Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 3 - Chambre 1
ARRÊT DU 08 JUIN 2016
(n° , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/06873
Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Mars 2014 - Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/14319
APPELANT
Monsieur [T] [S] [U]
né le [Date naissance 1] 1943 à [Localité 1]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représenté par Me Patricia HARDOUIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056
assisté de Me Jean LEGER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0542
INTIMES
Madame [K] [G]
née le [Date naissance 2] 1986 à [Localité 2] (CANADA)
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Madame [X] [G] épouse [Q]
née le [Date naissance 3] 1983 à [Localité 3] (ETATS-UNIS)
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Madame [A] [G] épouse [S]
née le [Date naissance 4] 1979 à [Localité 4]
[Adresse 4]
[Adresse 1]
Monsieur [M] [G]
né le [Date naissance 5] 1976 à [Localité 5]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
Madame [P] [G] épouse [V]
née le [Date naissance 6] 1974 à [Localité 5]
[Adresse 6]
[Adresse 6]
Madame [O] [G]
née le [Date naissance 7] 1991 à [Localité 6]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Madame [C] [U]
née le [Date naissance 8] 1954 à [Localité 4]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Monsieur [G] [U] représenté par son père, Monsieur [U] [U]
né le [Date naissance 9] 1998 à [Localité 7]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
Monsieur [U] [U]
né le [Date naissance 10] 1950 à [Localité 8]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
Madame [R] [U]
née le [Date naissance 11] 1952 à [Localité 8]
[Adresse 8]
[Adresse 8]
Madame Christine [F]
née le [Date naissance 12] 1985 à [Localité 9]
[Adresse 9]
[Adresse 9]
Madame [E] [F]
née le [Date naissance 13] 1971 à [Localité 9]
[Adresse 10]
[Adresse 10]
Monsieur [Y] [F]
né le [Date naissance 14] 1973 à [Localité 10]
[Adresse 11]
[Adresse 11]
Madame [H] [F]
née le [Date naissance 15] 1988 à [Localité 9]
[Adresse 12]
[Adresse 12]
Madame [L] [U]
née le [Date naissance 16] 1948 à [Localité 8]
[Adresse 13]
[Adresse 13]
Monsieur [I] [U]
né le [Date naissance 17] 1956 à [Localité 4]
[Adresse 14]
[Adresse 14]
Madame [B] [U] épouse [E]
née le [Date naissance 18] 1987 à [Localité 9]
[Adresse 15]
[Adresse 15]
représentés et assistés par Me Olivier FOUCHE de la SCP FOUCHE-EX IGNOTIS, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, toque : PC 155
Madame [W] [Y] épouse [U]
[Adresse 16]
régulièrement assignée à étude de l'huissier, n'ayant pas constitué avocat
Monsieur [D] [U]
[Adresse 1]
régulièrement assigné à tiers présent au domicile, n'ayant pas constitué avocat
Monsieur [J] [U]
[Adresse 17]
régulièrement assigné à étude de l'huissier, n'ayant pas constitué avocat
Madame [H] [U] épouse [A]
[Adresse 18]
régulièrement assignée à personne, n'ayant pas constitué avocat
Monsieur [F] [U]
[Adresse 19]
régulièrement assigné à étude de l'huissier, n'ayant pas constitué avocat
Madame [Q] [U] épouse [D]
[Adresse 20]
régulièrement assignée à personne, n'ayant pas constitué avocat
Madame [V] [U] épouse [I]
[Adresse 21]
régulièrement assignée à selon procès-verbal de recherches, n'ayant pas constitué avocat
Madame [Z] [N] [U] épouse [H]
[Adresse 22]
régulièrement assignée à selon procès-verbal de recherches, n'ayant pas constitué avocat
Monsieur [CC] [U]
[Adresse 23]
régulièrement assigné à étude de l'huissier, n'ayant pas constitué avocat
Monsieur [FF] [U]
[Adresse 24] - ALLEMAGNE
régulièrement assigné selon acte d'attestation de transmission en Allemagne, n'ayant pas constitué avocat
Monsieur [LL] [F]
[Adresse 25]
[Adresse 25]
régulièrement assigné à étude de l'huissier, n'ayant pas constitué avocat
COMPOSITION DE LA COUR :
Après rapport oral, l'affaire a été débattue le 08 Mars 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Evelyne DELBÈS, Président de chambre
Madame Monique MAUMUS, Conseiller
Mme Nicolette GUILLAUME, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Madame Emilie POMPON
ARRÊT :
- de défaut
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Evelyne DELBÈS, Président et par Madame Emilie POMPON, Greffier.
***
[J] [U] est décédé le [Date décès 1] 2002, laissant pour recueillir sa succession :
- Mme [W] [Y], son épouse commune en biens,
- ses sept enfants : MM. [T], [CC], [U] et [I] [U] et Mmes [L], [R] et [C] [U].
Par testament olographe du 22 décembre 1994 et deux codicilles des 30 octobre 1996 et 9 septembre 1998, le défunt avait légué à :
- Mme [W] [U], son épouse, l'usufruit de sa part dans l'appartement situé [Adresse 26],
- M. [T] [U], 16/25èmes de quotité disponible,
- M. [CC] [U], 1/25èmes de ladite quotité,
- M. [U] [U], 2/25èmes,
- M. [I] [U], 1/25èmes,
- Mme [C] [U], 4/25èmes,
- ses 21 petits-enfants, 1/25èmes.
Par jugement du 6 septembre 2007, le tribunal de grande instance de Paris a ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la communauté des époux [Y]/[U] et de la succession de [J] [U] et une expertise des biens immobiliers et des parts des sociétés SA [U], société civile Holding [U] et Fils, SA [J] [U], propriétaire d'un immeuble sis [Adresse 27], et SCI Clamagi, propriétaire d'un bien immobilier situé en Corse.
Par jugement du 27 mai 2010, le tribunal de grande instance de Paris a ordonné la licitation des 254 030 parts de la société Holding [U] et Fils représentant la totalité du capital social.
Par jugement rectificatif du 16 décembre 2010, le nombre de parts soumis à la licitation a été ramené à 234 848 parts, M. [T] [U] ayant indiqué qu'il détenait, à titre personnel, 10182 parts de la société Holding [U] et Fils, qui devaient donc être retiré de l'actif successoral.
Les coïndivisaires de l'intéressé ont alors cherché à savoir comment M. [T] [U] avait pu entrer en possession de ces 10182 parts.
Suspectant qu'il pouvait avoir fait l'acquisition de ces parts grâce à des deniers avancés par son père ou par le biais d'une donation ou d'une libéralité effectuée par celui-ci à son profit, Mmes [K] et [X] [G], Mme [A] [G] épouse [S], M. [M] [G], Mme [P] [G] épouse [V], Mme [O] [G], Mme [C] [U], M. [G] [U] représenté par son père, M. [U] [U], M. [U] [U], à titre personnel, Mme [R] [U], Mme Christine [F], Mme [E] [F], M. [Y] [F], Mme [H] [F] et Mme [L] [U] ont, par actes des 13, 14 et 18 septembre 2012, assigné M. [T] [U] devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins de rapport à la succession de la valeur des parts qu'il détient et de recel successoral.
Mme [W] [Y] veuve [U], M. [D] [U], M. [J] [I] [U], Mme [H] [U] épouse [A], M. [F] [U], Mme [Q] [U] épouse [D], Mme [V] [U] épouse [I], Mme [Z] [U] épouse [H], M. [CC] [U], M. [FF] [U], M. [LL] [F], M. [I] [U] et Mme [B] [U] ont été attraits dans cette instance.
Par jugement du 7 mars 2014, le tribunal de grande instance de Paris a :
- dit n'y avoir lieu à réouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la communauté des époux [Y]/[U] et de la succession de [J] [U],
- constaté que [J] [U] a donné, le 17 décembre 1983, à M. [T] [U] 99 parts de la société [J] [U] et Fils (SA),
- déclaré M. [T] [U] coupable de recel de cette donation,
- condamné l'intéressé à rapporter à la succession de son père une somme de 574 730 euros outre l'intérêt légal à compter du jugement,
- dit que M. [T] [U] sera privé de toute part sur la somme ainsi rapportée,
- ordonné à M. [T] [U] de restituer tous les fruits de ses 10 131 parts de la société civile Holding [U], parts issues de la donation du 17 décembre 1983, preçus par lui entre le 29 janvier 2002 et le jugement,
- dit que le même sera privé de toute part sur les fruits ainsi restitués,
- condamné l'intéressé à verser à Mmes [K], [X], [A], [P] et [O] [G], M. [M] [G], Mmes [C], [R], [L] et [B] [U], MM. [G], [U] et [I] [U], Mmes Christine, [E] et [H] [F] et M. [Y] [F] une somme globale de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile .
M. [T] [U] a interjeté appel de cette décision par déclaration du 26 mars 2014.
Dans ses dernières écritures du 18 février 2016, il demande à la cour de :
- vu les articles 1315, 778 et 843 et suivants du code civil,
- réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- dire qu'il incombe aux demandeurs au visa de l'article 1315 du code civil de prouver l'existence de la donation déguisée alléguée,
- constater que les intimés ne rapportent pas la preuve de l'intention libérale de [J] [U],
- les débouter en conséquence de leurs prétentions,
- subsidiairement, si la cour retenait qu'il y a lieu à libéralité rapportable,
- infirmer le jugement du chef du recel en constatant l'absence d'intention frauduleuse, alors que la détention par lui de 200 actions dans le capital de la société [U] et Fils SA était connue de l'ensemble de ses frères et soeurs depuis au moins l'année 1987,
- très subsidiairement,
- statuant sur l'appel incident,
- débouter les intimés de leur demande d'expertise des parts de la société civile Holding [U] et Fils qui ont fait l'objet d'une expertise au contradictoire de l'ensemble des parties ordonnée par le tribunal dans son jugement du 6 septembre 2007,
- confirmer en conséquence le jugement quant au montant du rapport,
- débouter les intimés de leur demande de condamnation à rapporter à la succession les fruits produits depuis le 17 décembre 1983 alors que [J] [U] est décédé le [Date décès 1] 2002,
- débouter les mêmes de leur demande d'intérêts à compter du 29 janvier 2002, alors que conformément au principe de la répétition de l'indu, l'héritier qui réclame les fruits produits depuis le décès par les biens recelés ne peut au surplus prétendre aux intérêts sur les fruits dont s'agit,
- infirmer le jugement du chef de l'article 700 du code de procédure civile,
- statuant à nouveau,
- condamner solidairement les intimés à lui payer la somme de 30 000 euros sur ce fondement,
- condamner les mêmes en tous les dépens de première instance et d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la Selarl 2H en la personne de Maître Hardouin.
Dans leurs dernières conclusions du 29 janvier 2016, Mmes [P], [L] et [R] [U], MM. [U] et [I] [U], Mmes [K] et [X] [G], Mme [A] [G] épouse [S], M. [M] [G], Mme [P] [G] épouse [V], Mme [O] [G], Mme Christine [F], M. [Y] [F], Mme [E] [F], Mme [H] [F], M. [G] [U] représenté par son père M. [U] [U], et Mme [B] [U] épouse [E], demandent à la cour de :
- vu les articles 778, 843 et suivants et particulièrement les articles 851, 854 et 860 du code civil,
- dire M. [T] [U] irrecevable en, en tout cas, mal fondé en son appel,
- confirmer le jugement du 7 mars 2014 sauf en ce qu'il a condamné M. [T] [U] à rapporter à la succession la somme de 574 730 euros,
- statuant à nouveau,
- condamner M. [T] [U] à rapporter à la succession la somme de 2 346 136 euros avec intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 1983, jour de l'appropriation frauduleuse, et la somme de 133 020 euros au titre des dividendes perçus entre le 29 janvier 2002 et le 20 septembre 2012, avec intérêts au taux légal à compter du 29 janvier 2002, sommes sur lesquelles il sera privé de toute part,
- y ajoutant,
- condamner M. [T] [U] à payer à chacun d'eux la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.
Mme [W] [U], Mme [Z] [U] épouse [H], MM. [D] et [J] [U], Mme [H] [U] épouse [A], M. [F] [U], Mme [Q] [U] épouse [D], Mme [V] [U] épouse [I], MM. [CC] et [FF] [U] et M. [LL] [F], auxquels la déclaration d'appel et les conclusions d'appelant ont été régulièrement signifiées, n'ont pas constitué avocat.
SUR CE
Considérant que pour s'opposer à la demande de rapport formée à son encontre par les intimés, M. [T] [U] indique que :
- son père, [J] [U], assureur conseil, a créé en 1939 la SA [J] [U],
- le 1er janvier 1970, il a rejoint son père pour participer au développement de ses entreprises,
- en 1972, il a acquis une part de la Sarl [YY] [T], devenue la SA [J] [U] et Fils, dont il a pris la présidence du conseil d'administration en février 1974,
- son père lui a cédé, le 17 décembre 1983, 99 actions de la SA [J] [U] et Fils
- le 27 juin 1986, il a été décidé de procéder à deux augmentations de capital de la SA [J] [U] et Fils avec une prime d'apport qui a été ensuite incorporée au capital ce qui a eu pour effet de lui attribuer 100 actions nouvelles du capital,
- à la suite de ces opérations, il s'est trouvé détenteur d'une action de garantie, des 99 actions données par son père et de 100 actions nouvelles, soit 200 actions sur les 5000 du capital social
- en 1998, il a créé avec son père la société civile Holding [J] [U] et Fils à laquelle ils ont l'un et l'autre apporté leurs actions de la SA [J] [U] et Fils et reçu, en contrepartie, son père, 243 848 parts et lui, 10182 parts, de la nouvelle entité ;
Considérant que M. [T] [U] argue de l'absence d'intention libérale de son père à son égard lors de la cession de 99 actions de la SA [J] [U] et Fils intervenue le 17 décembre 1983 et soutient qu'elle lui a été faite en rémunération de son activité en faveur des entreprises familiales et de ses fonctions de président du conseil d'administration de la société ;
Considérant que les intimés font plaider que le transfert de titres opéré le 17 décembre 1983 par leur père au bénéfice de l'appelant, qui ne démontre pas l'existence de la moindre contrepartie à cette cession, ne peut correspondre qu'à une libéralité indirecte dont il doit le rapport à la succession de leur auteur ; qu'ils contestent le caractère rémunératoire prêté à ce transfert par l'intéressé qui était salarié des sociétés de son père où il bénéficiait d'une rémunération 'très élevée (250 K€ en 2007)' et dont la part dans la succession est, du fait de la donation, en moyenne plus de deux fois supérieure à celle de ses cohéritiers ;
Considérant que c'est à celui qui se prévaut de la qualification de donation d'en faire la preuve et, notamment, de démontrer l'intention libérale du donateur ;
Considérant que ni le statut de salarié de M. [T] [U], ni le montant de son salaire en 2007 tel que relevé par les intimés, ni sa part dans la succession ne sont de nature à exclure que la cession intervenue à son profit, le 17 décembre 1983, de 99 des 1000 actions du capital de la SA [J] [U] et Fils, l'ait été à titre rémunératoire et en contrepartie des services par lui rendus depuis, alors, près de 10 ans au sein des entreprises de son père et à la tête du conseil d'administration de la société concernée, mandat dont il affirme, sans être contredit par les intimés, qu'il était gratuit, et afin de l'intéresser aux bénéfices à la réalisation desquels, seul parmi les enfants du défunt, il participait et, ainsi, de le fidéliser, ce qui s'est produit puisqu'il a continué à apporter sa collaboration aux sociétés familiales durant toute sa vie professionnelle ;
Considérant que la nature de donation de la cession du 17 décembre 1983 ne peut, dès lors, être retenue ;
Considérant en conséquence, que la cour, infirmant le jugement, déboutera les intimés de toutes leurs demandes ;
Considérant que l'équité commande de ne pas faire application, en l'espèce, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement déféré,
Statuant à nouveau,
Déboute Mme [C] [U], Mme [L] [U], Mme [R] [U], M. [U] [U], M. [I] [U], Mme [K] [G], Mme [X] [G] épouse [Q], Mme [A] [G] épouse [S], M. [M] [G], Mme [P] [G] épouse [V], Mme [O] [G], Mme Christine [F], M. [Y] [F], Mme [E] [F], Mme [H] [F], M. [G] [U] représenté par son père, [U] [U], et Mme [B] [U] épouse [E] de toutes leurs demandes,
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne les intimés aux entiers dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT