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17/05/2017 | FRANCE | N°16/05397

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 17 mai 2017, 16/05397


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRÊT DU 17 Mai 2017

(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/05397



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Mars 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 15/2652





APPELANTE

SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 572 053 833 000 107

représentée par Me Da

vid RAYMONDJEAN, avocat au barreau de PARIS, toque : C0948 substitué par Me Anne-eugénie FAURE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0883







INTIMÉ

Monsieur [Z] [Q]

[Adresse 2]

[Lo...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRÊT DU 17 Mai 2017

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/05397

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 22 Mars 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 15/2652

APPELANTE

SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN

[Adresse 1]

[Localité 1]

N° SIRET : 572 053 833 000 107

représentée par Me David RAYMONDJEAN, avocat au barreau de PARIS, toque : C0948 substitué par Me Anne-eugénie FAURE, avocat au barreau de PARIS, toque : A0883

INTIMÉ

Monsieur [Z] [Q]

[Adresse 2]

[Localité 2]

représenté par Me Laurence SOLOVIEFF, avocat au barreau de PARIS, toque : A0007

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2016/048005 du 20/12/2016 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Mars 2017, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. Benoît DE CHARRY, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M Benoît DE CHARRY, Président de chambre

Mme Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, Conseillère

Mme Séverine TECHER, vice-présidente placée

Greffier : Mme Clémence UEHLI, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Monsieur Benoît DE CHARRY, Président et par Madame Clémence UEHLI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES

Monsieur [Z] [Q] a été engagé par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 10 janvier 2005 en qualité d'agent de nettoyage par une société dont le marché a été repris par la SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN .

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des entreprises de nettoyage.

La SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN occupait à titre habituel au moins onze salariés lors de la rupture des relations contractuelles.

Par lettre du 10 octobre 2014, la SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN a fait connaître à Monsieur [Z] [Q], qui jusque-là était affecté à des prestations de nettoyage sur la ligne D du RER à [Localité 3], qu'elle l'affectait à compter du 20 octobre suivant sur le site de l'université [Établissement 1] à [Localité 4].

Monsieur [Z] [Q] a refusé cette affectation malgré une mise en demeure de rejoindre ce site.

La SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN lui a notifié, le 2 décembre 2014, sa mutation disciplinaire sur le chantier fret SNCF de Clichy-la-Garenne.

Monsieur [Z] [Q] a refusé de rejoindre cette affectation malgré plusieurs mises en demeure de son employeur.

Par lettre en date du 29 décembre 2014, Monsieur [Z] [Q] a été convoqué à un entretien préalable fixé au 9 janvier 2015.

Par lettre en date du 14 janvier 2015, Monsieur [Z] [Q] a été licencié pour faute grave.

Contestant notamment son licenciement, Monsieur [Z] [Q] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris qui, par jugement en date du 22 mars 2016 auquel la Cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, a :

-dit le licenciement injustifié,

-condamné la SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN à payer à Monsieur [Z] [Q] :

*3152 euros à titre de préavis,

*315 euros au titre des congés payés afférents,

*3480,92 euros à titre d'indemnité de licenciement,

*5207,69 euros à titre de salaire du 21 octobre 2000 14 au 31 janvier 2015,

*520,76 euros au titre des congés payés afférents,

*15 000 à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*1000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile profit de Me [Y], avocat intervenant au titre de l'aide juridictionnelle,

-débouté Monsieur [Z] [Q] du surplus de ses demandes.

La SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN a relevé appel de ce jugement par déclaration parvenue au greffe de la cour le 7 avril 2016.

La SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN soutient que Monsieur [Z] [Q] n'est pas fondé à revendiquer la qualification de chef d'équipe, qu'elle n'est pas redevable de rappels de primes et que le licenciement est justifié.

En conséquence, elle sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a condamnée à payer les indemnités de rupture, un rappel de salaire et une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sa confirmation pour le surplus et la condamnation de Monsieur [Z] [Q] à lui payer 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

En réponse, Monsieur [Z] [Q] fait valoir qu'il exerçait des fonctions de chef d'équipe, qu'il est fondé à obtenir des rappels de primes et que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

En conséquence, il sollicite l'infirmation partielle de la décision entreprise et la condamnation de la SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN à lui payer :

*5997,98 euros et 599,79 euros à titre de rappel de salaire et d'indemnité de congés payés afférents pour la période du 1er mai 2012 au 31 janvier 2015,

et a titre subsidiaire,

*4434,56 et 443,45 euros à titre de rappels de salaires et d'indemnités de congés payés afférents pour la période du 1er mai 2012 au 31 janvier 2015,

*412,54 euros et 41,25 euros à titre de rappel d'indemnité compensatrice de préavis et d'indemnité de congés payés sur préavis,

et à titre subsidiaire,

*291,20 euros et 29,10 euros à titre de rappel d'indemnité compensatrice de préavis e d'indemnité de congés payés sur préavis,

*5355,22 euros 535,52 euros à titre de rappels de salaires et d'indemnités de congés payés afférents pour la période du 21 octobre 2014 31 janvier 2015,

*5000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par l'interruption brutale du versement de son salaire,

*700 euros et 70 euros à titre de rappel de prime d'objectif et d'indemnité de congés payés afférents pour la période du 1er avril 2000 14 au 31 janvier 2015,

*140 euros et 14 euros à titre de rappel afférent sur les indemnités compensatrices de préavis et indemnité de congés payés sur préavis,

*1580 euros et 178 euros à titre de rappel de primes dites exceptionnelles et d'indemnité de congés payés afférents pour la période du 1er janvier 2014 au 31 janvier 2015,

*300 euros et 30 euros à titre de rappel afférent sur les indemnités compensatrices de préavis et indemnité de congés payés sur préavis,

*40 316,91 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans réelle et sérieuse,

*4381,69 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

*438,16 euros au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis,

*3480,92 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement,

et à titre subsidiaire, si la cour estime le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse,

*4381,69 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

*438,16 euros au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis,

*3480,92 euros au titre de l'indemnité de légale de licenciement

avec intérêts au taux légal à compter de la date de l'introduction de l'instance et capitalisation des intérêts,

*2500 euros au titre de l'article dont distraction aux profits de Maître [Y] en application de l'article 700 alinéa 2 et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

MOTIFS

Vu le jugement du conseil de prud'hommes, les pièces régulièrement communiquées et les conclusions des parties, visées par le greffier et soutenues oralement à l'audience, auxquels il convient de se référer pour plus ample information sur les faits, les positions et prétentions des parties.

Sur les demandes au titre de la classification

Monsieur [Z] [Q] soutient que son employeur lui avait confié des fonctions de chef d'équipe 'uvrant, relevant de la catégorie CE 1, voire CE2 de l'annexe I relatives aux classifications de la convention collective nationale des entreprises de propreté.

La SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN répond que Monsieur [Z] [Q] ne peut revendiquer de qualification supérieure à celle indiquée dans l'avenant au contrat de travail du 23 avril 2012, AQS1A, agent de service qualifié.

Il appartient au salarié qui se prévaut d'une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail, de démontrer qu'il assure de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique.

Monsieur [Z] [Q] fait valoir qu'il assurait le contrôle du nettoyage et que plusieurs documents le désignent comme responsable chantier.

Selon la grille de classification d'un chef d'équipe qui figure dans l'annexe la convention collective précitée, celui-ci est un personnel qui assure la coordination d'une équipe relevant des qualifications AS1 à AS3 et la bonne exécution des travaux et qui veille au respect de la discipline et des consignes d'hygiène et de sécurité.

S'il résulte de la lettre de satisfaction de l'adjointe qualité de la direction des lignes Transilien R E R du 24 juillet 2014 que Monsieur [Z] [Q] travaillait au sein d'une équipe, l'intéressé ne démontre pas qu'il en assurait la coordination, ni qu'il veillait au respect de la discipline et des consignes d'hygiène de sécurité.

À titre subsidiaire, Monsieur [Z] [Q] estime qu'il relève, à tout le moins, de la qualification d'Agent Très Qualifié de Service, Niveau 2, dans la mesure où cette dernière qualification correspondant à un degré d'autonomie et d'initiative qui était au minimum incontestablement le sien, ainsi que l'exécution de prestations complexes et combinées les plus délicates et l'évaluation des acquis conjointement avec sa hiérarchie.

Selon la grille de classification contenue dans l'annexe I de la convention collective nationale des entreprises de propreté, l'agent très qualifié de service (ATQS) est chargé de prestations qui nécessitent des travaux de haute technicité ou des opérations complexes. L'ATQS a la responsabilité de l'entretien et de la maintenance des matériels électromécaniques et complexes qu'il utilise. Il évalue ses acquis conjointement avec sa hiérarchie, rédige des rapports et les transmet à sa hiérarchie.

Monsieur [Z] [Q] ne justifie pas que les prestations dont il était chargé nécessitaient des travaux de haute technicité ou des opérations complexes, dans la mesure où les documents qu'il produit aux débats ne font état que de misions de nettoyage de voies, où l'intéressé ne justifie pas être chargé de l'entretien de la maintenance de matériels électromécaniques et complexes et où il ne verse aucun rapport qu'il aurait rédigé et transmis à ses supérieurs.

En conséquence, le jugement est confirmé et Monsieur [Z] [Q] est débouté de ses demandes de rappel de salaire, et de congés payés afférents, de rappel de prime d'expérience et de rappel au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et d'indemnité de congés payés sur préavis.

Sur les demandes au titre du rappels de primes

Monsieur [Z] [Q] fait valoir qu'il résulte de la jurisprudence applicable qu'une prime qui revêt les caractères de constance, fixité et généralité, caractérisant dès lors un usage, ne peut être supprimée unilatéralement par l'employeur, et qu'il percevait deux prime mensuelles avant que son employeur ne les supprime.

Il sollicite un rappel de rémunération au titre de ces primes, ainsi qu'un rappel au titre des congés payés afférents.

La SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN répond que ces primes ont été versées certains mois et pour des montants variables, de sorte qu'elles ne résultent pas d'un usage.

L'examen des bulletins de salaire de Monsieur [Z] [Q] fait apparaître qu'il a perçu, certains mois, une prime d'objectif d'un montant variable, de 30 à 80 euros, et qu'il a également perçu, certains mois, une prime exceptionnelle d'un montant variant de 80 à 150 euros.

Ces primes ne résultent ni du contrat de travail ni d'un accord collectif applicable. Le versement d'une prime peut résulter d'un usage, lequel suppose que soient remplies les conditions de généralité, de constance et de fixité. La généralité exige que la prime soit reconnue à l'ensemble des salariés ou à l'ensemble d'une catégorie du personnel. Monsieur [Z] [Q] qui revendique l'existence d'un usage, et sur qui pèse la charge de la preuve de son existence, ne démontre pas que le versement des primes avait un caractère de généralité.

Le jugement est confirmé.

Sur le licenciement

La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est ainsi rédigée:

« Nous avons pris la décision de vous licencier pour faute en raison des faits ci-après exposés.

Le 10 octobre 2014, nous vous avons fait parvenir un courrier par lequel nous vous informions de votre affectation sur le site de l'Université [Établissement 1] à [Localité 4], suite à des besoins liés à une nouvelle organisation de service. Vous l'avez refusée par deux fois malgré nos explications par courrier du 20 octobre 2014, et c'est dans ce contexte que nous avons été contraints de vous notifier une mutation disciplinaire le 02 décembre 2004 sur le site Fret SNCF Clichy-la-Garenne...

Cette mutation disciplinaire avec eux prise d'effet immédiate vous a bien été notifiée à votre domicile dès le 03 décembre 2014 (date du distribution du courrier recommandé). Or, vous ne vous êtes pas présenté à votre poste de travail depuis cette date, sans y être autorisé et sans nous avoir fourni de justificatif relatif à cette absence, et ce, malgré nos mises en demeure adressées par courrier en date des 09 et 22 décembre 2014.

Ces faits sont graves et intolérables dans la mesure où votre absence prolongée et injustifiée perturbe profondément le fonctionnement de nos services et par la même, la qualité de nos prestations.

Nous vous notifions donc, par la présente, votre licenciement pour faute grave. Votre licenciement prend effet à la date d'envoi du présent courrier. »

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

Au cas d'espèce, la SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN fait grief à Monsieur [Z] [Q] de ne s'être pas présenté à son poste de travail durant plusieurs semaines, sans autorisation ni justificatif.

Monsieur [Z] [Q] ne conteste pas avoir refusé de rejoindre le poste auquel il avait été affecté par mesure disciplinaire, en faisant valoir qu'il était fondé à refuser une précédente mutation, refus sur lequel son employeur avait fondé la sanction.

Monsieur [Z] [Q] fait valoir qu'il était affecté à [Localité 3], que le lieu de travail était contractuellement fixé, de sorte qu'aucune mutation, constitutive d'une modification de son contrat de travail, ne pouvait intervenir sans son accord.

La SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN conteste l'existence d'une disposition contractuelle relative à la détermination du lieu d'exécution du travail et répond que la modification de celui-ci constitue un simple changement des conditions de travail que l'employeur peut décider unilatéralement.

La mention d'un lieu de travail dans le contrat de travail a valeur d'information à moins qu'il ne soit stipulé par une clause claire et précise que le salarié exécutera son travail exclusivement dans un lieu.

Le contrat de travail initial n'est pas produit aux débats, de sorte qu'il n'est pas démontré que celui-ci contient une clause expresse de localisation de l'emploi. L'avenant au contrat de travail en date du 8 août 2007 qui dispose dans son article 5 que lors de la conclusion de cet avenant, Monsieur [Z] [Q], affecté sur le chantier de la gare de [Localité 3], pouvait être affecté dans tout autre chantier situé dans le ressort de l'établissement de Rungis, n'a été conclu que pour la période du 8 août au 31 août 2007, les autres articles du contrat de travail initial du 15 juin 2005 restant inchangés, de sorte que cet avenant ne fixe pas le lieu d'emploi de Monsieur [Z] [Q] pour la période postérieure à celle de sa validité. L'avenant au contrat de travail du 23 avril 2012 porte la mention : « lieu de travail : gare [Localité 3] », mais il est dépourvu de toute indication selon laquelle cette affectation est exclusive de tout autre lieu. En conséquence, Monsieur [Z] [Q] ne peut revendiquer l'existence d'une disposition contractuelle faisant obstacle un changement de son lieu de travail décidé unilatéralement par son employeur.

La modification du lieu de travail à l'intérieur d'un même bassin d'emploi constitue un simple changement des conditions de travail et non une modification du contrat de travail. L'affectation de Monsieur [Z] [Q] à [Localité 4], dans le bassin d'emploi que constitue la couronne parisienne et dans lequel se situe également la gare de [Localité 3], ne conduit pas à modifier le contrat de travail de l'intéressé et constitue un simple changement de ses conditions de travail.

Monsieur [Z] [Q] soutient, mais sans en justifier faute de produire le moindre document émanant de l'employeur ou de l'université [Établissement 1], ou encore la moindre attestation, que ses fonctions et ses horaires de travail auraient été modifiés par suite de sa mutation à [Localité 4]. En conséquence, cette mutation n'avait pas pour effet de modifier son contrat de travail.

Monsieur [Z] [Q] soutient que la mutation à [Localité 4] avait pour conséquence de lui causer une atteinte disproportionnée à sa vie personnelle et familiale, [Localité 4] étant située à plus de 60 km de [Localité 3]. Or Monsieur [Z] [Q] ne résidait pas à proximité de [Localité 3], mais à Paris (19ème). Il n'est pas contesté qu'il était possible de se rendre de son domicile à l'université en empruntant les transports en commun et Monsieur [Z] [Q] n'établit pas que ses horaires de travail étaient incompatibles avec l'utilisation de ces moyens de transport. Monsieur [Z] [Q] ne prouve pas non plus que le temps de trajet entre son lieu de résidence et son lieu d'affectation se trouvait sensiblement allongé par suite de la mutation. Ainsi, Monsieur [Z] [Q] ne démontre pas que son affectation constituait une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie personnelle et familiale.

Monsieur [Z] [Q] fait enfin valoir que la mutation d'octobre 2014 était abusive, particulièrement déloyale, non conforme à l'intérêt de l'entreprise et consécutive à son intention de saisir la juridiction prud'homale.

La bonne foi contractuelle est présumée, de sorte qu'il n'y a pas lieu de rechercher si la décision de l'employeur de changer les conditions de travail d'un salarié est conforme à l'intérêt de l'entreprise. Il incombe au salarié de démontrer que cette décision a, en réalité, été prise pour des raisons étrangères à cet intérêt ou mise en 'uvre dans des conditions exclusives de la bonne foi contractuelle.

Monsieur [Z] [Q] ne démontre pas que la SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN a décidé de le muter par mesure de rétorsion à l'égard de ses demandes de primes et notamment pas que, dès le mois de juillet 2014, l'employeur l'a menacé de mutation. Les courriers du 12 mai et 10 juin 2014 ont été reçus par la SNCF et il n'est pas démontré que la SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN en n'a été destinataire. Si par une lettre adressée en juillet 2014 à la SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN, Monsieur [Z] [Q] a sollicité le rappel de primes des mois de mars à juillet, à défaut de quoi il se verrait dans l'obligation de saisir les prud'hommes, aucun élément ne permet de relier cette réclamation à la décision de mutation prise plusieurs mois plus tard.

En conséquence, Monsieur [Z] [Q] ne pouvait légitimement refuser son affectation à [Localité 4]. Son refus définitif et injustifié de rejoindre ce poste et d'y travailler, malgré la mise en demeure de son employeur du 20 octobre 2014, constitue un manquement à ses obligations découlant du contrat de travail justifiant une sanction disciplinaire sous forme d'une mutation. Son refus persistant de rejoindre son poste, exprimé dans une lettre du 18 décembre 2014 en réponse à une mise en demeure de son employeur de justifier de son absence depuis le 3 décembre 2014 ou de reprendre le travail immédiatement, constitue un manquement à ses obligations découlant du contrat de travail dont la gravité etait telle qu'elle rendait impossible le maintien de ce dernier.

Le licenciement pour faute grave est justifié.

Il y a donc lieu d'infirmer la décision déférée en ce qu'elle a jugé le contraire et qu'elle a alloué au salarié concerné, outre des indemnités de rupture, un rappel de salaire pour la période du 21 octobre 2014 au 31 janvier 2015 ainsi qu'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les frais irrépétibles

Dès lors que la cour infirme le jugement quant au caractère fondé du licenciement, elle en infirme également la disposition relative aux frais irrépétibles.

Partie succombante, Monsieur [Z] [Q] est condamné à payer à la SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN la somme de 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Sur les dépens

Partie succombante, Monsieur [Z] [Q] est condamné au paiement des dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

INFIRME le jugement mais seulement en ce qu'il a déclaré injustifié le licenciement et condamné la SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN au paiement d'une indemnité de préavis et de congés payés afférents, d'une indemnité de licenciement, de rappels de salaire et de congés payés afférents, d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

DIT le licenciement pour faute grave fondé,

DÉBOUTE Monsieur [Z] [Q] de l'ensemble de ses demandes,

Ajoutant,

CONDAMNE Monsieur [Z] [Q] à payer à la SAS ENTREPRISE GUY CHALLANCIN la somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

CONDAMNE Monsieur [Z] [Q] au paiement des dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 16/05397
Date de la décision : 17/05/2017

Références :

Cour d'appel de Paris K6, arrêt n°16/05397 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-05-17;16.05397 ?
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