Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 1
ARRET DU 10 AVRIL 2018
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 16/16588
Décision déférée à la Cour : Sentence rendue à Paris le 21 juin 2016 par le tribunal arbitral ad hoc, composé de MM [A] et [S], arbitres, et de M. [X], président
DEMANDEURS AU RECOURS :
Monsieur [Z] [J] né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 1] (Burkina Faso)
[Adresse 1]
[Localité 2]
représenté par Me Sylvie CHARDIN, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : L0079
assisté de Me Yves GUIBERT, avocat plaidant du barreau du MANS
Madame [W] [E] née le [Date naissance 2] 1967 à [Localité 3] (Oise)
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Me Sylvie CHARDIN, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : L0079
assistée de Me Yves GUIBERT, avocat plaidant du barreau du MANS
SOCIÉTÉ VARFON S.A.S.
prise en la personne de ses représentants légaux
dont le siège est :
[Adresse 2]'
[Localité 4]
représentée par Me Sylvie CHARDIN, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : L0079
assistée de Me Yves GUIBERT, avocat plaidant du barreau du MANS
DÉFENDERESSE AU RECOURS :
S.A.S. ITM ALIMENTAIRE OUEST
prise en la personne de ses représentants légaux
[Adresse 3]
[Localité 5]
N° SIRET : 432 534 415
représentée par Me Marie-Laure BONALDI, avocat postulant du barreau de PARIS, toque: B0936
assistée de Me Bruno CRESSARD, avocat plaidant du barreau de RENNES
INTERVENANTE VOLONTAIRE :
SELARL FRANKLIN BACH ès-qualité de mandataire liquidateur de la Société VARFON S.A.S.
[Adresse 4]
[Adresse 5]
[Localité 6]
représentée par Me Xavier DAUSSE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1792
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 13 mars 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Dominique GUIHAL, présidente
Mme Dominique SALVARY, conseillère
M. Jean LECAROZ, conseiller
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Dominique GUIHAL, présidente de chambre et par Mélanie PATE, Greffière présent lors du prononcé.
La SAS Varfon, ayant pour président et associé majoritaire M. [Z] [J] et pour associée minoritaire, Mme [W] [E], exploitait un fonds de commerce sous enseigne Intermarché à [Localité 7] (Sarthe), en vertu d'un contrat d'enseigne conclu le 7 décembre 2001 avec la société ITM Entreprises. Son approvisionnement lui était fourni par la société ITM Alimentaire Ouest (ITMAO). Des retards de règlement des factures ont conduit à la conclusion le 30 octobre 2007 entre ITMAO, la société Varfon, ainsi que M. [J] et Mme [E] d'un protocole intitulé 'Accompagnement des points de vente en difficulté'.
L'application de ce protocole a suscité des différends entre les parties. Celles-ci se sont délivrées réciproquement des assignations devant les tribunaux de commerce d'[Localité 8] et de [Localité 9]. Ce dernier s'est déclaré incompétent en considération de la clause compromissoire stipulée par le protocole.
Le 25 juillet 2013, la procédure arbitrale a été engagée par ITMAO. Un acte de mission a été signé le 28 mars 2014.
Par une sentence rendue à Paris le 21 juin 2016, le tribunal arbitral ad hoc, composé de MM [A] et [S], arbitres, et de M. [X], président, statuant en amiable composition a :
- donné acte à ITMAO de ce qu'elle renonçait à la levée de l'option d'achat dont elle bénéficiait, aux termes du protocole, sur les actions détenues par M. [J] et par Mme [E] dans la SAS Varfon,
- condamné solidairement la SAS Varfon, ainsi que M. [J] et Mme [E] en leur qualité de cautions, à payer à ITMAO la somme de 6.868.502, 36 euros au titre des factures de fournitures impayées,
- ordonné à ITMAO, en raison de son comportement abusif :
- de payer la somme de 2.118.790 euros répartie à proportion de leurs parts respectives dans le capital de la société Varfon à hauteur de 36.603,68 euros pour Mme [E] et 2.082.186,32 euros pour M. [J],
- de payer la somme de 100.000 euros au titre du préjudice moral à répartir par moitié entre Mme [E] et M. [J],
- de faire abandon au profit de la SAS Varfon de sa créance en compte courant d'un montant de 877.546 euros,
- partagé par moitié les frais d'arbitrage.
Le 28 juillet 2016, M. [J], Mme [E] et la SAS Varfon ont formé un recours en annulation de la sentence.
Par des conclusions notifiées le 9 janvier 2018, M. [J] et Mme [E], sur le fondement de la violation du contradictoire et du défaut de motivation, demandent à la cour d'annuler la sentence en ce qu'elle les a condamnés à payer la somme de 6.868.512,87 euros, de dire n'y avoir lieu à condamnation de ce chef, subsidiairement, d'ordonner une expertise comptable, en toute hypothèse, de condamner ITMAO à leur payer la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Par des conclusions notifiées le 22 janvier 2018, ITMAO demande à la cour de déclarer les demandes irrecevables et en tout cas mal fondées, subsidiairement, en cas d'annulation, de renvoyer l'affaire devant un tribunal arbitral, en toute hypothèse, de condamner solidairement M. [J] et Mme [E], ainsi que la société Varfon à lui payer la somme de 15.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 11 janvier 2018, la SELARL Franklin Bach, ès qualités de mandataire liquidateur de la SAS Varfon, désignée à cette fonction par jugement du tribunal de commerce d'Angers du 15 mars 2017, s'est constituée en tant qu'intervenante volontaire. Par des conclusions notifiées le 16 février 2018, elle s'en est rapportée à justice sur le mérite des demandes et indiqué qu'en cas d'annulation partielle de la sentence, la cour ne pourrait statuer sur le fond que dans les limites de la mission confiée aux arbitres. Elle a sollicité la condamnation de toute partie succombante à lui payer la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR QUOI :
Sur les moyens tirés de la violation du principe de la contradiction et du défaut de motivation de la sentence (article 1492, 4° et 6° du code de procédure civile) :
Les recourants font grief aux arbitres d'avoir retenu que la créance d'ITMAO n'était pas contestée, alors qu'elle l'était tant dans son principe que dans son montant, et, par conséquent, de n'avoir pas motivé leur décision, et d'avoir violé le principe de la contradiction.
Considérant que, pour prononcer la condamnation de la société Varfon, de M. [J] et de Mme [E] à payer la somme de 6.868.502,36 euros, le tribunal arbitral retient que :
'La SAS ITM ALIMENTAIRE OUEST a fourni au tribunal arbitral le détail de l'évolution de la créance commerciale qu'elle détient sur la SAS VARFON qui est passée de 5.833.986,30 euros dans le mémoire originel à 6.868.502,36 euros in fine. Le tribunal arbitral constate que ce montant en tant que tel n'est pas contesté par les défendeurs, que ces derniers n'indiquent pas que les marchandises qui font l'objet de cette créance étaient impropres à la vente, et qu'il convient donc de présumer qu'elles ont été normalement revendues aux clients du point de vente. Le rejet du paiement de cette somme par les défendeurs se fonde sur le comportement abusif d'ITMAO, argument que le tribunal arbitral examinera ci-après et qui, en tout état de cause, ne peut donner lieu qu'à des dommages-intérêts.';
Considérant, en premier lieu, que le principe de la contradiction exige seulement que les parties aient pu faire connaître leurs prétentions de fait et de droit et discuter celles de leur adversaire de telle sorte que rien de ce qui a servi à fonder la décision des arbitres n'ait échappé à leur débat contradictoire;
Considérant que les recourants ne font état d'aucun moyen, d'aucun fait, ni d'aucune pièce qui auraient fondé la décision du tribunal arbitral sans être soumis à la discussion des parties;
Considérant, en second lieu que le contrôle des motifs de la sentence par le juge de l'annulation porte sur leur existence et non sur leur pertinence;
Considérant qu'en l'espèce, il résulte des énonciations précitées de la sentence que la condamnation au paiement du solde de factures n'est pas dénuée de motivation; que la critique des recourants, qui porte sur l'adéquation de ces motifs aux moyens qu'ils avaient développés, invite la cour à une révision au fond de la sentence qui ne lui est pas permise;
Considérant que les moyens ne sont pas fondés; que le recours en annulation doit donc être rejeté;
Sur l'article 700 du code de procédure civile :
Considérant que l'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à l'une quelconque des parties;
PAR CES MOTIFS :
Rejette le recours en annulation de la sentence rendue à Paris entre les parties le 21 juin 2016.
Condamne solidairement M. [J] et Mme [E] aux dépens qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Rejette toute autre demande.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE