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31/03/2017 | FRANCE | N°14/25301

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4- chambre 1, 31 mars 2017, 14/25301


Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4- Chambre 1

ARRÊT DU 31 MARS 2017

(no, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/ 25301

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Novembre 2014- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 13/ 00889

APPELANTE

Madame Dorothée X...
née le 04 février 1982 à CHERBOURG

demeurant...

Représentée par Me Barbara PIERANTI, avocat au barreau de PARIS, toque : C0789
Ass

istée sur l'audience par Me Sami SKANDER, avocat au barreau de VAL D'OISE, toque : 202

INTIMÉS

Madame Christelle Y...
née le 22 Janvi...

Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4- Chambre 1

ARRÊT DU 31 MARS 2017

(no, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 14/ 25301

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Novembre 2014- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 13/ 00889

APPELANTE

Madame Dorothée X...
née le 04 février 1982 à CHERBOURG

demeurant...

Représentée par Me Barbara PIERANTI, avocat au barreau de PARIS, toque : C0789
Assistée sur l'audience par Me Sami SKANDER, avocat au barreau de VAL D'OISE, toque : 202

INTIMÉS

Madame Christelle Y...
née le 22 Janvier 1971 à VALENCIENNES

demeurant...

Représentée et assistée sur l'audience par Me Anne CARUS, avocat au barreau de PARIS, toque : A0543

Maître Prisca Z..., notaire

demeurant...

Représenté par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

SA LE CREDIT LYONNAIS prise en la personne de ses représentants légaux
No SIRET : 954 509 741

ayant son siège au 18 rue de la République-69000 LYON

Représentée et assistée sur l'audience par Me Frédéric LEVADE de l'AARPI CHAIN, avocat au barreau de PARIS, toque : P0462

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 23 Février 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Dominique DOS REIS, Présidente de chambre
Mme Christine BARBEROT, Conseillère
M. Dominique GILLES, Conseiller

qui en ont délibéré

Greffier lors des débats : Monsieur Christophe DECAIX

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

-rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Dominique DOS REIS, Présidente, et par Monsieur Christophe DECAIX, greffier auquel la minute de la décision à été remise par le magistrat signataire.

*

* *

Suivant acte authentique reçu le 16 mars 2012 par Mme Prisca Z..., notaire associé, Mme Christelle A..., épouse Y..., a vendu à Mme Dorothée X... le lot no 18 de l'état de division d'un ensemble immobilier sis... à Paris 18e arrondissement, soit, dans le bâtiment sur cour, un appartement de 25, 71 mètres carrés au rez-de-chaussée, au prix de 235 000 €. Cet achat était financé par un prêt d'un montant de 241 300 € souscrit par Mme X... auprès de la société Le Crédit lyonnais. Par acte d'huissier de justice des 2 et 7 janvier, 6 novembre 2012, Mme X..., qui avait constaté des infiltrations d'eau dans son appartement en provenance de la façade de l'immeuble, a assigné le vendeur, le notaire et la banque en annulation de la vente pour dol et du prêt, subsidiairement, en résolution sur le fondement du vice caché.

C'est dans ces conditions que, par jugement du 20 novembre 2014, le Tribunal de grande instance de Paris a :

- déclaré irrecevables les conclusions de la société Le Crédit lyonnais,
- déclaré irrecevable le formulaire de publication produit par Mme X...,
- déclaré irrecevables les demandes de Mme X... en nullité et en résolution de la vente et du prêt,
- condamné Mme Y... à payer à Mme X... une indemnité de 3 150 € en réparation du trouble de jouissance subi en raison du vice caché affectant le bien vendu,
- débouté Mme X... de sa demande de réparation de son préjudice moral et de celle en remboursement des émoluments de Mme Z...,
- débouté Mme Y... et Mme Z... de leur demande respective de dommages-intérêts pour procédure abusive,
- condamné Mme X... à payer à Mme Z... une indemnité de 3 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné Mme Y... à payer à Mme X... une indemnité de 3 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamné Mme Y... aux dépens.

Par dernières conclusions du 15 mars 2015, Mme X..., appelante, demande à la Cour de :

- vu les articles 1134, 1116, 1641, 1645 et 1382 du Code civil,
- à titre principal :
. déclarer recevable son action en nullité ou résolution de la vente du 16 mars 2012,
. prononcer la nullité de cette vente pour dol,
- à titre subsidiaire : prononcer la résolution de cette vente pour vice caché,
- en tout état de cause :
. dire que les parties seront remises en état,
. condamner Mme Y... à lui rembourser le prix, soit la somme de 235 000 €, ainsi que les frais liés aux formalités d'enregistrement, soit la somme de 13 166, 82 € avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation et capitalisation,
. prononcer l'annulation du prêt bancaire,
. dire qu'elle remboursera à la banque la somme de 241 300 €, déduction faite des échéances réglées,
. condamner Mme Z... à lui rembourser la somme de 2 815, 60 € versée au titre de ses émoluments,
. condamner in solidum Mme Y... et Mme Z... à lui payer la somme de 34 600 € à titre de dommages-intérêts en réparation de son préjudice de jouissance arrêté au 28 février 2015, celle de 20 000 € en réparation de son préjudice moral et celle de 6 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.

Par dernières conclusions du 9 mai 2015, Mme Y... prie la Cour de :

- vu les articles 1641, 1642, 1382 du Code civil, 32-1 du Code de procédure civile,
- à titre principal, constater l'absence de manoeuvres dolosive et dire que Mme X... avait connaissance du vice,
- à titre subsidiaire dire que Mme X... ne justifie pas des dommages allégués,
- en conséquence, débouter Mme X... de toutes ses demandes,
- condamner Mme X... au paiement de la somme de 5 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.

Par dernières conclusions du 27 avril 2015, Mme Z... demande à la Cour de :

- vu les articles 28- 4e et 30- 5e du décret du 4 janvier 1955, 1382 du Code civil,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme X... de l'ensemble de ses demande,
- l'infirmer en ce qu'il a rejeté sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,
- condamner Mme X... à lui payer la somme de 2 000 € de dommages-intérêts,
- dire Mme X... irrecevable et subsidiairement mal fondée en ses demandes,
- la débouter de l'ensemble de ses réclamations présentées contre elle,
- dire, subsidiairement que Mme Y... devra la garantir de toute condamnation prononcée contre elle,
- condamner la partie succombante à lui payer la somme de 8 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.

Par dernières conclusions du 13 avril 2015, la société Le Crédit lyonnais prie la Cour de :

- vu les articles 1134 et suivants, 1382 du Code civil,
- constater qu'elle s'en rapporte à justice sur la demande de nullité du contrat de vente,
- dans l'hypothèse où l'annulation du contrat de prêt serait prononcée :
- condamner Mme X... à lui restituer la somme de 241 300 € au titre du capital prêté,
- lui donner acte de ce qu'elle s'engage dans cette hypothèse à restituer à Mme X... les mensualités perçues,
- ordonner la compensation entre les deux sommes,
- condamner toute partie succombante à lui payer les intérêts conventionnels sur toute la durée du prêt à titre de dommages-intérêts,
- en tout état de cause :
- condamner toute partie succombante à lui payer la somme de 3 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.

SUR CE
LA COUR

Devant la Cour, Mme X... justifie avoir enregistré le 27 mars 2014 ses conclusions aux service de la publicité foncière, de sorte que la procédure ayant été régularisée, l'action de Mme X... est recevable.

Ayant constaté des infiltrations d'eau dans les murs de son appartement, Mme X... a déclaré ce sinistre à son assureur lequel a diligenté un expert. Le 25 septembre 2012, cet expert a constaté que la peinture intérieure du mur de l'appartement, correspondant à la façade du bâtiment sur cour, était boursouflée, que le taux d'humidité de ce mur était à saturation et que les infiltrations trouvaient leur cause dans le mauvais état de la façade. Si Mme X... ne pouvait ignorer la dégradation apparente de la façade, ayant eu connaissance, ainsi qu'il résulte des mentions de l'acte de vente du 16 mars 2012, du procès-verbal de la dernière assemblée générale du 15 décembre 2011 votant les travaux de ravalement des trois façades, ainsi que de l'état dressé par le syndic en vertu de l'article 5 du décret du 17 mars 1967 mentionnant de gros travaux à venir et renvoyant au dernier procès-verbal d'assemblée générale, cependant, elle pouvait ne pas savoir que les dégradations de la façade avaient eu, d'ores et déjà, des répercussions sur l'état intérieur de l'appartement en l'affectant d'une humidité importante. En effet, avant l'achat, l'appartement avait été repeint et aucun désordre n'était apparent au moment de l'achat. Or, M. Nicolas B..., copropriétaire et syndic bénévole, a attesté qu'avant la vente, Mme Y... lui avait fait part de son inquiétude et lui avait fait constater, quelques mois avant octobre 2011, des traces d'humidité dans son appartement. De même, Mme C..., copropriétaire, témoigne de ce que les infiltrations d'eau étaient connues de tous les occupants du bâtiment.

La réfection de l'appartement ne peut s'expliquer par la nécessité d'une réfection à la suite d'un dégât des eaux de janvier 2012 qui n'est établi ni par un accord tardif du 9 mars 2016 qui serait intervenu entre Mme Y... et la voisine de l'étage du dessus ni par l'attestation non datée d'un tiers. Le silence gardé par la venderesse et la suppression des traces de l'infiltration par la façade révèlent une dissimulation dolosive ayant eu un effet déterminant sur l'achat, de sorte qu'il doit être fait droit à la demande de nullité de la vente.

Il convient de condamner Mme Y... à restituer à Mme X... la somme de 235 000 € au titre du prix avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation valant mise en demeure et capitalisation dans les conditions de l'article 1154 du Code civil.

S'agissant des droits de mutation et d'enregistrement, ces frais pouvant être répétés sur le Trésor public, la demande de Mme X... de ce chef doit être rejetée.

C'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le Tribunal a évalué le préjudice de jouissance de Mme X... et débouté cette dernière de sa demande au titre d'un préjudice moral.

L'annulation du contrat de vente entraînant l'annulation du contrat de prêt par application de l'article L. 312-12 du Code de la consommation, Mme X... doit restituer à la banque la somme de 241 300 € au titre du capital, sans qu'il y ait lieu de subordonner cette restitution à celle du prix, et la banque à restituer à Mme X... les échéances déjà payées, ces créances et dettes se compensant entre elles.

S'agissant de la demande de la société Le Crédit lyonnais en paiement par " toute partie succombante " à lui payer " les intérêts conventionnels sur toute la durée du prêt " le dol de la venderesse étant à l'origine de l'annulation du prêt, la banque est en droit de réclamer à Mme Y... la réparation du préjudice qu'elle a subi à la suite de l'anéantissement du contrat. L'annulation du contrat de vente entraînant la nullité du contrat de prêt et le prêteur ayant réclamé la restitution du capital prêté non amorti, la perte du gain que la banque pouvait espérer par le biais des intérêts conventionnels constitue une perte de chance, qu'il convient d'évaluer, eu égard au montant de la somme prêtée, soit 241 300 €, à la durée du prêt de 300 mois et au taux contractuel de 4, 40 % l'an, à la somme de 6 000 €, au paiement de laquelle il y a lieu de condamner Mme Y....

S'agissant de la responsabilité du notaire, c'est par des motifs pertinents que la Cour adopte que le tribunal a débouté Mme X... de ses demandes contre Mme Z....

C'est encore à bon droit que le Tribunal a rejeté les demandes de dommages-intérêts pour procédure abusive.

Les dépens de l'instance d'appel engagée par Mme X... contre Mme Y... et la société Le Crédit lyonnais seront supportés par Mme Y....

Les dépens de l'instance d'appel engagée par Mme X... contre Mme Z... seront supportés par Mme X....

La solution donnée au litige emporte le rejet de la demande, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, de Mme Y....

L'équité commande qu'il soit fait droit aux demandes de Mme X..., Mme Z... et la société Le Crédit lyonnais, sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel, comme il est dit dans le dispositif du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement entrepris mais seulement ce qu'il a déclaré Mme Dorothée X... irrecevable en son action en nullité ou en résolution de la vente et du prêt ;

Statuant à nouveau :

Déclare Mme Dorothée X... recevable en son action ;

Prononce l'annulation de la vente suivant acte authentique reçu le 16 mars 2012 par Mme Prisca Z..., notaire, membre de la SCP Jean-Claude F...-Prisca Z...-Anna D..., titulaire d'un office notarial à Amboise, oublié et enregistré le 10 avril 2012 à la conservation des hypothèques de Paris 10e bureau volume 2012P no 2370, au termes duquel Mme Christelle A..., épouse Y..., a vendu à Mme Dorothée X... le lot no 18 de l'état de division par acte reçu par M. E... notaire à Paris le 8 octobre 1959 publié au 10e bureau des hypothèques, le 26 novembre 1959 volume 3414 no 21, d'un ensemble immobilier sis... à Paris 18e arrondissement, cadastré section BL no 94, soit, dans le bâtiment sur cour (groupe deux), un appartement au rez-de-chaussée surélevé du bâtiment sur cour, composé de deux pièces éclairées sur cour et une cuisinette, droit au cabinet d'aisance, sis au rez-de-chaussée du bâtiment sur rue, au prix de 235 000 € ;

Ordonne la restitution par Mme Christelle Y... à Mme Dorothée X... de la somme de 235 000 € au titre du prix avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation et ordonne la capitalisation des intérêts échus dans les conditions de l'article 1154 du Code civil ;

Prononce l'annulation du prêt suivant acte sous seing privé du 3 janvier 2012 consenti par la société Le Crédit lyonnais à Mme Dorothée X... d'un montant de 241 300 €, d'une durée de 300 mois, remboursable au taux contractuel de 4, 40 % l'an par échéances mensuelles d'un montant de 1 415, 78 € ;

Ordonne la restitution par Mme Dorothée X... à la société Le Crédit lyonnais de la somme de 241 300 € au titre du capital et la restitution par la société Le Crédit lyonnais à Mme Dorothée X... des échéances déjà payées ;

Dit que ces créances se compensent entre elles ;

Déboute Mme Dorothée X... du surplus de ses demandes ;

Confirme le jugement entrepris pour le surplus ;

Y ajoutant :

Condamne Mme Christelle Y... à payer à la SA Le Crédit Lyonnais la somme de 6 000 € de dommages-intérêts ;

Ordonne la publication du présent arrêt au service de la publicité foncière compétent ;

Rejette les autres demandes ;

Condamne Mme Dorothée X... aux dépens de l'instance d'appel engagée contre Mme Prisca Z... qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile ;

Condamne Mme Christelle A..., épouse Y..., aux autres dépens d'appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile ;

Condamne Mme Dorothée X... à payer à Mme Prisca Z... la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne Mme Christelle A..., épouse Y..., sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel, à payer à :

- Mme Dorothée X..., la somme de 6 000 €,

- la société Le Crédit lyonnais : la somme de 3 000 €.

Le Greffier, La Présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4- chambre 1
Numéro d'arrêt : 14/25301
Date de la décision : 31/03/2017
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2017-03-31;14.25301 ?
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