Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4- Chambre 1
ARRÊT DU 31 MARS 2017
(no, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/ 11032
Décision déférée à la Cour : Jugement du 01 Avril 2015- Tribunal de Grande Instance de PARIS-RG no 11/ 10784
APPELANTE
SCI STANFORD Représentée par son gérant Monsieur Aymeric X...
No SIRET : 43 5 2 147 39
ayant son siège au 15 avenue de la Motte Piquet-75007 PARIS
Représentée et assistée sur l'audience par Me Marie-hélène ISERN-REAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D0994, substitué sur l'audience par Me Sophie DESHORS, avocat au barreau de PARIS, toque : D0994
INTIMÉE
SA GECINA prise en la personne de ses représentants légaux
No SIRET : 592 014 476
ayant son siège au 16, RUE DES CAPUCINES-75002 PARIS
Représentée et assistée sur l'audience par Me Fabienne MOUREAU-LEVY, avocat au barreau de PARIS, toque : D1292
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 Mars 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Mme Dominique DOS REIS, Présidente de chambre, et Mme Christine BARBEROT, Conseillère, chargées du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Dominique DOS REIS, Présidente de chambre
Mme Christine BARBEROT, Conseillère
Mme Laure COMTE, Vice-présidente placée,
Greffier lors des débats : M. Christophe DECAIX
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
-rendu par mise à disposition de l'arrêt de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Dominique DOS REIS, Présidente, et par M. Christophe DECAIX, greffier auquel la minute de la décision à été remise par le magistrat signataire.
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Suivant acte authentique du 29 septembre 2006, la société Parigest a vendu à la SCI Stanford un ensemble immobilier sis 10-12 rue de Saïgon et 6 rue d'Argentine à Paris 16ème. Aux termes de cet acte, la venderesse s'obligeait à exécuter divers travaux concernant les parties communes. Était compris, par ailleurs, dans les lots vendus, un appartement sis au 4ème étage, donné en location, selon bail du 1er juillet 1992, aux consorts Y... qui ont quitté les lieux en laissant impayés plusieurs termes de loyer et d'indemnités d'occupation et auxquels la société Parigest avait restitué en original, le 3 juin 2007, la garantie bancaire accordée par la banque Monte Paschi à hauteur de douze mois de loyers.
C'est dans ces conditions que, par acte extra-judiciaire du 11 juillet 2011, la SCI Stanford a assigné la société Parigest, aux droits de laquelle se trouve la société Gecina, afin de la voir condamner à exécuter sous astreinte les travaux listés dans l'acte de vente du 29 septembre 2006 et pour obtenir paiement de la somme de 24. 209, 88 € au titre de sa perte locative consécutive à la restitution de la garantie bancaire aux consorts Y....
Le syndicat des copropriétaires du 12 rue de Saïgon est intervenu volontairement à l'instance.
Par jugement du 1er avril 2015, le tribunal de grande instance de Paris a :
- condamné la société Gecina à payer au syndicat des copropriétaires du 12 rue de Saïgon la somme de 3. 500 € HT augmentée de la TVA à 10 %, soit un total de 3. 850 €, avec capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil,
- dit que la société Gecina avait commis une inexécution contractuelle en ne remettant pas la garantie bancaire des engagements des consorts Y... à la SCI Stanford,
- dit que les préjudices allégués comme découlant de cette faute n'étaient pas établis,
- débouté la SCI Stanford de sa demande de dommages-intérêts,
- rejeté les demandes formées au titre de l'abus de droit,
- condamné la société Gecina à payer à la SCI Stanford et au syndicat des copropriétaires du 12 rue de Saïgon ensemble une somme de 4. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens,
- ordonné l'exécution provisoire.
La SCI Stanford a relevé appel, à l'encontre de la société Gecina, de ce jugement dont elle poursuit l'infirmation, demandant à la Cour, par dernières conclusions signifiées le 26 août 2015, de :
au visa des articles 1147, 1743, 1692, 2290, 2292 du code civil,
- constater que l'inexécution contractuelle commise par la société Parigest devenue la société Gecina et consistant en la non-remise de la garantie bancaire détenue en garantie des engagements de consorts Y... lui a causé un préjudice matériel,
- dire que sa créance, étant supérieure au montant garanti par la caution bancaire, son préjudice est, au minimum, égal au montant de cette garantie,
- en conséquence, condamner la société Gecina à lui payer la somme de 24. 209, 88 € et, subsidiairement celle de 18. 398, 18 €, correspondant au montant de la créance garantie,
- constater, en outre, que l'inexécution contractuelle commise par la société Gecina l'a privée d'une chance de recouvrer le surplus de sa créance,
- dire que cette perte de chance peut être indemnisée par le versement d'une somme complémentaire de 36. 478, 86 €,
- condamner, en conséquence, la société Gecina à lui régler cette somme de 36. 478, 86 €,
- ordonner la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil à compter de la première mise en demeure du 5 mars 2008,
- condamner la société Gecina à lui payer une somme de 3. 000 € de à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive,
- confirmer le jugement pour le surplus,
- condamner la société Gecina à lui payer une somme de 3. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens.
La société Gecina prie la Cour, par dernières conclusions signifiées le 6 septembre 2016, de :
- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,
- débouter la SCI Stanford de ses demandes,
- la condamner au paiement de la somme de 3. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en sus des entiers dépens.
SUR CE
LA COUR
Au soutien de son appel, la SCI Stanford rappelle que, par application de l'article 1692 du code civil, la cession d'une créance comprend les accessoires de cette créance tels caution, privilège ou hypothèse, de sorte que la société Parigest a commis une inexécution contractuelle en ne lui remettant pas la caution bancaire de la banque Monte Paschi alors que la vente subrogeait l'acquéreur dans les droits de propriétaire de la venderesse ; elle ajoute que les manquements de la société Gecina lui ont fait perdre une chance de recouvrer le surplus de sa créance dès lors que la banque Monte Paschi se serait très probablement, une fois sa garantie mise en jeu, jointe à ses efforts pour obtenir le recouvrement des impayés et du montant des travaux de remise en état de l'appartement dégradé par les locataires ;
La SCI Gecina reconnaît qu'elle a restitué par erreur aux consorts Y... la caution bancaire de la banque Monte Paschi en original, mais conteste la créance locative invoquée par la société Stanford, eu égard aux incertitudes et contradictions relatives aux règlements opérés par ces locataires ; elle fait encore observer que le surplus de la créance invoquée par l'appelante au titre des travaux de réfection du logement, n'est pas démontré avec certitude, en sorte que le montant de la créance reste indéterminé ;
En droit, en cas de vente de l'immeuble donné à bail, le cautionnement garantissant le paiement des loyers est, sauf stipulation contraire, transmis de plein droit aux nouveaux propriétaires en tant qu'accessoire de la créance de loyer cédée à l'acquéreur, de sorte qu'il importe peu que la société Parigest ne se soit pas engagée à l'acte de vente à transmettre à la SCI Stanford la caution de la banque Monte Paschi qui devait lui bénéficier ;
Les consorts Y... ont été condamnés, par ordonnance du 18 février 2008 du tribunal d'instance du 16ème arrondissement, qui a résilié leur bail à la date du 17 février 2007, à régler à la SCI Stanford les loyers impayés au jour de l'ordonnance, soit la somme de 5. 776, 50 €, ainsi que des indemnités d'occupation correspondant au montant du loyer majoré de 10 %, à compter du 1er mars 2007 ; ils ont quitté les lieux au mois de septembre 2008 sans avoir apuré leur dette de loyers et d'indemnités d'occupation, n'ayant réglé que les sommes de 11. 550 € et 1. 334, 74 € ; les deux saisies-attributions pratiquées, les 23 avril et 28 août 2008 sur leurs comptes bancaires ouverts dans les livres de la banque Monte Paschi se sont avérées infructueuses ;
En ce qui concerne le montant de la dette de loyers des consorts Y..., il convient de rappeler que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et que, réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; de ce fait, il incombe à la société Gecina qui prétend que les consorts Y... se seraient libérés de leur obligation à paiement de le prouver, ce qu'elle ne fait pas et le tribunal ne pouvait, au prétexte d'absence de décompte précis contradictoire, considérer qu'il n'était pas démontré que le solde de la dette locative fût supérieur à celui garanti par la caution bancaire ;
En s'abstenant de remettre à la SCI Stanford la caution de la banque Monte Paschi, accordée aux consorts Y... à hauteur de la somme de 120. 684 F soit 18. 398, 16 €, correspondant à douze mois loyers plus charges plus taxes, la société Parigest a manqué à ses obligations contractuelles, ce qui justifie sa condamnation à réparer le préjudice en découlant pour la SCI Stanford, laquelle aurait, si cette caution lui avait été remise, pu obtenir de la banque le paiement de douze mois de loyers augmentés des charges et frais, soit la somme minimale de 18. 398, 18 €, inférieure au montant de la créance d'impayés de la SCI Stanford qui s'élève, selon les poursuites engagées par son huissier en recouvrement des sommes faisant l'objet de titres exécutoires, à la somme de totale de 50. 028, 55 € hors frais de procédure et dépens et, suivant les calculs de l'expert-comptable de la SCI Stanford, à la somme de 54. 977, 04 € ;
Pour le surplus, la SCI Stanford n'établit pas avoir subi une perte de chance de recouvrer le surplus de sa créance locative qui serait en relation certaine et directe avec les manquements de la société Gecina, dès lors que rien n'établit que la banque Monte Paschi aurait exercé des pressions sur ses clients pour les persuader d'acquitter les loyers et frais impayés si sa caution avait été appelée, hypothèse relevant de suppositions purement gratuites sur les rapports de la banque et des clients, promoteurs immobiliers au Maroc ;
En conséquence, le jugement sera, dans la limite de l'appel interjeté, infirmé, et la société Parigest aux droits de la société Gecina sera condamnée à régler à la SCI Stanford la somme de 18. 398, 18 € correspondant à la garantie perdue par la faute de l'intimée ; cette somme indemnitaire sera assortie des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt et de la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil ;
Il n'est pas démontré que la société Gecina aurait fait dégénérer en abus par malice, légèreté blâmable ou intention de nuire sa résistance aux demandes de la SCI Stanford, de sorte que celle-ci sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive ;
En équité, la société Gecina sera condamnée à régler à la SCI Stanford la somme de 3. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement, dans la limite de l'appel interjeté,
Infirme le jugement en ce qu'il a débouté la SCI Stanford de sa demande de dommages-intérêts en raison de la non-remise de la caution bancaire de la banque Monte Paschi,
Statuant à nouveau,
Condamne la société Gecina à payer à la SCI Stanford la somme de 18. 398, 18 € à titre de dommages-intérêts, avec intérêts au taux légal du présent arrêt et la capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil,
Condamne la société Gecina à payer à la SCI Stanford la somme de 3. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toute autre demande,
Condamne la société Gecina aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier, La Présidente,