RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 9
ARRÊT DU07 Juin 2017
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S 14/03520
Décision déférée à la cour : SUR RENVOI APRES CASSATION du 23 octobre 2013 suite à l'arrêt de la cour d'appel de Paris (6-5) du 16 février 2012 concernant un jugement rendu le 24 mars 2010 par le conseil de prud'hommes Formation paritaire de LONGJUMEAU - RG n° 06/00380
APPELANTE
Madame [B] [U] épouse [K]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 1]
née le [Date naissance 1] 1951 à [Localité 2] (MAROC)
comparante en personne, assistée de Me Jessy FARRUGIA, avocat au barreau de PARIS, C1388
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2013/050093 du 08/01/2014 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
INTIMEE
SAS TOUNETT
[Adresse 2]
[Adresse 2]
N° SIRET : 950 004 531 00030
en la présence de Monsieur [V] [D], comparant pour la société
assistée de Me Isabelle TOLEDANO substituant Me Catherine LAUSSUCQ, avocat au barreau de PARIS, toque : D0223
PARTIE INTERVENANTE :
POLE EMPLOI (REMBOURSEMENT) DE NANTERRE
[Adresse 3]
[Adresse 3]
non comparant
non représenté
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 01 mars 2017, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Catherine SOMMÉ, présidente de chambre Monsieur Benoît HOLLEAUX, conseiller
Madame Laure TOUTENU, vice-présidente placée
qui en ont délibéré
Greffier : Mme Mélanie PATE, lors des débats
ARRET :
- réputé contradictoire
- prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Catherine SOMMÉ, président et par Madame Marion AUGER, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Mme [B] [U] épouse [K] a été engagée par la société ISS Abilis France en qualité d'agent de service à temps partiel suivant contrat à durée déterminée du 10 mars 2001, puis par contrat à durée indéterminée conclu le 2 juillet 2001.
Mme [K], victime d'un accident du travail, a été en arrêt de travail du 11 juin au 29 novembre 2004.
A la suite de la reprise par la SAS TOUNETT du marché de la société BESOIN et BARJON aux Ulis sur lequel était affectée la salariée, le contrat de travail de Mme [K] a été transféré à la société TOUNETT à compter du 1er septembre 2004, suivant avenant du même jour, avec reprise d'ancienneté au 5 avril 1994, prévoyant une rémunération mensuelle brute de 504,40 € pour 65 heures par mois du lundi au vendredi de 17 heures à 20 heures.
Par lettre du 8 novembre 2004, Mme [K] a demandé à la société TOUNETT à revenir à ses anciens horaires de travail qui étaient fixés par son précédent employeur, soit de 15h30 à 18h30.
Par lettre du 29 novembre 2004, la société TOUNETT a informé Mme [K] de ce qu'elle devait se présenter à la médecine du travail le 1er décembre suivant pour une visite de reprise, qui n'a pas eu lieu.
Par lettre du 3 décembre 2014, Mme [K] a informé la société TOUNETT que le 1er décembre 2004 elle s'était présentée sur le site de la société BESOIN et BARJON «'dans l'heure habituelle de service'» mais que la société cliente n'avait pas voulu l'accepter.
Par lettre du 6 décembre 2004, la société TOUNETT a convoqué Mme [K] à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 14 décembre 2004, et lui a notifié une mise à pied à titre conservatoire.
Par lettre en réponse du 9 décembre 2004, Mme [K] a fait part à son employeur de sa surprise, ayant toujours respecté ses horaires de travail, et l'a informé qu'elle ne se présenterait pas à cet entretien.
Par lettre du 3 janvier 2005, la salariée a écrit à son employeur pour lui demander la suite réservée à la procédure de licenciement.
Dans sa lettre du réponse du 14 janvier 2005, la société TOUNETT, rappelant que la salariée lui avait fait savoir qu'elle ne voulait plus travailler sur son site d'affectation habituel BESOIN et BARJON aux horaires prévus dans son contrat de travail, soit de 17h à 20h, a précisé que cet horaire était demandé par la société cliente, a indiqué à la salariée qu'elle avait du la convoquer après avoir tenté de la contacter sans succès, et lui a proposé un nouveau site d'affectation, lui demandant de la contacter dans les délais les plus brefs pour lui donner sa réponse sur cette proposition et permettre l'organisation d'une visite de reprise.
Le 6 avril 2006, Mme [K] a saisi le conseil de prud'hommes de Longjumeau de demandes tendant à voir prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de l'employeur, subsidiairement dire que la rupture s'analyse en un licenciement, et condamner la SAS TOUNETT au paiement de diverses sommes à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnités de rupture et de rappel de salaire du 1er janvier 2005 au 21 novembre 2007.
Par jugement rendu le 24 mars 2010, le conseil de prud'hommes de Longjumeau, retenant que Mme [K] avait «'signé une lettre de démission manifestant son intention ferme de mettre un terme à son contrat de travail'» et que «'sa démission était du reste implicite, compte tenu de son comportement depuis le 1er décembre 2004, c'est à dire la date qui aurait du être sa reprise de fonctions'», a débouté Mme [K] de l'ensemble de ses demandes et a laissé les dépens à la charge des deux parties par moitié.
Mme [K] a interjeté appel de cette décision et par arrêt rendu le 16 février 2012, la cour d'appel de Paris a':
- infirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions,
- statuant à nouveau et y ajoutant :
. prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [K], aux torts de l'employeur
. en conséquence, condamné la société TOUNETT à payer à Mme [K] les sommes suivantes :
'1 008,80 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre celle de 100,88 € au titre des congés payés afférents ;
'1 790,62 € à titre d'indemnité de licenciement ;
'6 052 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en application de l'article L.1235-3 du code du travail ;
'42 874 € à titre de rappel de salaire pour la période allant du 6 décembre 2004 au 6 janvier 2012 ;
'4 287,40 € au titre des congés payés afférents ;
. condamné la société TOUNETT à remettre à Mme [K] les documents sociaux et bulletins de salaires conformes, sous astreinte de 50 € par jour de retard, à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de la notification de la décision ;
. ordonné d'office, en application de l'article L.1235-4 du code du travail et dans la limite posée par cette disposition, le remboursement par la société TOUNETT de toutes les indemnités chômage payées à Mme [K] ;
. condamné la société TOUNETT aux dépens de première instance et d'appel et à payer à Mme [K] la somme de 2 000 € en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991';
. débouté celle-ci de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
La cour d'appel a retenu en substance que la salariée disposait de motifs sérieux pour contester le courrier du 29 janvier 2005 à en-tête de Mme [K] et signé à son nom, produite par la société TOUNETT, dont on ignorait les conditions de la remise, que cette démission était suspecte, ne pouvant exprimer une volonté claire et non équivoque de démissionner de la part de la salariée et qu'elle était donc privée d'effet, que l'employeur en privant la salariée de travail et donc de rémunération, avait manqué à ses obligations contractuelles ce qui justifiait de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts.
Sur pourvoi formé par la société TOUNETT, par arrêt rendu le 23 octobre 2013, la chambre sociale de la Cour de cassation a cassé et annulé dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 février 2012, entre les parties par la cour d'appel de Paris et les a renvoyées devant la cour d'appel de Paris autrement composée, aux motifs qu'«'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que la salariée contestait la véracité de la lettre de démission qui lui était imputée, la cour d'appel, qui devait procéder à une vérification d'écriture, a violé'» les articles 287 et 288 du code de procédure civile.
Par déclaration du 21 mars 2014, Mme [K] a saisi cette cour désignée comme cour de renvoi dans le délai de quatre mois prévu par l'article 1034 du code de procédure civile.
Aux termes de ses écritures visées par le greffier et soutenues oralement à l'audience du 1er mars 2017, Mme [K] demande à la cour de :
- avant-dire droit :
. procéder à une vérification d'écriture de la lettre de démission dont la véracité et la signature sont contestées et déniées par Mme [K], en se servant de documents et pièces versées aux débats pour procéder à l'analyse comparative de l'écriture déniée ;
. subsidiairement et en tant que besoin, ordonner une expertise et désigner un expert afin qu'il procède à une vérification d'écriture de cette prétendue lettre de démission ;
- sur le fond :
. dire Mme [K] recevable et bien fondée en son appel ;
.en conséquence, infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Longjumeau le 24 mars 2010 en toutes ses dispositions faisant grief à Mme [K], et statuant à nouveau :
à titre principal :
. prononcer la résolution judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur ;
. condamner, en conséquence, la société TOUNETT à payer à Mme [K] les sommes suivantes :
'6 052,80€ à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
'1 008,80€ à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
'100,88 € au titre des congés payés afférents ;
'1 790,62 € à titre d'indemnité légale de licenciement ;
'42 874 € à titre de rappel de salaires du 6 décembre 2004, date de la mise à pied à titre conservatoire, à l'audience du 6 janvier 2012 ;
' 4 287,40 € au titre des congés payés afférents ;
'31 155,10 € à titre de rappel de salaire du 6 janvier 2012, date de la précédente audience au fond au 1er mars 2017 (audience devant la cour de renvoi) ;
'3 115,51 € au titre des congés payés afférents ;
à titre subsidiaire :
. dire et juger que la rupture du contrat de travail entre Mme [K] et la société TOUNETT s'analyse en un licenciement implicite dénué de cause réelle et sérieuse ;
condamner, en conséquence, la société TOUNETT à payer à Mme [K] les sommes suivantes :
'6 052,80 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
'1 008,80 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;
'100,88 € au tire des congés payés afférents ;
'1 790,62 € à titre d'indemnité légale de licenciement ;
'891,10 € à titre de rappel de salaires du 6 décembre 2004, date de la mise à pied à titre conservatoire, au 29 janvier 2005, date de la rupture alléguée par l'employeur ;
'89,11 € au titre des congés payés afférents ;
en tout état de cause :
. condamner la société TOUNETT à remettre à Mme [K] un certificat de travail, un solde de tout compte, des bulletins de paie et une attestation Pôle emploi, le tout conforme et sous astreinte de 250 € par jour de retard et par document ;
. débouter la société TOUNETT de ses demandes, fins et conclusions ;
. condamner la société TOUNETT à lui verser une somme de 2 500 € par application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
. condamner la société TOUNETT aux entiers dépens.
La société TOUNETT, reprenant oralement à l'audience ses conclusions visées par le greffier, demande à la cour de :
- débouter Mme [K] de l'ensemble de ses demandes ;
- apprécier la validité de l'acte d'appel au regard des différentes écritures émanant de Mme [K] versées aux débats ;
- ordonner en tant que de besoin une expertise et désigner un expert afin de vérifier les différentes écritures émanant de Mme [K] ;
- à titre subsidiaire, fixer au 1er février 2005 la date de la résiliation judiciaire ;
- condamner Mme [K] aux éventuels dépens ainsi qu'au paiement à la société TOUNETT de la somme symbolique de 100 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur la démission alléguée
Mme [K], rappelant qu'elle ne sait ni lire, ni écrire en langue française et qu'elle a fréquemment recours aux services d'un écrivain public, conteste être l'auteur de la prétendue lettre de démission du 29 janvier 2015, dont la société TOUNETT se prévaut, ainsi que l'attestation produite par celle-ci, établie par M. [G], salarié de la société intimée, en relevant son absence de conformité aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile'ainsi que la tardiveté de cette attestation, et affirmant qu'elle n'a pris connaissance de celle-ci que par l'intermédiaire de son nouveau conseil. Elle souligne qu'elle a déposé plainte pour faux témoignage et que sa plainte a été classée sans suite, non pas parce que l'infraction n'était pas caractérisée mais pour cause d'extinction de l'action publique à la date du dépôt de plainte. Mme [K] fait valoir qu'en toute hypothèse il ne ressort pas de la lettre litigieuse du 29 janvier 2015 une volonté de sa part claire et non équivoque de démissionner. Elle relève en outre que l'employeur n'a pas accusé réception de cette prétendue démission et qu'il ne lui a pas adressé les documents de fin de contrat.
La société TOUNETT affirme qu'il y a lieu de comparer la signature portée sur la lettre litigieuse avec celles figurant sur les courriers émanant de la salariée et sur sa déclaration d'appel, que les signatures varient, qu'elles ne peuvent donc en l'état être utiles à la vérification d'écriture requise par l'article 287 du code de procédure civile, qu'elle s'associe donc à la demande subsidiaire de l'appelante aux fins d'expertise. La société TOUNETT soutient que Mme [K] a démissionné par lettre du 29 janvier 2015 comme il ressort de l'attestation de M. [G], que cette lettre exprime une volonté claire et non équivoque de rompre le contrat de travail, peu important la date exacte à laquelle ladite lettre a été remise au témoin.
Il résulte des articles 287 et 288 du code de procédure civile que, lorsque l'écriture ou la signature d'un acte sous seing privé sont déniées ou méconnues, il appartient au juge de vérifier l'écrit contesté, à moins qu'il puisse statuer sans en tenir compte ou qu'il trouve dans la cause des éléments de conviction suffisants.
La lettre litigieuse datée du 29 janvier 2005 et à en-tête de Mme [K] est libellée comme suit':
«'Monsieur,
Suite à notre entretien téléphonique je vous confirme mon intention de démissionner car j'ai un travail au heure [sic] que vous me proposez.
Veuillez, agréer Monsieur, mes salutations distinguées'».
Il n'est pas discuté que Mme [K] ne sait ni lire ni écrire la langue française, ni qu'elle ait recours de manière habituelle aux services d'un écrivain public, ce que confirme Mme [R] [P],'écrivain public à la mairie [Établissement 1], qui certifie ne pas être la rédactrice de la lettre datée du 29 janvier 2005.
Il résulte de l'examen de la signature portée sur les contrats de travail de la salariée, sur ses lettres des 8 novembre, 3 décembre, 9 décembre 2004 et 3 janvier 2005, ainsi que sur sa déclaration d'appel du 21 mai 2010, que ces signatures ne sont pas identiques en tous points mais qu'elles varient relativement peu et comportent de réelles similitudes, alors que la signature portée sur la lettre litigieuse du 29 janvier 2005, contemporaine des lettres adressées par la salariée à son employeur, est très nettement différente.
Par conséquent, après avoir procédé à la vérification d'écriture demandée et sans qu'il soit nécessaire de recourir à une mesure d'expertise, la cour estime que Mme [K] n'est pas l'auteur de la signature portée sur la lettre du 29 janvier 2005, laquelle ne peut par conséquent valoir démission claire et non équivoque de la salariée, étant relevé par ailleurs qu'il ne résulte d'aucune autre pièce que la salariée ait exprimé une volonté claire et non équivoque de rompre son contrat de travail.
La démission ne se présumant pas, il doit être retenu que Mme [K] n'a pas démissionné de son emploi.
Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail
A l'appui de cette demande, Mme [K] soutient que l'avenant du 1er septembre 2004 a réduit sa durée du travail et donc sa rémunération mensuelle, qu'au moment de la signature de cet avenant elle était en arrêt de travail, que la société TOUNETT n'a pas répondu à son courrier du 8 novembre 2004 par lequel elle lui demandait de revenir aux horaires de travail antérieurs, que la société TOUNETT se prévaut d'un courrier du 29 novembre 2004 la convoquant à une visite de reprise du 1er décembre, soit deux jours plus tard, qu'en tout état de cause elle «'ne se souvient pas'» avoir reçu ledit courrier dont l'envoi effectif n'est pas justifié, qu'elle s'est présentée le 1er décembre 2004 «'à l'heure habituelle de service'», soit à 17 heures, sur le site BESOIN et BARJON, que cependant l'accès au lieu de travail lui a été refusé, une autre salariée ayant été affectée aux même horaires.
Mme [K] affirme qu'en lui refusant l'accès à son poste de travail le 1er décembre 2004 et en ne levant pas la mise à pied conservatoire qui lui avait été notifiée le 6 décembre 2004, l'employeur l'a mise dans l'impossibilité d'accomplir son contrat de travail «'tout en refusant de procéder à son licenciement'», ce qui justifie le prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts.
La société TOUNETT fait valoir qu'initialement Mme [K] travaillait pour la société ISS Propreté, venant aux droits de la société ISS Abilis France, dans le cadre d'un temps partiel, en dernier lieu de 119,16 heures mensuelles réparties à raison de 65 heures sur le site BESOIN et BARJON et 54,16 heures sur le site BRADY, qu'à compter de la reprise du marché BESOIN et BARJON par la société TOUNETT, la salariée a eu deux employeurs, la société TOUNETT à hauteur de 65 heures par mois et la société ISS Propreté pour 54,16 heures, qu'il est donc faux de prétendre que l'avenant du 1er septembre 2004 a réduit la durée du travail de la salariée. Elle soutient que celle-ci, en signant cet avenant a accepté le changement de ses horaires de travail, fixés à 65 heures de travail par mois, du lundi au vendredi de 17 heures à 20 heures. La société TOUNETT affirme encore que la salariée, refusant ses nouveaux horaires, a pris l'initiative de se présenter sur le lieu de travail aux anciens horaires, en violation de ses obligations contractuelles, qu'elle a refusé de se présenter à la visite médicale de reprise, que la société intimée a décidé d'abandonner la procédure disciplinaire en proposant une nouvelle affectation à Mme [K], qu'elle n'a donc commis aucun manquement. Elle souligne enfin que la salariée étant en arrêt de travail depuis le 10 juin 2004, la société ISS Propreté, précédent prestataire, l'avait remplacée le temps de son arrêt sur le site, et que Mme [K] a attendu plus d'un an pour saisir le conseil de prud'hommes.
Seuls peuvent être de nature à justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur des faits, manquements, ou agissements de ce dernier d'une gravité suffisante de nature à empêcher la poursuite du travail.
Il ressort de l'avenant au contrat de travail signé entre la société ISS ABILIS France et Mme [K], à effet du 1er octobre 2003, que celle-ci était employée à temps partiel pour 119,16 heures par mois, en étant affectée d'une part sur le site BESOIN et BARJON, du lundi au vendredi de 15h30 à 18h30, soit 65 heures par mois, d'autre part sur le site BRADY, du lundi au vendredi de 18h30 à 21h.
L'avenant au contrat de travail conclu entre la salariée et la société TOUNETT le 1er septembre 2004 à la suite de la reprise du marché BESOIN et BARJON par la société TOUNETT, prévoit 65 heures de travail par mois et modifie les horaires de travail qui sont dorénavant fixés du lundi au vendredi de 17 heures à 20 heures. Contrairement à ce que soutient Mme [K], le volume horaire est donc resté le même.
Mme [K] affirme qu'elle s'est vu refuser l'accès au lieu de travail le 1er décembre 2004. Cependant dans sa lettre du 3 décembre, seule pièce qu'elle produit au soutien de ses allégations, la salariée écrit à son employeur qu'elle s'est présentée sur le site de la société BESOIN et BARJON «'dans l'heure habituelle de service'», ce dont il ne peut être déduit, contrairement à ce qu'elle affirme, qu'elle s'est bien présentée à son horaire de travail tel que stipulé à l'avenant du 1er septembre 2004, soit à 17h. En effet cet horaire n'était pas l'horaire «'habituel'» de la salariée, qui, avant son arrêt de travail, prenait son poste à 15h30, et qui au demeurant, après la signature de l'avenant du 1er septembre 2004 conclu pendant son arrêt de travail, avait demandé à son employeur à revenir à ses anciens horaires.
Il s'en déduit que la salariée ne justifie pas s'être vu refuser l'accès à son poste de travail à l'heure contractuellement prévue de sa prise de poste. Le manquement invoqué n'est donc pas établi.
Mme [K] ne peut pas davantage soutenir utilement qu'une autre salariée avait été affectée à son poste de travail, dès lors que l'employeur a légitimement pourvu à son remplacement pendant son arrêt de travail et qu'il justifie par ailleurs avoir organisé une visite de reprise de la salariée pour le 1er décembre 2004, à laquelle celle-ci ne s'est pas rendue.
Aux termes de l'article L. 1232-6 du code du travail, ''Lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception... Elle ne peut être expédiée moins de deux jours ouvrables après la date prévue de l'entretien préalable au licenciement auquel le salarié a été convoqué ...'.
Il résulte de ces dispositions que la mise à pied conservatoire notifiée par la société TOUNETT par lettre du 6 décembre 2004 a pris nécessairement fin au plus tard à l'expiration d'un mois, soit le 6 janvier 2015. La salariée est donc mal fondée à soutenir que sa mise à pied à titre conservatoire n'a pas été levée. En outre l'employeur ne peut se voir reprocher de ne pas avoir mené à son terme la procédure de licenciement.
Dès lors les manquements de l'employeur invoqués par Mme [K] ne sont pas établis.
La salariée doit en conséquence être déboutée de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail.
Sur l'existence d'un licenciement «'implicite'»
Mme [K] soutient que lorsque la société TOUNETT a repris le marché de nettoyage sur le site de la société BESOIN et BARJON, cette dernière lui a expressément précisé, le 14 janvier 2015, son souhait de changer de personnel d'entretien, que la société TOUNETT s'est exécutée au détriment de Mme [K] en se prévalant d'une apparente lettre de démission qui n'a jamais été régularisée par la salariée, qu'il résulte de ces éléments un licenciement «'implicite'» lequel est dépourvu de cause réelle et sérieuse. Elle ajoute à l'audience que ce licenciement «'implicite'» résulte également de la convocation par l'employeur à l'entretien préalable au licenciement.
La société TOUNETT ne développe pas d'observations dans ses écritures sur le licenciement «'implicite'», invoqué par Mme [K], s'en tenant à son moyen principal tiré de l'existence d'une rupture résultant de la démission de la salariée.
La société BESOIJN et BARJON a adressé à la société TOUNETT, le 14 janvier 2005, une télécopie par laquelle elle lui confirmait avoir stipulé lors de la signature du contrat que «'la prestation nettoyage de nos bureaux ne devait démarrer qu'à partir de 17 heures'», en ajoutant que «'De plus en changeant de prestataire nous souhaitions changer de personnel d'entretien'».
Il est constant par ailleurs que la société TOUNETT a engagé une procédure de licenciement de Mme [K] en la convoquant, le 6 décembre 2004, à un entretien préalable au licenciement.
Cependant cette procédure n'a pas été menée à son terme et l'employeur n'a manifesté aucunement par la suite sa volonté de rompre le contrat de travail, que ce soit par l'envoi de documents de fin de contrat ou par tout autre agissement, le seul engagement de la procédure de licenciement étant insuffisant à cet égard. Il ne peut pas davantage être déduit de la production devant la juridiction prud'homale par l'employeur d'une prétendue lettre de démission de la salariée, l'existence d'un licenciement «'implicite'» de l'intéressée.
Dès lors le contrat de travail n'a pas été rompu et Mme [K] doit être déboutée de l'ensemble de ses demandes à ce titre.
Il résulte de ce qui précède que le jugement déféré qui a débouté Mme [K] de toutes ses demandes doit être confirmé par motifs substitués.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Mme [K] partie perdante, supportera les dépens d'appel. L'équité ne commande pas qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
REJETTE le surplus des demandes ,
CONDAMNE Mme [B] [U] épouse [K] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT