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16/06/2016 | FRANCE | N°13/08173

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 16 juin 2016, 13/08173


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 16 juin 2016

(n° 450 , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/08173



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Mai 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 11/11646





APPELANT

Monsieur [L] [N]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 1]

comparant en personne, assi

sté de Me Nathalie ATTIAS, avocat au barreau de PARIS, toque : E0416 substitué par Me Olivier LADREGARDE, avocat au barreau de PARIS, toque : E 0416





INTIMEES

Me [F] [H] - Man...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 16 juin 2016

(n° 450 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/08173

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Mai 2013 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 11/11646

APPELANT

Monsieur [L] [N]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 1]

comparant en personne, assisté de Me Nathalie ATTIAS, avocat au barreau de PARIS, toque : E0416 substitué par Me Olivier LADREGARDE, avocat au barreau de PARIS, toque : E 0416

INTIMEES

Me [F] [H] - Mandataire liquidateur de la SARL ICR ENERGIES

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par Me Stéphane JEGOU, avocat au barreau de NANTES, toque : 49

PARTIE INTERVENANTE :

AGS CGEA [Localité 2]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représenté par Me Arnaud CLERC, avocat au barreau de PARIS, toque : T10 substitué par Me Maud MIALLON, avocat au barreau de PARIS, toque : D0223

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 31 Mars 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Marthe-Elisabeth OPPELT-RÉVENEAU, Conseillère faisant fonction de présidente

M. Mourad CHENAF, Conseiller

Mme Camille-Julia GUILLERMET, Vice-présidente placée

qui en ont délibéré

Greffier : Madame Véronique FRADIN-BESSERMAN, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Marthe-Elisabeth OPPELT-REVENEAU, Conseillère faisant fonction de Présidente et par Madame Véronique FRADIN-BESSERMAN, greffier présent lors du prononcé.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Monsieur [L] [N] a été engagé par la Sarl ICR Conseil, devenue la Sarl ICR ENERGIES, en contrat à durée indéterminée du 13 novembre 2007 pour exercer les fonctions d'expert en prévention des risques industriels, statut cadre, moyennant un salaire mensuel brut de 5000 €.

Par courrier du 30 octobre 2009, Monsieur [N] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 9 novembre 2009.

Par courrier du 13 novembre 2009, Monsieur [N] a été licencié pour insuffisance professionnelle et pour avoir donné une interview à un journaliste sur un dossier faisant l'objet d'une procédure judiciaire.

La Sarl ICR ENERGIES compte habituellement plus de 11 salariés et applique la convention collective « syntec ».

Estimant son licenciement abusif, Monsieur [L] [N] a saisi le Conseil de Prud'hommes de PARIS, de demandes tendant en dernier lieu à obtenir des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi qu'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du Tribunal de Commerce de Paris en date du 26 mai 2010, la Sarl ICR ENERGIES a été placée en liquidation judiciaire.

Par jugement du 3 mai 2013, le Conseil de Prud'hommes de PARIS a débouté Monsieur [L] [N] de l'intégralité de ses demandes.

Appelant, Monsieur [N] sollicite de la Cour l'infirmation de la décision entreprise en toutes ses dispositions.

Monsieur [N] demande à la Cour de déclarer son appel recevable et de fixer sa créance au passif de la société ICR ENERGIE à la somme de 60 000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de déclarer l'arrêt à intervenir opposable à l'AGS.

La SCP [F], es qualités de mandataire-liquidateur de la société ICR ENERGIES, conclut à titre principal à l'irrecevabilité de l'appel de Monsieur [N], subsidiairement à la confirmation du jugement déféré en toutes ses dispositions et à la condamnation de Monsieur [N] au paiement d'une indemnité de 3000 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.

L'AGS [Localité 2] demande à la Cour de déclarer l'appel de Monsieur [N] irrecevable et subsidiairement de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour renvoie pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens développés, aux conclusions respectives des parties, visées par le greffier et soutenues oralement à l'audience du 31 mars 2016.

A la suite des débats, les parties ont été entendues en leurs dires et observations et avisées que l'affaire a été mise en délibéré pour un arrêt rendu le 26 mai 2016, prorogé au 16 juin 2016.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la recevabilité de l'appel de Monsieur [N] :

Aux termes des articles 670 et 677 du code de procédure civile, la notification des jugements n'est réputée faite à la partie elle-même que lorsque l'avis de réception est signé par son destinataire.

Au cas d'espèce, il résulte des pièces du dossier et des débats que le jugement du Conseil de Prud'hommes de Paris en date du 3 mai 2013 a été notifié aux parties par le greffe par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 mai 2013, conformément aux dispositions de l'article R1454-26 du code de travail.

Monsieur [N] soutient que la signature apposée sur l'accusé de réception de la notification du jugement n'est pas la sienne et que dès lors le délai d'appel d'un mois ne lui est pas opposable.

Il résulte de l'analyse des documents produits aux débats que la signature figurant sur l'accusé de réception n'est pas identique à celle apposée par Monsieur [N] sur différent documents produits aux débats, de sorte qu'il n'est pas établi que Monsieur [N] soit le signataire de l'accusé de réception, ce dont il se déduit que le délai d'appel n'a pas pu courir contre Monsieur [N], lequel doit donc être déclaré recevable en son appel.

Sur le licenciement de Monsieur [N] :

Selon les dispositions de l'article L.1232-1 du Code du travail tout licenciement pour motif personnel doit être justifié par une cause réelle et sérieuse.

L'article L.1235-1 du Code du travail dispose, en ses derniers alinéas, que :

« Le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié. » ;

L'insuffisance professionnelle se définit comme l'incapacité objective et durable d'un salarié à exécuter de façon satisfaisante un emploi correspondant à sa qualification. Elle se caractérise par une mauvaise qualité du travail due soit à une incompétence professionnelle, soit à une inadaptation à l'emploi.

Si l'appréciation des aptitudes professionnelles et de l'adaptation à l'emploi relève du pouvoir de l'employeur, pour justifier le licenciement, les griefs doivent être suffisamment pertinents, matériellement vérifiables et perturber la bonne marche de l'entreprise ou être préjudiciables aux intérêts de celle-ci.

Il résulte des articles L.1234-1 et L.1234-9 du code du travail que, lorsque le licenciement est motivé par une faute grave, le salarié n'a droit ni à un préavis ni à une indemnité de licenciement.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis.

L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

Au cas d'espèce, les motifs énoncés dans la lettre de licenciement notifiée à Monsieur [N] sont mixtes. D'une part, le licenciement est de nature disciplinaire en ce qu'il prétend sanctionner une faute commise par Monsieur [N] à qui l'employeur reproche d'avoir donné une interview au magazine l'Express dans les locaux de l'entreprise sans son accort et, d'autre part, il est motivé par une insuffisance professionnelle caractérisée par une insuffisance de résultats, ce qui ressortit de la mauvaise exécution contractuelle.

Sur l'insuffisance professionnelle :

La lettre de licenciement du 13 novembre 2009 qui fixe définitivement les termes du litige reproche à Monsieur [N] de ne pas avoir atteint les objectifs contractuels sur l'exercice 2009 avec pour conséquence que la marge brute dégagée par les affaires apportées par Monsieur [N] n'a pas couvert les frais généraux.

Monsieur [N] soutient que l'insuffisance professionnelle n'est pas établie par l'employeur qui ne rapporte pas la preuve qu'il n'a pas atteint son objectif contractuel, que le défaut de résultat ne constitue pas en soi une cause de licenciement, qu'en l'absence de mise en demeure ou rappel à l'ordre, l'employeur ne pouvait le licencier pour défaut de rentabilité et qu'à supposée établie, une insuffisance de résultats, cette situation ne peut lui être imputable, car le secteur sur lequel il a été affecté n'était pas rentable et qu'au surplus, l'employeur a adopté un comportement de nature à entraver ses fonctions et partant ses résultats.

Il ressort des pièces produites aux débats et notamment l'avenant au contrat de travail en date du 13 novembre 2007, que les objectifs financiers que Monsieur [N] a accepté sont fixés comme suit : « A court terme, vos objectifs sont à minima, de couvrir par la marge brute dégagée par vos affaires, les salaires et charges patronales et les frais généraux de la société. A moyen terme, votre objectif est de rentabiliser l'activité ».

Contrairement à ce que soutient Monsieur [N], l'objectif contractuellement convenu n'apparait en rien irréaliste puisqu'il revenait à demander, comme le démontre la SCP [F], es qualités de mandataire-liquidateur de la société ICR ENERGIES, à réaliser un chiffre d'affaires mensuel de 8617,91€ pour couvrir ses charges fixes.

La Cour relève que sur la période de janvier à octobre 2010, soit 10 mois, Monsieur [N], n'a pu obtenir que quatre commandes alors qu'il avait lui-même rassuré son employeur lors d'un entretien du 28 mai 2008 au cours duquel un premier bilan de son activité a été établi, en indiquant que son objectif était atteignable et que sa stratégie commerciale, malgré la faiblesse de ses résultats en 2008, était en adéquation avec les objectifs contractuels.

La tenue de l'entretien du 28 mai 2008, au cours duquel l'employeur a fait connaître à Monsieur [N] ses inquiétudes sur la faiblesse de ses résultats sur les 6 premiers mois d'activité, dément ainsi les allégations de celui-ci sur l'absence de mise en demeure ou de rappel à l'ordre préalable à son licenciement.

Par ailleurs, la Cour dispose des éléments suffisants pour constater que l'insuffisance de résultats est démontrée par l'employeur contrairement aux affirmations de Monsieur [N].

En effet, à l'analyse des factures émises par Monsieur [N] et le nombre de clients mentionnés dans la lettre de licenciement, il ressort que le chiffre d'affaires réalisé par Monsieur [N], qu'il ne conteste pas, soit 28 659,53 €, est loin d'atteindre l'objectif fixé qui est de 63 958,16 € sur 10 mois.

Enfin, aucune des pièces produites par Monsieur [N] ne vient démontrer que la faiblesse du chiffre d'affaires pour l'exercice 2009, qui selon la lettre de licenciement, a été encore plus mauvais que celui de 2008, ce que Monsieur [N] ne conteste pas sérieusement, soit imputable au comportement de l'employeur, au manque de moyens ou à la faible rentabilité du secteur du risque industriel.

Au contraire, l'employeur expose à l'instance, sans être contredit par Monsieur [N], l'avoir alerté sur le fait qu'il se dispersait en estimant qu'il devait parcourir le monde entier (Irak, Afghanistan, Cambodge) pour tenter d'obtenir des marchés improbables et sans rapport avec le secteur du risque industriel.

Il se déduit de ce qui précède que les griefs invoqués par la société ICR ENERGIES dans la lettre de licenciement sont suffisamment caractérisés pour retenir l'existence d'une insuffisance professionnelle du salarié.

Sur l'interview donnée par Monsieur [N] :

Pour justifier que Monsieur [N] a donné une interview au magazine l'Express dans les locaux de la société et sans l'autorisation préalable de l'employeur, la SCP [F], es qualités de mandataire-liquidateur de la société ICR ENERGIES, produit une copie de l'article de presse en question.

L'analyse de cet article de presse permet, certes, de relever qu'il porte sur un différend entre Monsieur [N] et son ancien employeur ayant fait l'objet d'une audience devant un tribunal correctionnel, mais pas de confirmer que l'interview se soit déroulée sur le lieu de travail de Monsieur [N] et dans les locaux de l'entreprise.

Ce second grief n'est donc pas établi.

Il s'ensuit que le licenciement de Monsieur [N] pour insuffisance professionnelle est fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Par voie de conséquence, la Cour confirme le jugement déféré sur ce point et déboute Monsieur [N] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions relative à la rupture du contrat de travail.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

L'équité commande de dire que Monsieur [N], qui succombe à l'instance, est condamné aux dépens de l'instance et au paiement à la SCP [F], es qualités de mandataire-liquidateur de la société ICR ENERGIES, de la somme de 1000 € au titre de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement du Conseil de Prud'hommes de Paris rendu le 3 mai 2013 en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant ;

Vu l'article 700 du Code de Procédure Civile ;

CONDAMNE Monsieur [L] [N] à payer à la SCP [F], es qualités de mandataire-liquidateur de la société ICR ENERGIES, la somme de 1000 € au titre de ses frais irrépétibles ;

CONDAMNE Monsieur [L] [N] aux entiers dépens de l'instance.

La Greffière La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 13/08173
Date de la décision : 16/06/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°13/08173 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-06-16;13.08173 ?
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