Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 8
ARRET DU 5 JUIN 2018
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 17/12676
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 14 Juin 2017 -Juge commissaire de MELUN - RG n° 2017M00553
APPELANTE
SCI PADAMA
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié [...]
N° SIRET : [...]
Représentée par Me Sylvain X... de la SELARL CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173
INTIMEES
SCP ANGEL HAZANE
Siret numéro [...]
es qualité de liquidatrice de la liquidation judiciaire de la société Etablissement L.Marchetto
Avenue du President Salvador Y...
[...]
Représentée par Me Pascal Z... de la SCP Société Civile Professionnelle d'Avocats Z... ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : D1205
SA ETABLISSEMENTS L MARCHETTO
Immatriculée au RCS de MELUN sous le numéro 304 275 282
ayant son siège social
[...]
Représentée par Me Luc A..., avocat au barreau de PARIS, toque : A0353
SAS SERVICES TRAVAUX LOCATIONS GERANCES (STLG) Prise en la personne de son représentant légal domicilié [...]
N° SIRET : [...]
Représentée par Me David B... de la C... - BONLIEU, avocat au barreau de FONTAINEBLEAU
SAS MAB FINANCE SAS représentée par ses représentant légaux domiciliés [...] / FRANCE
N° SIRET : [...]
N'ayant pas constitué avocat
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 27 Mars 2018, en audience publique, devant la Cour composée de:
Mme Marie-Christine D..., Présidente de chambre
Mme Isabelle E..., Conseillère
M. Laurent BEDOUET, Conseiller
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme Isabelle E... dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.
Greffier lors des débats : Mme Christine LECERF
MINISTERE PUBLIC : l'affaire a été communiquée au ministère public le 4/7/2017
ARRET :
- défaut
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Mme Marie-Christine D..., président et par Mme Christine LECERF, greffier présent lors du prononcé.
*
Par acte du 1er avril 1994, la SCI Padama a donné à bail commercial à la société anonyme Marchetto des locaux sis à Varennes sur Seine, pour une durée de neuf ans, à compter du 1er avril 1994, pour se terminer le 31 mars 2003. Le bail s'est poursuivi par tacite prolongation.
Par jugement du 5 décembre 2016, le tribunal de commerce de Melun a prononcé la résolution du plan de redressement de la société Marchetto, ouvert à son égard une procédure de liquidation judiciaire et désigné la SCP Angel Hazane en qualité de liquidateur judiciaire.
Par jugement du 18 janvier 2017, confirmé par arrêt de la présente cour du 18 mai 2017, le tribunal de commerce de Melun a arrêté le plan de cession de la société Marchetto au profit de la société STLG, étant précisé que les baux commerciaux relatifs à tous les sites d'exploitation ne faisaient pas partie du périmètre du plan de cession.
Les actes de cession ont été signés le 28 février 2017.
Le 8 février 2017, le liquidateur judiciaire a déposé une requête aux fins de cession de gré à gré du bail commercial sur le fondement de l'article L.642-19 du code de commerce et à cette audience du 22 mai 2017, la SCI Padama a sollicité la résiliation du bail.
Par ordonnance du 14 juin 2017, le juge-commissaire du tribunal de commerce de Melun a rejeté la demande de résiliation du bail et a autorisé la cession au profit de la société STLG du bail, ayant pour objet un ensemble immobilier sis [...] [...]
La SCI Padama a interjeté appel le 23 juin 2017.
Par arrêt du 21 novembre 2017, la présente cour a procédé à la désignation d'un médiateur. Celui-ci a, le 2 février 2018, informé la cour de l'échec de la médiation.
Vu les dernières conclusions du 31 octobre 2017, ainsi que les conclusions de rectification d'erreur matérielle, de la SCI Padama, par lesquelles elle demande à la cour d'infirmer l'ordonnance, de constater la résiliation du bail commercial pour défaut de paiement des loyers, en conséquence de fixer le montant de l'indemnité d'occupation journalière à l'équivalent de deux jours du dernier loyer fixé dans le bail, augmenté de l'éventuelle indexation conventionnelle, taxes et charges en sus et de condamner la société Service Travaux Location Gérance, STLG, au paiement de cette indemnité d'occupation, de dire que celle-ci sera due à compter du prononcé la résiliation judiciaire du bail jusqu'à la libération effective des locaux qui s'effectuera par la remise des clés, à titre subsidiaire, au cas où le bail ne serait pas résilié, de constater que le juge-commissaire a excédé ses pouvoirs en autorisant la cession du droit au bail de gré à gré au profit de la société STLG, alors qu'elle avait manifesté son opposition à la cession, en conséquence de refuser la cession isolée du droit au bail, de déclarer que la cession du droit au bail intervenue par acte sous-seing privé du 26 juin 2017 lui est inopposable et de condamner solidairement la SCP Angel Hazane, ès qualités, la société STLG et la société Marchetto aux dépens, ainsi qu'au paiement d'une somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Vu les dernières conclusions du 24 octobre 2017 de la société anonyme Établissements Marchetto, par lesquelles elle demande à la cour de lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte à justice.
Vu les dernières conclusions du 9 novembre 2017 de la société Service Travaux Locations Gérances- STLG, par lesquelles elle demande à la cour de confirmer l'ordonnance et de condamner la SCI Padama au paiement d'une somme de 10000 euros pour procédure abusive, au paiement d'une somme de 10000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.
Vu les dernières conclusions du 18 septembre 2017 de la société Angel Hazane, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Marchetto, par lesquelles elle demande à la cour de confirmer l'ordonnance et de condamner in solidum la SCI Padama aux dépens.
La Sas Mab Finance n'a pas constitué avocat.
SUR CE,
Sur la résiliation du bail.
Consécutivement au jugement de liquidation judiciaire, le liquidateur a poursuivi le contrat de bail, mais n'a pas réglé les loyers dus en contrepartie.
C'est ainsi que la bailleresse a adressé deux mises en demeure au liquidateur judiciaire, les 8 février 2017 et 30 mars 2017, précisant qu'en l'absence de paiement rapide, elle serait contrainte de lui faire délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire contenue au bail.
Aucun commandement de payer ne fut délivré, mais lors de l'audience devant le juge-commissaire afin d'autoriser la cession du droit au bail, la SCI Padama a sollicité que le juge-commissaire constate la résiliation de plein droit du bail pour non paiement des loyers, malgré une mise en demeure adressée au liquidateur et demeurée infructueuse.
Le liquidateur judiciaire s'est opposé à la constatation de la résiliation du bail, au motif qu'aucun commandement de payer n'avait été délivré et le lendemain de l'audience, soit le 23 mai 2017, le liquidateur a adressé à l'avocat de la SCI Padama le montant des loyers dus.
La SCI appelante reproche au juge commissaire de l'avoir déboutée de sa demande de constatation de la résiliation de plein droit du contrat de bail, alors que plus de trois mois s'étant écoulés depuis l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire et les loyers étant demeurés impayés, elle considère que le juge-commissaire avait l'obligation de constater la résiliation de plein droit sollicitée.
Pour débouter la bailleresse de sa demande de résiliation, le juge-commissaire a relevé qu'aucun commandement de payer n'avait été préalablement délivré et qu'au surplus le mandataire liquidateur avait régularisé la situation en payant la totalité des loyers échus.
Selon l'article L. 641-12 du code de commerce, la résiliation du bail des immeubles utilisés pour l'activité de l'entreprise intervient lorsque le bailleur demande la résiliation judiciaire ou fait constater la résiliation de plein droit du bail pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement de liquidation judiciaire, dans les conditions prévues aux troisième et cinquième alinéas de l'article L.622-14 du même code.
Selon l'article L.622'14 du code de commerce, la résiliation du bail des immeubles donnés à bail au débiteur et utilisés pour l'activité de l'entreprise intervient lorsque le bailleur demande la résiliation ou fait constater la résiliation du bail pour défaut de paiement des loyers et charges afférents à une occupation postérieure au jugement d'ouverture, le bailleur ne pouvant agir qu'au terme d'un délai de trois mois à compter dudit jugement. Si le paiement des sommes dues intervient avant l'expiration de ce délai, il n'y a pas lieu à résiliation.
Par ailleurs, il résulte de l'article L.145-41 du code de commerce que toute clause insérée dans un bail commercial prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement de payer demeuré infructueux, le juge saisi d'une demande de délais de grâce, pouvant, en accordant des délais, suspendre la résiliation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée.
Les dispositions de l'article L.622-14 du code de commerce ne dérogent pas aux dispositions de l'article L.145-41 du même code prévoyant, en cas de clause résolutoire, la délivrance préalable d'un commandement, le liquidateur pouvant se prévaloir des dispositions de l'article L.145-41 susmentionnées et solliciter des délais de paiement, ainsi que la suspension des effets de la clause résolutoire, tant que la résiliation du bail n'est pas constatée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée.
Il s'ensuit que la résolution de plein droit du bail commercial pour défaut de paiement des loyers et charges pendant plus de trois mois après le jugement d'ouverture n'est pas acquise tant qu'il n'y a pas eu, en application de l'article L.145-41 du code de commerce, délivrance par acte d'huissier d'un commandement de payer au preneur, l'écoulement d'un délai d'un mois pendant lequel ce commandement est demeuré infructueux, et, enfin, l'écoulement des délais de grâce éventuellement octroyés au preneur.
Contrairement à ce que soutient la SCI bailleresse, le fait d'opter pour la saisine du juge-commissaire plutôt que pour le juge des référés, d'une demande en constat de la résiliation du bail ne dispense pas de la délivrance préalable d'un commandement de payer visant la clause résolutoire, et le statut des baux commerciaux s'applique quel que soit le juge saisi, en raison de son caractère d'ordre public, la résiliation de plein droit d'un contrat de bail en cours par le juge-commissaire, en application des articles L.622-14 et R.622-13 alinéa 2 du code de commerce devant intervenir sans préjudice de l'article L. 145-41 du même code.
En conséquence, c'est à juste titre qu'il n'a pas été fait droit à la demande de constatation de la résiliation du bail et l'ordonnance sera donc confirmée de ce chef.
Sur la cession.
Devant la présente cour, la SCI bailleresse reproche au juge commissaire d'avoir autorisé la cession du bail commercial en violation de l'article 8 du contrat de bail qui prévoit que le preneur ne pourra céder son droit au bail, sans l'autorisation du bailleur, si ce n'est à l'acquéreur de son fonds de commerce.
Elle fait valoir que la cession des baux n'est pas concomitante à la cession du fonds de commerce intervenue consécutivement au jugement arrêtant le plan et que dès lors elle est en droit de s'opposer à cette cession.
Toutefois, la société STLG, à laquelle la société Marchetto a été cédée par le jugement du tribunal de commerce du 18 janvier 2017, puis par les actes de cession du 28 février 2017, est bien l'acquéreur du fonds de commerce de cette société et aucun texte, ni aucune clause contractuelle n'exigent que la cession de droit au bail soit concomitante à la cession du fonds de commerce pour qu'il puisse y être procédé sans qu'il soit nécessaire d'obtenir l'accord du bailleur.
Il convient donc de confirmer l'ordonnance qui a autorisé la cession du droit au bail.
Sur la demande de dommages-intérêts.
La société STLG, qui ne caractérise pas une volonté de nuire ou une légèreté blâmable de la part de la SCI bailleresse, sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.
Sur les dépens et les frais hors dépens.
La SCI Padama qui succombe dans ses prétentions, sera condamnée aux dépens.
Aucune considération d'équité ne commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de quiconque.
PAR CES MOTIFS
Confirme l'ordonnance,
Rejette la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive
,
Condamne la SCI Padama aux dépens d'appel avec recouvrement dans les conditions de l'article 699 du code de procédure civile,
Rejette les demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT