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16/11/2016 | FRANCE | N°15/06285

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 16 novembre 2016, 15/06285


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRÊT DU 16 Novembre 2016

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/06285 MLG



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Mars 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MELUN RG n° 14/00175





APPELANT

Monsieur [C] [J]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 2] (ALGERIE)

co

mparant en personne, assisté de Me Carole YTURBIDE, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : PB 131





INTIMEE

RESIDENCE DE RETRAITE [Établissement 1]

[Adresse 2]

[Adresse 3]
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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRÊT DU 16 Novembre 2016

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 15/06285 MLG

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 11 Mars 2015 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MELUN RG n° 14/00175

APPELANT

Monsieur [C] [J]

[Adresse 1]

[Localité 1]

né le [Date naissance 1] 1971 à [Localité 2] (ALGERIE)

comparant en personne, assisté de Me Carole YTURBIDE, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : PB 131

INTIMEE

RESIDENCE DE RETRAITE [Établissement 1]

[Adresse 2]

[Adresse 3]

N° SIRET : [Établissement 1]

représentée par Me Alexandra ABRAT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0223

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 Octobre 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Marie-Luce GRANDEMANGE, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Luce GRANDEMANGE, Présidente

Madame Céline HILDENBRANDT, Vice-présidente placée

Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, Conseillère

Greffier : Mme Eva TACNET, greffier lors des débats

ARRET :

- contradictoire

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Luce GRANDEMANGE, présidente et par Madame Eva TACNET, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

M. [C] [J] a été embauché par la résidence de retraite [Établissement 1], gérée par la Fédération des Sociétés Juives de France (FSJF), par contrat à durée déterminée en date du 03 octobre 2011, transformé en contrat à durée indéterminée par avenant le 20 octobre 2011, en qualité d'infirmier. Il était promu infirmier responsable le 01 décembre 2011.

M. [J] a été victime d'un accident de trajet le 9 janvier 2012 et placé en arrêt maladie pour accident de travail jusqu'au 24 janvier 2012.

Après une reprise le 25 janvier 2012, il était de nouveau placé en arrêt maladie en raison d'une rechute à compter du 10 avril 2012 prolongé jusqu'au 03 septembre 2012, puis du 30 novembre 2012 au 21 mai 2013.

Par lettre en date du 13 mai 2013 la résidence [Établissement 1] l'autorisait à prendre 13 jours de récupération du 22 mai au 7 juin 2013.

Suite à l'avis émis par le médecin du travail le 03 juin 2013,et conformément à un avenant en date du 07 juin 2013 M. [J] a repris son poste en mi temps thérapeutique jusqu'au 03 septembre 2013.

Le 14 septembre 2013 Monsieur [J] était de nouveau placé en arrêt maladie prolongé jusqu'au 6 janvier 2014 inclus.

Par lettre remise en main propre le 20 janvier 2014 Monsieur [J] était convoqué à un entretien préalable à son éventuel licenciement le 30 janvier 2014 avec mise à pied à titre conservatoire.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 7 février 2014 la résidence [Établissement 1] (Fédération des sociétés juives de France) notifiait à Monsieur [J] son licenciement pour faute grave.

Le 24 février 2014, Monsieur [J] a saisi le Conseil des Prud'hommes de Melun en contestation de son licenciement, en paiement d'un rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire, des indemnités de rupture, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour interruption de sa formation professionnelle.

Par décision en date du 11 mars 2015, le Conseil des Prud'hommes a dit le licenciement pour faute grave de Monsieur [J] bien-fondé, l'a débouté de l'ensemble de ses demandes et condamné à payer à la résidence de retraite [Établissement 1] une indemnité de 750 € sur le fondement de l'article code de procédure civile.

Le 23 juin 2015, Monsieur [J] a interjeté appel de cette décision.

Par conclusions déposées le 3 octobre 2016, développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, Monsieur [J] conclut à la réformation du jugement entrepris.

Il demande à la cour de dire son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et forme dés lors les demandes en paiement des sommes suivantes à l'encontre de la maison de retraite résidence [Établissement 1] :

- 42'800 € à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 6779,28 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 677,92 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés sur préavis,

- 3954,58 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 1165,94 euros à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire,

- 4961,08 €à titre de rappel de salaire correspondant ou prime de septembre à février 2014,

- 2000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il sollicite la remise de bulletins de paie, de l'attestation destinée à pôle emploi et d'un certificat de travail rectifiés sous astreinte de 150 € par jour de retard et par document à compter de la décision à intervenir.

Par conclusions déposées le 3 octobre 2016 développées oralement et auxquelles il est expressément fait référence, la résidence de retraite [Établissement 1], fédération des sociétés juives de France, demande la confirmation du jugement entrepris et la condamnation de Monsieur [J] à lui payer la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIVATION

Sur le paiement d'un rappel de primes pour les mois d'octobre 2013 à janvier 2014

Pour la période d'octobre 2013 au 06 janvier 2014 inclus, M. [J] en arrêt maladie suite à un accident de travail a bien été indemnisé sur la base d'un salaire brut incluant les primes dont il sollicite le paiement. Toutefois il lui restait dû au titre du complément patronal la somme brute de 435,11 € bruts (343,26 € nets) qui lui a été payée par chèque en date du 21 janvier 2016,ainsi qu'en atteste les pièces produites et l'expert comptable de la résidence [Établissement 1].

M. [J] en absence injustifiée entre le 07 et le 19 janvier 2014 ne peut prétendre au paiement d'aucune rémunération pour cette période.

Entre le 20 janvier 2014 et le 08 février 2014 M. [J] était en arrêt maladie ordinaire, il ne pouvait prétendre pour cette période à l'application des règles relatives au complément patronal en cas d'arrêt consécutif à une maladie professionnelle ou un accident du travail.

Il doit être débouté de cette demande.

Sur la rupture du contrat de travail

La charge de la preuve de la gravité de la faute privative des indemnités de préavis et de licenciement incombe à l'employeur étant rappelé que la faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations découlant du contrat de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis sans risque de compromettre les intérêts légitimes de l'employeur.

Il appartient au juge de qualifier le degré de gravité de la faute. Si la faute retenue n'est pas de nature à rendre impossible le maintien du salarié pendant la durée du préavis, il appartient au juge dire si le licenciement disciplinaire repose néanmoins sur une cause réelle et sérieuse.

En l'espèce la lettre de licenciement est motivée comme suit :

' Cette décision est motivée par le comportement gravement fautif que vous avez adopté depuis plusieurs semaines au cours desquelles vous avez manifesté une défiance croissante de plus en plus affichée que vous manifestez envers votre employeur. Ainsi, vous avez systématiquement critiqué la gestion de notre résidence, oralement mais également par écrit, allant jusqu'à proférer des menaces. Parallèlement, vous avez entretenu des relations conflictuelles avec les autres salariés. À ce titre, plusieurs salariées se sont plaintes de votre agressivité. Par ailleurs, votre comportement vis-à-vis du médecin coordonnateur est peu compatible avec vos fonctions. En effet, vous n'avez de cesse de remettre en cause ses décisions et de le critiquer ouvertement. Enfin, votre désinvolture vis-à-vis de votre hiérarchie est inacceptable. Nos différents rappels à l'ordre sont malheureusement restés sans effet. À ce titre, vous avez cru pouvoir prendre des congés à partir du 7 janvier 2014, alors que vous deviez reprendre votre poste à issue de votre arrêt maladie. Vous avez pris sans autorisation des congés alors que vous connaissiez parfaitement la procédure à suivre qui vous impose de remplir une demande de congés qui doit être expressément validée par la direction. C'est d'ailleurs une procédure que vous appliquez à vos équipes. Vous savez parfaitement que seule la direction peut autoriser des congés. Au surplus, vous saviez parfaitement que la directrice n'était pas encore en poste vous avez manifestement profité de ces quelques jours de transition pour imposer votre décision de partir en congés.

Cette absence injustifiée, ajoutée à votre comportement de dénigrement et d'hostilité à l'égard de notre établissement et de notre personnel caractérise une faute grave.'

M. [J] prétend avoir pris ses congés du 07 au 14 janvier 2014 avec l'accord de sa direction après avoir adressé dès le lundi 06 janvier 2014 le récapitulatif de ses jours de récupération du 07 au 20 janvier 2014. Il soutient que son absence était justifiée, ce que réfute l'employeur qui maintient n'avoir jamais reçu de demande écrite de la part de M. [J] de prendre des congés et qu'aucune autorisation ne lui a été accordée.

Le règlement intérieur de l'entreprise prévoit en son article 5 que toute absence prévisible doit faire l'objet d'une autorisation préalable délivrée par la direction ou le chef hiérarchique immédiat.

Au regard des pièces produites de part et d'autre, notamment des attestations de Mme [L], responsable logistique de l'entreprise, et de Mme [Q], chargée de l'enregistrement du courrier, il apparaît que le 27 décembre 2014 l'employeur a reçu le certificat médical de reprise de M. [J] pour le 07 janvier 2014.

Le lundi 06 janvier 2014 M. [J] a téléphoné à Mme [L], l'a informée du refus du médecin conseil de la sécurité sociale de le placer sous le régime du mi-temps thérapeutique alors qu'il ne souhaitait pas reprendre un poste à temps plein. À sa demande Mme [L] lui a envoyé par voie postale, ce 06 janvier 2014, un récapitulatif du nombre de ses jours de récupération encore à prendre et l'imprimé type de demande de congés d'usage dans l'entreprise.

Or, contrairement à ce qu'il affirme, M. [J] n'a pas renvoyé cette demande de congés pour la période du 07 au 20 janvier 2014. Il ne saurait arguer de sa bonne foi alors qu'il n'a jamais formalisé sa demande ni, a fortiori, obtenu l'autorisation préalable de l'employeur de s'absenter entre le 07 janvier et le 19 janvier 2014 inclus.

Son absence injustifiée est établie, tout comme la production d'une copie du cahier des transmissions démontre que son retour était bien attendu dans le service le 07 janvier 2014.

S'agissant du comportement conflictuel et agressif du salarié avec le médecin coordinateur et les autres membres du personnel M. [J] fait valoir que ces faits, qu'il conteste, son prescrits.

Ces faits ont été commis pendant la période de présence de M. [J] dans l'entreprise entre juin et mi-septembre 2013, avant son dernier arrêt maladie. Il est exact qu'ils ont été commis plus de deux mois avant l'introduction de la procédure de licenciement.

Plus précisément M. [J] a adressé au médecin coordinateur au début du mois d'août 2013 un courriel, au ton agressif, mettant en cause son implication dans le travail et son efficacité. Le médecin en a informé la direction dès le 07 août 2013. Le 13 septembre 2013 M. [J] lui renvoyait un courriel se terminant en ces termes 'si vous remplissiez pleinement votre fonction de médecin coordinateur au sein de l'établissement...'.

Puis par lettre recommandée avec accusé de réception, adressée à la direction, datée du 05 octobre 2013 M. [J] se plaignait de dysfonctionnements, d'un manque de personnel de harcèlement moral de la part de la directrice et du médecin coordinateur, il reconnaissait avoir adressé une lettre de dénonciation de son employeur auprès de l'ARS et menaçait la résidence de nouvelles dénonciations auprès des médias.

Par lettre recommandée datée du 09 octobre 2013 la résidence [Établissement 1] (FSJF) lui adressait une lettre de 'recadrage' constitutive d'un avertissement lui reprochant ses propos grossiers, agressifs et inexacts, ses messages déplacés adressés au médecin coordinateur en août et septembre 2013, ses menaces, lui expliquant que ces propos l'exposaient à des poursuites judiciaires et l'invitant 'fermement à plus de modération'.

Au vu de ces éléments il apparaît que la matérialité de ces faits est établie et qu'ils ont déjà faits l'objet d'une sanction.

Dès lors, s'ils ne peuvent fonder une nouvelle sanction, ces antécédents disciplinaires peuvent être pris en compte pour apprécier le degré de gravité de la faute commise par le salarié.

Au vu de l'ensemble de ces éléments il apparaît que le comportement de M. [J] rendait impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant l'exécution de son préavis.

En conséquence il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a dit le licenciement de Monsieur [J] fondé sur une faute grave et l'a débouté de toutes ses demandes subséquentes.

Sur les autres demandes

M. [J] qui succombe conservera la charge de ses frais irrépétibles et sera condamné aux dépens de la procédure.

L'équité et les circonstances de la cause commandent de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la Fédération des Sociétés Juives de France, résidence de retraite [Établissement 1], qui se verra allouer la somme de 1000 € à ce titre.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE M. [J] à verser à la Fédération des Sociétés Juives de France, résidence de retraite [Établissement 1] la somme de 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [J] aux dépens de la procédure.

LA GREFFIERE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 15/06285
Date de la décision : 16/11/2016

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°15/06285 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-11-16;15.06285 ?
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