Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4- Chambre 1
ARRÊT DU 21 OCTOBRE 2016
(no, 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/ 22752
Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Juin 2014- Tribunal de Grande Instance de BOBIGNY-RG no 12/ 12292
APPELANTS
Monsieur Marcel X... né le 28 Février 1970 à PARIS (75012)
demeurant ...-93360 FRANCE
Représenté et assisté sur l'audience par Me Jonathan TOBOLSKI, avocat au barreau de PARIS, toque : C2049
Monsieur Raphael Y... né le 28 février 1979 à PARIS (75012)
demeurant ...-75020 FRANCE
Représenté et assisté sur l'audience par Me Jonathan TOBOLSKI, avocat au barreau de PARIS, toque : C2049
INTIMÉE
SCI DES VIGNES prise en la personne de ses représentants légaux, NoSiret : 449 496 777
ayant son siège au 33 rue Capdeville-33650 FRANCE
Représentée et assistée sur l'audience par Me Isabelle DAHAN de l'AARPI DAHAN G. et I. AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : G0781
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Septembre 2016, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Christine BARBEROT, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Dominique DOS REIS, Présidente
Madame Christine BARBEROT, Conseillère
Monsieur Fabrice VERT, Conseiller
qui en ont délibéré
Greffier lors des débats : Monsieur Christophe DECAIX
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
-rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Dominique DOS REIS, Présidente, et par Monsieur Christophe DECAIX, greffier auquel la minute de la décision à été remise par le magistrat signataire.
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Par acte authentique du 27 juillet 2011, la SCI Des Vignes a promis de vendre jusqu'au 31 octobre 2011, à M. Marcel X...et M. Raphaël Y..., qui s'étaient réservé la faculté d'acquérir, un local industriel composé de deux bâtiments sis 65 chemin Des Vignes à Bobigny (93), au prix de 1 600 000 €, sous la condition suspensive de l'obtention par les bénéficiaires d'un ou plusieurs prêts, d'un montant de 1 700 400 €, au taux maximum de 5, 20 % l'an. Les bénéficiaires ont versé la somme de 48 000 € entre les mains du notaire, séquestre. La vente n'a pas été réalisée. Par acte du 25 octobre 2012, la SCI Des Vignes a assigné les consorts X...-Y...en paiement de la somme de 160 000 € au titre de l'indemnité d'immobilisation prévue au contrat.
C'est dans ces conditions que, par jugement du 12 juin 2014, le Tribunal de grande instance de Bobigny a :
- condamné solidairement les consorts X...-Y...à verser la somme de 112 000 € à la SCI Des Vignes au titre du solde de l'indemnité d'immobilisation,
- dit que la somme de 48 000 € versée lors de la signature du " compromis " de vente resterait acquise à la SCI Des Vignes en paiement de l'indemnité d'immobilisation,
- dit que le notaire devrait remettre la somme séquestrée à la SCI Des Vignes sur notification du jugement,
- rejeté toute autre demande,
- débouté les consorts X...-Y...de leurs demandes,
- condamné les consorts X...-Y...à verser à la SCI Des Vignes la somme de 2 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile,
- prononcé l'exécution provisoire,
- condamné les consorts X...-Y...aux dépens.
Par dernières conclusions du 5 octobre 2015, les consorts X...-Y..., appelants, demandent à la Cour de :
- vu les articles 1134, alinéa 3, du Code civil, 909 du Code de procédure civile,
- infirmer le jugement entrepris et statuant à nouveau :
- prononcer la caducité de la promesse unilatérale de vente du 27 juillet 2011,
- ordonner la mainlevée à leur profit de la somme de 48 500 € séquestrée entre les mains du notaire,
- condamner au besoin la SCI Des Vignes à leur verser cette somme de 48 500 €,
- condamner la SCI Des Vignes à leur verser la somme de 10 000 € chacun en réparation de leur préjudice moral,
- condamner la SCI Des Vignes à leur payer la somme de 10 000 € chacun au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.
Par dernières conclusions du 31 mars 2015, la SCI Des Vignes prie la Cour de :
- vu l'article 1134 du Code civil,
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- débouter les consorts X...-Y...de toute leurs demandes,
- condamner solidairement les consorts X...-Y...à lui verser la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.
SUR CE
LA COUR
Considérant, sur l'irrecevabilité des conclusions de l'intimée soulevée devant la Cour par les consorts X...-Y...sur le fondement de l'article 909 du Code de procédure civile, que, selon l'article 914 du Code de procédure civile, après le dessaisissement du conseiller de la mise en état, les parties ne sont plus recevables à invoquer l'irrecevabilité des conclusions en application de l'article 909, à moins que la cause ne survienne ou ne se soit révélée postérieurement ;
Que l'instance ayant été clôturée du 8 octobre 2015, les consorts X...-Y...ne sont pas recevables à invoquer l'irrecevabilité des conclusions de l'intimée du 19 novembre 2014 au motif qu'elles n'auraient pas été déposées dans le délai prévu par l'article 909 du Code de procédure civile ;
Considérant que la condition suspensive relative à l'obtention d'un ou plusieurs prêts par le bénéficiaire, incluse dans la promesse unilatérale de vente du 27 juillet 2011, obligeait le bénéficiaire à " déposer le ou les dossiers de demande de prêts dans le délai de quinze jours calendaires à compter de la signature des présentes, et à en justifier à premier demande du promettant par tout moyen de preuve écrite " ;
Que le contrat ne pouvant imposer au bénéficiaire des obligations contractuelles de nature à accroître les exigences légales, la SCI Des Vignes (la promettante) ne peut prétendre que les consorts X...-Y...(les bénéficiaires) auraient fait défaillir la condition en ne justifiant pas auprès d'elle du dépôt des demandes de prêts dans les délais et formes précitées ;
Considérant que la promesse unilatérale de vente prévoyait encore que cette " condition suspensive sera réalisée en cas d'obtention d'un ou plusieurs accords définitifs de prêts au plus tard le 10 octobre 2011 " et que " pour pouvoir bénéficier de la protection de la présente condition suspensive, le bénéficiaire devra :- justifier du dépôt de ses demandes de prêts après d'au moins deux banques ou établissements financiers différents et du respect de ses obligations aux termes de la présente condition suspensive,- et de se prévaloir, au plus tard à la date ci-dessus, par télécopie ou courrier électronique confirmés par courrier recommandé avec avis de réception adressé au promettant à son domicile élu, de la non-obtention d'un ou plusieurs prêts ou de refus de prêts devant émaner d'au moins deux banques ou établissements financiers. Il est rappelé qu'à défaut par le bénéficiaire de se prévaloir de la non-réalisation de la présente condition suspensive, il sera réputé y avoir renoncé " ;
Que, par lettre recommandée avec avis de réception du 14 décembre 2011 adressée à Mme Floriane C..., notaire de la promettante ayant rédigé la promesse, M. X... a indiqué : " notre demande de financement a été refusée par diverses banques que nous avons sollicitées et dont vous avez les coordonnées, aussi nous vous demandons de bien vouloir faire le nécessaire auprès des cédants, vos clients afin que ceux-ci puissent reprendre leur liberté. En effet compte tenu du contexte actuel et des éléments fournis aux différentes banques, celles-ci refusent de nous suivre, Nous vous prions de bien vouloir procéder au remboursement des 48 500 euros déposé dans votre étude lors de la signature, ce par tout moyen à votre convenance " ;
Que, par cette lettre, expédiée par M. X... pour le compte des bénéficiaires de la promesse, ces derniers se sont prévalus de la non-réalisation de la condition suspensive en raison de la non-obtention du prêt ; que le 28 novembre 2011, répondant à la demande de l'expert-comptable des bénéficiaires qui négociait le financement et qui avait indiqué ce même jour au notaire que le comité de la BNP se réunissait le soir même de sorte qu'il n'aurait la réponse définitive que le lendemain, Mme C...a indiqué dans un message électronique ayant pour objet : " prorogation de promesse ", " J'ai bien eu votre message et vous confirme l'accord des vendeurs pour une prorogation de promesse de vente jusqu'au 31 décembre 2011 " ; qu'ainsi, les bénéficiaires, qui se sont prévalus de la non-réalisation de la condition suspensive avant le 30 décembre 2011, date d'expiration de la promesse, ne sont pas réputés y avoir renoncé ;
Considérant que, dans la promesse unilatérale de vente du 27 juillet 2011, les parties ayant stipulé que la réalisation de la vente pourrait avoir lieu " au profit de toute autre personne physique ou morale ou de tout crédit bailleur " que le bénéficiaire substituerait dans ses droits, la promettante ne peut prétendre que ne seraient pas conformes au contrat les demandes faites par la société Pamara, substituée dans les droits des bénéficiaires, d'un financement sous la forme d'un crédit-bail ;
Considérant que la condition suspensive d'obtention des prêts prévoyait que les bénéficiaires devaient justifier du dépôt des demandes de prêt " auprès d'au moins deux banques ou établissements financiers différents " et que " leur montant total soit d'un minimum de un million sept cent mille quatre cents euros (1 700 400, 00 EUR) ; que le taux d'intérêts, assurance comprise, soit de 5, 20 % maximum " ;
Que, par lettre du 7 octobre 2011, la BNP Paribas, groupe Saint-Denis, a confirmé à la SCI Pamara avoir reçu le 3 août 2011 de M. Marcel X... une demande de prêt d'un montant de 1 710 000 € sur 144 mois pour le financement d'un bien immobilier situé 69 chemin des Vignes à Bobigny ; que, par lettre du 22 juin 2012, adressée à " SCI Pamara Mr X... Marcel ", la BNP Paribas, succursale de Saint-Denis, a refusé le prêt sollicité de 1 710 000 € sur 12 ans pour l'acquisition d'un bien immobilier situé 65 chemin des Vignes à Bobigny ; que, par lettre du 14 novembre 2014 adressée à " SCI Pamara Mr X... Marcel ", la BNP Paribas, succursale de Saint-Denis, a précisé " Suite à votre demande de financement déposée le 3 août 2011 dans le cadre du financement des locaux commerciaux, sis 65 chemin des vignes à Bobigny (93000) par un crédit-bail immobilier pour un montant de 1 710 000 € sur 12 ans au taux proposé de 4, 60 %, nous vous confirmons que ce dossier a été refusé le 5 décembre 2011 " ;
Que ces courriers émanant d'une banque, et notamment, la dernière lettre du 14 novembre 2014 qui engage la responsabilité de la BNP Paribas et dont la SCI Des Vignes n'établit pas qu'il s'agirait d'une attestation de complaisance, prouvent que les bénéficiaires ou leur substitué, ont sollicité pendant la durée de la promesse un financement pour un montant et un taux conformes à cette convention, qui n'imposait aucune durée au prêt, et que cette demande a été refusée ;
Que, par lettre du 7 octobre 2011 adressée à " Airolia Monsieur Marcel X... ", la société Norbail-immobilier, appartenant au groupe Crédit du Nord, a transmis son offre de financement, concernant le dossier en crédit-bail immobilier de la SCI Pamara d'un montant de 1 600 000 € sur 10, 12 ou 15 ans, pour l'achat d'un ensemble immobilier à Bobigny 69 chemin des Vignes, offre qui ne portait que sur la moitié du montant réclamé, soit 800 000 €, l'échéancier annexé à l'offre mentionnant un taux de 2, 71 € pour 1 600 000 € sur 12 ans ; que, toutefois, cette lettre ne permet pas d'établir le taux d'intérêt sollicité par les bénéficiaires ;
Que, par lettre du 13 octobre 2011 adressée à la SCI Pamara, la Société générale, agence de Boulogne-Billancourt, a refusé le crédit qui avait été sollicité le 1er août 2011 ; que, par lettre du 9 juillet 2015, la même banque a précisé au même destinataire qu'à la suite de sa demande de crédit du 1er août 2011, " le prêt de 1 600 000 € (un million six cent mille euros) au taux de 4, 50 % ne pourra trouver une suite favorable " ; que cette dernière lettre, qui engage la responsabilité de la Société générale et dont la SCI Des Vignes n'établit pas qu'il s'agirait d'une attestation de complaisance, prouve que les bénéficiaires ou leur substitué, ont sollicité pendant la durée de la promesse un prêt à un taux d'intérêts inférieur au taux maximum de 5, 20 % prévu à cette convention, qui n'imposait aucune durée au prêt ; que, si le montant du prêt est inférieur à celui " minimum " de 1 700 400 € prévu par la promesse, cependant, en réclamant un prêt d'un montant inférieur à celui mentionné dans la promesse, les bénéficiaires n'ont pas aggravé la condition, de sorte qu'ils ne l'ont pas fait défaillir ;
Considérant qu'il se déduit de l'ensemble de ces éléments que les bénéficiaires ont justifié du dépôt de demandes de financement auprès d'au moins deux banques ou établissements financiers différents et que ces demandes ont été refusées, sans que la défaillance de la condition soit imputable aux bénéficiaires ;
Considérant qu'en conséquence, l'indemnité d'immobilisation n'est pas due par les bénéficiaires et la somme de 48 500 €, qu'ils justifient avoir versée, doit leur être restituée, le jugement entrepris étant infirmé en toutes ses dispositions ;
Considérant que la procédure engagée par la SCI Des Vignes n'étant ni abusive ni " insensée ", la demande de dommages-intérêts des appelants doit être rejetée ;
Considérant que la solution donnée au litige emporte le rejet de la demande sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile de la SCI Des Vignes ;
Considérant que l'équité commande qu'il soit fait droit à la demande des consorts X...-Y..., sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, comme il est dit dans le dispositif du présent arrêt.
PAR CES MOTIFS
Rejette l'irrecevabilité soulevée par les consorts X...-Y...des conclusions de la SCI Des Vignes ;
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau :
Déboute la SCI Des Vignes de toutes ses demandes ;
Condamne la SCI Des Vignes à restituer à M. Marcel X... et M. Raphaël Y... la somme de 48 500 € ;
Déboute M. Marcel X... et M. Raphaël Y... de leur demande de dommages-intérêts ;
Rejette les autres demandes ;
Condamne la SCI De Vignes aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile ;
Condamne la SCI Des Vignes à payer à M. Marcel X... et M. Raphaël Y... la somme globale de 6 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Le Greffier, La Présidente,