Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FIANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 4
ARRÊT DU 08 NOVEMBRE 2017
(n° , 12 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 14/17723
Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Juillet 2014 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 11/03534
APPELANTE
SAS FORS FRANCE
Ayant son siège social : [Adresse 1]
[Adresse 1]
N° SIRET : 328 988 506 (CRETEIL)
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
Représentée par Me Michel GUIZARD de la SELARL GUIZARD ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0020
Ayant pour avocat plaidant : Me Philippe GLASER, avocat au barreau de PARIS, toque : J010
INTIMÉS
- Monsieur [Z] [Y]
né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 1]
Demeurant : [Adresse 2]
[Adresse 2]
Représenté par Me Emmanuel ASMAR de l'AARPI ASMAR ASSAYAG, avocat au barreau de PARIS, toque : R261
Ayant pour avocat plaidant : Me Maria CORNAZ BASSOLI, de l'AARPI ASMAR ASSAYAG, avocat au barreau de PARIS, toque : R261
- SARL SANTE ACTIONS
Ayant son siège social : [Adresse 3]
[Adresse 3]
N° SIRET : 414 958 918 (ALBI)
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
- SARL GENIMED
Ayant le siège de sa liquidation : [Adresse 3]
[Adresse 3]
N° SIRET : 524 451 606 (ALBI)
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
- SARL GENIMARKET, aux droits de laquelle vient la SARL GENIMARKET, consécutivement à sa dissolution sans liquidation
Ayant son siège social : [Adresse 4]
[Adresse 4]
N° SIRET : 523 115 780 (CASTRES)
Représentées par Me Alain FISSELIER de la SCP SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044
Ayant pour avocat plaidant : Me Xavier LECOMTE, avocat au barreau de TOULOUSE
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 04 Octobre 2017, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Irène LUC, Présidente de chambre
Madame Dominique MOUTHON VIDILLES, Conseillère
Madame Laure COMTE, Vice-Présidente Placée, rédacteur
qui en ont délibéré
Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Laure COMTE dans les conditions prévues par l'article 785 du Code de Procédure Civile.
Greffier, lors des débats : Madame Cécile PENG
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Irène LUC, président et par Madame Cécile PENG, greffier auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Monsieur [Z] [Y] est médecin urgentiste. Au début des années 2000, il a développé, au travers d'une société Med Services, un système expert de bases de données médicales permettant l'aide au diagnostic médical, destiné au personnel médical et au grand public.
La société Fors France est spécialisée dans la conception et la commercialisation de bornes d'écoute et de solutions de sécurité.
Au cours de l'année 2007, la société Fors France et Monsieur [Z] [Y] se sont rapprochés en vue du développement de mallettes et bornes de consultation destinées à recueillir les bases de données médicales mises au point par Monsieur [Z] [Y], et pour mettre en place des systèmes d'aide à l'automédication et à l'assistance médicale d'urgence des personnes en situation d'isolement, utilisés par les particuliers et professionnels de santé.
Le 20 décembre 2007, la société Med Services a signé avec la société Fors France un accord de distribution exclusive de la base de données sur des bornes interactives créée par Monsieur [Z] [Y] pour une durée de trois ans renouvelable.
Par jugement en date du 14 mai 2009, la société Med Services a été placée en redressement judiciaire.
La société Fors France a présenté un plan de reprise de la société Med Services.
Le 7 juillet 2009, Monsieur [Z] [Y] et la société Fors France ont conclu un protocole d'accord par lequel Monsieur [Z] [Y] s'est engagé à accorder à la société Fors une exclusivité de distribution de la base de données et du logiciel dont il est l'auteur, sur les bornes et les mallettes développées par la société Fors France, en cas de reprise de la société Med Services par la société Fors France. Par avenant du 8 juillet 2009, ils ont décidé de procéder à la finalisation d'un contrat accordant l'exclusivité de distribution des mallettes et des bornes sur le territoire de l'Arabie Saoudite à la société ASMA International.
Le plan de reprise présenté par la société Fors France n'a pas abouti et la société Med Services, en la personne de ses nouveaux co-gérants, Messieurs [T] et [S], n'a pas souhaité renouveler l'accord de distribution exclusive sur les bornes du 20 décembre 2007.
C'est dans ces conditions que Monsieur [Z] [Y] s'est rapproché des sociétés Genimed et Genimarket, détenues par la société Santé Action, société holding.
La société Genimed, enregistrée sous le n° 524 451 606, a pour activité la recherche et le développement en sciences physiques et naturelles.
La société Genimarket est spécialisée dans l'activité de radiodiagnostic et de radiothérapie.
Les sociétés Genimed et Genimarket, d'une part, et la société Fors France, d'autre part, se sont rapprochées pour envisager la réalisation et la commercialisation des systèmes créés par Monsieur [Z] [Y].
Le 5 mai 2010, dans le cadre de leurs pourparlers, les sociétés Fors France, Genimed et Genimarket ont signé un document intitulé « lettre d'intention ».
Par courrier du 23 novembre 2010, les sociétés Genimed et Genimarket ont informé la société Fors France de leur choix de ne pas donner suite à leur projet de collaboration.
La société Fors France a assigné les sociétés Santé Actions, Genimed, Genimarket et Monsieur [Z] [Y] devant le tribunal de grande instance de Paris, sur le fondement de l'article 1134 du code civil, aux motifs, à titre principal, que, la lettre d'intention du 5 mai 2010 constitue une promesse de contrat, que les défendeurs ont manqué à leurs obligations contractuelles en empêchant la conclusion du contrat de licence prévue à l'article 3 de ce document, à titre subsidiaire, que la lettre d'intention du 5 mai 2010 constitue un accord de principe, et que les défendeurs ont manqué à leur obligation de négocier de bonne foi.
Par jugement en date du 11 juillet 2014, le tribunal de grande instance de Paris a :
- rejeté l'ensemble des demandes de la société Fors France,
- condamné la société Fors France au paiement des entiers dépens de l'instance avec droit de recouvrement direct au profit de Me Valérie Maintrieu Frantz, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,
- condamné la société Fors France à verser aux sociétés Genimed, Genimarket et Santé Actions la somme globale de 2 500 euros et à verser à Monsieur [Z] [Y] la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Fors France a relevé appel de ce jugement par déclaration remise au greffe le 21 août 2014.
La procédure devant la cour a été clôturée le 3 octobre 2017.
La société Genimarket a fait l'objet d'une dissolution sans liquidation au profit de la société Genimed, enregistrée sous le n° 479 567 430, venant aux droits de la société Genimarket.
LA COUR
Vu les conclusions du 2 octobre 2017 par lesquelles la société Fors France, appelante, invite la cour, au visa des articles 1134, 1184, 1371 et 1382 du code civil, 18 et suivants du code de procédure civile, à :
- infirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 11 juillet 2014,
Statuant à nouveau,
A titre principal,
- condamner in solidum les sociétés Genimed, Genimarket et Monsieur [Z] [Y] à lui payer la somme de 1.997.728 euros à titre de réparation du préjudice subi constitué par la perte liée aux investissements, augmentée d'une somme de 8.973.492 euros correspondant au gain manqué,
A titre subsidiaire,
- condamner in solidum les sociétés Genimed, Genimarket et Monsieur [Z] [Y] à lui payer la somme de 1.997.728 euros à titre de réparation du préjudice subi constitué par la perte liée aux investissements,
- condamner la société Santé Actions à lui restituer la somme de 1.997.728 euros correspondant à l'enrichissement sans cause dont elle a bénéficié,
En tout état de cause,
- dire que les condamnations porteront intérêts à compter de l'assignation outre la capitalisation sur le fondement des dispositions de l'article 1154 du code civil,
- condamner in solidum les sociétés Santé Actions, Genimed, Genimarket et Monsieur [Z] [Y] à lui verser la somme de 100.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens ;
Elle fait valoir que :
- sa demande tendant à voir engager la responsabilité de Monsieur [Z] [Y] pour non-respect des termes du protocole du 7 juillet 2009 et de son avenant du 8 juillet 2009 n'est pas nouvelle, dès lors qu'elle tend aux mêmes fins que celle présentée en première instance, dans la mesure où elle a toujours entendu rechercher la responsabilité de M. [Z] [Y],
- cette demande n'est pas prescrite, dès lors qu'elle est liée à ses prétentions initiales, tendant au même but,
- Monsieur [Z] [Y] n'a pas respecté les termes du protocole du 7 juillet 2009 ainsi que son avenant du 8 juillet 2009, dans lesquels il s'engage à lui accorder un contrat de licence exclusive, indépendamment du projet de reprise de la société Med Services, ce qu'il n'a jamais fait,
à titre principal,
- le document signé par les parties le 5 mai 2010 et intitulé « lettre d'intention » constitue une promesse de contrat, en ce qu'il renferme un accord de volonté des parties sur les éléments essentiels du contrat,
- les sociétés Genimed et Genimarket ont engagé leur responsabilité contractuelle à son égard en rompant de manière fautive ladite promesse par courrier du 23 novembre 2010,
- Monsieur [Z] [Y] a engagé sa responsabilité délictuelle à son égard en raison de son concours volontaire à ladite rupture fautive,
à titre subsidiaire,
- ledit document signé le 5 mai 2010 constitue à tout le moins un contrat de négociation,
- les sociétés Genimed auraient dû poursuivre de bonne foi les négociations sur les bases convenues, alors qu'elles ont envisagé clairement de l'exclure, en proposant des modalités contractuelles inacceptables et déséquilibrées afin de provoquer une situation de blocage,
- les sociétés Genimed et Genimarket ont manqué à leur obligation contractuelle de négocier de bonne foi le contrat définitif prévu par le contrat de négociation, s'agissant notamment de la conduite du dépôt du dossier OSEO 2, et engagent ainsi leur responsabilité contractuelle à son égard,
- Monsieur [Z] [Y] a engagé sa responsabilité délictuelle à son égard en raison de son implication fautive lors de la tenue des négociations,
- la société Santé Actions s'est enrichie à son détriment,
- elle a subi un préjudice liée aux investissements de dépense de personnel, de frais de structure, de frais juridiques, de marketing et de coût de prototype pour un montant total de 1.997.728 euros,
- elle a subi un préjudice équivalent à un manque à gagner de 8.973.492 euros, compte tenu des objectifs de vente sur les 5 premières années convenus avec la société Genimed ;
Vu les conclusions du 25 septembre 2017 par lesquelles la société Genimed (n° 524 451 606), la société Genimed (n° 479 567 430), venant aux droits de la société Genimarket, et la société Santé Action, intimées, demandent à la cour, au visa des articles 1371 et suivants, 1844-5 al 3 du code civil, 564 du code de procédure civile, de :
- constater que la société Genimed, SARL au capital de 2 000 euros identifiée au RCS de Castres sous le numéro 479 567 430, ayant son siège social [Adresse 4], vient aux droits de la société Genimarket,
- déclarer irrecevable la demande présentée à l'encontre de la société Santé Actions,
En tout état de cause,
- confirmer l'ensemble des dispositions du jugement dont appel,
Y ajoutant,
- condamner la société Fors France à payer à chacune d'elles une indemnité de 20.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'au paiement des entiers dépens dont distraction au profit de la SCP AFG conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Elles expliquent que :
- dans la lettre d'intention du 5 mai 2010, les parties signataires se sont limitées à se mettre d'accord sur les très grandes lignes de leur éventuelle collaboration future,
- ce document ne peut s'analyser en une promesse de contrat,
- la poursuite des négociations, à la suite de la signature de la lettre d'intention du 5 mai 2010, ne peut constituer qu'une obligation de moyen, et en aucun cas une obligation de résultat,
- la société Fors France ne rapporte pas la preuve que les négociations, menées en suite de la lettre d'intention du 5 mai 2010, l'auraient été d'une manière totalement contraire aux principes arrêtés dans cette lettre d'intention,
- elles n'ont jamais laissé traîner les négociations,
- elles n'avaient aucun intérêt à continuer les négociations s'il était acquis dès le mois de juillet qu'une collaboration avec la société Fors France n'était plus d'actualité,
- la demande en restitution de l'indu est irrecevable, dès lors qu'elle est produite pour la première fois en cause d'appel et qu'elle conduit l'appelante à se contredire à leur détriment,
- la demande n'est pas fondée, aux motifs qu'il n'y a pas eu d'enrichissement et d'appauvrissement corrélatif,
- la société Fors France ne démontre pas l'enrichissement de la société Santé Actions qui ne commercialise pas, par elle-même ou par ses filiales, les mallettes objet du litige,
- il n'y a aucun lien de causalité entre le préjudice allégué et une éventuelle faute qui pourrait être retenue à l'encontre de la société Genimed ou de la société Genimed venant aux droits de la société Genimarket, en ce que les frais dont il s'agit ont été exposés bien avant toute intervention de leur part,
- la société Fors France ne saurait réclamer un préjudice au titre du gain manqué, dès lors que la rupture abusive des pourparlers ne peut donner lieu à l'indemnisation d'une perte de chance de réaliser les gains de la conclusion du contrat, la victime ne pouvant obtenir que l'indemnisation des efforts déployés, du temps consacré et des frais engagés inutilement pour faire aboutir le projet ;
Vu les conclusions du 16 janvier 2017 par lesquelles Monsieur [Z] [Y], intimé, demande à la cour, de :
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- déclarer irrecevable la prétention nouvelle soumise à la cour d'appel par la société Fors France tendant à dire et juger qu'il n'a pas respecté les termes du protocole du 7 juillet 2009 ainsi que son avenant du 8 juillet 2009 et aurait ainsi commis un manquement à son obligation contractuelle,
En tout état de cause,
- déclarer toute action en responsabilité contractuelle fondée sur un prétendu manquement de Monsieur [Z] [Y] aux termes du protocole du 7 juillet 2009 et de son avenant du 8 juillet 2009, prescrite,
A titre subsidiaire,
- la dire mal fondée,
- débouter la société Fors France de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
- condamner la société Fors France à lui payer la somme de 15.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction ;
Il soutient que :
- la demande de la société Fors France tendant à voir engager sa responsabilité pour non-respect des termes du protocole du 7 juillet 2009 et de son avenant du 8 juillet 2009 est une demande prohibée par l'article 564 du code de procédure civile, dès lors qu'à aucun moment, en première instance, sa responsabilité contractuelle, pas plus que délictuelle n'a été recherchée pour une prétendue méconnaissance des termes du protocole du 7 juillet 2009 et de son avenant du 8 juillet 2009,
- cette demande est prescrite,
- il n'a jamais été dans l'intention des parties à ce protocole de conclure un accord de distribution exclusive indépendant du projet de reprise de la société Med Services par la société Fors France et du succès dudit projet,
- dans la mesure où le plan de reprise présenté par la société Fors France n'a pas abouti, le protocole et toutes ses dispositions sont devenus sans objet,
- aucune faute en rapport avec l'exécution de ce protocole ne saurait lui être reprochée,
- les éléments essentiels de l'opération projetée n'étaient pas fixés par les parties lors de la signature de la lettre d'intention du 5 mai 2010,
- il ne pouvait y avoir de contrat définitif ni de projet de contrat,
- la société Fors France n'allègue au soutien de sa demande à son encontre aucun élément précis susceptible de révéler un comportement fautif,
- l'échec de la négociation est exclusivement imputable à la société Fors France,
- la perte prétendue des investissements réalisés depuis 2007 est sans lien avec l'échec des négociations entre les sociétés Genimed et Fors France,
- le préjudice allégué au titre du gain manqué repose sur un prévisionnel de vente parfaitement théorique, émanant de la société Fors France elle-même, qui ne présente en conséquence pas le degré de certitude nécessaire pour être réparé ;
SUR CE
La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.
En application de l'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions.
Sur les demandes à l'encontre de Monsieur [Z] [Y]
Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, « à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ».
N'introduit pas une demande nouvelle, celui qui invoque en cause d'appel le fondement de la responsabilité contractuelle après s'être fondé devant les premiers juges sur la responsabilité délictuelle, en invoquant les mêmes griefs.
En l'espèce, la société Fors France a recherché en première instance la responsabilité délictuelle de Monsieur [Z] [Y] pour être intervenu à l'acte du 5 mai 2010, et en tout état de cause, avoir participé délibérément à la violation de cet acte.
En cause d'appel, la société Fors France reproche également à Monsieur [Z] [Y] d'avoir engagé sa responsabilité contractuelle pour ne pas avoir respecté les termes du protocole d'accord du 7 juillet 2009 et son avenant du 8 juillet 2009.
Ces griefs et ce fondement n'ayant pas été invoqués en première instance par la société Fors France à l'encontre de Monsieur [Z] [Y], la demande doit être qualifiée de nouvelle au sens de l'article précité.
Il y a donc lieu de déclarer irrecevable la demande formée par la société Fors France à l'encontre de Monsieur [Z] [Y] sur le fondement de la responsabilité contractuelle en raison de la violation des contrats des 7 et 8 juillet 2009.
Sur les demandes formées au titre de l'inexécution de l'acte du 5 mai 2010
Les parties s'opposent sur la qualification juridique de l'acte du 5 mai 2010 intitulé « lettre d'intention entre les sociétés Genimed, Genimarket et Fors ». A titre principal, la société Fors France soutient que le document, dont il est question, fait naître des obligations à la charge des parties contractantes, le qualifiant de promesse de contrat. Au contraire, les sociétés Genimed, Genimarket et Monsieur [Z] [Y] considèrent que cet acte ne contient aucun accord des parties sur les éléments essentiels du contrat.
Les promesses de contrat sont des contrats préparatoires en ce qu'elles constituent, dans l'esprit des parties, une étape vers la conclusion du contrat final, alors que les contractants se sont accordés sur les éléments principaux dudit contrat et les engagements réciproques. Elles emportent engagement réciproque de conclure.
En l'espèce, la « lettre d'intention » présente les parties, à savoir les sociétés Genimed, Genimarket et Fors, ainsi que leurs rôles respectifs dans le développement futur des mallettes médicales d'urgence et bornes d'automédication et conseil santé.
L'acte prévoit l'imputabilité de certains coûts de développement (validation, homologation, certification), décrit un exemple du mode d'amortissement des coûts de validation, d'homologation ou de certification. Il explique aussi que les contrats de licences seront conclus entre les parties ultérieurement pour confier à la société Fors la fabrication et la distribution de la mallette et de la borne. Il précise que la société Fors accepte que la mallette et la borne soient commercialisées sous la marque Genimed, et que sa marque « Telemedecine Station » soit jointe à la marque Genimed. Les parties fixent également le montant de la redevance due par la société Fors France. Le document rappelle que la société Genimed est seule propriétaire du logiciel et des bases de données. Enfin, les sociétés Genimed et Genimarket s'engagent à ne pas commercialiser de produits directement concurrents à la mallette et la borne dont il est question.
Plus précisément, cet acte énonce notamment que « la société Genimarket et Fors négocieront les licences confiant à Fors la fabrication et la distribution de la mallette et de la borne, pour toutes zones géographiques en France et à l'international (hors la distribution pour la Libye et le Mali qui sera conservée par Genimarket) dans le cadre de modalités commerciales qui restent à discuter entre les parties, mais sur la base des principes prévus par la présente lettre » (page 3, point 3), que « le contrat formalisant l'octroi de licences de fabrication et de distribution, sera négocié, et officialisé en cas d'accord entre les parties, dans les 60 jours suivant la signature de la lettre d'intention. Il sera conclu pour une durée indéfinie » (page 4).
Il stipule enfin que « cette licence sera accordée à Fors uniquement pour la fabrication et la distribution de la mallette et de la borne, sans entraîner aucun transfert de propriété ou de savoir-faire à Fors sur le système de télé-médecine ou les bio-capteurs » (page7 dernier paragraphe).
Il ressort de cette « lettre d'intention » que les parties entendent poser les bases d'une négociation pour permettre à la société Fors France de fabriquer et de distribuer les mallettes médicales d'urgence et bornes d'automédication et conseil santé, dotées d'un système de télé-médecine, des bases de données et des bio-capteurs, propriétés de la société Genimed.
Ainsi, l'intention des parties, telle qu'elle ressort de l'acte, est de poser « la base des principes » mais que « le cadre des modalités commerciales » des licences « reste à discuter entre les parties ».
Dès lors, il apparaît que seuls les principes étaient actés dans cette lettre d'intention, mais que les parties ne s'étaient pas accordées sur leurs obligations réciproques dans les contrats de licences.
En outre, comme l'ont relevé les premiers juges, les échanges ultérieurs entre les parties et notamment le courrier de la société Fors adressé aux sociétés Santé Action et Genimarket, du 1er octobre 2010, démontrent que certains points évoqués dans la lettre d'intention, étaient remis en cause par la société Fors, notamment s'agissant du montant de la redevance due par la société Fors, et de la durée de la licence à son bénéfice.
Par ailleurs, ce même courrier établit que de nombreux points essentiels à la signature d'un contrat de licence n'ont pas été abordés dans la lettre d'intention, à savoir la garantie par la société Santé Actions, la protection des droits de propriété intellectuelles de la société Fors France, la signature d'un contrat de distribution distinct du contrat de fabrication, les modalités de résiliation, la propriété de la clientèle, ou encore les devoirs d'informations réciproques. Or, il apparaît que les parties ne trouvent pas d'accord sur ces points dans le cadre de leurs négociations.
En conséquence, la « lettre d'intention » ne constitue pas un accord des sociétés Fors France, d'une part, et Genimed et Genimarket d'autre part, sur leurs obligations essentielles réciproques dans les contrats de licences à signer, alors que le montant des redevances comme la durée étaient remis en cause par la société Fors France, et que les modalités commerciales, juridiques comme financières, éléments déterminants, restaient à définir entre les parties.
La lettre d'intention du 5 mai 2010 ne peut donc être qualifiée de promesse de contrat. Il y a donc lieu de rejeter la demande de la société Fors France sur le fondement de l'inexécution de la promesse de contrat ou du contrat du 5 mai 2010.
Le jugement doit être confirmé sur ce point.
Sur les demandes formées au titre de la rupture fautive de l'accord de principe
La société Fors France soutient subsidiairement que la « lettre d'intention » du 5 mai 2010 doit être qualifiée de contrat de négociation. Elle explique que la rupture des négociations par les sociétés Genimed et Genimarket, aidées de Monsieur [Z] [Y], est fautive, en raison de leur mauvaise foi. Les sociétés Genimed et Genimarket relèvent qu'il n'est pas établi qu'elles ont manqué à leur obligation de moyen et qu'elles ont mené avec bonne foi les négociations. Monsieur [Z] [Y] conteste avoir contribué à l'échec des négociations.
Si le principe de la liberté de la rupture des pourparlers est posé, même dans l'hypothèse d'un contrat dit de négociation, il n'en demeure pas moins que les parties s'obligent à la bonne foi lors des négociations.
Il appartient donc à celui qui invoque une rupture fautive de démontrer la faute commise par l'autre partie à la négociation, et notamment sa mauvaise foi.
La société Fors France reproche aux sociétés Genimed et Genimarket de l'avoir exclue du dossier Oséo 2. Or, ce grief n'est pas repris par la société Fors France dans le courrier du 1er octobre 2010 déjà évoqué supra, comme étant un motif de refus de signer le projet de contrat de licence envoyé. En tout état de cause, ce grief n'est pas établi et ne démontre pas la mauvaise foi des sociétés Genimed et Genimarket dans la poursuite des négociations avec elle.
Par ailleurs, la société Fors France soutient que les clauses proposées dans le contrat de licence par les sociétés Genimed et Genimarket démontrent leur mauvaise foi, en ce que le contrat serait déséquilibré. Toutefois, la société Fors France ne démontre pas le déséquilibre qu'elle invoque. Les clauses dont elle fait état et qu'elle conteste n'apparaissent pas déséquilibrées. Ces clauses et les rapports de force, dont il est question, constituent l'objet même des négociations. Le seul fait que les parties ne s'accordent pas sur certains points essentiels ne peut suffire à établir la mauvaise foi d'une partie dans le cadre des négociations.
En outre, il convient de relever avec les premiers juges que les parties ont continué leurs échanges au-delà du délai prévu dans la lettre d'intention pour signer les contrats de licence de soixante jour, que différents projets de contrat ont été échangés entre les parties, jusqu'au 21 septembre 2010, date de la dernière version proposée par les sociétés Genimed et Genimarket. Il a déjà été relevé supra que la société Fors France, contrairement aux sociétés Genimed et Genimarket, a remis en cause des points pourtant définis dans la lettre d'intention du 5 mai 2010. Ainsi, suite au courrier du 1er octobre 2010 de la société Fors France, les sociétés Genimed et Genimarket n'ont pas commis d'abus en annonçant par courrier du 23 novembre 2010 la fin des pourparlers.
Il n'est donc pas établi par la société Fors France que les sociétés Genimed et Genimarket ont manqué à leur obligation de bonne foi dans la poursuite des négociations avec elle, ni que la rupture des négociations revêt un caractère abusif.
Il y a donc lieu de rejeter les demandes de la société Fors France de ce chef.
Le jugement doit être confirmé de ce chef.
Sur les demandes à l'encontre de Monsieur [Z] [Y]
La société Fors France reproche à Monsieur [Z] [Y] d'avoir contribué à l'échec des négociations, ce que conteste ce dernier.
Il convient d'abord de relever que la rupture des négociations par les sociétés Genimed et Genimarket n'est pas fautive.
Par ailleurs, aux termes du courriel du 3 juillet 2010 que la société Fors France met en avant, il apparaît que Monsieur [Z] [Y] a essayé de trouver des solutions avec les sociétés Genimed et Genimarket pour proposer à la société Fors France un montage acceptable pour toutes les parties.
Dans ces conditions, il y a lieu de rejeter les demandes de la société Fors France de ce chef.
Le jugement doit être confirmé sur ce point.
Sur les demandes à l'encontre de la société Santé Actions
Sur la recevabilité de la demande
La société Santé Actions soutient que cette demande est irrecevable pour avoir été formée pour la première fois à son encontre en cause d'appel. La société Fors France invoque la recevabilité de sa demande, pour avoir sollicité en première instance la même condamnation sur le fondement de la responsabilité délictuelle.
La société Fors France reprochait en première instance à la société Santé Actions de bénéficier économiquement de ses investissements réalisés dans le cadre du projet de commercialisation des mallettes médicales d'urgence et bornes d'automédication et conseil santé. Ce même grief est repris par la société Fors France en cause d'appel pour formuler une demande fondée sur l'enrichissement sans cause.
Cette demande est donc recevable.
La société Santé Actions conteste également la recevabilité de la demande au motif que la société Fors France dispose d'autres actions à son encontre pour faire valoir ses droits.
Ce grief est un moyen de fond et sera donc examiné pour apprécier le bien-fondé de la demande.
Il y a donc lieu de rejeter le moyen tiré de l'irrecevabilité de la demande.
L'action de in rem verso ne doit être admise que dans les cas où le patrimoine d'une personne se trouvant, sans cause légitime, enrichi au détriment de celui d'une autre personne, celle-ci ne jouirait, pour obtenir ce qui lui est dû, d'aucune action naissant d'un contrat, d'un quasi-contrat, d'un délit ou d'un quasi-délit, et elle ne peut être intentée en vue d'échapper aux règles par lesquelles la loi a expressément défini les effets d'un contrat déterminé.
La société Fors France ne démontre pas que la société Santé Actions profite de ses investissements, et ce indûment, ni qu'elle ne dispose d'aucune autre action à son égard pour faire valoir ses droits.
Il y a donc lieu de rejeter la demande formée par la société Fors France de ce chef.
Le jugement doit être confirmé sur ce point.
Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l'application qui y a été faite des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
La société Fors France, partie perdante, doit être condamnée aux dépens d'appel, dont distraction, ainsi qu'à payer aux sociétés Santé Action, Genimed (n °524 451 606) en son nom propre et n° 479 567 430, et venant aux droits de la société Genimarket, ainsi qu'à Monsieur [Z] [Y] chacun la somme supplémentaire de 15.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du code de procédure civile formulée par la société Fors France.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
DÉCLARE irrecevable la demande formée par la société Fors France à l'encontre de Monsieur [Z] [Y],
REJETTE le moyen tiré de l'irrecevabilité de la demande formée par la société Fors France à l'encontre de la société Santé Actions,
CONFIRME le jugement,
Y ajoutant,
CONDAMNE la société Fors France aux dépens d'appel, dont distraction, ainsi qu'à payer aux sociétés Santé Action, Genimed (n°524 451 606) en son nom propre et n°479 567 430, et venant aux droits de la société Genimarket, ainsi qu'à Monsieur [Z] [Y] chacun la somme supplémentaire de 15.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
REJETTE toute autre demande.
Le Greffier La Présidente
Cécile PENG Irène LUC