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21/10/2016 | FRANCE | N°15/04027

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 1, 21 octobre 2016, 15/04027


COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4- Chambre 1
ARRÊT DU 21 OCTOBRE 2016
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/ 04027
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Février 2015- Tribunal de Grande Instance de FONTAINEBLEAU-RG no 13/ 00984
APPELANTE
Madame Sandra Cathy X... née le 06 Juillet 1972 à FORBACH (57600)
demeurant...
Représentée par Me Jean-marc BORTOLOTTI de la SCP DUMONT-BORTOLOTTI-COMBES-JUNGUENET, avocat au barreau de FONTAINEBLEAU Assistée sur l'audience par Me Bernard DUMONT, avocat au barreau de FONTAINEBLEAU

INTIMÉS >Monsieur Laurent Georges Y... né le 29 Octobre 1967 à JOINVILLE (52) (52300) et Madame Corinne An...

COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4- Chambre 1
ARRÊT DU 21 OCTOBRE 2016
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/ 04027
Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Février 2015- Tribunal de Grande Instance de FONTAINEBLEAU-RG no 13/ 00984
APPELANTE
Madame Sandra Cathy X... née le 06 Juillet 1972 à FORBACH (57600)
demeurant...
Représentée par Me Jean-marc BORTOLOTTI de la SCP DUMONT-BORTOLOTTI-COMBES-JUNGUENET, avocat au barreau de FONTAINEBLEAU Assistée sur l'audience par Me Bernard DUMONT, avocat au barreau de FONTAINEBLEAU

INTIMÉS
Monsieur Laurent Georges Y... né le 29 Octobre 1967 à JOINVILLE (52) (52300) et Madame Corinne Annie Ghislaine Z... épouse Y... née le 14 Décembre 1969 à DOUAI (59) (59500)

demeurant...
Représentés tous deux et assistés sur l'audience par Me Christian CAMOIN, avocat au barreau de FONTAINEBLEAU
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Septembre 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Dominique DOS REIS, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Dominique DOS REIS, Présidente Madame Christine BARBEROT, Conseillère Monsieur Fabrice VERT, Conseiller

qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Monsieur Christophe DECAIX
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
-rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Dominique DOS REIS, Présidente, et par Monsieur Christophe DECAIX, greffier auquel la minute de la décision à été remise par le magistrat signataire.

Suivant acte reçu par la SCP notariale A... le 13 août 2008, M. et Mme Y... ont vendu à Mme Sandra X... une maison d'habitation sis... à Villecerf (77), moyennant le prix principal de 213. 000 €.
S'étant aperçue que la véranda dépendant de cette maison était édifiée sur partie d'une cour commune, Mme Sandra X... a, par acte extra-judiciaire du 1er août 2013, assigné M. et Mme Y... à l'effet de voir prononcer la résolution ou, subsidiairement, l'annulation de la vente, la restitution du prix de vente, outre des dommages-intérêts et une somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 18 février 2015, le tribunal de grande instance de Fontainebleau a :
- débouté Mme Sandra X... de sa demande de résolution de la vente,- débouté Mme Sandra X... de sa demande de nullité de la vente,- débouté M. et Mme Y... de l'intégralité de ses demandes financières, tant en remboursement du prix de vente et des frais y afférents qu'en réparation des préjudices matériel et moral allégués,- condamné Mme Sandra X... à payer à M. et Mme Y... la somme de 1. 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens,- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,- rejeté toute autre demande.

Mme Sandra X... a relevé appel de ce jugement dont elle poursuit l'infirmation, demandant à la Cour, par dernières conclusions signifiées le 17 août 2016, de :
au visa des articles 1382, 1603, 1604, 1610 et 1611 du code civil,
- prononcer la résolution ou, subsidiairement, l'annulation de la vente pour dol,- condamner solidairement M. et Mme Y... à lui rembourser la somme de 213. 000 € correspondant au prix de vente, assortie des intérêts au taux légal à compter du 13 août 2008, outre la somme de 15. 121, 55 € correspondant aux frais et honoraires réglés aux services de l'enregistrement ou au notaire,- condamner M. et Mme Y... solidairement à lui payer la somme de 20. 490, 67 € en réparation de son préjudice matériel et celle de 10. 000 € en réparation de son préjudice moral,- condamner solidairement M. et Mme Y... à lui payer la somme de 6. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en sus des entiers dépens.

M. et Mme Y... prient la Cour, par dernières conclusions signifiées le 10 juillet 2015, de :
au visa des articles 2258, 2261 et 2272 du code civil,
- constater qu'ils ont acquis par usucapion la parcelle de terre située devant le bien immobilier litigieux, délimitée par la clôture et faisant partie de la parcelle cadastrée section AC no 53,
au visa des articles 1603, 1604, 1610 et 1611 du code civil,
- débouter Mme Sandra X... de sa demande de résolution et en nullité de la vente,- la débouter de ses demandes de réparation,- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,- y ajoutant, condamner Mme Sandra X... au paiement de la somme de 3. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens.

SUR CE LA COUR

Mme Sandra X..., au soutien de son appel, fait valoir que le bien qui lui a été délivré n'est pas conforme à son titre, qu'en effet, l'acte de vente ne peut servir de titre de propriété pour la véranda qui est édifiée sur une parcelle n'appartenant pas aux vendeurs, que ceux-ci ne peuvent exciper d'un accord-non établi-des propriétaires de la cour commune pour l'édification de la véranda, ni, en l'absence au litige desdits propriétaires, d'une prescription acquise, laquelle supposerait pour être reconnue l'engagement d'une action judiciaire qui ne peut lui être imposé ;
M. et Mme Y... indiquent avoir exactement délivré le bien objet de la vente, décrit à l'acte de vente comme comportant une véranda-salon, et soutiennent que le trouble invoqué par Mme Sandra X... est purement hypothétique, les riverains copropriétaires de la cour commune ne revendiquant aucun droit sur la véranda construite depuis plus de trente années sur une partie de la cour, donc incorporée par prescription acquisitive dans le bien vendu ;
Suivant l'article 1604 du code civil, la délivrance est le transport de la chose vendue en la puissance et la possession de l'acheteur et la non-conformité de la chose vendue aux spécifications contractuelles constitue un manquement du vendeur à son obligation ; cette non-conformité peut consister en une discordance physique ou juridique entre la chose délivrée et celle décrite aux actes de propriété, une telle discordance mettant obstacle à toute publication au fichier hypothécaire d'un titre conforme à la chose et donc affectant la possibilité d'en disposer ;
Aux termes de l'acte de vente du 13 août 2008, M. et Mme Y... ont vendu à Mme Sandra X... :
« une maison d'habitation dans une cour commune ouvrant sur la Grande Rue, ..., élevée sur cave et comprenant :- au rez-de-chaussée, entrée sur véranda-salon, cuisine, salle de bains, WC, une chambre,- à l'étage, trois chambres et un dressing, le tout devant la cour commune, au fond Bonn ou repérsentants.... »

ainsi qu'un terrain de 3 a 83 ca donnant également droit à la cour commune ;
La véranda dépendant de la maison se trouvant située sur une courette attenante, entourée d'une clôture, Mme Sandra X... qui souhaitait refaire cette clôture, s'est heurtée à un arrêté municipal de refus car la véranda et la clôture étaient situées sur l'emprise de la cour commune ; le notaire rédacteur de la vente, M. A..., vérifiait alors que ni la véranda ni la cour ne faisaient partie de l'assiette de la maison et du terrain objet de la vente ; il apparaissait par la suite que les vendeurs avaient, lors du dépôt de la déclaration de travaux à la mairie de Villecerf pour l'édification de la véranda, fait état de l'accord « unanime » des autres propriétaires de la cour commune, ce qui était inexact dans la mesure où l'un de ces propriétaires, Mme B..., avait refusé de donner son accord à cette construction ;
Il se déduit de ces circonstances que M. et Mme Y... ont manqué à leur obligation de délivrance en transférant en la possession de Mme Sandra X... une propriété pour partie (la véranda-salon) édifiée sur un terrain ne leur appartenant pas, en discordance avec la description de ce bien à l'acte de vente et ses références cadastrales, ce qu'ils ne contestent pas, prétendant qu'ils ont usucapé par prescription trentenaire cette adjonction à leur maison et que Mme Sandra X... n'est en rien troublée dans sa possession ;
Or, d'une part, ces objections sont dénuées de pertinence en l'absence de reconnaissance judiciaire d'une usucapion acquise par prescription trentenaire opposable aux autres propriétaires de la cour commune, qui ne sont pas dans la cause, d'autre part, les vendeurs ne sauraient imposer à leur acquéreur de soutenir une procédure judiciaire longue, complexe, onéreuse et aléatoire afin d'obtenir un titre de propriété juridiquement conforme à la configuration physique du bien délivré, enfin et en tout état de cause, la prescription qu'ils allèguent comme incontestable et incontestée ne saurait porter sur un bien laissé en dehors des ventes successives ;
La gravité des manquements des vendeurs à leur obligation de délivrance d'un bien conforme à l'accord des parties justifie la résolution de la vente, le jugement entrepris étant infirmé en toutes ses dispositions ; en conséquence de cette résolution, M. et Mme Y... devront restituer à Mme Sandra X... le prix d'acquisition, soit la somme de 213. 000 €, assorti des intérêts au taux légal à compter de l'assignation valant mise en demeure, et les frais notariés, à l'exception des frais d'enregistrement qu'il leur appartient de réclamer à l'administration fiscale ensuite de la résolution de la vente ;
Le présent arrêt devra être publié au service de la publicité foncière compétent ;
Invoquant les travaux quelle a réalisés ou fait réaliser sur le bien litigieux ainsi que le règlement des taxes foncières Mme Sandra X... sollicite la condamnation de M. et Mme Y... au paiement de la somme de 20. 490, 67 € à titre de dommages-intérêts : toutefois, en l'absence de factures correspondant auxdits travaux, les dommages-intérêts qui lui seront accordés en réparation de son préjudice matériel seront chiffrés à la somme de 10. 000 € au vu des justificatifs produits (devis et photographies) ;
En réparation du préjudice moral indéniable qu'elle a subi du fait des tracas et contrariétés, démarches et pertes de temps consécutifs au litige, il lui sera octroyé une somme de 6. 000 € de dommages-intérêts ;
En équité, M. et Mme Y... seront condamnés à payer à Mme Sandra X... une somme de 5. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
Infirme le jugement,
Statuant à nouveau,
Prononce la résolution de la vente consentie par M. Laurent Georges Y... et Mme Corinne Annie Ghislaine Z... épouse Y... à Mme Sandra X... et portant sur une maison d'habitation sise à Villecerf 77250 rue Grande, cadastrée section AC no 61 pour 75 c, section AC no 60 pour 17 ca et no 53 pour 3 ares en ce qui concerne la cour commune et un terrain sis à Villecerf cadastré section AC no 58 pour 3 ares 83 centiares et section AC no 60 pour 17 ares et section AC no 53 pour 3 ares 70 centiares en ce qui concerne la cour commune, suivant acte reçu par M. A..., notaire associé à Moret-sur-Loing, le 13 août 2008, et publié à la Conservation des Hypothèques de Fontainebleau le 19 août 2008, volume 2008, P no 4333,
Dit que M. et Mme Y... devront restituer à Mme Sandra X... le prix d'acquisition, soit la somme de 213. 000 €, assorti des intérêts au taux légal à compter de l'assignation valant mise en demeure, ainsi que les frais notariés,
Déboute Mme Sandra X... de sa demande de remboursement des droits d'enregistrement,
Ordonne la publication du présent arrêt au service de la publicité foncière compétent,
Condamne M. et Mme Y... à verser à Mme Sandra X... les sommes de :
-10. 000 € en réparation de son préjudice matériel,-6. 000 € en réparation de son préjudice moral,-5. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre demande,
Condamne M. et Mme Y... in solidum aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 15/04027
Date de la décision : 21/10/2016
Sens de l'arrêt : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2016-10-21;15.04027 ?
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