Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 1
ARRET DU 1er FÉVRIER 2017
(n° 55 , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/16824
Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Juillet 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/15629
APPELANTE
SAS NATALIE SEROUSSI agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice domiciliés ès qualités audit siège.
[Adresse 1]
[Localité 1]
N° SIRET : 327 885 828
Représentée par Me Nicolas SIDIER de la SCP PECHENARD & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : R047
INTIMES
Monsieur [P] [F]
[Adresse 2]
[Localité 2]
Non comparant, non représenté
Madame [C] [I] es qualité de mandataire de justice de la société ART CONSEIL W.
[Adresse 3]
[Localité 3]
Représentée par Me Agathe QUERMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : G0735
SASU APONEM
[Adresse 4]
[Localité 4]
N° SIRET : 489 056 8033
Représentée par Me Marcel PORCHER de la SELAS PORCHER & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0450
Ayant pour avocat plaidant Me Agathe QUERMENT, avocat au barreau de PARIS, toque : G0735
SA ALBINGIA prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 5]
[Localité 5]
N° SIRET : 429 369 309
Représentée par Me Christophe LAVERNE de la SCP KUHN, avocat au barreau de PARIS, toque : C 1903
Ayant pour avocat plaidant Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0753
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 06 Décembre 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Jacques BICHARD, Président de chambre
Madame Marie-Sophie RICHARD, Conseillère
Mme Marie-Claude HERVE, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Khadija BADID
ARRET :
- Réputé contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Jacques BICHARD, président et par Mme Lydie SUEUR, greffier présent lors du prononcé.
*****
La société Galerie Nathalie SEROUSSI a acquis lors d'une vente aux enchères publiques organisée le 20 avril 2012 par la société Patrick DEBUREAUX, aux droits de laquelle se trouve la société APONEM, dont l'expert était la société ART CONSEIL W, moyennant le prix de 17 500 euros outre les frais s'élevant à 4 186 euros, un bronze présenté dans le catalogue de vente comme suit :
' [B] [R] ( 1887-1966 ) . $gt; épreuve en bronze doré, signée en creux, numérotée, marque du fondeur sous la base [R] 0/6 E GODARD Paris ; H : 29, 5 cm' .
Par courriel du 6 avril 2012, la société Galerie Nathalie SEROUSSI avait indiqué à l'expert qu'elle était intéressée par cette oeuvre sous réserve que son authenticité soit certifiée par la fondation [R].
Or celle-ci par courriel du 2 juillet 2012 a informé la société ART CONSEIL W qu'elle ne pouvait pas fournir de certificat d'authenticité, faute pour la veuve de l'artiste d'avoir autorisé la fonte 0/6.
Se prévalant d'un courriel en date du 20 avril 2012 aux termes duquel la société ART CONSEIL W écrivait '(....) Si l'authenticité de ce bronze n'était pas reconnue par la fondation, nous nous engagerions bien évidemment à annuler la vente et à vous rembourser', la société Galerie Nathalie SEROUSSI, par courrier du 24 juillet 2012, a mis en demeure cette société de lui rembourser le prix de vente, ainsi que la société Patrick DEBUREAUX de conserver ledit prix de vente et de lui communiquer le nom du vendeur.
Le 27 juillet 2012 la société Patrick DEBUREAUX informait la société Galerie Nathalie SEROUSSI de ce qu'elle avait remis le prix de vente au vendeur dont elle lui communiquait, le 2 octobre 2012, le nom, à savoir M. [P] [F].
Le 3 octobre 2012 la société Galerie Natalie SEROUSSI mettait M. [P] [F] en demeure de lui remettre le prix de vente en contrepartie de la restitution du bronze litigieux.
Ces diverses mises en demeure étant restées sans effet, la société Galerie Nathalie SEROUSSI a assigné en nullité de la vente, restitution du prix et indemnisation de son préjudice, M. [P] [F], la société Patrick DEBUREAUX et la société ART CONSEIL W, la société d'assurances ALBINGIA étant appelée en intervention forcée par son assurée la société ART CONSEIL W, devant le tribunal de grande instance de Paris dont elle a déféré à la cour le jugement rendu le 10 juillet 2014 qui l' a déboutée de ses demandes et l'a condamnée à payer une indemnité de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile à la société ART CONSEIL W et à la société ALBINGIA.
Vu l'arrêt rendu par cette cour le 7 juin 2016 ordonnant la réouverture des débats.
Vu les dernières conclusions communiquées par la voie électronique le :
- la déclarer recevable et bien fondée en son appel,
- infirmer le jugement déféré,
- prononcer la nullité de la vente du bronze litigieux,
- condamner solidairement M. [P] [F], la société APONEM et la société ART CONSEIL W à lui verser la somme de 24 686 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 20 avril 2012,
- subsidiairement condamner la société ART CONSEIL W à lui verser la somme de 24 686 euros au titre de son engagement de garantie,
- en tout état de cause, débouter la société ART CONSEIL W et la société APONEM de leurs demandes et les condamner chacune à lui verser une somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, M. [P] [F] sur ce fondement devant être condamné à lui verser une somme de 10 000 euros.
- à titre principal de confirmer le jugement déféré,
- en cas d'annulation de la vente, dire et juger qu'elle ne sera pas tenue au remboursement du prix de vente mais devra rembourser les honoraires à l'acheteur,
- à titre subsidiaire, dire que la responsabilité de la société ART CONSEIL W est engagée et condamner en conséquence, sur son action directe, l'assureur de cette société, à savoir la société ALBINGIA à la relever indemne de toute condamnation,
- à titre très subsidiaire, dire et juger qu'elle ne saurait être tenue par des engagements contractuels exorbitants pris antérieurement à la vente par l'expert,
- condamner l'appelante ou toute partie qui succombe à lui verser une indemnité de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
- confirmer le jugement déféré,
- subsidiairement, dire la demande en dommages intérêts présentée par la galerie Natalie SEROUSSI irrecevable à hauteur de 10 000 euros,
- à titre très subsidiaire, condamner la société ALBINGIA à la garantir,
- condamner la galerie Natalie SEROUSSI à lui verser une indemnité de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
- confirmer le jugement déféré,
- à titre subsidiaire, dire la demande en dommages intérêts présentée par la galerie Natalie SEROUSSI irrecevable à hauteur de 10 000 euros et la débouter de ses demandes,
- à titre très subsidiaire, débouter la société ART CONSEIL de sa demande en garantie,
- à titre infiniment subsidiaire déduire la franchise d'un montant de 1 050 euros
- en tout état de cause, débouter' la société Patrick DEBUREAUX et associés' de sa demande en garantie,
- condamner toute partie qui succombe à lui verser une indemnité de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile .
Constatée l'absence de constitution d'avocat de M. [P] [F] auquel la Galerie SEROUSSI a notifié par acte d'huissier de justice du 20 novembre 2014 sa déclaration d'appel et ses conclusions du 30 octobre 2014.
SUR QUOI LA COUR
Il est constant que le bronze litigieux a été présenté dans le catalogue de vente, sans aucune réserve comme étant de l'artiste [B] [R].
Néanmoins il demeure que préalablement à la vente aux enchères publiques, organisée le 20 avril 2012 par la société Patrick DEBUREAUX, mais postérieurement la publication dudit catalogue, la société Natalie SEROUSSI, par un courriel du 6 avril 2012, s'est adressée à l'expert de la vente M. [A] de la société ART CONSEIL W, pour lui faire savoir qu'elle n'achèterait le bronze en cause que 'sous réserve que son authenticité soit certifiée par la fondation [R]'.
Pour autant la galerie Natalie SEROUSSI a acquis l'oeuvre dont s'agit alors même qu'aucun certificat d'authenticité ne lui a été préalablement transmis.
La galerie Nathalie SEROUSSI ne démontre pas qu'entre le 6 avril 2012 et antérieurement à la vente du bronze litigieux qui a eu lieu le 20 avril 2012 à 14 heures, elle a obtenu de la part de la société de vente ou de l'expert, des informations sur l'oeuvre présentée, voire l'assurance que celle-ci était authentique et avoir été ainsi trompée par des manoeuvres dolosives.
Si dans un courriel du 20 avril 2012, la société ART CONSEIL W lui écrivait :
'Suite à notre conversation téléphonique, je vous indique à nouveau que la fondation a bien reçu plusieurs photos et éléments concernant ce bronze de [R]. Je vous informe que si l'authenticité de ce bronze n'était pas reconnue par la fondation, nous nous engagerions, bien évidemment, à annuler la vente et à vous rembourser ', ce document est non seulement postérieur de quelques heures à la vente, mais également ne vaut pas de la part de son auteur comme la reconnaissance du caractère authentique de l'oeuvre litigieuse.
Et l'engagement souscrit par M. [A] d'annuler la vente et de rembourser le prix au cas où la fondation [R] ne reconnaîtrait pas l'oeuvre comme un authentique de [B] [R] ne peut être interprété ainsi que le soutient l'appelante comme la démonstration de ce que celui-ci était convaincu de cette authenticité de sorte qu'elle même n'avait dés lors pas à en douter.
Ainsi la société Natalie SEROUSSI, professionnelle du marché de l'art, dont la volonté d'acquérir a été déterminée par la seule délivrance préalable à la vente d'un certificat d'authenticité et non pas par les mentions du catalogue de vente, ne peut valablement arguer de l'absence de toute réserve portée dans ce document et soutenir avoir été victime d'une erreur sur la qualité substantielle du bronze dont s'agit dont il n'est en revanche pas contesté que conformément aux mentions dudit catalogue il a été fondu par GODARD.
Il convient en conséquence de la débouter de sa demande en nullité de la vente dont s'agit.
Il en est de même de sa prétention à obtenir le paiement de la somme de 10 000 euros qu'elle présente spécifiquement dans le cadre de sa demande de nullité de la vente pour attitude déloyale de la part de M. [F], la société APONEM et la société ART CONSEIL et qui au demeurant n'est nullement justifiée.
En ce qui concerne sa demande en paiement fondée sur l'engagement pris par la société ART CONSEIL W dans son courriel du 20 avril 2012 dont les termes ont été ci-dessus rappelés, il s'avère qu'en conclusion de sa correspondance du 30 avril 2015 adressée à la société appelante, la fondation [R] a précisément écrit ' Le refus de Madame [F] [R] du tirage 0/6 de la forme 'S'élevant' exclut l'authenticité de celui-ci et toute délivrance d'un certificat d'authenticité de la part des Fondations'.
Ainsi conformément à l'engagement souscrit par la société ART CONSEIL W qui est dépourvu de toute ambiguïté en ce qu'il soumet précisément le remboursement du prix au défaut de reconnaissance de l'authenticité du bronze par la fondation [R], la société Natalie SEROUSSI est bien fondée à en obtenir l'exécution.
Et il importe peu que ce document soit postérieur à la vente dés lors qu'il est clair et précis sur la condition de mise oeuvre de l'engagement qu'il contient, à savoir l'absence de reconnaissance par la fondation [R] de l'authenticité du bronze, ce qui est le cas, ladite fondation affirmant que le refus de Mme [F] [R] exclut l'authenticité de l'oeuvre et par voie de conséquence la délivrance d'un certificat la constatant.
La société ART CONSEIL W sera ainsi condamnée à lui payer la somme de 21 686, euros qui est celle qu'elle a acquittée pour acquérir l'oeuvre litigieuse, cette somme produisant intérêts au taux légal à compter de la lettre de mise en demeure du 24 juillet 2012.
Mais s'agissant de l'exécution d'une obligation de remboursement qui ne peut concerner que le seul prix payé, la galerie Natalie SEROUSSI sera en conséquence déboutée de sa demande en paiement de la somme de 3 000 euros versée à la fondation [R] en règlement de l'expertise réalisée par celle-ci qu'elle forme au titre de 'l'engagement de garantie' souscrit par la société ART CONSEIL W mais qui cependant ne peut être assimilée au prix de vente.
La société ART CONSEIL W qui s'est engagée sans réserve, à rembourser la société Natalie SEROUSSI au cas où la fondation [R] ne reconnaîtrait pas l'authenticité de l'oeuvre litigieuse, n'a pas volontairement exécuté son obligation malgré la mise en demeure qui lui a été délivrée.
Son assureur, la société ALBINGIA, est ainsi bien fondée à opposer à son assurée mais également au tiers lésé, l'absence de garantie tirée des conditions spéciales de la police en ce qu'il est prévu que le contrat 'garantit exclusivement les obligations de moyen acceptées par l'assuré '.
En l'état de cette décision la demande de garantie présentée par la société APONEM est sans objet.
La solution du litige eu égard à l'équité commande d'accorder à la galerie Natalie SEROUSSI une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile qu'il convient de fixer à la somme de 3 000 euros et qui est mise à la charge de la société ART CONSEIL W.
PAR CES MOTIFS :
Infirme le jugement déféré,
Statuant à nouveau,
Condamne la société ART CONSEIL W à payer à la galerie Natalie SEROUSSI la somme de 21 686, euros avec intérêts au taux légal à compter de la lettre de mise en demeure du 24 juillet 2012, outre une indemnité de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure.
Rejette toute autre demande .
Condamne la société ART CONSEIL W aux dépens de première instance et d'appel dont distraction au profit des avocats des autres parties qui en ont fait la demande dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER,LE PRESIDENT,