RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 24 Novembre 2016
(n° , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 13/09326
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 Juillet 2013 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 12-05268
APPELANTE
Société ARKOS INTERIM
[Adresse 1]
[Adresse 2]
représentée par Me Denis ROUANET, avocat au barreau de LYON, toque : 1485 substitué par Me Thomas CRETIER, avocat au barreau de LYON, toque : 2224
INTIMEE
CPAM 93 - SEINE SAINT DENIS (BOBIGNY)
[Adresse 3]
[Adresse 4]
[Adresse 5]
Représentée par Mme [J] [M], en vertu d'un pouvoir spécial.
Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale
[Adresse 6]
[Adresse 7]
avisé - non comparant
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 28 Septembre 2016, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Claire CHAUX, Présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Claire CHAUX, Présidente de chambre
Madame Marie-Odile FABRE DEVILLERS, Conseiller
Madame Chantal IHUELLOU LEVASSORT, conseiller
Greffier : Mme Anne-Charlotte COS, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
- signé par Mme Claire CHAUX, présidente et par Mme Anne-Charlotte COS, greffier présent lors du prononcé à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par la société ARKOS INTERIM à l'encontre d'un jugement rendu le 2 juillet 2013 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris dans un litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint Denis .
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTION DES PARTIES:
Monsieur [G] [E], employé par la société ARKOS INTERIM en qualité d'intérimaire en menuiserie, a déclaré avoir été victime d'un accident du travail le 21 juin 2010. La déclaration d'accident du travail datée du lendemain indique 'qu'en faisant la manutention d'un panneau de bois, celui-ci est tombé sur son épaule gauche '.
Le 24 juin 2010, la société ARKOS INTERIM a envoyé un courrier d'observations à la Caisse primaire d'assurance maladie de la Seine Saint Denis (la caisse). Ce courrier indiquait dans son objet 'courrier de réserve '.
Le 16 juillet 2010, la caisse la caisse a notifié à la société ARKOS INTERIM sa décision de prendre en charge d'emblée l'accident au titre de la législation sur les risques professionnels.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 6 janvier 2012, la société ARKOS INTERIM a saisi la commission de recours amiable de la caisse afin que la décision de prise en charge de l'accident lui soit déclarée inopposable. Faute de décision de ladite commission dans le délai d'un mois, elle a saisi le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris d'un recours contentieux.
Par jugement en date du 2 juillet 2013, le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris a déclaré opposable à la société ARKOS INTERIM la décision de prise en charge du 16 juillet 2010 de la caisse.
Par déclaration au greffe du 30 septembre 2013, la société ARKOS INTERIM a régulièrement interjeté appel du jugement rendu le 2 juillet 2013.
La société ARKOS INTERIM a développé, par l'intermédiaire de son conseil, les conclusions visées et déposées au greffe social le 28 septembre 2016 tendant à l'infirmation du jugement entrepris.
Elle soutient avoir formulé des réserves parfaitement motivées dans la mesure où elles mentionnaient, d'une part, la possibilité que l'accident soit survenu en dehors du temps et du lieu de travail et, d'autre part, l'absence de témoin. Elle ajoute que ces réserves mettaient également l'accent sur le fait que la description de l'accident était particulièrement confuse et ne résultait que des seules déclarations de l'assuré, ce qui n'était pas sans remettre en cause la survenance du sinistre allégué aux lieu et temps de travail. La société ARKOS INTERIM en conclut que la seule formulation de ces réserves imposait à la caisse de procéder à une enquête conformément aux dispositions de l'article R. 441-11 du Code de la sécurité sociale et lui interdisait de prendre en charge d'emblée l'accident survenu à Monsieur [E] au titre de la législation professionnelle. Elle demande donc que la décision de prise en charge lui soit déclarée inopposable.
La caisse a développé, par l'intermédiaire de son conseil, les conclusions visées et déposées au greffe social le 28 septembre 2016 tendant à la confirmation du jugement entrepris.
La caisse fait observer que les termes employés par la société ARKOS INTERIM dans son courrier d'observations sont particulièrement laconiques et généraux. Elle ajoute qu'il s'agit d'une lettre stéréotypée utilisable dans tous les dossiers d'accident de travail déclaré par les salariés de l'employeur, entreprise de travail temporaire. Elle sollicite donc la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a jugé que la caisse n'était pas tenue de diligenter une enquête ou d'envoyer des questionnaires à l'employeur et à la victime et qu'il a déclaré opposable à la société ARKOS INTERIM la décision de prise en charge du 16 juillet 2010.
Il est fait référence aux écritures ainsi déposées pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions ;
SUR QUOI, LA COUR:
Considérant les dispositions de l'article R. 441-11 III du code de la sécurité sociale selon lesquelles en cas de réserves motivées de la part de 1'employeur, la caisse doit envoyer à l'employeur et à la victime un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou procéder à une enquête avant de se prononcer sur le caractère professionnel de l'accident ;
Que préalablement à cette décision, la caisse doit également aviser l'employeur des éléments recueillis susceptibles de lui faire grief ainsi que de la fin de la procédure d`instruction, de la possibilité de consulter le dossier et de la date a laquelle elle entend prendre sa décision ;
Qu'il se déduit a contrario de ces dispositions, qu'en l`absence de réserves motivées de l'employeur, la caisse peut se prononcer d'emblée sur le caractère professionnel de 1`accident et n'est alors tenue d'aucune obligation d'information à l'égard de l`employeur;
Que les réserves s'entendent de la contestation du caractère professionnel de l'accident et ne peuvent porter que sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci.
Considérant qu`en l'espèce, la société ARKOS INTERIM a adressé un courrier d'observations à la caisse dans lequel elle indiquait émettre 'des réserves sur le caractères professionnel de l'accident cite en référence pour les motifs suivants :
- Absence de fait soudain.
- La description des circonstances de l'accident est confuse;
- La description des circonstances de l'accident ne résulte que de la déclaration de la victime.
- Absence de témoin.
- De plus, l'entreprise utilisatrice ne nous a pas adressé d'informations préalables à la déclaration d'accident du travail';
Qu'il convient toutefois de constater que cette lettre ne peut pas être considérée comme l'expression de réserves motivées;
Qu'en effet, les trois premiers motifs invoqués ne sont pas applicables au cas d'espèce:
- La chute d'un panneau de bois constitue bien un fait soudain.
- La déclaration d'accident du travail indique que l'accident s'est produit dans les circonstances suivantes: 'en faisant la manutention d'un panneau de bois, celui-ci est tombé sur son épaule gauche.' La description des circonstances de l'accident n'est donc pas confuse.
- Cette description ne peut pas résulter des seules déclarations de la victime étant donné que M. [E] a été immédiatement transporté à l'hôpital ;
Que la seule invocation d'une absence de témoin n'est pas de nature à remettre en question les circonstances de temps et de lieu de l'accident. De fait, M. [E] ayant été immédiatement transporté à l'hôpital, il existe des présomptions suffisamment graves, précises et concordantes en faveur de la survenance du fait accidentel aux temps et lieu du travail ;
Qu'enfin, l'argument de l'absence d'information préalable à la déclaration d'accident du travail de l'entreprise utilisatrice ne constitue pas des réserves portant sur les circonstances de temps et de lieu de l'accident ;
Qu'en conséquence, force est de constater que la lettre du 24 juin 2010 est rédigée en des termes généraux qui ne sont pas spécifiques au cas d'espèce. Les réserves formulées par la société ARKOS INTERIM ne sont donc pas suffisamment précises, circonstanciées et détaillées au regard des éléments de l'espèce.
Considérant qu'en l'absence de motivation quant aux circonstances de temps et de lieu dans lesquelles l'accident est survenu et en l'absence d'élément caractérisant l'existence d'une cause étrangère au travail, l'employeur ne pouvait être considéré comme ayant émis des réserves au sens de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale ;
Qu'en l'absence de réserves motivées émises par l'employeur, les éléments décrits par ce dernier permettaient à la caisse de retenir la matérialité de l'accident et de prendre d'emblée la décision de prise en charge de l'accident de Monsieur [E] survenu le 21 juin 2010 au titre de la législation professionnelle ;
Que la caisse, qui a pris sa décision de reconnaissance du caractère professionnel d'un accident du travail au vu des seuls éléments transmis sans réserves motivées par l'employeur sans procéder à une mesure d'instruction, n'était pas tenue à l'obligation d'information prévue par les dispositions de l'article R. 441-11 du code de la sécurité sociale ;
Qu'il s'en suit que c'est par de justes motifs que les premiers juges ont déclaré opposable à l'employeur la prise en charge de l'accident subi le 21 juin 2010 par Monsieur [E] et que le jugement sera confirmé de ce chef ;
PAR CES MOTIFS
Déclare la société ARKOS INTERIM recevable mais mal fondée en son appel ;
Confirme le jugement entrepris ;
Fixe le droit d'appel prévu par l'article R 144-10 alinéa 2 du code de la sécurité sociale à la charge de l'appelant qui succombe au 10ème du montant mensuel du plafond prévu à l'article L241-3 du code de la sécurité sociale et condamne la société ARKOS INTERIM au paiement de ce droit ainsi fixé à la somme de 321,80 euros (trois cents vingt-et-un euros et quatre-vingt centimes).
Le Greffier Le Président