la SAS Le Terroir, intimé, demande à la cour de :
A titre principal :
- Déclarer irrecevable l'appel de la Ville de Paris en date du 30 novembre 2015 ;
A titre subsidiaire :
- Surseoir à statuer jusqu'au prononcé de l'arrêt de la cour d'appel de Paris sur l'appel de ordonnance du 21 décembre 2015 (procédure enrôlée devant le Pôle 1 chambre 8 sous le numéro 16/00586) ;
A titre infiniment subsidiaire :
- Débouter la Ville de Paris de son appel ;
En outre et en tout état de cause :
- Condamner la Ville de Paris à payer au syndicat de la résidence Lyautey Suchet Tolstoï 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner la Ville de Paris aux entiers dépens de l'instance, avec distraction au profit de Maître Lebatteux, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Sur la recevabilité de l'appel, l'intimé valoir :
- Que l'ordonnance du 21 décembre 2015 a réformé celle du 16 novembre 2015 et l'a donc totalement anéantie ; qu'aux termes des articles 561, 562 et 591 du code de procédure civile, la cour est donc dans l'impossibilité de statuer sur l'appel formé contre l'ordonnance du 16 novembre 2015, ses pouvoirs ne s'exerçant que sur des chefs d'une décision qui existe au moins formellement ; que l'appel doit donc être déclaré irrecevable.
Sur le sursis à statuer, il soutient, à titre subsidiaire, qu'un appel est pendant devant la cour de céans s'agissant de l'ordonnance du 21 décembre 2015 rétractant l'ordonnance du 16 novembre 2015 ; que l'audience est fixée au 25 février 2016 ; que si l'ordonnance du 21 décembre 2015 se trouve annulée, l'ordonnance du 16 novembre 2015 dont appel pourra recouvrer une existence juridique ; qu'il est donc de l'intérêt d'une bonne administration de la justice de surseoir à statuer en attendant la décision qui sera rendue par la Cour de céans sur l'appel de l'ordonnance du 21 décembre 2015.
Sur l'absence de motif de réformation de l'ordonnance du 16 novembre 2015, l'intimé fait valoir à titre infiniment subsidiaire :
- que sa demande est recevable ; il convient sur ce point de se reporter aux développements figurant dans les conclusions du 25 février 2016 précédemment développées
- Qu'il existe un trouble manifestement illicite et un dommage imminent ; il convient également sur ce point de se reporter aux développements figurant dans les conclusions du 25 février 2016 précédemment développées.
Par ses dernières conclusions régulièrement transmises le 24 février 2016, la Ville de Paris (RG 16/586), intimée, demande à la cour de :
- Débouter le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé Résidence Lyautey Suchet Tolstoï, [Adresse 2], [Adresse 3], [Adresse 4] et [Adresse 5] et le Syndicat des Copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé Résidence Lyautey Suchet Auteuil, [Adresse 7], [Adresse 8], [Adresse 9] et [Adresse 5] de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,
A titre principal :
- Infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a déclaré recevable le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé Résidence Lyautey Suchet Tolstoï, [Adresse 2], [Adresse 3], [Adresse 4] et [Adresse 5] et le Syndicat des Copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé Résidence Lyautey Suchet Auteuil, [Adresse 7], [Adresse 8], [Adresse 9] et [Adresse 5] dans leur action et statuant à nouveau les dire et juger irrecevables à agir, faute d'intérêt
A titre subsidiaire et en tout état de cause :
- Confirmer l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions
- Condamner le Syndicat des Copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé Résidence Lyautey Suchet Tolstoï, [Adresse 2], [Adresse 3], [Adresse 4] et [Adresse 5] et le Syndicat des Copropriétaires de l'ensemble immobilier dénommé Résidence Lyautey Suchet Auteuil, [Adresse 7], [Adresse 8], [Adresse 9] et [Adresse 5] à payer à la Ville de Paris la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens qui seront recouverts ainsi qu'il est dit à l'article 699 du code de procédure civile.
Sur la recevabilité de la tierce opposition, elle fait valoir :
- Que la jurisprudence considère qu'en présence d'un appel, la voie de tierce opposition est fermée uniquement à l'égard de la partie qui intervient en cause d'appel ; qu'en l'espèce la SIEMP n'est pas intervenue dans l'appel interjeté contre l'ordonnance du 16 novembre 2015 ; qu'elle a formé tierce opposition avant que la Ville de Paris ne fasse appel de l'ordonnance du 16 novembre 2015 ; que sa tierce opposition était donc recevable ;
- Que c'est a bon droit que le premier juge a considéré cette intervention recevable, au motif que la SIEMP n'a pas été appelée à intervenir en appel alors qu'elle y avait intérêt ; qu'en effet, contrairement à ce que soutiennent les appelantes, il résulte de l'article 31 du code de procédure civile que l'intérêt à agir s'apprécie toujours au moment de l'introduction de la demande en justice par son auteur ;
que c'est également a bon droit que le premier juge a retenu que la SIEMP avait intérêt à former tierce opposition en ce qu'elle n'avait pas fait l'objet d'une intervention forcée devant la cour d'appel, ce qui aurait eu pour effet de lui opposer valablement l'instance d'appel engagée postérieurement par la Ville de Paris.
Sur l'irrecevabilité de l'instance engagée par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble Résidence Lyautey Suchet Tolstoï, elle soutient :
- Que la vente ne porte pas atteinte aux droits des autres copropriétaires ; que l'article 15 de la loi du 10 juillet 1965 dispose que le syndicat des copropriétaires a seulement intérêt à agir en vue de la sauvegarde matérielle et juridique des parties communes ; que la jurisprudence considère qu'un syndicat ne peut agir en justice contre une opération à laquelle il est tiers, que lorsqu'il peut justifier d'une transmission des droits à son profit ; qu'il lui incombe donc de justifier que son action ne se fonde pas sur une obligation personnelle d'un copropriétaire, mais se rattache à l'immeuble ; qu'il ne peut agir en justice pour défendre l'ensemble des intérêts de la collectivité des copropriétaires que lorsqu'il justifie d'un trouble collectif ; qu'il ne peut agir pour la réparation des préjudices personnels subis par les copropriétaires que lorsque le trouble de jouissance est identique et supporté de la même manière par l'ensemble des copropriétaires ou l'ensemble des lots ; qu'en l'espèce le syndicat des copropriétaires ne démontre pas la recevabilité de son action ; que le fait allégué suivant lequel la vente consentie par la Ville au profit de la SIEMP entraînerait prétendument une diminution de la valeur des lots privatifs de l'immeuble ne constitue nullement une atteinte aux parties communes ou à l'immeuble en général, dans la mesure ou la valeur des lots est un élément du patrimoine des copropriétaires ; qu'il n'existe aucune transmission au syndicat d'une action tendant à obtenir une interdiction de vente pour ce motif qui reste éminemment personnel à chaque copropriétaire ; que la vente ne constitue pas non plus un préjudice collectif, c'est-à-dire subi de manière identique par l'ensemble des copropriétaires ; que le préjudice allégué n'est qu'hypothétique et ne concerne que les copropriétaires qui désireraient délivrer un congé pour vendre à leur locataire, ou vendre leur bien ; que si une dévalorisation était constatée, elle pourrait être liée à d'autres motifs ; que le syndicat des copropriétaires n'a donc ni intérêt ni qualité à agir ;
- Que si l'ordonnance dont appel a retenu qu'il existerait un préjudice identique pour chaque copropriétaire du fait de la vente, elle ne démontre pas qu'il existerait un préjudice pour le syndicat des copropriétaires, en l'absence de critère de rattachement aux parties communes ; que le premier juge a ainsi confondu le préjudice subi par les seuls copropriétaires avec le préjudice subi de manière identique et uniforme tant par les copropriétaires que par le syndicat ; que ce n'est que dans cette seconde hypothèse que le syndicat peut agir pour réparer aussi bien son préjudice que celui subi par les copropriétaires ; que par ailleurs les appelants reconnaissent implicitement dans leurs conclusions l'absence de préjudice collectif subi uniformément tant par le syndicat des copropriétaires que par les copropriétaires.
Sur l'absence de dommage imminent ou de trouble manifestement illicite, l'intimée fait valoir :
- Que c'est à bon droit que l'ordonnance du 21 décembre 2015 retient l'absence de dommage imminent ou de trouble manifestement illicite en ce que le prix fixé répond aux exigences des acquisitions dans le secteur social, et que l'opération ne viole pas le règlement de copropriété en ce qui concerne la destination des lots ;
- Que le dommage invoqué d'un risque de dépréciation des lots est inexact ; que contrairement à cette affirmation, les prix se fixent selon l'indice Notaires-Insee des prix des logements anciens, lequel est établi grâce aux bases de données des notaires sur les prix des ventes instrumentées, à l'exclusion des ventes à des bailleurs sociaux ; que la vente est donc étrangère au marché et n'aura aucun impact sur les prix ;
- Que le prix de vente correspond à une valorisation courante pour une acquisition dans le secteur social ; que le premier juge, dans son ordonnance du 16 novembre 2015 frappée de tierce opposition, a retenu à tort que l'estimation de 7.500 euros par m² réalisée par France Domaines est "minimale au vu des caractéristiques de l'ensemble immobilier" ; qu'il apparait au contraire que la copropriété est très largement constituée d'anciens locataires de la ville devenus propriétaires et que la ville a procédé à des ventes par adjudication entre 2005 et 2013 pour un prix moyen correspondant à celui fixé par France Domaines ; que ce prix correspond à l'état des biens vendus, sur lesquels la Ville n'a pas opéré de travaux depuis sa décision de s'en dessaisir en 1977, alors que depuis lors les autres copropriétaires ont pu procéder à des travaux d'amélioration ; que la copropriété n'est pas particulièrement en bon état ; qu'elle a notamment accueilli des squatteurs et que les procès verbaux d'assemblées générales relèvent que des copropriétaires subissent des vols et agressions ; que l'opération porte sur une vente groupée pour laquelle le prix de vente au m² est nécessairement inférieur à celui d'une vente par lots ; que la vente à un prix de 3.500 euros est par ailleurs justifiée au vu de la finalité sociale de l'opération et du type de financement d'une telle opération ; qu'en effet les opérations portant sur le logement social échappent aux règles de financement du marché privé, notamment en ce que la rentabilité est affectée par la fixation réglementaire des loyers à un montant inférieur au marché ; que le prix de cession a notamment été fixé au regard de l'annexe IV de la circulaire n097-51 du 29 mai 1997, dans le but, non de vendre à un prix inférieur au marché, mais de réaliser l'opération au meilleur prix compte-tenu des contraintes réglementaires, techniques et financières qui résultent d'une opération de logement social ; que ce prix de vente est également déterminé au regard des économies budgétaires que l'opération permet pour la Ville de Paris, en application de l'article L302-7 du code de la construction et de l'habitation ; que l'ordonnance du 21 décembre 2016 retient donc à bon droit l'absence de dommage imminent ;
- Qu'il n'existe aucun trouble manifestement illicite ; que la vente entre la Ville de Paris et le SIEMP ne porte aucune atteinte à la destination de l'immeuble ; que l'article 8 I de la loi du 10 juillet 1965 dispose que "Le règlement de copropriété ne peut imposer aucune restriction aux droits des copropriétaires en dehors de celles qui seraient justifiées par la destination de l'immeuble, telle qu'elle est dé'nie aux actes, par ses caractères ou sa situation" ; que le règlement se borne à énoncer que les lots sont affectés à l'habitation, sans autre précision ou limitation, visant notamment l'habitat social ; que la jurisprudence s'attache à priver d'effet toutes les clauses du règlement qui imposeraient des limites quant aux personnes pouvant acquérir un lot de copropriété ; qu'elle retient également qu'en l'absence d'une clause quelconque faisant état d'une destination particulière de l'immeuble, «il ne pouvait être soutenu que la construction d'habitations à loyers modéré était contraire à la destination de l'immeuble '' ; que le règlement n'interdit pas la location des lots privatifs, ne traite pas du montant du loyer ni de la catégorie sociale du locataire ;
Par ses dernières conclusions régulièrement transmises le 24 février 2016, la Ville de Paris (RG 15/23068) demande à la cour de :
In limine litis :
- Ordonner un sursis à statuer de la présente instance dans l'attente de l'intervention d'une solution définitive dans l'instance d'appel engagée notamment par le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Résidence Lyautey Suchet Tolstoï, [Adresse 2], [Adresse 3], [Adresse 4] et [Adresse 5] à l'encontre de l'ordonnance du 21 décembre 2015 ;
- A titre subsidiaire, renvoyer l'examen du présent appel devant le conseiller de la mise en état ;
A titre subsidiaire, sur le fond :
- Débouter le Syndicat des Copropriétaires de l'ensemble immobilier Résidence Lyautey Suchet Tolstoï, [Adresse 2], [Adresse 3], [Adresse 4] et [Adresse 5] de ses demandes, fins et conclusions.
- Déclarer recevable et fondé l'appel interjeté par la Ville de Paris ;
Y faisant droit :
- Infirmer la décision entreprise et, statuant à nouveau ;
- Dire et juger le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Résidence Lyautey Suchet Tolstoï, [Adresse 2], [Adresse 3], [Adresse 4] et [Adresse 5] irrecevable en ses demandes à l'égard de la Ville de Paris ;
A titre subsidiaire :
- Dire n'y avoir lieu à référé et renvoyer le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Résidence Lyautey Suchet Tolstoï, [Adresse 2], [Adresse 3], [Adresse 4] et [Adresse 5] à mieux se pourvoir ;
Et plus généralement :
- Le débouter de l'intégralité de ses fins, demandes et conclusions à l'égard de la Ville de Paris.
En tout état de cause :
- Condamner le syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier Résidence Lyautey Suchet Tolstoï, [Adresse 2], [Adresse 3], [Adresse 4] et [Adresse 5] à payer à la Ville de Paris la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
- Condamner Syndicat des Copropriétaires de l'ensemble immobilier Résidence Lyautey Suchet Tolstoï, [Adresse 2], [Adresse 3], [Adresse 4] et [Adresse 5] en tous les dépens ainsi qu'il est dit à l'article 699 du code de procédure civile au profit de Maître Bruno MATHIEU, Avocat.
Sur le rejet du moyen d'irrecevabilité soutenu par le syndicat des copropriétaires, l'appelante soutient :
- Que l'intérêt à agir en appel s'apprécie au jour de l'acte d'appel, sans prendre en compte les circonstances postérieures ; qu'il a été interjeté appel de l'ordonnance du 16 novembre 2015 par acte du 30 novembre 2015 ; qu'est donc inopérant le fait que cette ordonnance ait été anéantie par l'ordonnance du 21 décembre 2015 ;
- Que l'ordonnance du 21 décembre 2015 n'a pas acquis la force de chose jugée au provisoire, celle-ci étant soumise à la discussion en fait et en droit devant la cour d'appel ; qu'elle ne peut donc pas être opposée à l'acte d'appel dirigé contre l'ordonnance du 16 novembre 2015 ;
- Que le syndicat ne peut pas se prévaloir de l'irrecevabilité de l'acte d'appel contre l'ordonnance du 16 novembre 2015 au motif de l'existence d'un appel contre l'ordonnance du 21 décembre 2015, et simultanément l'irrecevabilité des demandes de la ville de Paris dans la procédure d'appel de l'ordonnance du 21 décembre 2015 en raison de l'existence du présent appel ; qu'il s'agit d'une contradiction au détriment d'autrui.
Sur l'irrecevabilité de la demande d'interdiction de vendre en l'absence d'une atteinte à la destination de l'immeuble et des droits des autres copropriétaires, l'appelante fait valoir :
- Que la vente entre la Ville de Paris et le SIEMP ne porte aucune atteinte à la destination de l'immeuble ; que l'article 8 I de la loi du 10 juillet 1965 dispose que "Le règlement de copropriété ne peut imposer aucune restriction aux droits des copropriétaires en dehors de celles qui seraient justifiées par la destination de l'immeuble, telle qu'elle est définie aux actes, par ses caractères ou sa situation" ; que le règlement se borne à énoncer que les lots sont affectés à l'habitation, sans autre précision ou limitation, visant notamment l'habitat social ; que peu importe qui occupe le bien pourvu que celui-ci ne nuise pas à la tranquillité de l'immeuble, ce qui ne se détermine pas à l'avance ; que la jurisprudence s'attache à priver d'effet toutes les clauses du règlement qui imposeraient des limites quant aux personnes pouvant acquérir un lot de copropriété ; qu'elle retient également qu'en l'absence d'une clause quelconque faisant état d'une destination particulière de l'immeuble, « il ne pouvait être soutenu que la construction d'habitations à loyers modéré était contraire à la destination de l'immeuble '' ; que le règlement n'interdit pas la location des lots privatifs, ne traite pas du montant du loyer ni de la catégorie sociale du locataire ;
- Que la vente ne porte pas atteinte aux droits des autres copropriétaires ; il convient sur ce point de se reporter aux développements figurant dans les conclusions du 24 février 2016 précédemment développées (RG 16/00586).
A titre subsidiaire, sur l'infirmation de la mesure d'interdiction de vendre, en raison de l'absence de dommage imminent, elle fait valoir : il convient également sur ce point de se reporter aux développements figurant dans les conclusions du 24 février 2016 précédemment développées (RG 16/00586) ;
La Société Immobilière d'Economie Mixte de la Ville de Paris (SIEMP), intimée ( RG 16/586), par ses conclusions du 24 février 2016 demande à la cour de :
A titre principal,
- confirmer en toutes ses dispositions, l'ordonnance attaquée du 21 décembre 2015 rendue sur tierce opposition de la SIEMP ;
- débouter le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 18]' et le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 19], de l'ensemble de ses demandes en cause d'appel ;
A titre incident,
- condamner le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 18] et le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 19] à une amende civile de 3.000 euros pour appel abusif, sur le fondement de l'article 559 du code de procédure civile ;
- condamner le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 18] et le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 19] à payer à la SIEMP la somme de 45.000 euros en réparation de son préjudice, en application de l'article 559 du code de procédure civile ;
- condamner le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 18] et le Syndicat des copropriétaires de l'ensemble immobilier [Adresse 19] à payer à la SIEMP la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Elle fait valoir :
- que par requête du 13 novembre 2015, les deux syndicats de copropriétaires ont saisi le tribunal administratif de Paris d'une requête visant à l'annulation de la délibération des 28, 29 et 30 septembre 2015 autorisant la cession des lots de copropriété concernés à la SIEMP, qu'ils ont assorti ce recours d'une requête en référé suspension en date du 13 novembre 2015, introduite sur le fondement de l'article L 521-1 du code de justice administrative visant à la suspension de l'exécution de ladite délibération, que le juge des référés dans une ordonnance du 4 décembre 2015 a rejeté la requête en suspension de la délibération attaquée,
- qu'en sa qualité d'acquéreur elle n'a pas été attraite dans la procédure RG 15/23618 de sorte qu'elle a fait tierce opposition à l'encontre de l'ordonnance du 16 novembre 2015, qu'elle était parfaitement recevable en sa tierce opposition formée avant la déclaration d'appel de la Ville de Paris,
- que le syndicat des copropriétaires, qui aux termes de l'article 15 alinéa 1 de la loi du 10 juillet 1965 peut agir en justice en vue de la sauvegarde des droits collectifs afférents à l'immeuble, n'a pas qualité pour solliciter l'interdiction de la vente de certains lots de la copropriété alors que sont seulement en cause les intérêts des copropriétaires,
- que le syndicat des copropriétaires ne démontre pas que le vente projetée en vue de la réalisation de logements sociaux par la SIEMP est constitutive d'un dommage imminent au sens de l'article 809 du code de procédure civile qui fonde sa demande,
- qu'en effet, compte tenu de la participation à un objectif d'intérêt général et l'absence de caractère spéculatif de l'opération envisagée, la différence de prix de cession apparaît justifiée, que la différence de prix de cession et la valeur vénale n'apparaît pas disproportionnée, que le prix de 3.500 euros a été fixé au terme d'une procédure objective et transparente qui tient compte de l'économie réelle de l'opération envisagée,
- que la clause du règlement de copropriété selon laquelle les appartements seront occupés de façon honnête de bonne vie et m'urs ne peut être interprétée comme interdisant la création de logements sociaux au sein de l'ensemble immobilier,
- que ce blocage de la vente lui a causé un préjudice en l'obligeant à reporter sur un exercice comptable ultérieur le financement de cette acquisition et des travaux à réaliser ce qui bouleverse ses équilibres financiers, qu'en outre l'action des syndicats se fonde en réalité sur des motifs totalement discriminatoires.
SUR CE LA COUR
Sur la jonction :
L'article 367 du code de procédure civile dispose que le juge peut, à la demande des parties ou d'office, ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui, s'il existe entre les litiges un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les instruire et juger ensemble.
Tel est bien le cas en l'espèce s'agissant du même litige, l'ordonnance du tribunal de grande instance de Paris du 21 décembre 2015 ayant « réformé » celle du 16 novembre 2015 ;
Il y a donc lieu d'ordonner la jonction des deux affaires RG 16/586 et RG 15/23068 sous ce numéro seul subsistant.
Sur la recevabilité de tierce opposition et de l'appel de la Ville de Paris et le sursis à statuer :
Selon l'article 561du code de procédure civile, l'appel remet la chose jugée en question devant la juridiction d'appel pour qu'il soit à nouveau statué en fait et en droit.
Etant observé que la tierce opposition est intervenue avant la déclaration d'appel (assignations en tierce opposition des 30 novembre 2015 à 13H50 et 14H20 pour une déclaration d'appel du 30 novembre 2015 à 15H57) il est, compte tenu de la jonction qui a été opérée et au regard de l'effet dévolutif de l'appel, sans intérêt de statuer sur la recevabilité de la tierce opposition et de l'appel de la Ville de Paris, la cour étant saisie de l'entier litige et donc des appels à l'encontre des deux ordonnances pour statuer par un seul et même arrêt, vidant ainsi sa saisine. Pour le même motif, il n'y a pas lieu de surseoir à statuer.
Sur la recevabilité des syndicats des copropriétaires Résidence LYAUTEY-SUCHET-TOLSTOI et Résidence LYAUTEY-SUCHET-AUTEUIL :
Aux termes des dispositions de l'article 31 du code de procédure civile, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention ou pour défendre un intérêt légitime.
L'article 14 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 dispose notamment que la collectivité des copropriétaires est constituée en un syndicat qui a la personnalité civile.....Il a pour objet la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes. Il est responsable des dommages causés aux copropriétaires ou au tiers par le vice de construction ou le défaut d'entretien des parties communes sans préjudice de toutes actions récursoires.
Selon l'article 15 de la même loi, le syndicat a qualité pour agir en justice tant en demandant qu'en défendant, même contre certains des copropriétaires ; il peut notamment agir conjointement ou non avec un ou plusieurs de ces derniers en vue de la sauvegarde des droits afférents à l'immeuble.Tout copropriétaire peut néanmoins exercer seul les actions concernant la propriété ou la jouissance de son lot à charge d'en informer le syndic.
ll en résulte que la qualité à agir du syndicat des copropriétaires est limitée conformément au principe de la spécificité des personnes morales par les termes de son objet à savoir la conservation de l'immeuble et l'administration des parties communes et qu'il ne peut intervenir que pour défendre l'intérêt collectif partagé de la même manière par tous les copropriétaires.
Les syndicats des copropriétaires soutiennent que le syndicat Résidence LYAUTEY-SUCHET-TOLSTOI a bien qualité à agir car en vendant ses lots à un prix inférieur au prix du marché, la Ville de Paris déprécie la résidence dans son ensemble soulignant que chaque lot comprend une partie privative et une quote-part des parties communes.
La Ville de Paris soutient l'irrecevabilité de l'action des syndicats de copropriétaires faute d'intérêt à agir, l'action du syndicat ayant en l'espèce pour objet de défendre les intérêts de chaque copropriétaire pris individuellement et non pas l'intérêt collectif ; la SIEMP fait observer qu'il n'y a pas méconnaissance de la destination de l'immeuble.
Il appartient au syndicat, par l'intermédiaire de son représentant légal, le syndic, de veiller au respect du règlement de copropriété et par conséquent de s'assurer que la jouissance de l'immeuble par chacun s'exerce en conformité des prescriptions de ce règlement.
Dès lors, en cas d'infraction au règlement de copropriété, le syndicat, est habilité à agir à l'encontre du copropriétaire responsable pour le voir contraint au respect de ses obligations dont l'inobservation engendre un préjudice collectif.
En effet, conformément à l'article 8 alinéa 1 de la loi du 10 juillet 1965, outre l'affectation des locaux le règlement de copropriété peut déterminer les conditions de jouissance de l'immeuble.
En l'espèce, le règlement de copropriété du [Adresse 18] précise en son article 10 (page 146) Destination de l'Immeuble que : « les appartements, studios et chambres dépendant de l'ensemble immobilier sont destinés à habitation ou à usage professionnel ; ils seront occupés et habités de façon honnête par des personnes de bonne vie et moeurs »
Le règlement de copropriété du [Adresse 20] précise page 192 article 10 2°) Destination de l'immeuble -occupation : « A a)les appartements, studios, chambres et remise dépendants des Bâtiments 1 à 4 sont destinés à l'habitation ou à usage professionnel ; ils seront occupés et habités de façon honnête par des personnes de bonne vie et moeurs ».
Il n'est pas contesté que les appartements dont la SIEMP, eu égard à son objet social, envisage l'acquisition sont destinés à l'habitation conformément aux clauses des règlements de copropriété susvisés : ces clauses ne peuvent s'interpréter comme interdisant l'occupation à titre d'habitation (copropriétaires ou locataires) desdits appartements, studios, chambres à certaines catégories sociaux professionnelles de sorte que le syndicat ne peut arguer de l'inobservation du règlement et de sa « clause d'habitation bourgeoise » engendrant un préjudice collectif et justifiant son action.
Par ailleurs, s'agissant de la « dépréciation » alléguée de la résidence, il s'agit d'un préjudice individuel éventuellement subi par le copropriétaire lors de la vente de son bien, étant observé que le prix de vente d'un appartement dans une copropriété est la résultante d'un ensemble de paramètres propres au lot concerné (vétusté du bien, emplacement, étage, existence d'un locataire etc ...) : il ne s'agit nullement de préjudices personnels ressentis de la même manière par l'ensemble des copropriétaires prenant ainsi un caractère collectif.
Il résulte de ce qui précède que le syndicat des copropriétaires de la Résidence LYAUTEY-SUCHET-TOLSTOI n'est pas recevable en son action faute de qualité et d'intérêt à agir. Il en est de même du syndicat de la résidence LYAUTEY-SUCHET AUTEUIL ;
Il y a donc lieu d'infirmer l'ordonnance du 16 novembre 2015 en toutes ses dispositions et celle du 21 décembre 2015 du chef de la recevabilité à agir des syndicats de copropriétaires et de confirmer pour le surplus cette deuxième ordonnance en ce qu'elle a rétracté l'ordonnance du 16 novembre 2015 qui a fait interdiction à la Ville de Paris de vendre ses lots situés dans le groupe d'immeubles à la Société Immobilière d'Economie Mixte de la Ville de Paris au prix de 3.500 euros le mètre carré habitable et rendu opposable sa décision à la Ville de Paris et au syndicat des copropriétaires [Adresse 7], [Adresse 8], [Adresse 9] et [Adresse 17] représenté par son syndic la société Albert Stoops.
Sur la demande de dommages et intérêts de la SIEMP :
Selon l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers ou de la survenance ou de la révélation d'un tiers.
La SIEMP demande la condamnation des deux syndicats de copropriétaires à lui verser la somme de 45.000 euros de dommages et intérêts soutenant que le blocage de la vente a remis en cause tout son programme de logement sociaux, lui imposant une réorganisation et une re-planification en interne, génératrice d'importants coûts.
Cette demande n'a pas été présentée devant les premiers juges, elle ne peut être qualifiée comme le fait la SIEMP, d' « incidente en cause d'appel » puisque comme le soulignent les syndicats de copropriétaires la SIEMP avait obtenu devant le premier juge entièrement satisfaction et qu'une demande de rétractation d'une ordonnance, fondement de la demande ayant donné lieu à l'ordonnance du 21 décembre 2015 ne peut avoir pour objet que la remise en cause de la décision qu'elle critique, toute nouvelle demande étant irrecevable.
La demande de dommages et intérêts de la SIEMP est donc irrecevable ;
Il résulte de l'article 559 du code de procédure civile que l'amende civile profite à l'Etat et non à la partie adverse qui n'est pas bien fondée à faire une demande à ce titre.
L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile dans les termes du présent dispositif.
PAR CES MOTIFS
Ordonne la jonction des affaires RG 16/586 et RG 15/23068 sous ce numéro seul subsistant,
Dit n'y avoir lieu en conséquence à statuer sur l'irrecevabilité de la tierce opposition et de l'appel de la Ville de Paris,
Dit n'y avoir lieu de surseoir à statuer,
Infirme l'ordonnance du 16 novembre 2015 en toutes ses dispositions,
Statuant à nouveau,
Déclare le syndicat des copropriétaires Résidence LYAUTEY-SUCHET-TOLSTOI [Adresse 2], [Adresse 21], [Adresse 4] et [Adresse 5] irrecevable en sa demande,
Condamne le syndicat des copropriétaires Résidence LYAUTEY-SUCHET-TOLSTOI [Adresse 2], [Adresse 21], [Adresse 4] et [Adresse 5] à verser à la Ville de Paris la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne le syndicat des copropriétaires Résidence LYAUTEY-SUCHET-TOLSTOI [Adresse 2], [Adresse 21], [Adresse 4] et [Adresse 5] aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés pour ces derniers conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
Infirme l'ordonnance du 21 décembre 2015, du chef de la recevabilité,
Statuant à nouveau de ce chef infirmé,
Déclare le syndicat des copropriétaires Résidence LYAUTEY-SUCHET-TOSTOI [Adresse 2], [Adresse 21], [Adresse 4] et [Adresse 5] et le syndicat des copropriétaires de la Résidence LYAUTEY-SUCHET-AUTEUIL [Adresse 19], [Adresse 22], [Adresse 9] et [Adresse 23] irrecevables en leurs demandes,
Confirme l'ordonnance du 21 décembre 2015 en ses autres dispositions en ce qu'elle a rétracté l'ordonnance du 16 novembre 2015 qui a fait interdiction à la Ville de Paris de vendre ses lots situés dans le groupe d'immeubles à la Société Immobilière d'Economie Mixte de la Ville de Paris au prix de 3.500 euros le mètre carré habitable, rendu opposable sa décision à la Ville de Paris et au syndicat des copropriétaires de la Résidence LYAUTEY-SUCHET-AUTEUIL, [Adresse 7], [Adresse 8], [Adresse 9] et [Adresse 17] représenté par son syndic la société Albert Stoops, statué sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile,
Y ajoutant,
Déclare Société Immobilière d'Economie Mixte de la Ville de Paris irrecevable en sa demande de dommages et intérêts,
Dit n'y avoir lieu à amende civile,
Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires Résidence LYAUTEY-SUCHET-TOSTOI [Adresse 2], [Adresse 21], [Adresse 4] et [Adresse 5] et le syndicat des copropriétaires de la Résidence LYAUTEY-SUCHET-AUTEUIL [Adresse 19], [Adresse 22], [Adresse 9] et [Adresse 23] à verser à la Société Immobilière d'Economie Mixte de la Ville de Paris la somme de 3500 euros et à la Ville de Paris celle de 5.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Déboute le syndicat des copropriétaires Résidence LYAUTEY-SUCHET-TOLSTOI [Adresse 2], [Adresse 21], [Adresse 4] et [Adresse 5] et le syndicat des copropriétaires de la Résidence LYAUTEY-SUCHET-AUTEUIL [Adresse 19], [Adresse 22], [Adresse 9] et [Adresse 23] de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne in solidum le syndicat des copropriétaires Résidence LYAUTEY-SUCHET-TOLSTOI [Adresse 2], [Adresse 21], [Adresse 4] et [Adresse 5] et le syndicat des copropriétaires de la Résidence LYAUTEY-SUCHET-AUTEUIL [Adresse 19], [Adresse 22], [Adresse 9] et [Adresse 23] aux dépens d'appel de l'ordonnance du 21 décembre 2015 qui seront recouvrés pour ces derniers conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier,
Le Président,