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26/04/2017 | FRANCE | N°13/02074

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 26 avril 2017, 13/02074


Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4



ARRÊT DU 26 AVRIL 2017



(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 13/02074



Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Janvier 2013 -Tribunal de Commerce de LYON - RG n° 12/J177





APPELANTE



SAS TEXTO FRANCE

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 399 861 194 (Angers)r>
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



Représentée par Maître Laurence TAZE BERNARD, avocat au barreau de PARIS, toque : P0241

Ayant pour ...

Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 4

ARRÊT DU 26 AVRIL 2017

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 13/02074

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Janvier 2013 -Tribunal de Commerce de LYON - RG n° 12/J177

APPELANTE

SAS TEXTO FRANCE

ayant son siège social [Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 399 861 194 (Angers)

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître Laurence TAZE BERNARD, avocat au barreau de PARIS, toque : P0241

Ayant pour avocat plaidant Maître Stéphane ANDREO, avocat au barreau de LYON, toque : 36

INTIMÉE

SARL RPM COMPAGNY

ayant son siège social [Adresse 2]

[Adresse 2]

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentée par Maître Elise ORTOLLAND de la SEP ORTOLLAND, avocat au barreau de PARIS, toque : R231

Ayant pour avocat plaidant Maître RENAUD BARIOZ, avocat au barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Février 2017, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant Madame Irène LUC, Présidente, et Monsieur François THOMAS, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Irène LUC, Présidente de chambre

Madame Dominique MOUTHON VIDILLES, Conseillère

Monsieur François THOMAS, Conseiller, rédacteur

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur François THOMAS dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile,

Greffier, lors des débats : Mme Patricia DARDAS

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Irène LUC, Présidente et par Monsieur Vincent BRÉANT, greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DES FAITS

La société Texto France, qui a pour activité la création, la fabrication et la distribution de chaussures, les commercialise sous la marque TEXTO par l'intermédiaire d'un réseau de magasins répartis sur toute la France.

Le 2 avril 1999, cette dernière a signé avec la société RPM Compagny, spécialisée dans le secteur d'activité du commerce de détail de la chaussure, un contrat dit 'de commission affiliation' aux termes duquel la seconde, en sa qualité de commerçant indépendant, acceptait de vendre au nom et pour le compte de la première les marchandises remises en dépôt à cette fin, avait le droit d'utiliser la marque TEXTO à titre d'enseigne uniquement pour son fonds de commerce situé [Adresse 2], en contrepartie du versement d'une commission égale à 35 % HT du chiffre d'affaires réalisé par l'affiliée, et ce, pour une durée de 4 ans renouvelable par tacite reconduction d'année en année.

Le même jour ces parties ont également signé un contrat de location et d'assurance portant sur la mise à disposition d'un terminal de point de vente et une enseigne destinée à la devanture.

Par un avenant du 12 juillet 2000, la société RPM Compagny s'est engagée à vendre exclusivement des produits de la marque Texto.

Par un autre avenant n° 3 au contrat du 1er mars 2007 l'exploitation du fonds de commerce par l'affiliée a été transférée dans un magasin implanté [Adresse 2], les autres clauses demeurant inchangées.

Le 4 avril 2007, la société Texto Developpement, filiale de la société Texto France, a confié par un contrat de location gérance l'exploitation à la société RPM Compagny dudit fonds de commerce de vente au détail de chaussures situé [Adresse 2], dont la première est propriétaire, et ce, pour une durée d'une année renouvelable par tacite reconduction, moyennant une redevance de 6,5 % du chiffre d'affaires HT réalisé par la locataire gérant, avec une redevance minimum mensuelle fixée à 3100 euros HT.

La société RPM Compagny a poursuivi l'exploitation d'un commerce sous l'enseigne 'Quoi d'autre'' au [Adresse 2], ainsi que l'exploitation de deux autres magasins sous cette même enseigne à [Localité 1] au [Adresse 3], dans le Rhône.

Par courrier recommandé du 28 octobre 2010, la société Texto France a notifié à la société RPM Compagny la résiliation des contrats afférents à l'exploitation du magasin situé [Adresse 2], avec effet au 7 avril 2011.

Se plaignant d'une rupture brutale des relations commerciales établies, la société RPM Compagny a fait assigner le 28 décembre 2011, sur le fondement de l'article L 442-6-1 5 du code de commerce, la société Texto France en indemnisation de son préjudice devant le tribunal de commerce de LYON, lequel par jugement du 14 janvier 2013 a notamment retenu que la rupture des relations commerciales établies entre les sociétés RPM Compagny et Texto France présentait un caractère brutal, dit que le préavis devait être de 17 mois, condamné la société Texto France à verser à la société RPM Compagny la somme de 254.942 euros au titre des indemnités réparatrices de préjudice, débouté la société RPM Compagny de sa prétention relative aux immobilisations non amorties, ordonné l'exécution provisoire.

A la suite de l'appel interjeté par la société Texto France, la cour d'appel de Paris a, par arrêt du 13 mai 2015 :

- infirmé le jugement querellé sur la recevabilité de la demande relative à la rupture du contrat de location gérance et sur la durée du préavis,

- dit irrecevable la demande en ce qu'elle porte sur la rupture du contrat de location gérance,

- fixé la durée de préavis applicable à la rupture des relations commerciales issues du contrat de commission affiliation et du contrat de location et d'assurance à douze mois,

- avant dire droit, sur l'indemnité devant être allouée à la société RPM Compagny, ordonné une consultation confiée à Madame [V] [O] afin qu'elle donne son avis sur le taux de marge brute applicable à l'activité de vente de chaussures à laquelle cette dernière a procédé dans le cadre du contrat de commission-affiliation, et qu'elle donne également tous éléments utiles à la cour pour sa détermination,

- dit que la société RPM Compagny versera une somme de 5.000 euros à titre de provision pour l'expert,

- sursis à statuer sur les dommages et intérêts devant être alloués à la société RPM Compagny.

Madame [O] a déposé son rapport le 22 juillet 2016.

Selon dernières conclusions du 6 février 2017 la société Texto France :

- sollicite l'infirmation du jugement rendu par le tribunal de commerce de Lyon le 14 janvier 2013 en toutes ses dispositions,

- estime que l'indemnité à laquelle la société RPM Compagny peut prétendre au titre du préavis de 7 mois dont elle n'a pas bénéficié, ne saurait excéder la somme de 53.175 euros,

- réclame la condamnation de cette dernière à lui restituer la somme de 201.767 euros versée au titre de l'exécution provisoire attachée au jugement critiqué, avec intérêts au taux légal à compter des présentes écritures valant mise en demeure et capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1154 du code civil,

- considère que les frais et honoraires de la mesure de consultation confiée à Mme [O], en raison de la carence de la société RPM Compagny dans la justification de son préjudice, seront intégralement supportés par cette dernière,

- sollicite la condamnation de la société RPM Compagny à lui verser une somme de 15.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 25 janvier 2017 la société RPM Compagny :

- fait valoir que le préjudice qu'elle a subi doit s'entendre de la perte de marge brute sur la période de préavis non respectée par la société Texto France que la cour a fixé à 7 mois,

- sollicite la condamnation de la société Texto France à lui verser la somme de 124.214 euros à titre de dommages et intérêts,

- demande sa condamnation à lui verser la somme de 15.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, en ce compris le coût de la mesure d'instruction confiée à madame [O].

MOTIVATION

Devant la cour le débat est circonscrit à l'évaluation de l'indemnité devant revenir à la société RPM Compagny.

Cette dernière critique le rapport de consultation déposé le 22 juillet 2016 par Madame [O], en premier lieu, en ce qu'elle aurait méconnu les dispositions de l'article 238 du code de procédure civile en ne se limitant pas au calcul de la marge brute et en ne respectant pas le principe du contradictoire.

Mais, à juste titre l'appelante réplique que Madame [O] n'a pas excédé sa mission, puisque celle-ci portait non seulement sur un avis à donner sur le taux de marge brute applicable à l'activité de vente de chaussures dans le cadre du contrat de commission-affiliation mais également sur tous éléments utiles à la cour pour la détermination de ce taux, dont elle n'avait pas connaissance, et ce, dans le but d'évaluer le préjudice économique, alors qu'elle avait déjà fixé le délai de préavis, connaissait les chiffres d'affaires et avait rejeté la demande d'immobilisations non amorties de l'intimée ; en tout état de cause le juge peut toujours s'approprier l'avis de l'expert judiciaire. Par ailleurs cette consultante a le 20 mai 2016 communiqué 'une note d'étape' aux parties et à leurs conseils en leur demandant de lui transmettre leurs observations éventuelles au plus tard le 17 juin 2016, de sorte qu'elle les a informées de ses propres constatations, en prenant en compte les pièces justificatives de chacun.

Ces deux premiers moyens sont par conséquent inopérants.

En second lieu, la société RPM Compagny fait grief à Madame [O] d'avoir calculé en réalité la perte de marge nette subie par elle alors que la cour avait jugé que l'indemnisation devait se calculer par référence à la perte de marge brute, l'indemnisation s'élevant alors à la somme de 124.214 euros.

L'appelante objecte que le taux de marge brute théorique correspond à ce que l'intimée a perçu avant la rupture des relations et comprenait donc les charges que cette société supportait pour exercer son activité. Elle rétorque donc que ce taux n'est pertinent que si les charges sont demeurées les mêmes, ce qui n'aurait pas été le cas.

La marge brute est une notion comptable définie comme la différence entre le chiffre d'affaires HT et les coûts HT ; la marge réellement dégagée par une entreprise ne peut être connue qu'après imputation des coûts dits variables, c'est à dire des charges qui varient en fonction du chiffre d'affaires, car en même temps qu'il a perdu du chiffre d'affaires le partenaire commercial évincé a en effet pu économiser certains coûts. Dans ces conditions le préjudice doit être calculé sur la base de la marge brute jusqu'au terme prévu du contrat, déduction faite des coûts variables relatifs à la commercialisation des produits. Le recours à la marge brute se justifie par le fait que la victime de la rupture continue de supporter certaines charges fixes, mais lorsqu'elle cesse son activité elle n'assure plus lesdites charges et la référence à la marge brute n'est plus justifiée.

Ainsi il ressort du rapport de Madame [O], expert comptable, de juillet 2016 que sur la période comprise entre le 8 avril et le 7 novembre 2011, la société RPM Compagny a subi, en raison de la rupture des relations commerciales avec la société Texto France, une perte de commissions égale au montant annuel normal HT d'un montant de 264.849 euros, multipliée par la durée de 7 mois de préavis complémentaire dont elle aurait dû bénéficier, soit une somme de 154.495 euros et après application du taux de marge brute de 80,40 %, une somme de 124.214 euros, laquelle n'est pas remise en cause par l'intimée.

L'expert judiciaire a alors justement calculé que sur cette même période la société RPM Compagny a réalisé des économies de frais fixes, en particulier en frais de personnel pour un montant mensuel de 10.008 euros, en loyer pour le Terminal Point de Vente (contrat de location et d'assurance), soit pour une durée de 7 mois un total de 71.039 €, de sorte que le préjudice réellement subi par celle-ci s'élève à la somme de 53.175 €, que devra lui régler la société Texto France.

Il convient de retenir l'analyse de l'expert judiciaire, et le montant du préjudice qu'elle a proposé.

La décision des premiers juges sera donc infirmée de ce chef.

La société Texto France sollicite, pour sa part, la restitution du trop perçu au titre de l'exécution provisoire attachée au jugement du tribunal de commerce de Lyon, à savoir une somme de 201.767 euros avec intérêts au taux légal, outre la capitalisation desdits intérêts à compter des conclusions notifiées le 31 octobre 2016 qui valaient mise en demeure de procéder à cette restitution, l'allocation d'une somme de 15.000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile et la condamnation de son adversaire à payer les frais de la consultation de Madame [O] dans la mesure où elle perd son procès.

L'intimée objecte que la cour n'a pas à prononcer une condamnation en restitution, que le point de départ des intérêts ne peut être antérieur à la date du présent arrêt, que l'appelante succombe en ses prétentions puisqu'elle prétendait à titre principal que les demandes auraient été irrecevables et à titre subsidiaire avoir respecté un préavis suffisant.

Il est de principe que la partie qui doit restituer partie de la somme qu'elle détenait en vertu d'une décision de justice exécutoire n'en doit les intérêts au taux légal qu'à compter de la notification, valant mise en demeure de la décision ouvrant droit à restitution.

Par suite la société RPM Compagny doit restituer à la société Texto France la somme de 201.767 euros avec intérêts au taux légal à compter de la notification du présent arrêt ouvrant droit à restitution.

La capitalisation des intérêts sera ordonnée dans les conditions de l'article 1154 du code civil.

Les frais de la mesure de consultation et les dépens resteront à la charge de la société Texto France qui succombe en l'essentiel de ses prétentions.

PAR CES MOTIFS

Par arrêt contradictoire,

Dans les limites de l'arrêt rendu le 13 mai 2015 par la cour d'appel de PARIS,

INFIRME la décision rendue le 14 janvier 2013 par le tribunal de commerce de Lyon exclusivement du chef des indemnités réparatrices de préjudices,

Statuant à nouveau de ce seul chef,

CONDAMNE la société Texto France à verser à la société RPM Compagny la somme de 53.175 euros en réparation de son préjudice économique,

EN CONSÉQUENCE DIT que la créance de restitution d'un montant de 201.767 euros à la charge de la société RPM Compagny portera intérêts au taux légal à compter de la notification du présent arrêt et que lesdits intérêts seront capitalisés dans les termes de l'article 1154 du code civil,

CONFIRME la décision du 14 janvier 2013 sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société Texto France à payer à la société RPM Compagny la somme complémentaire de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société Texto France aux dépens comprenant les frais de la consultation de Madame [O].

Le GreffierLa Présidente

Vincent BRÉANT Irène LUC


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 13/02074
Date de la décision : 26/04/2017

Références :

Cour d'appel de Paris I4, arrêt n°13/02074 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-04-26;13.02074 ?
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