Grosses délivrées RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 2 - Chambre 2
ARRÊT DU 05 AVRIL 2018
(n° 2018 - 100 , 20 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 15/11931, jonction avec le dossier 18/3361
Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Mai 2015 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 12/00614
APPELANTS :
Monsieur [L], [K], [W] [X]
Né le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 1]
[Adresse 1]
[Adresse 2]
ET
Monsieur [E] [N]
Né le [Date naissance 2] 1967 à [Localité 2]
[Adresse 3]
[Adresse 4]
ET
Monsieur [W], [A], [D] [P]
Né le [Date naissance 3] 1970 à [Adresse 5]
[Adresse 6]
[Adresse 7]
ET
Monsieur [W], [O], [U] [K]
Né le [Date naissance 4] 1962 à [Adresse 8]
[Adresse 9]
[Adresse 10]
ET
Madame [X] [Z] [E]
Née le [Date naissance 2] 1956 à [Localité 3]
[Adresse 11]
[Adresse 12]
ET
Madame [H], [U] [Z], épouse [C]
Née le [Date naissance 5] 1954 à [Localité 3]
[Adresse 13]
[Adresse 10]
ET
Monsieur [I], [P], [V] [G]
Né le [Date naissance 6] 1955 à [Localité 3]
[Adresse 14]
[Adresse 10]
ET
Madame [B], [J], [S] [W], épouse [G]
Née le [Date naissance 7] 1955 à [Localité 4]
[Adresse 14]
[Adresse 10]
ET
Madame [Y], [T], [R] [S], épouse [D]
Née le [Date naissance 8] 1948 à [Localité 5]
[Adresse 15]
[Adresse 16]
ET
Madame [J] [F], épouse [H]
Née le [Date naissance 9] 1959 à [Localité 6]
[Adresse 17]
[Adresse 8]
ET
L'ASSOCIATION UNION DES FAMILLES POUR LES RETRAITES - UFP RETRAITES, agissant en la personne de son représentant légal
[Adresse 18]
[Adresse 19]
Représentés par Me Sylvie CHARDIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0079
Assistés à l'audience de Me Françoise BESSON, avocat au barreau de PARIS, toque : D1356
INTIMÉS :
L'Association Générale des Institutions de Retraite des Cadres (AGIRC), prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 20]
[Adresse 10]
ET
L'Association pour le Régime de Retraite Complémentaire des salariés (ARRCO), prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 20]
[Adresse 10]
Représentées par Me Jérôme ARTZ de la SELAS Jacques BARTHELEMY & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L0097
Assistées à l'audience de Me Jacques BARTHELEMY, avocat au barreau de PARIS, toque : L 0097
LA CONFEDERATION GENERALE DES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES- CGPME, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 21]
[Adresse 22]
ET
LE MOUVEMENT DES ENTREPRISES DE FRANCE - MEDEF, pris en la personne de son représentant légal
[Adresse 23]
[Adresse 10]
Représentées par Me Hervé DUVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : R297
Assistées à l'audience de Me Frédéric BURET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1998
Le Syndicat CFDT CADRES, Union de Syndicats, représentée par son secrétaire général, Monsieur [N] [Q], pris en la personne de son représentant légal
[Adresse 24]
[Adresse 10]
ET
La Confédération Française Démocratique du Travail - CFDT, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 25]
[Adresse 10]
Représentés par Me Béatrice BURSZTEIN de la SCP LBBA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0469
Assistés à l'audience de Me Henri-José LEGRAND, avocat au barreau de PARIS, toque : P0469
L'Union Professionnelle Artisanale (UPA), prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 26]
[Adresse 27]
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
Assistée à l'audience de Me Jean-Michel LEPRETRE du PARTNERSHIPS ORRICK HERRINGTON & SUTCLIFFE (Europe) LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : P0134
La CFTC, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 28]
[Adresse 29]
ET
L'UGICA - CFTC, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 28]
[Adresse 29]
Représentées par Me Christophe PACHALIS de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K148
La Confédération Générale du Travail -Force Ouvrière (CGT - FO), prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 30]
[Adresse 10]
ET
La FO-CADRES, prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 31]
[Adresse 10]
Représentées par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111
Assistées à l'audience de Me Léa PEREZ, avocat au barreau de PARIS substituant Me Jean-François DELRUE de la SCP DBG, avocat au barreau de PARIS, toque : P0174
COMPOSITION DE LA COUR :
Madame Marie-Hélène POINSEAUX, présidente, ayant préalablement été entendue en son rapport dans les conditions de l'article 785 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le, en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Marie-Hélène POINSEAUX, présidente de chambre
Madame Annick HECQ-CAUQUIL, conseillère
Madame Isabelle CHESNOT, conseillère
qui en ont délibéré
Greffière, lors des débats : Madame Fatima-Zohra AMARA
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
- signé par Madame Marie-Hélène POINSEAUX, présidente et par Madame Fatima-Zohra AMARA, greffière présente lors du prononcé.
***************
Vu l'appel interjeté le 8 juin 2015 par l'association des familles pour les retraites - UFP retraites, MM. [L] [X], [E] [N], [W] [P], [W] [K], [I] [G], Mmes [X] [E], [H] [Z] épouse [C], [B] [W] épouse [G], [Y] [S] épouse [D] et [J] [F] épouse [H] d'un jugement rendu le 12 mai 2015 par le tribunal de grande instance de Paris, lequel :
* A rejeté la fin de non-recevoir,
* les a déboutés de l'ensemble de leurs demandes,
* a rejeté les prétentions articulées sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
* a débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires,
* les a condamnés aux dépens avec distraction ;
Vu les dernières écritures notifiées par voie électronique le 31 octobre 2017, par lesquelles l'association des familles pour les retraites - UFP retraites, MM. [L] [X], [E] [N], [W] [P], [W] [K], [I] [G], Mmes [X] [E], [H] [Z] épouse [C], [B] [W] épouse [G], [Y] [S] épouse [D] et [J] [F] épouse [H] demandent à la cour de :
* Se rétracter et transmettre la question prioritaire de constitutionnalité développée dans un nouveau mémoire distinct à la Cour de cassation et surseoir à statuer dans l'attente de sa décision,
ou bien infirmer le jugement du 12 mai 2015 du tribunal de grande instance de Paris et, statuant à nouveau,
* dire et juger nul et de nul effet le paragraphe 1 et le 3ème alinéa du paragraphe 2 de l'article 7 de l'accord portant sur les retraites complémentaires AGIRC ARRCO AGFF du 18 mars 2011,
* dire et juger nul et de nul effet le 2) de l'avenant A-264 du 8 juin 2011 à la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947,
* dire et juger nul et de nul effet l'avenant n°115 du 8 juin 2011 à l'accord national interprofessionnel de retraite complémentaire du 8 décembre1961 en ce qu'il introduit un dernier alinéa au 2° de l'article 17 de la convention nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947,
* condamner in solidum l'AGIRC, l'ARRCO, le MEDEF, la CGPME, l'UPA, la CFDT, la CFTC, la CGT-FO, FO Cadres, la CFDT-Cadres, l'UGICA-CFTC au paiement de 6 000 euros sur le fondement de l'article 700 code de procédure civile ;
Vu les dernières écritures notifiées par voie électronique le 5 février 2018, aux termes desquelles l'Association Générale des Institutions de Retraite des Cadres (AGIRC) et l'Association pour le Régime de Retraite Complémentaire des salariés (ARRCO) prient la cour de :
* Débouter les requérants de toutes leurs prétentions en confirmant le jugement du tribunal de grande instance en date du 12 mai 2015,
* les condamner au paiement d'une somme de 5 000 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance avec distraction ;
Vu les dernières écritures notifiées par voie électronique le 24 mai 2017, aux termes desquelles la CFTC et l'UGICA-CFTC prient la cour de :
* Dire n'y avoir lieu à se rétracter et transmettre la question prioritaire de constitutionnalité, objet de l'arrêt du 11 décembre 2015, à la Cour de cassation et donc de surseoir à statuer,
* confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté les demandeurs à la procédure de toutes leurs demandes,
* les condamner solidairement au paiement de la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction ;
Vu les dernières écritures notifiées par voie électronique le 2 février 2018, aux termes desquelles la Confédération Française des Travailleurs (CFDT) et la CFDT-Cadres prient la cour de :
* Juger l'Union des Familles pour les Retraites et ses adhérents mal fondés en leur appel,
* confirmer le jugement, les débouter de leurs demandes, excepté sur le rejet de la demande des concluants fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
* le réformant sur ce point, ordonner aux appelants in solidum de rembourser à chacune des concluantes leurs frais non compris dans les dépens à concurrence de la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
* mettre à leur charge les entiers dépens de première instance et d'appel ;
Vu les dernières écritures notifiées par voie électronique le 6 février 2018 par lesquelles la Confédération Générale du Travail - Force Ouvrière (CGT- FO) et FO-Cadres demandent à la cour de :
* Débouter les appelants de toutes leurs demandes,
* confirmer le jugement entrepris,
* condamner solidairement les appelants au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens avec distraction ;
Vu les dernières écritures notifiées par voie électronique le 4 novembre 2015, aux termes desquelles l'Union Professionnelle Artisanale (UPA) devenue Union des entreprises de proximité (U2P) prie la cour, au visa notamment de l'article 34 de la Constitution, la convention collective nationale de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, l'accord national interprofessionnel de retraite complémentaire du 8 décembre 1961, les articles L. 911-1 et suivants du code de la sécurité sociale, de :
* Confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 12 mai 2015 en toutes ses dispositions,
* débouter l'Union des familles pour les retraites, MM. [L] [X], [E] [N], [W] [P], [W] [K], [I] [G], Mmes [X] [Z] [E], [H] [Z] épouse [C], [B] [W] épouse [G], [Y] [S] épouse [D], et [J] [F] épouse [H] de leurs demandes,
* condamner solidairement les demandeurs à lui payer la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction ;
Vu les dernières écritures notifiées par voie électronique le 30 janvier 2018, aux termes desquelles le MEDEF (Mouvement des Entreprises de France) et la CPME (Confédération des Petites et Moyennes Entreprises) prient la cour de :
* Déclarer irrecevables les demandes des appelants en ce qu'elles mettent en cause l'inconstitutionnalité des dispositions des articles L. 911-1 et suivants du code de la sécurité sociale,
* les débouter de toutes leurs demandes,
* confirmer le jugement entrepris,
* condamner solidairement les appelants au paiement au MEDEF, d'une part, et à
la CPME, d'autre part, d'une somme de 6 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens avec distraction ;
Vu le mémoire notifié le 5 décembre 2017 de l'association des familles pour les retraites - UFP retraites, MM. [L] [X], [E] [N], [W] [P], [W] [K], [I] [G], Mmes [X] [E], [H] [Z] épouse [C], [B] [W] épouse [G], [Y] [S] épouse [D] et [J] [F] épouse [H], au visa de l'article 126-6 du code de procédure civile, aux fins de rétractation de l'arrêt en date du 11 décembre 2015 refusant la transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité et demandant à la cour de :
* Transmettre à la Cour de cassation la question prioritaire de constitutionnalité suivante: Les dispositions de l'article L. 921-4 du code de la sécurité sociale et des articles L. 911-1, L. 911-3 et L. 911-4 auxquels il renvoie, par lesquelles le législateur a habilité les partenaires sociaux à définir, par voie d'accords nationaux interprofessionnels étendus et élargis par arrêtés des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, l'intégralité des règles des régimes complémentaires obligatoires de retraite, sous réserve de certaines clauses obligatoires ou prohibées qu'il a définies, sont-elles conformes aux droits et libertés que la Constitution garantit, et notamment à la garantie constitutionnelle des situations légalement acquises résultant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789 ' ;
Vu les dernières écritures notifiées par voie électronique les 5 et 16 février 2018, aux termes desquelles l'Association Générale des Institutions de Retraite des Cadres (AGIRC) et l'Association pour le Régime de Retraite Complémentaire des salariés (ARRCO) prient la cour de :
* Refuser de se rétracter,
* refuser de transmettre la question tirée de l'inconstitutionnalité des dispositions de l'article L. 921-4 du code de la sécurité sociale et des articles L. 911-1, L. 911-3 et L. 911-4 auxquels il renvoie ;
Vu les dernières écritures notifiées par voie électronique le 1er février 2018, aux termes desquelles la CFTC et l'UGICA-CFTC prient la cour de :
* Refuser de se rétracter,
* refuser de transmettre la question tirée de l'inconstitutionnalité des dispositions de l'article L. 921-4 du code de la sécurité sociale et des articles L. 911-1, L. 911-3 et L. 911-4 auxquels il renvoie ;
Vu les dernières écritures notifiées par voie électronique les 2 et 16 février 2018, aux termes desquelles la Confédération Française des Travailleurs (CFDT) et la CFDT Cadres prient la cour de :
* Refuser de se rétracter,
* subsidiairement, refuser de transmettre la question tirée de l'inconstitutionnalité des dispositions de l'article L. 921-4 du code de la sécurité sociale et des articles L. 911-1, L. 911-3 et L. 911-4 auxquels il renvoie ;
Vu les dernières écritures notifiées par voie électronique les 6 et 16 février 2018 par lesquelles la Confédération Générale du Travail - Force Ouvrière (CGT- FO) et FO-Cadres demandent à la cour de :
* déclarer irrecevable la demande en rétractation formulée par l'Union des familles pour les retraites (UFP-retraites) et les autres requérants avec toutes conséquences de droit ;
Vu les dernières écritures notifiées par voie électronique le 19 janvier 2016, aux termes desquelles l'Union Professionnelle Artisanale (UPA) devenue Union des entreprises de proximité (U2P) prie la cour de :
* Rejeter la demande en rétractation de refus de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité,
* refuser de transmettre la question tirée de la prétendue inconstitutionnalité des dispositions de l'article L. 921-4 du code de la sécurité sociale et des articles L. 911-1, L. 911-3 et L. 911-4 auxquels il renvoie,
- débouter les appelants de toutes leurs demandes,
- les condamner solidairement au paiement de la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens dont le montant pourra être recouvré par Lexavoués Paris-Versailles ;
Vu les dernières écritures notifiées par voie électronique les 30 janvier et 16 février 2018, aux termes desquelles le MEDEF (Mouvement des entreprises de France) et la CPME (Confédération des petites et moyennes entreprises) prient la cour de :
* Refuser de se rétracter,
* refuser de transmettre la question tirée de l'inconstitutionnalité des dispositions de l'article L. 921-4 du code de la sécurité sociale et des articles L. 911-1, L. 911-3 et L. 911-4 auxquels il renvoie ;
Vu l'avis du Ministère public notifié par voie électronique le 23 février 2018, concluant :
* Principalement, à l'irrecevabilité de la requête aux fins de rétractation, compte tenu des règles spécifiques applicables à la procédure de rétractation du refus de transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité,
* subsidiairement, sur la question, à la déclaration de l'inapplicabilité au litige des articles 921-4 du code de la sécurité sociale et L.9l1-1, L.911-3 et L. 911-4 auxquels il renvoie,
- très subsidiairement, au refus de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité en raison de son absence de caractère sérieux ;
Vu le mémoire en réponse à l'avis du Ministère public, notifié le 1er mars 2018, de l'association des familles pour les retraites - UFP retraites, MM. [L] [X], [E] [N], [W] [P], [W] [K], [I] [G], Mmes [X] [E], [H] [Z] épouse [C], [B] [W] épouse [G], [Y] [S] épouse [D] et [J] [F] épouse [H], tendant à l'application de l'article 126-6 alinéa 2 du code de procédure civile, l'argumentaire du Ministère public procédant d'une violation de la loi ;
SUR CE, LA COUR,
Considérant qu'il y a lieu, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, de joindre à l'affaire au fond le dossier de demande de rétractation de refus de transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité ;
Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ; qu'il convient de rappeler que :
* Le 14 mars 1947 a été conclue entre les représentants des employeurs et des cadres la convention collective nationale de retraite de prévoyance des cadres, régime obligatoire de retraite complémentaire par répartition, gérée par l'Association Générale des Institutions de Retraite des Cadres (AGIRC) ;
* le 8 décembre 1961, un accord national interprofessionnel a rendu obligatoire, pour l'ensemble des activités représentées au sein du CNPF, l'affiliation des salariés non cadres à l'un des régimes de retraites complémentaires existants, auxquels s'est substitué le 25 avril 1996 un régime unique de retraite complémentaire par répartition, géré par l'Association pour le Régime de Retraite Complémentaire des salariés (ARRCO) ;
* le 18 mars 2011, les partenaires sociaux ont signé un accord prévoyant en son article 7 la modification du régime des majorations familiales des pensions de retraite pour l'avenir,
- pour le régime AGIRC, par le remplacement de la majoration progressive du pourcentage évoluant en fonction du nombre d'enfants par une majoration unique de 10%, à partir du 3ème enfant, quelque soit le nombre d'enfants et par le plafonnement du montant de la majoration perçue à ce titre à la somme maximum de 1 000 euros par an,
- pour le régime ARRCO, par le relèvement de 5 à 10% du montant de la majoration familiale des participants ayant élevé trois enfants ou plus et par le plafonnement du montant de la majoration perçue à ce titre à 1 000 euros par an, accord étendu et élargi par un arrêté conjoint du ministre du travail et du ministre du budget du 27 juin 2011;
* le 8 juin 2011, cet accord a été transposé par deux avenants, A-264 de la convention collective nationale de retraite de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 pour le régime AGIRC et n°115 de la convention collective nationale du 8 décembre 1961 pour le régime ARRCO, avenants étendus et élargis par arrêtés du 27 juin 2011 ;
* les 13, 15 et 21 décembre 2011, les appelants ont fait assigner l'AGIRC, l'ARRCO, et les signataires de l'accord du 18 mars 2011, soit le MEDEF, la CGPME, l'UPA, la CFDT, la CFTC, la CGT-FO, FO-Cadres, la CFDT-Cadres et l'UGICA-CFTC aux fins d'annulation de paragraphes de l'accord du 18 mars 2011 et des avenants A-264 et n°115 du 8 juin 2011, prévoyant la réduction pour l'avenir des taux de majoration pour charges de famille des régimes AGIRC et ARRCO et de leur plafonnement ;
* le 17 avril 2013, le Conseil d'Etat a rejeté les recours de l'UFP-retraites contre les arrêtés ministériels des 27 juin et 17 novembre 2011 portant extension et élargissement de l'accord du 18 mars 2011 et des avenants A-263 et A-264 signés le 8 juin 2011 à la convention collective nationale du 14 mars 1947 et n°115 à l'accord national interprofessionnel du 8 décembre 1961 ;
* le 12 mai 2015 est intervenu le jugement dont appel ;
* par arrêt de cette chambre du 11 décembre 2015, la cour d'appel de Paris a refusé la transmission à la Cour de cassation d'une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'article L. 921-4 du code de la sécurité sociale et les articles L. 911-1, L. 911-3 et L. 911-4 auxquels il renvoie ;
* le 5 décembre 2017, les appelants ont déposé un mémoire en rétractation de cette décision, demandant à la cour de transmettre à la Cour de Cassation la question prioritaire de constitutionnalité ;
Sur la rétractation de la décision refusant la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité :
Sur la recevabilité de la demande :
Considérant que selon l'article 126-6 du code de procédure civile, Le refus de transmettre la question dessaisit la juridiction du moyen tiré de la question prioritaire de constitutionnalité.
Toutefois, lorsque ce refus a été exclusivement motivé par la constatation que la disposition législative contestée n'était pas applicable au litige ou à la procédure en cause, la juridiction peut, si elle entend à l'occasion de l'examen de l'affaire faire application de cette disposition, rétracter ce refus et transmettre la question ;
Considérant qu'en l'espèce, la décision de refus de transmission de la question prioritaire de constitutionnalité a été motivée par l'inapplicabilité au litige des dispositions arguées d'inconstitutionnalité ;
Que, dès lors,
l'article 126-6 alinéa 2 permet de recevoir la demande en rétractation ;
Sur le refus de transmission :
Considérant que, si les articles L. 921-4 du code de la sécurité sociale et les articles L. 911-1, L. 911-3 et L. 911-4 auxquels il renvoie constituent le cadre légal de l'accord du 8 juin 2011 et de ses avenants, ils ne fondent pas la demande en nullité des appelants ;
Que demeurent les motifs ayant conduit à la décision de refus de transmission, dont la demande de rétractation sera rejetée ;
Au fond :
Sur la recevabilité des demandes :
Considérant que le Mouvement des Entreprises de France (MEDEF) et la Confédération des Petites et Moyennes Entreprises (CPME) soulèvent l'irrecevabilité des demandes des appelants, comme poursuivant la nullité de l'accord et des avenants au motif de leur fondement sur une loi ne respectant pas la Constitution, alors qu'il n'appartient pas au juge d'apprécier, même indirectement, la constitutionnalité d'une loi ;
Mais considérant que la demande en nullité d'un accord collectif et de ses avenants de transposition est recevable devant le juge judiciaire, l'appréciation de ses motifs relevant, non de la recevabilité, mais du débat au fond ; que la demande sera rejetée ;
Sur la nullité de l'accord et des avenants :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de la sécurité sociale, A moins qu'elles ne soient instituées par des dispositions législatives ou réglementaires, les garanties collectives dont bénéficient les salariés, anciens salariés et ayants droit en complément de celles qui résultent de l'organisation de la sécurité sociale sont déterminées soit par voie de conventions ou d'accords collectifs, soit à la suite de la ratification à la majorité des intéressés d'un projet d'accord proposé par le chef d'entreprise, soit par une décision unilatérale du chef d'entreprise constatée dans un écrit remis par celui-ci à chaque intéressé ;
Que l'article L. 911-3 du même code dispose que Les dispositions du titre III du livre Ier du code du travail sont applicables aux conventions et accords collectifs mentionnés à l'article L. 911-1. Toutefois, lorsque les accords ont pour objet exclusif la détermination des garanties mentionnées à l'article L. 911-2, leur extension aux salariés, aux anciens salariés, à leurs ayants droit et aux employeurs compris dans leur champ d'application est décidée par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale et du ministre chargé du budget, après avis motivé d'une commission dont la composition est fixée par décret ;
Que selon l'article L. 921-4 du même code, Les régimes de retraite complémentaire des salariés relevant du présent chapitre sont institués par des accords nationaux interprofessionnels étendus et élargis conformément aux dispositions du titre Ier du présent livre.
Ils sont mis en oeuvre par des institutions de retraite complémentaire et des fédérations regroupant ces institutions. Les fédérations assurent une compensation des opérations réalisées par les institutions de retraite complémentaire qui y adhèrent ;
Considérant qu'en l'espèce, les modifications de l'accord du 18 mars 2011 dont la nullité est demandée figurent,
- à l'article 7 paragraphe 1, aux termes duquel Les participants au régime AGIRC qui ont eu ou justifient avoir élevé au moins trois enfants de moins de 16 ans pendant 9 ans, bénéficient d 'une majoration de leur allocation égal à 10%.
Cette disposition s 'applique aux allocations liquidées au titre de la seule partie de carrière postérieure au 31 décembre 2011. Les droits inscrits aux comptes des participants pour les périodes antérieures au 1er janvier 2012 feront l'objet, lors de la liquidation, de l'application des majorations pour enfants telles que prévues par l'article 6 bis de l'annexe 1 à la Convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 194 7 dans sa rédaction en vigueur à la veille du présent accord, sous réserve que les conditions d 'attribution de ces majorations aient été remplies le 31 décembre 2011.
L 'ensemble des majorations pour enfants nés ou élevés servies par l 'AGIRC sera plafonné à 1000 euros par an pour toute liquidation d 'allocation prenant effet à compter du 1er janvier 2012. Ce plafond sera proratisé en fonction de la durée pendant laquelle le participant aura relevé du régime AGIRC,
- à l'article 7 paragraphe 2 alinéa 3, selon lequel L'ensemble des majorations pour enfants nés ou élevés servies par l'ARRCO sera plafonné à 1000 euros par an pour toute liquidation d'allocation prenant effet à compter du 1er janvier 2012. Ce plafond sera proratisé en fonction de la durée pendant laquelle le participant aura relevé du régime ARRCO ;
Que, par voie de conséquence, est également recherchée la nullité des avenants de transposition, soit,
- pour l'AGIRC, l'avenant A-264 à la convention collective nationale de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947, selon lequel Les dispositions de l 'article 6 bis de l'annexe I sont remplacées, pour les liquidations d 'allocations prenant effet à compter du 1er janvier 2012, par les dispositions suivantes : (...)
2) Le participant ayant eu ou élevé pendant 9 ans avant l 'âge de 16 ans au moins 3 enfants (au sens défini par la Commission paritaire), cette condition étant appréciée à la date d'effet de la retraite, peut, sous réserve des dispositions prévues au point 3 ci-dessous, bénéficier d 'une majoration de son allocation calculée sur la base de taux
différents en fonction des parties de carrière :
- pour les périodes antérieures au 1er janvier 2012, majoration pour enfants nés ou élevés, égale à 8% pour 3 enfants, 12% pour 4 enfants, 16%pour 5 enfants, 20% pour 6 enfants, 24% pour 7 enfants ou plus.
- pour les périodes à compter du 1er janvier 2012, majoration pour enfants nés ou élevés (3 ou plus), égale à 10% de l'allocation correspondant à cette partie de carrière.
L'ensemble des majorations prévues au point 2 est plafonné à 1000 euros par an (montant revalorisé en fonction de la valeur du point), pour une liquidation prenant effet à compter du 1er janvier 2012. (sauf pour les participants nés avant le 2 août 1951),
- pour l'ARRCO, l'avenant n°115 du 8 juin 2011à l'accord national
interprofessionnel de retraite complémentaire du 8 décembre 1961, modifiant ainsi son article 17 - 2° Le participant ayant eu ou élevé pendant 9 ans avant l'âge de 16 ans, au moins 3 enfants (au sens défini par la Commission paritaire), cette condition étant appréciée à la date d'effet de la retraite, peut, sous réserve des dispositions prévues au point 3 ci-dessous, bénéficier d 'une majoration de son allocation calculée sur la base des taux et réglementations respectivement applicables aux différentes parties de carrière :
- pour les périodes antérieures au 1er janvier 1999, majorations pour enfants nés ou élevés, telles que prévues, le cas échéant, par les règlements des régimes ARRCO antérieurs au régime unique,
- pour les périodes entre le 1er janvier 1999 et le 31 décembre 2011, majoration pour enfants nés ou élevés, égale à 5% de l'allocation correspondant à cette partie de carrière,
- pour les périodes à compter du 1er janvier 2012, majoration pour enfants nés ou élevés, égale à 10% de l 'allocation correspondant à cette partie de carrière.
L'ensemble des majorations prévues au point 2 est plafonné à 1000 euros par an (montant revalorisé en fonction de la valeur du point), pour toute liquidation prenant effet à compter du 1er janvier 2012 (sauf pour les participants nés avant le 2 août 1951) ;
Que la nullité de l'accord et des avenants est demandée aux motifs qu'ils seraient contraires à la hiérarchie des normes, au principe de sécurité juridique et à l'intérêt général ;
Comme contraires à la hiérarchie des normes :
Considérant que les appelants contestent la compétence des partenaires sociaux pour réformer les majorations familiales des pensions de retraite complémentaire, celles-ci relevant du domaine de la loi ;
Qu'ils soutiennent que les régimes de retraite complémentaire par répartition réunissent, non seulement les partenaires sociaux, mais également les générations futures, impactées par leurs décisions et non-représentées, et qui ne peuvent se voir imposer leur participation à venir, excluant la nature contractuelle des accords, ainsi que le cadre de l'article L. 2221-1 du code du travail ;
Qu'ils se réfèrent, à cet égard, à la nécessité de l'ordonnance à valeur de loi du 4 février 1959 sur les régimes complémentaires de retraite du personnel et affirment le caractère subsidiaire et faiblement contractuel des conventions collectives de retraite complémentaire, limité aux accords des actifs cotisants, concluant à la nature principalement réglementaire du rôle des partenaires sociaux ;
Qu'ils contestent, comme fondement du pouvoir des partenaires sociaux, les normes supra-législatives ou une délégation par le législateur des pouvoirs tirés de l'article 34 de la Constitution, et affirment son caractère réglementaire, dès lors limité par les articles 34 et 37 de la Constitution, seul le législateur déterminant les principes fondamentaux du régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales, du droit du travail, du droit syndical et de la sécurité sociale ;
Qu'ils en concluent que les accords signés par les partenaires sociaux empiètent sur le domaine de la loi, les principes fondamentaux des retraites complémentaires se rapprochant des ceux des régimes de base de la sécurité sociale ;
Qu'ils précisent ne pas remettre en cause et ne pas demander l'annulation de l'augmentation de 5 à 10 % du pourcentage alloué par l'ARCCO aux parents non cadres de familles nombreuses, mais soutiennent que relèvent du domaine de la loi l'instauration d'un plafond au bénéfice d'une prestation ou la suppression du caractère croissant de l'avantage lié au nombre d'enfants ;
Considérant que l'AGIRC et l'ARRCO leur opposent que les accords de retraite complémentaire obligatoire, comme garanties sociales, sont soumis, par référence des articles L. 921-1 et L. 911-1 du code de la sécurité sociale, à l'article L. 2221-1 du code du travail, soit des accords collectifs, de nature contractuelle, avec une mission d'intérêt général et un objectif de solidarité justifiant la procédure de leur extension ; qu'ils rappellent que les droits des cotisants ne sont pas garantis par l'Etat, excluant les avantages acquis ;
Qu'ils affirment en conséquence la constitutionnalité des accords de retraite complémentaire, ne rentrant pas dans le champs des articles 34 et 37 de la Constitution, comme n'étant pas des régimes légaux de sécurité sociale, ainsi que leur légalité, en raison de leur nature contractuelle ;
Considérant que les syndicats CFTC et UGICA-CFTC contestent la qualification de régimes de sécurité sociale des régimes AGIRC et ARRCO, leur inconstitutionnalité au regard des articles 34 et 37 de la Constitution et rappellent le refus de transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité par arrêt de cette chambre du 11 décembre 2015;
Qu'ils font valoir que les majorations familiales ne sont pas des principes fondamentaux de sécurité sociale, réservés à la loi par l'article 34 de la Constitution, mais relèvent de la compétence des partenaires sociaux ;
Considérant que les syndicats CFDT et CFDT Cadres estiment que les régimes de retraite complémentaire ne font pas partie de l'organisation générale de la sécurité sociale et ne constituent pas des régimes de sécurité sociale ; qu'ils font valoir la contradiction des appelants, incriminant la modification dans le régime AGIRC et la validant dans le régime ARRCO ;
Qu'ils soulignent la consécration, par le législateur, de l'autonomie collective à l'origine de ces régimes, soit des garanties collectives pouvant être instituées par la négociation collective, le législateur ou le pouvoir réglementaire, en application des articles L. 911-1 et L. 921-4 du code de la sécurité sociale, ainsi que l'habilitation pour ce faire des organisations syndicales, en vertu de l'article L. 2141-2 du code du travail ;
Considérant que les syndicats CGT-FO et FO-Cadres soutiennent, en application de l'article L. 921-4 du code de la sécurité sociale, la compétence des partenaires sociaux pour instituer des garanties collectives non comprises dans les régimes de base de la sécurité sociale, sous la limite des clauses obligatoires ou prohibées réservée par le législateur et rappellent la décision de la cour de refus de transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité sur cette question ;
Considérant que l'Union Professionnelle Artisanale (UPA) devenue Union des entreprises de proximité (U2P) affirme que l'accord du 18 mars 2011 relève de la seule compétence des partenaires sociaux et n'enfreint aucun principe fondamental, au sens de l'article 34 de la Constitution, les régimes AGIRC et ARRCO étant de nature conventionnelle et les accords, de nature contractuelle, institués par l'article L. 921-4 du code de la sécurité sociale ;
Qu'ils soulignent l'indépendance des régimes de retraite complémentaire à l'égard du régime de sécurité sociale relevant du service public, leur exclusion du règlement communautaire 1408-71, ne visant que les législations de sécurité sociale et remarquent que l'accord du 18 mars 2011 ne porte atteinte à aucun principe fondamental du ressort du législateur, observant que les majorations pour charges de famille du régime général ressortent du seul pouvoir réglementaire ;
Considérant que le Mouvement des Entreprises de France (MEDEF) et la Confédération des Petites et Moyennes Entreprises (CPME) soulignent l'incohérence consistant à contester aux partenaires sociaux le pouvoir de faire évoluer les avantages familiaux qu'ils ont eux-mêmes initialement institués, par des accords collectifs et en l'absence d'une loi en fixant les principes fondamentaux ;
Qu'ils relèvent l'inexactitude de la qualification de régimes de sécurité sociale appliquée aux régimes de retraite complémentaire et l'aptitude des organisations syndicales de salariés à représenter les retraités ;
Considérant que, sous couvert de violation de la hiérarchie des normes, les appelants portent le débat sur la question de la conformité de la loi à la Constitution, objet de leur question prioritaire de constitutionnalité, laquelle a d'ores et déjà été rejetée ;
Que, si le principe de l'institution de régimes de retraite complémentaire ressort du domaine de la loi, il résulte de l'article L. 921-4 du code de la sécurité sociale que ses éléments, relevant des modalités de leur gestion financière et étant renvoyés à la négociation collective des partenaires sociaux, sont en conséquence de nature contractuelle et non des prestations de sécurité sociale, le pouvoir réglementaire n'intervenant que pour leur extension, sous conditions ; qu'il ne peut, dès lors, être reproché aux accord et avenants susvisés un empiétement sur le domaine de la loi ;
Qu'au demeurant, en ne faisant porter leurs prétentions que sur la validité de l'accord relatif aux retraites complémentaires AGIRC-ARRCO-AGFF du 18 mars 2011, ainsi que sur les avenants A-264 du 8 juin 2011 à la convention collective du 14 mars 1947 et n°115 du 8 juin 2011 à l'accord national du 8 décembre1961, ils ne remettent pas en cause le système institué par l'article L. 921-4, mais la seule modification du régime de majoration des retraites en lien avec le nombre d'enfants, dont les limitations existaient antérieurement à l'accord contesté ; qu'ainsi, ils ne critiquent pas la validité de l'accord et de l'avenant n°115, en ce qu'ils augmentent de 5 à 10 % du pourcentage alloué par l'ARCCO aux parents non cadres de familles nombreuses ;
Que leur contestation est donc limitée à la baisse des majorations familiales des cadres et au plafonnement de l'ensemble des majorations familiales, ne relevant pas de principes fondamentaux de la sécurité sociale au sens de l'article 34 de la Constitution et privant ainsi d'effet leur démonstration reposant sur la violation de la hiérarchie des normes ;
Comme contraires au principe de sécurité juridique :
Considérant que l'UFP retraites et les appelants soutiennent l'application seulement partielle du droit du travail aux conventions de retraite complémentaires et l'existence de droits acquis de points de retraite pour les cotisants, quelques soient leurs origines, attribution gratuite de majoration ou acquisition de points par cotisations, distincts du montant des retraites lors de leur liquidation ;
Qu'ils énoncent que les droits en cours d'acquisition sont protégés par le principe de sécurité juridique, interdisant la rétroactivité des règles, protégeant les attentes légitimes et respectant la prévisibilité de la règle de droit ;
Qu'ils en déduisent, d'une part, l'acquisition des droits à la date du fait générateur de la créance, en l'espèce, les naissances et les années d'éducation d'au moins trois enfants, d'autre part, la réalisation du principe d'attente légitime applicable, a fortiori, aux décisions autres que découlant de la loi, soit l'espérance d'une retraite majorée comme compensation de l'effort financier et des renonciations professionnelles consentis en mettant au monde une famille nombreuse, contrepartie future de la survie financière des régimes de retraite complémentaire, enfin, l'imprévisibilité de la règle de droit, en violation de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, faute de proportionnalité entre l'atteinte au droit de propriété et un motif financier, lequel ne peut constituer un objectif d'intérêt général ;
Qu'à cet égard, ils font valoir que l'équilibre général des régimes ne justifie pas l'atteinte portée à la sécurité juridique, alors que le fonctionnement des régimes par points permettait une gestion des régimes complémentaires sauvegardant les droits des adhérents ;
Considérant que l'AGIRC et l'ARRCO soulignent que la technique de la répartition exclut l'existence d'avantages acquis, mais que la fonction protectrice du droit social est assurée par le double paritarisme de conception et de gestion du régime, dont l'autonomie a comme seule limite la préservation du nombre de points des personnes dont la retraite est liquidée ;
Qu'elles rappellent que, si le droit à pension de retraite complémentaire est garanti, tel n'est pas le cas, même si la pension est déjà liquidée, de son montant, résultant des impératifs de solidarité et d'intérêt général, ce droit n'étant pas un droit fondamental en l'absence de principe constitutionnel d'intangibilité des pensions liquidées et pas plus des pensions en cours de constitution, à défaut de provisionnement des engagements ;
Qu'elles soulignent qu'au sens du droit du travail, la notion d'avantage acquis suppose que le travailleur en ait déjà bénéficié, que la nature contractuelle de l'accord collectif est prééminente et sa nature de loi professionnelle secondaire ; qu'elles en déduisent que le principe de non-rétroactivité ne peut être opposé, de surcroît à un droit éventuel, et d'autant plus que l'accord n'est pas opposable pour la part de l'activité antérieure à sa signature et pour les pensions liquidées ; qu'elles font valoir que les partenaires sociaux sont seuls compétents pour décider des choix permettant l'équilibre du régime, leur décision résultant d'une négociation ;
Considérant que la CFTC et l'UGICA-CFTC rappellent que l'accord n'a vocation à s'appliquer qu'aux liquidations d'allocations de retraite prenant effet à compter du 1er janvier 2012, excluant tout caractère rétroactif ainsi que toute atteinte à la non-rétroactivité des normes et à la prévisibilité de la règle nouvelle ;
Qu'ils font valoir que les droits à retraite complémentaire s'appréciant au jour de sa liquidation et l'équilibre financier du régime devant être maintenu, il ne peut y avoir de droits acquis en la matière et que le principe d'attente légitime dégagé par le Conseil constitutionnel ne s'applique qu'aux textes législatifs ;
Considérant que la CFDT et la CFDT Cadres contestent également tout effet rétroactif, la modification ne devant s'appliquer qu'aux liquidations de retraite complémentaire à compter du 1er janvier 2012, les majorations familiales n'étant définitivement acquises et ne pouvant être l'objet d'un droit de créance qu'au jour de la liquidation ;
Considérant que la CGT-FO et FO-Cadres font valoir qu'en vertu de l'article L. 922-11 du code de la sécurité sociale, les partenaires sociaux sont tenus d'assurer l'équilibre financier des régimes de retraite, mais non le maintien des taux des majorations familiales, seules étant concernées les liquidations de pensions postérieures au 1er janvier 2012, pour la seule parties des carrières postérieures au 31 décembre 2011, à l'exclusion de toute atteinte au principe de sécurité juridique ;
Considérant que l'Union Professionnelle Artisanale (UPA) devenue Union des entreprises de proximité (U2P) dénie tout effet rétroactif aux dispositions critiquées, comme n'affectant pas les pensions liquidées avant le 1er janvier 2012 et n'enfreignant aucun droit ou liberté garanti par la Constitution ;
Considérant que le Mouvement des Entreprises de France (MEDEF) et la Confédération des Petites et Moyennes Entreprises (CPME) opposent à l'atteinte à la sécurité juridique alléguée l'absence de remise en cause des droits acquis, soit les pensions liquidées, et d'atteinte aux droits en cours d'acquisition, soit le nombre des points, des retraités et des cotisants, les majorations familiales n'étant pas la contrepartie de cotisations versées et, prenant naissance lors de la liquidation de la pension, ne pouvant être qualifiées de droits acquis ;
Qu'ils contestent tout effet rétroactif de ces mesures, comme ne s'appliquant qu'aux liquidations intervenant à compter du 1er janvier 2012, critiquent l'application du principe d'attente légitime dégagé par le Conseil constitutionnel à des normes autres que législatives, rappelant que les taux des majorations familiales avaient déjà été modifiés en 1994, ainsi que celle du principe de sécurité juridique, soit de prévisibilité de la règle de droit ;
Considérant que L. 911-3 du code de la sécurité sociale renvoie au livre II de la 2ème partie du code du travail et que les accords collectifs sont révisés en application de l'article L. 2261-8 du code du travail selon lequel, L'avenant portant révision de tout ou partie d'une convention ou d'un accord se substitue de plein droit aux stipulations de la convention ou de l'accord qu'il modifie.
Il est opposable, dans des conditions de dépôt prévues à l'article L. 2231-6, à l'ensemble des employeurs et des salariés liés par la convention ou l'accord ;
Considérant que l'accord du 8 juin 2011 et les avenants ne s'appliquent qu'aux pensions dont la liquidation doit prendre effet à compter du 1er janvier 2012 et uniquement au titre de la seule partie de carrière postérieure au 31 décembre 2011 ; qu'ils ne peuvent être qualifiés de rétroactifs ;
Que le fait générateur de la retraite complémentaire n'est constitué que par la liquidation de la pension, dont le calcul intervient en considération du nombre de points acquis et des majorations éventuelles, ces majorations ne constituant pas une créance distincte bien qu'ayant un fait générateur autonome, soit les naissances et l'éducation des enfants ; que ces majorations sont accordées indépendamment de l'acquisition de points et ne peuvent être l'objet, en conséquence, ni d'un droit acquis, ni d'un droit en cours d'acquisition ;
Que les premiers juges ont justement relevé que le principe d'attente légitime n'est applicable qu'aux dispositions législatives ; que le principe de prévisibilité de la règle de droit ne peut s'appliquer à des accords collectifs de nature contractuelle, alors, au surplus, que l'article L. 2261-8 du code du travail prévoit l'opposabilité de leur révision ;
Que, de même, le principe de proportionnalité ne saurait s'appliquer, faute de conflit de droits en présence, étant rappelé que les majorations familiales ne constituent pas un droit, de créance ou de propriété, avant la liquidation de la pension de retraite complémentaire ;
Comme contraires à l'intérêt général :
Considérant que les appelants, rappelant que selon le Conseil Constitutionnel, la protection des attentes légitimes ne peut être écartée qu'en cas d'intérêt général suffisant, soulignent la modestie des bénéfices escomptés de la réforme critiquée et contestent la décision des premiers juges en faisant valoir le lien entre la survie des régimes et la naissance d'un nombre suffisant d'enfants, qu'il convient d'encourager en dédommageant partiellement leurs auteurs ;
Qu'ils reprochent à la réforme son défaut de respect des exigences de solidarité et d'égalité, selon lesquels doivent être traités différemment les justiciables dont la situation est différente, au regard du coût de l'éducation d'un enfant et des difficultés pour les parents de famille nombreuse de se constituer une épargne et un capital retraite, du faible taux d'activité professionnelle des mères, au regard du surcroît de cotisants offert aux régimes de retraite complémentaire en dépit de la baisse du taux de la natalité ;
Considérant que l'AGIRC et l'ARRCO observent que l'intérêt général est invoqué par les appelants pour protéger des intérêts catégoriels, l'équilibre du régime dépendant de facteurs étrangers au nombre d'enfants par foyer, et que ce dispositif d'intérêt général ne heurte pas un droit fondamental, et notamment celui de la négociation collective ;
Considérant que les syndicats CFTC et l'UGICA-CFTC soulignent la mission d'intérêt général de l'AGIRC et de l'ARRCO, personnes morales de droit privé, et non en charge d'un service public, revenant aux seules caisses de sécurité sociale des régimes de base ;
Considérant que la CFTC et l'UGICA-CFTC demandent la confirmation de la décision des premiers juges, en ce que l'atteinte à l'équilibre du régime, faute de maintien d'un rapport démographique satisfaisant, par la modification des majorations pour enfants n'est pas établie ; qu'ils observent que la critique porte, non sur la légalité, mais sur l'opportunité de la mesure, ne relevant pas de la compétence des juridictions ;
Considérant que la CGT-FO et FO-Cadres soutiennent que les appelants défendent les intérêts catégoriels des cadres relevant du régime AGIRC, au détriment de l'intérêt général, soit la pérennisation de l'ensemble du régime, assuré par l'accord du 18 mars 2011 ;
Considérant que l'Union Professionnelle Artisanale (UPA) devenue Union des entreprises de proximité (U2P) conteste toute atteinte à l'intérêt général, observant de surcroît que n'existe aucun contrôle judiciaire de la conformité des accords collectifs à l'intérêt général, lequel ne constitue ni une norme, ni un principe général du droit ;
Qu'elle souligne les intérêts catégoriels défendus par les appelants, alors que tous les participants sont concernés par la pérennité du régime, que la majoration litigieuse n'a pas été supprimée mais augmentée pour le régime ARRCO, que l'alignement des majorations répond au souci d'assurer l'équilibre financier des régimes de retraite complémentaire et qu'il n'est pas démontré l'effet favorable sur la natalité des majorations pour charges de famille au cours des années passées ;
Considérant que le Mouvement des Entreprises de France (MEDEF) et la Confédération des Petites et Moyennes Entreprises (CPME), rappelant que doivent être observés les principes de solidarité, d'égalité et de proportionnalité, observent que les appelants ne prennent en compte que les intérêts des cadres relevant du régime AGIRC et soulignent le souci des partenaires sociaux d'assurer la pérennité des régimes de retraite complémentaire ;
Considérant que selon l'article L. 922-11 alinéa 2 du code de la sécurité sociale, figurant au chapitre 2 sur les Dispositions relatives aux institutions de retraite complémentaire, à leurs fédérations et à leurs opérations, Les régimes mentionnés à l'alinéa précédent doivent, s'il y a lieu, modifier leurs dispositions pour définir les nouvelles modalités assurant la sauvegarde des droits de leurs adhérents ;
Considérant qu'il revient au juge de contrôler la conformité de la mesure, non à l'intérêt général, mais aux principes de solidarité, d'égalité et de proportionnalité ;
Que ces principes sont respectés par le choix des partenaires sociaux, dont les nouvelles mesures permettent de maintenir le niveau des pensions, en ne diminuant pas la valeur du point ; que la modification des majorations familiales ne contrevient pas à au principe d'égalité entre l'ensemble des cotisants ;
Que la sauvegarde du régime, par le maintien d'un rapport démographique satisfaisant, n'apparaît pas liée exclusivement à l'existence des majorations familiales des pensions de retraite complémentaire ;
Sur les autres demandes :
Considérant qu'il résulte du sens de l'arrêt que les appelants ne sauraient bénéficier des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ; qu'en revanche, l'équité commande de les condamner in solidum, sur ce même fondement, à verser à chacun des intimés une indemnité de 1 000 euros ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement,
Ordonne la jonction au dossier portant le numéro RG 15/11931 l'affaire enregistrée sous le numéro RG 18/03361 ;
Déclare recevable la demande de rétractation de l'arrêt du 11 décembre 2015 de l'association des familles pour les retraites - UFP retraites, MM. [L] [X], [E] [N], [W] [P], [W] [K], [I] [G], Mmes [X] [E], [H] [Z] épouse [C], [B] [W] épouse [G], [Y] [S] épouse [D] et [J] [F] épouse [H] ;
Déclare recevables les demandes de l'association des familles pour les retraites - UFP retraites, MM. [L] [X], [E] [N], [W] [P], [W] [K], [I] [G], Mmes [X] [E], [H] [Z] épouse [C], [B] [W] épouse [G], [Y] [S] épouse [D] et [J] [F] épouse [H] ;
Rejette la demande de rétractation ;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement déféré ;
Y ajoutant,
Condamne in solidum l'association des familles pour les retraites - UFP retraites, MM. [L] [X], [E] [N], [W] [P], [W] [K], [I] [G], Mmes [X] [E], [H] [Z] épouse [C], [B] [W] épouse [G], [Y] [S] épouse [D] et [J] [F] épouse [H] à payer à l'Association Générale des Institutions de Retraite des Cadres (AGIRC), l'Association pour le Régime de Retraite Complémentaire des salariés (ARRCO), la CFTC, l'UGICA-CFTC, la Confédération Française des Travailleurs (CFDT), la CFDT-Cadres, la Confédération Générale du Travail - Force Ouvrière (CGT- FO), FO-Cadres, l'Union des entreprises de proximité (U2P), le Mouvement des Entreprises de France (MEDEF) et la Confédération des Petites et Moyennes Entreprises (CPME) la somme de 1 000 euros chacun au titre des frais irrépétibles d'appel ;
Rejette toutes autres demandes contraires à la motivation ;
Condamne in solidum l'association des familles pour les retraites - UFP retraites, MM. [L] [X], [E] [N], [W] [P], [W] [K], [I] [G], Mmes [X] [E], [H] [Z] épouse [C], [B] [W] épouse [G], [Y] [S] épouse [D] et [J] [F] épouse [H] aux dépens et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE