Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4- Chambre 1
ARRÊT DU 27 OCTOBRE 2017
(no, 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/ 20243
Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Septembre 2015- Tribunal de Grande Instance de Paris-RG no 13/ 14828
APPELANTS
Monsieur Alexandre X...
né le 08 Décembre 1970 à Bethune (62400)
demeurant ...
Représenté et assisté sur l'audience par Me Aude POULAIN DE SAINT PERE de la SELEURL SOCIETE D AVOCATS POULAIN DE SAINT PERE, avocat au barreau de PARIS, toque : C0529
Madame Natalia Z...
née le 02 Septembre 1976 à Kiev ukraine
demeurant ...
Représentée et assistée sur l'audience par Me Aude POULAIN DE SAINT PERE de la SELEURL SOCIETE D AVOCATS POULAIN DE SAINT PERE, avocat au barreau de PARIS, toque : C0529
INTIMÉS
Monsieur Daniel A...
né le 27 Septembre 1943 à PARIS 14ÈME (75014)
demeurant ...
Représenté par Me Vincent RIBAUT de la SCP SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
Assisté sur l'audience par Me Elsa GIANGRASSO, avocat au barreau de PARIS, toque : A0438
Madame Cécile Marie Jeanne B...épouse A...
née le 20 Juin 1969 à SAINT MAUR DES FOSSES (94100)
demeurant ...
Représentée par Me Vincent RIBAUT de la SCP SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
Assistée sur l'audience par Me Elsa GIANGRASSO, avocat au barreau de PARIS, toque : A0438
Monsieur Alain Jean C...
né le 20 Août 1954 à LILLE (59000)
demeurant ...
Représenté par Me Vincent RIBAUT de la SCP SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
Assisté sur l'audience par Me Elsa GIANGRASSO, avocat au barreau de PARIS, toque : A0438
Madame Alice, Marie-Paule B...épouse C...
née le 16 Janvier 1968 à MAISONS-ALFORT (94700)
demeurant ...
Représentée par Me Vincent RIBAUT de la SCP SCP GRV ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010
Assistée sur l'audience par Me Elsa GIANGRASSO, avocat au barreau de PARIS, toque : A0438
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 28 Septembre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Dominique DOS REIS, Présidente de chambre
M. Thierry MONTFORT, Conseiller
Mme Christine BARBEROT, Conseillère
qui en ont délibéré
Mme DOS REIS a été entendu en son rapport
Greffier lors des débats : M. Christophe DECAIX
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
-rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Dominique DOS REIS, Présidente et par M. Christophe DECAIX, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*
* *
Par acte sous seing privé du 25 avril 2013, enregistré le 26 avril 2013, M. Daniel A..., Mme Cécile B..., divorcée de M. Daniel A..., M. Alain C...et Mme Alice B..., épouse C...(les promettants), ont promis de vendre à M. Alexandre X...et à Mme Natalia Z...(les bénéficiaires), qui se sont réservé la faculté d'acquérir jusqu'au 25 juillet 2013, les lots no 3, 43 et 44 de l'état de division d'un ensemble immobilier en copropriété sis ..., soit un appartement en triplex et deux emplacements de stationnement, au prix de 1 160 000 €, sous la condition suspensive de l'obtention par les bénéficiaires, au 25 juin 2013, d'un prêt-relais d'un montant de 500 000 € sur une période maximale de 2 ans au taux d'intérêt maximum de 4 % et d'un crédit immobilier classique d'un montant de 775 000 €, sur une période maximale de 25 ans au taux d'intérêt maximum de 3, 70 %. Une indemnité d'immobilisation d'un montant de 116 000 € était prévue au contrat sur laquelle les bénéficiaires ont versé la somme de 58 000 € entre les mains du notaire. Le 9 juillet 2013, le notaire des bénéficiaires a informé le notaire des promettants d'un refus de prêt. Par acte des 2 et 3 octobre 2013, les promettants ont assigné les bénéficiaires en paiement de l'indemnité d'immobilisation
C'est dans ces conditions que, par jugement du 14 septembre 2015, le Tribunal de grande instance de Paris a :
- autorisé le notaire à verser aux promettants la somme de 58 000 € séquestrée en son étude,
- condamné in solidum les bénéficiaires à verser aux promettants le solde de l'indemnité d'immobilisation,
- assorti la condamnation de l'intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 27 juillet 2013,
- condamné in solidum les bénéficiaires à payer aux promettants la somme de 1 000 € chacun en réparation du préjudice subi par ces derniers et celle de 1 000 € chacun en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné in solidum les bénéficiaires aux dépens.
Par dernières conclusions du 6 juin 2017, les bénéficiaires, appelants, demandent à la Cour de :
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et statuant à nouveau :
- à titre principal :
. dire que la condition suspensive de financement était impossible juridiquement à réaliser,
. dire que la promesse est nulle par application de l'article 1172 du Code civil,
- à titre subsidiaire : dire que cette condition ne pouvait qu'être défaillante sans que cette défaillance leur soit imputable,
- à titre infiniment subsidiaire, dire que les intimés ne rapportent pas la preuve d'une faute, négligence, passivité, mauvaise foi, abus de droit qui leur soient imputables ayant fait échec à la conclusion des prêts,
- à titre subsidiaire, dire qu'ils sont biens fondés à invoquer l'exception d'inexécution, les intimés n'ayant pas immobilisé le bien,
- subsidiairement, dire que l'indemnité d'immobilisation n'est pas la sanction prévue au contrat,
- très subsidiairement :
- qualifier l'indemnité d'immobilisation de clause pénale et la modérer,
- dire que les promettants n'ont subi aucun préjudice,
- dans tous les cas : débouter les promettants de leurs demandes et les condamner solidairement ou in solidum à leur restituer la somme de 120 000 € avec intérêts au taux légal à compter du 24 mars 2014 sous astreinte de 100 € par jour de retard et à leur payer la somme de 20 000 € de dommages-intérêts, ainsi que celle de 3 000 € en vertu de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.
Par dernières conclusions du 31 mai 2017, les promettants prient la Cour de :
- vu les articles 1134, 1147, 1172, 1176, 1178, 1181 et 1315 du Code civil,
- confirmer le jugement entrepris en tous point,
- débouter les bénéficiaires de l'ensemble de leurs demandes,
- les condamner à leur payer la somme de 3 000 € chacun au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, dépens en sus.
SUR CE
LA COUR
La condition suspensive de l'obtention par les bénéficiaires, au 25 juin 2013, d'un prêt-relais d'un montant de 500 000 € sur une période maximale de 2 ans au taux d'intérêt maximum de 4 % et d'un crédit immobilier classique d'un montant de 775 000 €, sur une période maximale de 25 ans, au taux d'intérêt maximum de 3, 70 %, soit des charges mensuelles maximales de 3 880 € hors assurance pour le prêt immobilier, n'était pas impossible dès lors que les montants énoncés étaient des maxima et qu'il était loisible aux bénéficiaires, sans aggraver la condition, de solliciter des organismes bancaires des prêts d'un montant inférieur à ceux énoncés dans l'acte, ce qu'ils ont, d'ailleurs, fait en approuvant le 25 avril 2013 un plan de financement élaboré par la BNP Paribas pour un montant total de 1 200 000 €, comportant des charges mensuelles de 3 074 € qui correspondaient, selon leur propres déclarations, à leur capacité financière.
La condition suspensive qui énonce, d'abord, que les bénéficiaires peuvent faire une ou des demandes de prêts auprès d'un ou plusieurs organismes financiers, ensuite, que, pour pouvoir bénéficier de sa protection, ils doivent justifier d'au moins deux refus de prêt émanant d'au moins deux banques ou organismes financiers différents, est contradictoire, de sorte qu'il ne peut être fait grief aux bénéficiaires d'avoir fait défaillir la condition en ne sollicitant les prêts qu'après de la BNP Paribas.
Suivant l'article 1178 du code civil, la condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l'accomplissement ;
Au cas présent, il ressort des pièces produites, notamment, des différents plans de financement élaborés par la BNP Paribas et du courrier électronique de celle-ci du 21 mai 2013, qu'une offre de prêt conforme aux caractéristiques de la promesse n'a pu être faite aux bénéficiaires en raison des droits détenus par l'ex-époux de Mme Z...sur le bien immobilier pour lequel le prêt-relais était sollicité dans l'attente de sa vente ; il ressort des questions posées par un autre organisme bancaire le 16 avril 2013 (pièce no 1 des appelants) que, s'agissant de l'apport de 500 000 €, le bien était présenté par les emprunteurs comme étant celui de Mme Z..., ce que confirme le courrier électronique précité qui révèle que la BNP n'a appris le statut du bien qu'après avoir élaboré le plan de financement du 25 avril 2013 ;
Les promettants reprochent aux bénéficiaires d'avoir déclaré à la promesse que rien dans leur situation juridique et dans leur capacité bancaire ne s'opposait aux demandes de prêt qu'ils se proposaient de solliciter, sans les informer du statut du bien précité ;
Cependant, les bénéficiaires justifient avoir demandé un prêt correspondant aux caractéristiques convenues, lequel a été refusé parce que Mme Z..., de nationalité étarngère, s'était méprise sur le statut juridique du bien immobilier dépendant de sa communauté avec son ex-conjoint et cette circonstance ne suffit pas à démontrer que les bénéficiaires, auxquels il ne peut être reproché d'avoir, de bonne foi, surestimé leur capacité d'emprunt, auraient empêché, soit par une initiative à cette fin, soit par une abstention fautive, l'accomplissement de la condition suspensive ;
En conséquence, dès lors que le prêt sollicité, correspondant aux caractéristiques convenues, a été refusé parce qu'excédant les facultés contributives des bénéficiaires, les dispositions de l'article 1178 précité ne peuvent recevoir application et le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a condamné les bénéficiaires au paiement de l'indemnité d'immobilisation prévue à la promesse ; la Cour, statuant à nouveau, déboutera les consorts A...-C... de leur demande tendant à se voir attribuer l'indemnité d'immobilisation, laquelle devra être restituée à M. X...et à Mme Z..., sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette obligation d'une astreinte, étant rappelé que l'infirmation du jugement emporte restitution des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire assortissant ce jugement, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure de restituer ;
Les appelants ne justifient pas avoir subi un préjudice complémentaire à cette restitution justifiant l'allocation de dommages et intérêts ;
L'équité ne justifie pas d'appliquer en la cause les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Infirme le jugement entrepris,
Statuant à nouveau,
Déboute M. Daniel A..., Mme Cécile B..., divorcée de M. Daniel A..., M. Alain C...et Mme Alice B..., épouse C..., de leur demande d'attribution de l'indemnité d'immobilisation et ordonne la restitution de cette indemnité aux consorts X...Z...,
Rappelle que l'infirmation du jugement entrepris emporte restitution de toutes sommes versés en vertu de son exécution, assorties des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure de restituer,
Rejette toute autre demande,
Condamne in solidum M. Daniel A..., Mme Cécile B..., divorcée de M. Daniel A..., M. Alain C...et Mme Alice B..., épouse C...aux dépens de première instance et d'appel qui pourront être recouvrés dans les conditions de l'article 699 du Code de procédure civile ;
Condamne in solidum M. Alexandre X...et Mme Natalia Z...à payer à M. Daniel A..., Mme Cécile B..., divorcée de M. Daniel A..., M. Alain C...et Mme Alice B..., épouse C..., la somme globale de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en cause d'appel.
Le Greffier, La Présidente,