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19/01/2017 | FRANCE | N°15/16287

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 8, 19 janvier 2017, 15/16287


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 8



ARRÊT DU 19 JANVIER 2017



(n° 30/2017 , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 15/16287 (jonction avec le numéro 15/16291)



Décisions déférées à la cour :

- jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris en date du 12 avril 2002 - RG 11/84440 ;

- jugement du juge de l'exécution du tribunal d

e grande instance de Paris en date du 6 septembre 2012 - RG 12/80925

après cassation, par arrêt de la Cour de cassation chambre commerciale financière et économique du ...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 8

ARRÊT DU 19 JANVIER 2017

(n° 30/2017 , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 15/16287 (jonction avec le numéro 15/16291)

Décisions déférées à la cour :

- jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris en date du 12 avril 2002 - RG 11/84440 ;

- jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris en date du 6 septembre 2012 - RG 12/80925

après cassation, par arrêt de la Cour de cassation chambre commerciale financière et économique du 09 décembre 2014, de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 16 mai 2013

APPELANTE

Sarl Conception Bureautique et Organisation du Travail (CBOT)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée et assistée par Me Benoît Rambert de l'AARPI 2BA Avocats, avocat au barreau de Paris, toque : L0308

INTIME

Chef du Service des Impôts des Particuliers de Paris 8e, représentant l'Etat

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté et assisté par Me Alain Stibbe, avocat au barreau de Paris, toque : P0211

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 16 novembre 2016, en audience publique, devant la cour composée de :

Mme Marie Hirigoyen, présidente de chambre

Mme Anne Lacquemant, conseillère

M. Gilles Malfre, conseiller,

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Déborah Toupillier

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Marie Hirigoyen, présidente, et par M. Sébastien Sabathé, greffier stagiaire en période de pré-affectation auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits, procédure et prétentions des parties

Diverses mesures d'exécution forcée ont été pratiquées à l'encontre de la Sarl Conception Bureautique et Organisation du Travail (Cbot), au titre du recouvrement d'impôts sur les sociétés pour les années 1987, 1988 et 1989 : d'une part, trois commandements de payer, les 4 février 2003, 21 février 2006 et 5 mars 2008 et un avis à tiers détenteur (ATD) le 14 avril 2011, d'autre part, une saisie de droits d'associé et de valeurs mobilières le 5 décembre 2006, dénoncée le 8 décembre 2006 et un commandement de payer du 31 août 2011 signifié le 20 septembre 2011.

Sur les premières mesures d'exécution et par jugement du 12 avril 2012 (RG 11-84440), le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris :

- a dit que la société Cbot justifiait d'un intérêt à agir en contestation des actes d'exécution pratiqués à son encontre ;

- s'est déclaré incompétent et a renvoyé la société Cbot à mieux se pourvoir sur la question de la prescription de l'action en recouvrement de l'administration fiscale ;

- a déclaré la société Cbot irrecevable en sa demande d'annulation des commandements de payer des 4 février 2003, 21 février 2006 et 5 mars 2008, de l'ATD du 14 avril 2011 délivré entre les mains de la Compagnie Financière Edmond Rothschild et de sa notification du 2 mai 2011 ;

- a condamné la société Cbot à payer au Service des Impôts du 8° arrondissement de Paris 1'500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Cbot a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 18 mai 2012.

Sur les autres mesures d'exécution et par jugement du 6 septembre 2012 (12-80925), le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris a :

- constaté la litispendance des demandes de nullité des commandements de payer des 4 février 2003, 21 février 2006 et 5 mars 2008, de l'ATD du 14 avril 2011 délivré entre les mains de la Compagnie Financières Rothschild et de sa notification du 2 mai 2011, et de mainlevée subséquente de ce dernier acte, diligentés par le service des impôts du 8ème arrondissement de Paris, et s'en est dessaisi au profit de la cour d'appel de Paris ;

- renvoyé l'examen de ces demandes devant la cour d'appel de Paris et a dit que le dossier sera transmis au Greffe de son pôle 4 chambre 8 ;

- débouté la société Cbot de sa demande de nullité de l'acte de dénonciation de saisie de droits d'associés et de valeurs mobilières du 8 décembre 2006 ;

- déclaré irrecevable comme forclose la contestation de la saisie de droits d'associé et de valeurs mobilières du 5 décembre 2006, dénoncée le 8 décembre 2006 ;

- débouté en conséquence la société Cbot de ses demandes de mainlevée de cette saisie de droits d'associé et de valeurs mobilières du 5 décembre 2006 dénoncée le 8 décembre 2006 et d'injonction au tiers saisi ;

- déclaré recevable l'ensemble des moyens de contestation du commandement de payer du 31 août 2011 ;

- s'est déclaré cependant incompétent sur la demande de nullité de ce commandement de payer du 31 août 2011 et de sa "signification" du 20 septembre 2011 fondée sur la prescription de l'action en recouvrement et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir ;

- débouté la société Cbot de ses autres demandes de nullité du commandement de payer du 31 août 2011 reçu le 20 septembre 2011 ;

- débouté le Service des Impôts du 8° arrondissement de Paris de sa demande de dommage et intérêts pour procédure abusive ;

- condamné la société Cbot à payer au Service des Impôts du 8° arrondissement de Paris la somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Cbot a interjeté appel de ce second jugement par déclaration du 25 septembre 2012.

Par arrêt du 16 mai 2013, la cour d'appel de ce siège a prononcé la jonction des deux appels et a confirmé les deux jugements, condamnant en outre la société Cbot à payer une somme de 8 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par arrêt du 9 décembre 2014 et à la suite du pourvoi formé par la société Cbot, la Cour de cassation a cassé l'arrêt du 16 mai 2013 en toutes ses dispositions, rappelant :

- sur le premier moyen, que l'article R. 281-5 du livre des procédures fiscales (LPF), dont les dispositions prévoient que : «'Le juge se prononce exclusivement au vu des justifications qui ont été présentées au chef de service. Les redevables qui l'ont saisi ne peuvent ni lui soumettre des pièces justificatives autres que celles qu'ils ont déjà produites à l'appui de leurs mémoires, ni invoquer des faits autres que ceux exposés dans ces mémoires. Lorsque le juge de l'exécution est compétent, l'affaire est instruite en suivant les règles de la procédure à jour fixe.'», ne fait pas obstacle à ce que le contribuable soulève devant le juge de l'exécution des moyens nouveaux, à la condition que ces derniers n'impliquent pas l'appréciation de pièces ou de circonstances de fait omises dans sa demande préalable adressée au chef de service ;

- sur le troisième moyen, que si les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques, dont la perception incombe aux comptables publics, doivent être adressées, dans un délai défini, à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites, et ce, avant toute saisine de la juridiction compétente pour en connaître, à peine d'irrecevabilité de la demande présentée à celle-ci, cette irrecevabilité n'est opposable au demandeur qu'à la condition qu'il ait été précisément informé, par l'acte de poursuite, des modalités et des délais de recours, ainsi que des dispositions des articles R. 281-4 et R. 281-5 du LPF ;

- également, sur le troisième moyen, que les décisions portant nomination dans la fonction publique de l'État doivent faire l'objet d'une publication et que le défaut de publication d'un acte administratif à caractère règlementaire ne constitue pas un vice propre de cet acte, les tribunaux de l'ordre judiciaire étant compétents pour constater, s'il y a lieu, une publicité incomplète d'un tel acte, que l'annulation d'un commandement de payer, dès lors qu'elle est demandée pour une telle irrégularité de forme, ressortit au juge de l'exécution.

Désignée comme cour d'appel de renvoi, la cour d'appel de ce siège a été saisie par déclaration de la société Cbot du 25 juillet 2015.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 11 novembre 2016, la société Cbot sollicite l'infirmation des deux jugements et le débouté des demandes adverses.

À titre principal, elle poursuit la nullité des cinq actes de poursuites (commandements de payer des 4 février 2003, 21 février 2006 et 5 mars 2008, saisie de valeurs mobilières du 5 décembre 2006 et sa dénonciation du 8 décembre 2006, avis à tiers détendeur du 14 avril 2011 et sa notification du 2 mai 2011 et commandement de payer daté du 30 août 2011 et sa notification du 20 septembre 2011).

Elle estime que l'action en recouvrement est éteinte faute d'un acte de poursuite régulier émis depuis le jugement du tribunal administratif de Paris du 7 janvier 2003 et entend que soit jugée prescrite l'action en recouvrement conformément à l'article L. 274 du LPF, la décharge de l'obligation de payer l'impôt sur les sociétés, au titre des exercices 1987, 1988 et 1989 étant prononcée.

Subsidiairement, l'appelante poursuit la nullité des actes de poursuite, ce qui emporte droit à restitution, à son profit, des sommes versées en exécution de la saisie de valeurs mobilières du 5 décembre 2006, de sorte que le chef du service des impôts des particuliers du 8 ème arrondissement de Paris doit être condamné à lui payer 2 260 434, 38 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 28 septembre 2012.

À titre infiniment subsidiaire, à défaut de se déclarer compétent pour statuer sur la question de la prescription de l'action en recouvrement résultant de l'invalidité des actes de recouvrement contestés, elle sollicite un sursis à statuer et entend que cette question soit renvoyée devant le juge administratif compétent, pour qu'il déclare prescrite l'action de recouvrement des impôts sur les sociétés au titre des exercices 1987, 1988 et 1989 et prononce la décharge de l'obligation de payer ces sommes.

Dans tous les cas, elle sollicite la condamnation du chef du service des impôts des Particuliers du 8ème arrondissement de Paris, à lui payer 40 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions signifiées le 8 novembre 2016, l'intimé poursuit l'irrecevabilité de la demande, du fait de l'incompétence du juge judiciaire pour connaître de la prescription de l'action en recouvrement, de la demande de décharge de l'obligation de payer et de l'absence alléguée de notification du titre exécutoire, au profit du tribunal administratif de Paris. Sur le fond, il sollicite confirmation des deux jugements, la société Cbot étant déboutée de l'intégralité de ses demandes, et réclame en outre 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

SUR CE

Sur la jonction des procédures

Il convient, pour une bonne administration de la justice de joindre les instances suivies sous les numéros 15/16287 et 15/16291, sous le numéro 15/16287, ces instances se rapportant toutes deux à des actes de poursuites délivrés par le même service des impôts, à l'encontre du même contribuable et pour le recouvrement d'une même créance.

Sur la compétence du juge de l'exécution pour statuer sur la prescription de l'action en recouvrement

C'est en vain que la société Cbot conclut à l'irrecevabilité de l'exception d'incompétence soulevée par le responsable du service des impôts des particuliers du 8ème arrondissement, aux motifs qu'il n'a pas mentionné la juridiction administrative compétente, pourtant imposé par l'article 75 du code de procédure civile, et qu'il n'a pas soulevé cette exception avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir en vertu de l'article 74 du code de procédure civile. En effet, il résulte de l'examen des deux jugements entrepris que le service des impôts a soulevé cette exception in limine litis. En outre, dans ses écritures saisissant la cour, l'intimé indique qu'il appartient au tribunal administratif de Paris de se prononcer sur la prescription de l'action en recouvrement.

Ainsi que le rappelle justement le responsable du service des impôts des particuliers du 8ème arrondissement, une contestation qui porte sur la prescription de l'action en recouvrement de l'administration a trait à l'exigibilité de l'impôt et ne peut être examinée par le juge de l'exécution. Le juge de l'exécution ne saurait donc se prononcer sur cette question de la prescription mais il reste néanmoins compétent pour apprécier la régularité formelle des actes de poursuites sur lesquels l'administration peut se fonder pour soutenir que son action n'est pas prescrite.

Il convient donc de renvoyer la société Cbot à mieux se pourvoir sur cette question de la prescription de l'action en recouvrement ainsi que ses conséquences.

Le jugement du 12 avril 2012 sera confirmé de ce chef, tout comme le jugement du 6 septembre 2012 en ce qu'il déclaré irrecevable la demande de nullité du commandement de payer du 31 août 2011 signifié le 20 septembre 2011 en ce qu'elle se fonde sur la prescription de l'action en recouvrement.

Sur la recevabilité de la contestation des actes de poursuite

Il convient de rappeler au préalable que la société Cbot a formé une réclamation préalable dans le délai légal à l'encontre de l'ATD du 14 avril 2011, par courrier du 10 mai 2011, ainsi que du commandement de payer du 31 août 2011 signifié le 20 septembre 2011, par courrier du 18 novembre 2011. L'appelante a fait opposition à la saisie de droits d'associés et de valeurs mobilières du 5 décembre 2006,'dénoncée le 8 décembre 2006, par courrier du 2 février 2012. Les trois autres actes d'exécution, à savoir les commandements de payer des 4 février 2003, 21 février 2006 et 5 mars 2008 n'ont pas fait l'objet d'une réclamation préalable et ont été directement contestés devant le premier juge, dans l'assignation des 5 et 7 septembre 2011 ayant donné lieu au jugement du 12 avril 2012.

S'agissant des trois commandements de payer des 4 février 2003, 21 février 2006 et 5 mars 2008, si leurs contestations ne peuvent, à peine d'irrecevabilité, être portées devant le juge compétent qu'après avoir été préalablement formées devant l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites, cette irrecevabilité n'est opposable au demandeur qu'à la condition qu'il ait été précisément informé, par l'acte de poursuite, de ces modalités et délais de recours, ainsi que des dispositions des articles R. 281-4 et R. 281-5 du LPF.

En l'espèce, ces trois commandements de payer précisent qu'ils peuvent être contestés devant le trésorier payeur général précisément désigné. En revanche, le seul visa des «'articles R. 281-1 et suivants du livre des procédures fiscales'» mentionné en page deux de ces commandements, en l'absence d'une reproduction des dispositions ou d'une explication sur leur portée, ne saurait répondre à l'exigence d'une information précise sur le contenu des dispositions des articles R. 281-4 et R. 281-5 et n'a pu donc faire courir le délai de recours contre ces actes.

Il en résulte que les contestations de la société Cbot relativement à ces trois actes sont recevables, le jugement du 12 avril 2012 devant être infirmé de ce chef.

Pour ce qui concerne la contestation de l'ATD du 14 avril 2011, introduite dans les délais par courrier du 10 mai 2011 et dans lequel la société Cbot poursuivait la nullité de cet acte, au motif que les créances fiscales qu'il vise sont prescrites, il est rappelé que si l'article R. 281-5 du LPF prévoit que : «'Le juge se prononce exclusivement au vu des justifications qui ont été présentées au chef de service. Les redevables qui l'ont saisi ne peuvent ni lui soumettre des pièces justificatives autres que celles qu'ils ont déjà produites à l'appui de leurs mémoires, ni invoquer des faits autres que ceux exposés dans ces mémoires. Lorsque le juge de l'exécution est compétent, l'affaire est instruite en suivant les règles de la procédure à jour fixe.'», ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le contribuable soulève devant le juge de l'exécution des moyens nouveaux, à la condition que ces derniers n'impliquent pas l'appréciation de pièces ou de circonstances de fait omises dans sa demande préalable adressée au chef de service.

Par conséquent, l'appelante est recevable à poursuivre devant le juge de l'exécution la nullité de cet ATD, nullité sollicitée dans la réclamation du 10 mai 2011, en se fondant sur de nouveaux moyens tirés de l'irrégularité formelle de cet acte. Le jugement du 12 avril 2012 sera infirmé de ce chef.

L'acte de dénonciation de la saisie des droits d'associés et de valeurs mobilières du 5 décembre 2016, délivré le 8 décembre 2016, se contente, comme les trois commandements susvisés, d'un simple visa des «'articles R. 281-1 et suivants du livre des procédures fiscales'», sans au surplus indiquer l'autorité administrative compétente pour connaître de la réclamation préalable. Dès lors, la contestation de cette saisie, bien qu'ayant fait l'objet d'une réclamation préalable par courrier adressé uniquement le 2 février 2012, est également recevable, le jugement du 6 septembre 2012 étant infirmé de ce chef.

Il sera par ailleurs rappelé que le jugement du 6 septembre 2012 a déclaré recevable les contestations du commandement de payer du 31 août 2011, relevant justement qu'il n'avait pas été porté à la connaissance du contribuable une information précise sur l'incidence du contenu du mémoire préalable sur la suite de la procédure.

Sur la régularité formelle des actes de poursuites

En premier lieu, l'appelante critique la qualité des personnes ayant délivré ces actes,'rappelant que si le comptable du Trésor est compétent pour émettre des titres exécutoires et ordonner des actes de poursuite, les actes de poursuite ne peuvent être délivrés que par un huissier de justice ou tout agent de l'administration habilité à exercer des poursuites au nom du comptable.

Mais c'est à bon droit que l'intimé souligne que seuls les actes de poursuite devant être signifiés doivent être délivrés par un huissier, que tel a été le cas en l'espèce de la saisie de droits d'associé et de valeurs mobilières qui a été pratiquée par deux huissiers du Trésor public le 5 décembre 2006 et également dénoncée par un huissier du Trésor public le 8 décembre 2006. En revanche, les commandements de payer et l'ATD, en ce qu'ils sont uniquement notifiés par la voie postale, n'ont pas à être délivrés par huissier. Ce moyen sera par conséquent rejeté.

Il est par ailleurs rappelé que le juge judiciaire est compétent pour constater le défaut de publication de l'acte administratif portant nomination du comptable public ayant délivré un acte de poursuite, ainsi que de l'acte par lequel ce comptable public a délégué sa signature. Cette omission est constitutive d'une irrégularité de forme faisant grief, dans la mesure où elle ne permet pas au contribuable de vérifier si le signataire avait le pouvoir de signer l'acte de poursuite.

Sur les commandements de payer des 4 février 2003 et 11 mars 2008, l'intimé fait valoir qu'ils ont été délivrés par Mme [F] [H], bénéficiaire d'une délégation de signature donnée par le comptable, M [W] en 2003 et M [B] en 2007, bien que les copies de ces deux commandements produits au débat par le service des impôts ne permettent pas de vérifier qu'ils ont été délivrés par cette délégataire, les signatures et les cachets étant illisibles. Le commandement de payer du 21 février 2006 a été délivré par Mme [K] [M], dont il est indiqué qu'elle bénéficie d'une délégation de signature donnée en 2005 par M [W]. L'intimé justifie de ces délégations de signature, produit un simple courrier du 28 novembre 2000 sur la nouvelle affectation de M [W] au Sip de [Localité 1] ainsi qu'un arrêté du 16 octobre 2006 portant nouvelle affectation de M [B] dans cette même trésorerie. Force est de constater qu'il n'est pas justifié de l'acte de nomination de M [W], et donc de la publication de cet acte, pas plus que de la publication de l'arrêté nommant M [B] dans ses fonctions. Ces trois commandements seront par conséquent annulés.

Le commandement de payer du 31 août 2011 signifié le 20 septembre 2011 a été directement délivré par M [R], comptable. L'intimé justifie que par arrêté du 26 octobre 2010 signé par M [Z] [T], administrateur civil agissant sur délégation du directeur général des finances publiques, ce comptable a changé d'affectation pour exercer ses fonctions au Sip de [Localité 1].

Il n'est pas non plus justifié de la publication de cet acte de nomination de M [R] de sorte que ce commandement sera également annulé. Le jugement du 6 septembre 2012 sera infirmé de ce chef.

L'ATD du 14 avril 2011 a été délivré par Mme [Q] [D], dont le service des impôts rappelle que le comptable, M [R], lui avait donné délégation de signature. Cependant et ainsi que cela a été précédemment constaté, il n'a pas été justifié de la publication de la décision de nomination de ce comptable. Cet acte de poursuite sera par conséquent annulé.

S'agissant de la saisie de droits d'associé et de valeurs mobilières, elle a été pratiquée par deux huissiers du Trésor, M [A] [A] et Mme [S] [X], et dénoncée par M [A]. Il est rappelé qu'en vertu du décret n° 97-658 du 31 mai 1997 fixant le statut particulier des huissiers du Trésor public, ces huissiers exercent leurs fonctions sous l'autorité du trésorier-payeur général et rendent compte de la réalisation de leurs actions au trésorier payeur général et, sous l'autorité de celui-ci, aux comptables pour lesquels ils instrumentent. Leurs nominations dans le corps des huissiers du Trésor public sont prononcées par arrêté du ministre chargé du budget et ils sont commissionnés par le préfet du département de leur résidence et ne peuvent exercer leurs fonctions qu'après avoir justifié de leur prestation de serment.

Comme pour les précédents actes de poursuite délivrés par le comptable ou leur délégataire,'l'intimé ne produit pas l'acte de nomination de ces deux huissiers pas plus que leur publication. Cette saisie sera dès lors annulée, sans qu'il y ait lieu de statuer sur la régularité de sa dénonciation.

Sur les autres demandes

Il n'y a pas lieu d'ordonner la restitution des sommes éventuellement perçues en exécution de cette saisie de droits d'associés et de valeurs mobilières, l'annulation de cette mesure valant titre de restitution.

Au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, le responsable du service des impôts des particuliers du 8ème arrondissement sera condamné au paiement d'une somme de 2 000 euros.

PAR CES MOTIFS

Ordonne la jonction des instances suivies sous les numéros 15/16287 et 15/16291, sous le numéro 15/16287,

Confirme les jugements entrepris en leur disposition sur la compétence, ayant renvoyé la Sarl Conception Bureautique et Organisation du Travail à mieux se pourvoir pour statuer sur la prescription de l'action en recouvrement ;

Infirme le jugement du 12 avril 2012 en ce qu'il a dit la Sarl Conception Bureautique et Organisation du Travail irrecevable en ses contestations des commandements de payer des 4 février 2003, 21 février 2006 et 5 mars 2008 et de l'avis à tiers détenteur du 14 avril 2011 et l'a condamnée au paiement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles outre les dépens ;

Infirme le jugement du 6 septembre 2012 en ce qu'il a déclaré la Sarl Conception Bureautique et Organisation du Travail irrecevable en sa contestation de la saisie de droits d'associés et de valeurs mobilières du 5 décembre 2006, en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de nullité du commandement de payer du 31 août 2011 signifié le 20 septembre 2011 et l'a condamnée au paiement d'une somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles outre les dépens ;

Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées ;

Annule les commandements de payer des 4 février 2003, 21 février 2006 et 5 mars 2008, l'avis à tiers détenteur du 14 avril 2011, la saisie de droits d'associés et de valeurs mobilières du 5 décembre 2006 et le commandement de payer du 31 août 2011 signifié le 20 septembre 2011 ;

Condamne M le responsable du service des impôts des particuliers du 8ème arrondissement représentant l'État à payer à la Sarl Conception Bureautique et Organisation du Travail la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toute autre demande ;

Condamne M le responsable du service des impôts des particuliers du 8ème arrondissement représentant l'État aux dépens de première instance et d'appel, qui pourront être recouvrés directement dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 15/16287
Date de la décision : 19/01/2017

Références :

Cour d'appel de Paris G8, arrêt n°15/16287 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-01-19;15.16287 ?
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