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10/05/2016 | FRANCE | N°14/20486

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 1, 10 mai 2016, 14/20486


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 1



ARRET DU 10 MAI 2016



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 14/20486



Décision déférée à la Cour : Sentence rendue à Paris le 21 juillet 2014 par le tribunal arbitral au second degré composé de MM. [G], [O], [A], [R], et de Mme [K], co-arbitres





DEMANDEUR AU RECOURS :



Monsieur [Y] [Z] [I], comme

rçant exerçant sous l'enseigne [I]



[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1] - SENEGAL



représenté par Me Cédric FISCHER de la SCP FISCHER TANDEAU DE MARSAC SUR & ASSOCIES, avoca...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 1

ARRET DU 10 MAI 2016

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/20486

Décision déférée à la Cour : Sentence rendue à Paris le 21 juillet 2014 par le tribunal arbitral au second degré composé de MM. [G], [O], [A], [R], et de Mme [K], co-arbitres

DEMANDEUR AU RECOURS :

Monsieur [Y] [Z] [I], commerçant exerçant sous l'enseigne [I]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1] - SENEGAL

représenté par Me Cédric FISCHER de la SCP FISCHER TANDEAU DE MARSAC SUR & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0147

DÉFENDERESSE AU RECOURS :

SA ASCOT COMMODITIES

prise en la personne de ses représentants légaux

[Adresse 2]

[Adresse 2]E - SUISSE

représentée par Me Patricia HARDOUIN de la SELARL 2H Avocats à la cour, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : L0056

assistée de Me Clément DUPOIRIER et de Me Jehan-Damien Le BRUSQ, avocats plaidant du barreau de PARIS, toque : J025

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 910 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 15 mars 2016, en audience publique, le rapport entendu, les avocats des parties ne s'y étant pas opposé, devant Madame GUIHAL, conseillère, et Madame DALLERY, conseillère, chargées du rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de:

Madame GUIHAL, conseillère, faisant fonction de présidente

Madame DALLERY, conseillère

Madame DUFOUR, conseillère, appelée pour compléter la cour conformément aux dispositions de l'ordonnance de roulement portant organisation des services rendue le 15 décembre 2015 par Madame le premier président de la cour d'appel de PARIS

Greffier, lors des débats : Madame PATE Mélanie

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame GUIHAL, conseillère, faisant fonction de présidente et par Madame PATE, greffier présent lors du prononcé.

M. [Y] [Z] [I] et la société de droit suisse ASCOT COMMODITIES SA (ASCOT) sont en relation commerciale pour l'importation de denrées alimentaires au Sénégal.

Un différend est né entre les parties à l'occasion de l'exécution de trois contrats de vente de riz conclus l'un le 30 juillet et les deux autres le 20 octobre 2008 qui stipulaient un arbitrage auprès de la chambre arbitrale de Paris.

M. [I] n'ayant pas été en mesure de régler le prix, les parties ont conclu le 7 mai 2009 un contrat de gage portant sur un certain volume de marchandises et le 4 juin 2009 une convention de séquestre entre les mains de la Banque Internationale pour le Commerce et l'Industrie du Sénégal afin de recevoir les produits de la vente des marchandises gagées, le solde du compte séquestre devant être affecté au paiement de la somme de 27.350.240 euros dont M. [I] se reconnaissait débiteur. Le contrat de gage et la convention de séquestre contenaient une clause d'élection de for au bénéfice des juridictions sénégalaises.

Le 10 juin 2009, ASCOT a déposé une demande d'arbitrage auprès de la Chambre arbitrale de Paris.

Le tribunal arbitral a rendu le 23 juillet 2013 un projet de sentence qui faisait droit à la plupart des demandes d'ASCOT. Le 4 septembre 2013, M. [I] a sollicité l'examen de l'affaire au second degré.

Par une sentence rendue à Paris le 21 juillet 2014, le tribunal arbitral au second degré composé de MM. [G], [O], [A], [R], et de Mme [K], co-arbitres a dit:

- que le droit applicable au litige était le droit sénégalais,

- que la conclusion du contrat de gage et de la convention de compte séquestre n'avait pas provoqué le report de l'exigibilité de la dette d'un montant initial de 23.750.475 euros,

- qu'après déduction des paiements partiels, le solde restant dû s'élevait à 10.575.946,33 euros en principal et intérêts au 30 juin 2014 au paiement duquel M. [I] était condamné avec les intérêts selon le droit sénégalais à compter de cette même date.

Le 10 octobre 2014, M. [I] a formé un recours contre cette sentence.

Par des conclusions signifiées le 12 janvier 2016, il en demande l'annulation et la condamnation d'ASCOT à lui payer 20.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile. Il invoque l'incompétence du tribunal arbitral (article 1520, 1° du code de procédure civile), la méconnaissance par les arbitres de leur mission (article 1520, 2° du code de procédure civile), et la violation de l'ordre public international (article 1520, 5° du code de procédure civile).

Par des conclusions signifiées le 10 février 2016, ASCOT demande à la cour de débouter M. [I] de ses demandes et de le condamner à lui payer 20.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR QUOI :

Sur les deux premiers moyens d'annulation tirés de l'incompétence du tribunal arbitral et de la méconnaissance par les arbitres de leur mission (article 1520, 1° et 3° du code de procédure civile) :

M. [I] soutient que le contrat de gage contenant une reconnaissance de dette, il n'y avait plus, à la date de sa conclusion de différend relatif à l'existence et l'étendue de la dette et que les litiges ultérieurs ne concernaient que le contrat de gage, lequel stipulait expressément que s'il n'emportait pas novation, il soumettait cependant tous les litiges nés de son interprétation ou de son exécution aux juridictions sénégalaises, de même de la convention de séquestre. Le recourant fait valoir qu'en statuant sur l'exigibilité et le quantum de la dette, le tribunal arbitral s'est nécessairement prononcé sur l'exécution et la validité des contrats de gage et de séquestre. Il ajoute qu'il s'est prévalu de ce moyen devant le tribunal arbitral en lui demandant de poser une question préjudicielle au juge sénégalais.

M. [I] allègue que, pour les mêmes raisons, en liquidant la dette, le tribunal arbitral a méconnu sa mission, qui était circonscrite aux contrats de vente à l'exclusion des conventions de gage et de séquestre.

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1466 du code de procédure civile, applicable en matière internationale en vertu de l'article 1506 du même code : 'La partie qui, en connaissance de cause et sans motif légitime, s'abstient d'invoquer en temps utile une irrégularité devant le tribunal arbitral est réputée avoir renoncé à s'en prévaloir';

Considérant que la sentence énonce aux paragraphes 22 et 23 : 'les parties s'opposent sur la question de savoir si le tribunal arbitral peut prendre en considération, et si oui dans quelle mesure, le contrat de gage et la convention de compte séquestre, sur lesquels il n'est pas compétent, pour les besoins de la résolution du litige relatif aux trois contrats de vente, sur lequel il est compétent. En particulier, l'une des principales questions litigieuses entre les parties est de savoir si la conclusion du contrat de gage et de la convention de compte séquestre a eu une influence sur l'exigibilité de la dette issue des contrats de vente. Cette interprétation de la volonté des parties implique nécessairement de la part du tribunal arbitral une prise en considération des contrats de gage et de compte séquestre.

Selon M. [Y] [Z] [I], l'interprétation du contrat de gage et de la convention de compte séquestre est nécessaire à la résolution du litige entre les parties et ne peut être faite que par les tribunaux de Dakar, conformément à la clause attributive de juridiction figurant dans chacun de ces deux contrats. M. [I] considère que le tribunal arbitral ne peut interpréter la volonté des parties qu'au moment de la conclusion des contrats de vente, car telle est la limite de sa compétence. Il invoque en d'autres termes l'existence d'une question préjudicielle, relevant de la compétence exclusive d'une autre juridiction et que le tribunal arbitral ne pourrait donc pas trancher, ce qui l'obligerait à surseoir à statuer en attendant que les juridictions sénégalaises se soient elles-mêmes prononcées';

Considérant qu'il résulte de ces énonciations que M. [I] qui, au cours de l'instance arbitrale, n'a pas contesté la compétence des arbitres au principal sur le litige relatif aux contrats de vente, n'est pas recevable à soutenir devant le juge de l'annulation qu'à la date de saisine du tribunal arbitral la conclusion des conventions de gage et de séquestre aurait mis fin à tout différend découlant des ventes; qu'en revanche, contrairement à ce que prétend ASCOT, le moyen tiré de la limitation de la compétence arbitrale à l'égard des conséquences des contrats de gage et de séquestre avait été invoqué par M. [I] devant le tribunal, de sorte que ce moyen est recevable devant la cour d'appel;

Considérant, en second lieu, que le juge de l'annulation contrôle la décision du tribunal arbitral sur sa compétence en recherchant tous les éléments de droit ou de fait permettant d'apprécier la portée de la convention d'arbitrage et d'en déduire les conséquences sur le respect de la mission confiée aux arbitres;

Considérant qu'un tribunal arbitral n'ayant pas le pouvoir de saisir une juridiction étatique d'une question préjudicielle, il lui appartient de résoudre toutes les difficultés dont la solution est un préalable nécessaire à celle du litige dont il est compétemment saisi au principal, à moins que ces questions ne soient par nature inarbitrables;

Considérant qu'en l'espèce, ASCOT demandait aux arbitres de fixer sa créance à l'égard de M. [I] en se prononçant sur sa date d'exigibilité, sur l'imputation des paiements partiels faits au titre des trois contrats de vente précités et d'un quatrième qui relevait d'une autre juridiction arbitrale, ainsi que sur le taux et le cours des intérêts;

Considérant que la liquidation de la créance qui découlait des contrats de vente contenant la clause compromissoire relevait de la compétence du tribunal arbitral; Que celui-ci, en prenant en compte, à titre de fait nécessaire à la solution de ce différend et, en particulier, à la recherche de la commune intention des parties relative à l'exigibilité de la dette, l'existence des conventions de gage et de séquestre qui stipulaient une clause d'élection de for, n'a ni outrepassé sa compétence, ni méconnu sa mission;

Que les deux premiers moyens doivent donc être écartés;

Sur le troisième moyen d'annulation tiré de la violation de l'ordre public international (article 1520, 5° du code de procédure civile):

M. [I] fait valoir que la sentence rendue le 21 juillet 2014 est contradictoire avec le jugement rendu le 24 décembre 2013 par le tribunal régional hors classe de Dakar qui a annulé l'article 4 du contrat de gage, ainsi que la convention de séquestre, et ordonné une expertise, et avec l'arrêt de la cour d'appel de Dakar du 23 janvier 2015 qui a confirmé le jugement en ce qu'il avait annulé l'article 4 du contrat de gage, l'a infirmé en ce qui concernait l'expertise et l'annulation intégrale de la convention de séquestre, qui a déclaré nul le seul article 2 de cette convention et renvoyé au tribunal arbitral le calcul du reliquat. Le recourant expose que l'annulation de l'article 4 a été prononcée par les juridictions sénégalaises au motif que ce mécanisme ne respectait pas les dispositions de l'acte uniforme OHADA qui prévoient que l'attribution du gage au créancier gagiste est autorisée par la juridiction compétente suivant les cours ou à dire d'expert.

Considérant que la reconnaissance ou l'exécution d'une sentence inconciliable avec une décision de justice étrangère précédemment revêtue en France de l'exequatur viole de manière manifeste, effective et concrète l'ordre public international; que sont inconciliables des décisions de justice entraînant des conséquences juridiques qui s'excluent mutuellement;

Considérant qu'en l'espèce, M. [I] n'allègue pas que les décisions sénégalaises dont il se prévaut auraient bénéficié de l'exequatur en France; que le moyen tiré de leur inconciliabilité avec la sentence ne peut donc qu'être écarté;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le recours doit être rejeté;

Sur l'article 700 du code de procédure civile :

Considérant que le recourant, qui succombe, ne saurait bénéficier des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et sera condamné sur ce fondement à payer à ASCOT la somme de 20.000 euros;

PAR CES MOTIFS :

Rejette le recours formé contre la sentence rendue entre les parties le 21 juillet 2014.

Condamne M. [Y] [Z] [I] aux dépens, qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, et au paiement à la société ASCOT COMMODITIES SA de la somme de 20.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA CONSEILLÈRE, faisant fonction de présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 14/20486
Date de la décision : 10/05/2016

Références :

Cour d'appel de Paris A1, arrêt n°14/20486 : Déboute le ou les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-05-10;14.20486 ?
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