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07/06/2018 | FRANCE | N°16/03050

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 07 juin 2018, 16/03050


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5



ARRÊT DU 07 Juin 2018

(n° , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/03050



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Janvier 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 13/16702





APPELANT :



Monsieur Daniel X...

né le [...]

demeurant au [...]

comparant en personne, assisté de Me Françoise Y.

.., avocat au barreau de PARIS, toque : A0866 substitué par Me Z... A..., avocat au barreau de PARIS





INTIMÉE :



Société CM CIC INVESTISSEMENT

sise [...] / France

représentée par...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRÊT DU 07 Juin 2018

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S 16/03050

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Janvier 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 13/16702

APPELANT :

Monsieur Daniel X...

né le [...]

demeurant au [...]

comparant en personne, assisté de Me Françoise Y..., avocat au barreau de PARIS, toque : A0866 substitué par Me Z... A..., avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

Société CM CIC INVESTISSEMENT

sise [...] / France

représentée par Me Jennifer B..., avocat au barreau de PARIS, toque : P0261

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Mai 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Stéphane MEYER, conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Marie-Bernard BRETON, présidente

M. Stéphane MEYER, conseiller

Mme Isabelle MONTAGNE, conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Monsieur Philippe ANDRIANASOLO, lors des débats

ARRET :

- contradictoire

-prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile,

- signé par Marie-Bernard BRETON, Présidente de chambre et par Philippe ANDRIANASOLO, Greffier présent lors de la mise à disposition

EXPOSÉ DU LITIGE :

Monsieur Daniel X... a été désigné à compter du 17 juin 2008, en qualité de président de la société TNT EUROPE, dont le principal actionnaire était la société CM-CIC Capital Finance, par la suite devenue la société CM-CIC Investissement.

Par jugement du 6 octobre 2010, le tribunal de commerce d'Agen a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société TNT EUROPE et par jugement du 21 septembre 2011, a prononcé sa liquidation judiciaire.

Le 21 septembre 2011, le liquidateur judiciaire de la société TNT EUROPE a mis fin au mandat social de Monsieur X....

Prétendant avoir été lié à la société CM-CIC Capital Finance par un contrat de travail, Monsieur X... a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 19 novembre 2013 pour en demander la résiliation judiciaire et a formé des demandes afférentes à un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que de rappel de salaires.

Par jugement du 12 janvier 2016, le conseil de prud'hommes de Paris a débouté Monsieur X... de ses demandes et l'a condamné aux dépens.

A l'encontre de ce jugement notifié le 15 février 2016, Monsieur X... a interjeté appel le 29 février 2016.

Lors de l'audience du 4 mai 2018, Monsieur X... demande à la cour d'infirmer le jugement, de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail allégué et de condamner la société CM-CIC Investissement (anciennement CM-CIC Capital Finance) à lui payer les sommes suivantes:

- 34999 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis

- 15165,70 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement

- 280000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse

- 70000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat

- 699960 € à titre de rappel de salaires

- 69996 € de congés payés afférents

- 223125,70 € à titre de rappel d'heures supplémentaires

- 22312,57 € au titre des congés payés afférents

- 27246 € au titre du remboursement des frais professionnels

- 4000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

- les intérêts au taux légal avec capitalisation

- Monsieur X... demande également que soit ordonnée la remise de l'ensemble des documents de fin de contrat, sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter du prononcé de la décision.

Au soutien de ses demandes, Monsieur X... expose:

- que son mandat social virtuel, qu'il n'a en réalité jamais exercé, doit être requalifié en contrat de travail, ses fonctions réelles étant en réalité exclusivement techniques, exercées sous la subordination de la société CM-CIC Capital Finance, laquelle était le dirigeant de fait de la société TNT EUROPE

- que la société CM-CIC Capital Finance a violé ses engagements contractuels à son égard, attitude justifiant la résiliation du contrat de travail à ses torts

- qu'il rapporte la preuve de ses préjudices

- qu'il a effectué de nombreuses heures supplémentaires qui n'ont pas été rémunérées.

- qu'il a été privé de sa rémunération à partir de septembre 2011.

En défense, la société CM-CIC Investissement (anciennement CM-CIC Capital Finance) demande la confirmation du jugement et la condamnation de Monsieur X... à lui verser une indemnité de 4000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que les demandes de Monsieur X... ne relèvent pas de la compétence du conseil de prud'hommes, puisqu'il ne rapporte pas la preuve de l'existence d'un contrat de travail, les directives que peut recevoir le mandataire de la part des associés ou du conseil d'administration et qui sont la conséquence logique de son mandat ne devant pas se confondre avec l'existence d'un lien de subordination

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions visées par le greffier et développées lors de l'audience des débats.

***

MOTIFS DE LA DECISION :

Aux termes de l'article 12 du code de procédure civile, le juge doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties auraient proposée.

Il en résulte que l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu'elles auraient donné à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité de celui qui se prétend salarié.

Le contrat de travail suppose l'existence d'un lien de subordination, caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité de l'employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

En l'espèce, le 17 juin 2006, le comité de surveillance de la société TNT EUROPE,a désigné Monsieur X... en qualité de président.

Le même jour, le représentant de la société CM-CIC Capital Finance, par la suite devenue la société CM-CIC Investissement, écrivait, en sa qualité de président du comité de surveillance de la société TNT EUROPE, à Monsieur X..., pour lui confirmer cette nomination.

Monsieur X... fait valoir qu'il n'a en réalité jamais exercé ce mandat social mais qu'il a exercé des fonctions exclusivement techniques, sous la subordination de la société CM-CIC Capital Finance.

Au soutien de cette allégation, il fait tout d'abord valoir que l'emprise de la Société CM-CIC Capital Finance, actionnaire principal de la Société TNT Europe, ressortait des statuts de cette dernière, lesquels octroyaient aux associés/actionnaires le droit discrétionnaire de limiter les pouvoirs du président, et attribuaient au comité de surveillance d'importants pouvoirs de contrôle de l'activité de son président. Il ajoute qu'aux termes de ces statuts, ce président était privé de son autonomie puisqu'il était tenu de recueillir l'accord préalable du comité de surveillance pour prendre une décision dans 19 domaines différents, alors que la société CM-CIC détenait en toutes circonstances la majorité requise au sein de ce comité de surveillance pour toute décision et qu'elle était ainsi le dirigeant de fait de la Société TNT Europe, faisait prévaloir ses intérêts sur ceux de la société TNT Europe.

Monsieur X... fait également valoir que les cadres dirigeants du CM-CIC Capital Finance lui adressaient des injonctions et produit, à cet égard, divers courriels émanant de ces derniers ; il en conclut que cette société s'est ainsi immiscée directement dans les relations qu'il aurait normalement dû entretenir, en sa qualité de président, avec les tiers intervenant pour le compte de la Société TNT Europe et plus largement du Groupe Acsud qu'il était censé diriger.

Monsieur X... fait également valoir qu'il était totalement dépourvu de pouvoir dans tous les domaines de gestion financière et commerciale, qu'il devait suivre les instructions de la société CM-CIC Capital Finance concernant les comptes de la société TNT Europe et était tenu de se comporter comme un simple exécutant.

A cet égard, il produit des courriels contenant des instructions précises en vue de la préparation de réunions avec les banques.

Cependant, les pouvoirs des mandataires sociaux peuvent être limités dans leur étendue comme dans leur durée sans qu'ils perdent cette qualité, même dans l'hypothèse d'une domination économique par la société-mère, dès lors que les fonctions qu'ils exercent ne présentent pas un caractère technique ne pouvant relever d'un mandat social.

Or, Monsieur X... n'explique pas en quoi ses fonctions présentaient un caractère technique distinct de celui relevant de l'exercice d'un mandat social, de telle sorte qu'il n'établit pas que les directives qu'il recevait, émanant du principal actionnaire, étaient caractéristiques d'un lien de subordination.

Monsieur X... fait valoir que les dirigeants de la société CM-CIC Capital Finance lui demandaient de rendre compte de ses activités. Cependant, l'obligation de rendre compte qui découle de son mandat social et en l'espèce, les échanges critiqués, étaient conformes aux échanges habituels entre un mandataire social et le principal actionnaire dans un contexte de difficultés de trésorerie.

Monsieur X... expose que le directeur de participation de CM-CIC Capital Finance a tenté de lui imposer de provoquer le redressement judiciaire de la société TNT Europe et de deux autres sociétés du groupe. Cependant, il résulte des pièces produites par les parties que Monsieur X... s'est opposé au comité de surveillance et dans le cadre du redressement judiciaire de la société TNT Europe, l'administrateur judiciaire désigné décrivait les actions qu'il avait menées pour tenter de redresser l'entreprise.

Monsieur X... fait enfin valoir qu'il était dépossédé, au profit du CM-CIC Capital Finance, du pouvoir de recruter et de licencier. Cette affirmation est cependant démentie par le fait qu'il a lui-même mis en 'uvre les licenciements pour motif économique des cadres dirigeants et employés, à une exception près.

Il résulte de ces considérations que, quelque soit l'étendue et le mérite du contrôle exercé par la société CM-CIC Capital Finance sur l'activité de sa filiale, la société TNT Europe, ainsi que sur l'exercice du mandat social de Monsieur X..., ce dernier ne rapporte pas la preuve d'un lien de subordination dans le cadre de fonctions techniques, qui serait caractéristique d'un contrat de travail.

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il l'a débouté de l'ensemble de ses demandes, la société CM-CIC Investissement ne soulevant pas et n'ayant pas soulevé en première instance, l'exception d'incompétence du conseil de prud'hommes.

L'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, par arrêt mis à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré

Déboute Monsieur Daniel X... de ses demandes

Y ajoutant,

Déboute la société CM-CIC Investissement de sa demande d'indemnité

Condamne Monsieur Daniel X... aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 16/03050
Date de la décision : 07/06/2018

Références :

Cour d'appel de Paris K5, arrêt n°16/03050 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-07;16.03050 ?
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