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15/06/2018 | FRANCE | N°16/18469

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 6, 15 juin 2018, 16/18469


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE


aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS











COUR D'APPEL DE PARIS





Pôle 5 - Chambre 6





ARRET DU 15 JUIN 2018





(n° , 11 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : 16/18469





Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Août 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 13/02979











APPELANTS





Madame C

écile X... épouse Y...


Née le [...] à Les Abymes


[...]





Monsieur E... X...


Né le [...] à Les Abymes


[...]





Monsieur Julien X...


Né le [...] à Saint-Claude


[...]


[...]





Représentés par Me Chloé Z..., avocat au barreau de PA...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 6

ARRET DU 15 JUIN 2018

(n° , 11 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 16/18469

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Août 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 13/02979

APPELANTS

Madame Cécile X... épouse Y...

Née le [...] à Les Abymes

[...]

Monsieur E... X...

Né le [...] à Les Abymes

[...]

Monsieur Julien X...

Né le [...] à Saint-Claude

[...]

[...]

Représentés par Me Chloé Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : A0141

Ayant pour avocat plaidant Maître Christiane G..., avocat au barreau de LYON

INTIMEES

LA COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS (CEGC)

RCS Nanterre 382 506 079

Prise en la personne de son représentant légal domicilié [...]

Représentée par Me Christofer H... & SARKOZY, avocat au barreau de PARIS, toque : R175

Ayant pour avocat plaidant Me A... B..., avocat au barreau de PARIS, toque: R175

LA CAISSE D'EPARGNE ET DE PRÉVOYANCE PROVENCE ALPES CORSE (CEPAC) venant aux droits de LA BANQUE DES ANTILLES FRANÇAISE (BDAF)

RCS MARSEILLE 777 559 404

Prise en la personne de son représentant légal domicilié [...]

Représentée par Me Bertrand C..., avocat au barreau de PARIS, toque : B0230

Ayant pour avocat plaidant Me Emmanuelle D..., avocat au barreau de PARIS, toque : G1186

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 09 Avril 2018, en audience publique, devant la Cour composée de:

Madame Françoise CHANDELON, Présidente de chambre

M. Marc BAILLY, Conseiller

Mme Pascale LIEGEOIS, Conseillère

qui en ont délibéré,

Un rapport a été présenté à l'audience dans les conditions de l'article 785 du Code de Procédure Civile.

Greffier, lors des débats : Mme Josélita COQUIN

ARRET :

- Contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Françoise CHANDELON, présidente et par Madame Josélita COQUIN, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Par offre du 25 février 2008 acceptée le 8 mars suivant, la société Banque des Antilles Françaises - BDAF- a consenti un prêt de 150000 euros remboursable en 240 mois au taux nominal de 5,98 % à Dominique X... pour l'acquisition d'un appartement à Correncon-en-Vercors, avec souscription d'une assurance groupe incapacité de travail - invalidité décès auprès de la compagnie AGF.

La SACCEF aux droits de laquelle vient la Compagnie Européenne des Garanties de Caution s'est portée caution du prêt au bénéfice de la BDAF, ultérieurement absorbée par la Caisse d'Epargne Provence-Alpes-Côtes d'Azur -CEPAC-.

Après le déblocage des fonds du 18 mars 2008, la banque prêteuse a été informée du placement de Dominique X... en détention provisoire et du défaut d'assurance à raison de sa non présentation à un examen médical.

Dominique X... a cessé d'honorer le paiement des échéances à compter du 18 juillet 2009 et a été mis en demeure à compter du 29 octobre 2009, la déchéance du terme à défaut de régularisation étant intervenue le 14 décembre 2009.

La CEGC a payé à la banque la somme de 147607,97 euros en sa qualité de caution le 2 février 2010.

Elle a assigné Dominique X... devant le tribunal de grande instance de Pointe-à-Pitre par acte du 16 mars 2010, un jugement réputé contradictoire du 26 août 2010 ayant condamné le défendeur à payer à la CEGC, subrogée dans les droits de la banque, la somme de 147 848,19 euros avec intérêts échus à compter du 9 février 2010, outre celle de 600 euros au titre des frais irrépétibles et débouté la CEGC de sa demande de dommages-intérêt.

Dominique X... est décédé le [...] en détention et il a laissé, pour lui succéder, ses trois enfants, Mme Cécile X... et MM. E... et Julien X..., qui ont accepté purement et simplement la succession.

Par assignations du 24 janvier 2013, les consorts X... ont assigné devant le tribunal de grande instance de Paris la BDAF et la CEGC.

Comme prévu au cours de l'audience, il a été justifié en cours de délibéré de ce que la Caisse d'Epargne Provence-Alpes-Côtes d'Azur a absorbé la BADF, par une fusion du 23 février 2016 et, par ailleurs, les consorts se sont désistés de leur demande à l'encontre de la Caisse régionale de Crédit Mutuel de Guadeloupe qui avait été attraite en la cause.

Par jugement en date du 30 août 2016, le tribunal de grande instance de Paris a :

- rejeté la demande tendant au prononcé de la caducité du jugement sur le fondement de l'article 478 du code de procédure civile à raison de ce qu'il n'avait pas été signifié dans les six mois de son prononcé au motif que cette disposition n'est pas applicable au cas d'un jugement réputé contradictoire en raison de la non comparution du défendeur cité à personne,

- refusé de mettre hors de cause la CEGC mais débouté les demandeurs de leurs prétentions à son encontre au motif qu'elle n'avait commis aucune faute en réglant la banque au vu de la résiliation du contrat après le prononcé de la déchéance du terme et qu'elle a obtenu un titre exécutoire régulier en vertu de l'article 2305 du code civil, les demandeurs n'étant plus fondés à la poursuivre,

- accueilli la fin de non recevoir tirée de la chose jugée par le jugement du 26 août 2010 opposée par la banque sur la régularité de la déchéance du terme qui l'a fondée,

- reconnu le manquement de la banque ayant consisté à prélever les cotisations d'assurance mais a débouté les consorts X... de leur demande de dommages-intérêts et en mainlevée de l'hypothèque au motif que l'assurance eût-elle été souscrite, elle n'aurait pas couvert le sinistre du décès dès lors que le prêt était résilié au moment de celui-ci, et limité la condamnation de la banque à la restitution des cotisations indûment versées, de sorte qu'il a notamment :

- déclaré parfait le désistement des consorts X... à l'encontre du Crédit Mutuel de Guadeloupe,

- dit que la caducité du jugement du 26 août 2010 n'est pas encourue,

- débouté les consorts X... de leurs demandes à l'encontre de la CEGC,

- débouté les consorts X... de leurs demandes à l'encontre de la CEPAC venant aux droits de la BDAF,

- condamné la CEPAC à leur rembourser la somme de 1 000 euros,

- débouté les consorts X... du surplus de leurs demandes et les a condamnés aux dépens.

Mme Cécile X... et MM. E... et Julien X... ont relevé appel par déclaration en date du 9 septembre 2016 contre la CEGC et la CEPAC.

Par leurs dernières conclusions en date du 13 février 2018, Mme Cécile X... et MM. E... et Julien X... font valoir :

- qu'après l'incarcération de leur père, Mme Cécile X... a pris contact avec la banque pour reprendre le crédit à son nom, un avocat intervenant également en son nom et une mandataire étant désignée, Mme F..., qu'en dépit de cela, une résiliation serait intervenue par le courrier non pas de la banque mais d'une société de recouvrement Oceor,

- que le jugement du 26 août 2010 n'a été signifié qu'à Mme Cécile X..., que c'est à l'occasion de l'ouverture des opérations de succession que les héritiers ont appris que le prêt litigieux et d'autres n'avaient pas été pris en charge par l'assurance alors que les cotisations étaient payées, que le notaire chargé de la vente de l'appartement acquis au moyen du prêt litigieux leur a exposé que la banque l'avait averti - mais après le déblocage des fonds - de l'absence de réponse de l'assurance à raison du défaut d'examen médical qui aurait pu être suppléé par une visite en détention, que la banque s'est empressée de faire prononcer la déchéance du terme sans garantie d'assurance et a porté un lourd préjudice aux héritiers,

- que le jugement du 26 août 2010 n'a été signifié qu'à la seule Mme Cécile X... et ne bénéficie donc pas de l'autorité de la chose jugée, qu'en tout état de cause n'ayant pas été signifié dans les six mois de sa date, il est non avenu en vertu de l'article 478 du code de procédure civile, et ce, alors que la signification de l'assignation à la personne de M. X... n'est pas démontrée et que l'acte est entaché d'une nullité de fond en ce qu'il indique la nécessité d'une constitution d'avocat au barreau de Fort-de-France, qui est en Martinique, alors que le procès se déroulait en Guadeloupe, cette demande n'étant pas nouvelle en ce qu'elle répond à l'argument soulevé par la partie adverse sur la signification à personne et est connexe à la demande de caducité, que la signification du jugement du 26 août 2010 est également nulle et que sa caducité doit être prononcée,

- que la banque a commis de nombreuses fautes en dissimulant ses erreurs à son client, en supprimant le découvert du compte sans raison et malgré les protestations de l'avocat de Dominique X..., en précipitant les impayés et en recherchant le prononcé de la déchéance du terme en récupérant les fonds prêtés,

- qu'en effet, tout en connaissant la situation de Dominique X... entre l'acceptation de l'offre et le déblocage des fonds, elle n'a pas refusé ce déblocage des fonds jusqu'à la justification de la souscription de l'assurance décès et sans le consulter,

- que le prêt comporte des mentions erronées en ce que la cotisation d'assurance est intégrée y compris une surprime sur laquelle Dominique X... n'a pu se prononcer, que son comportement fautif est à l'origine de la déchéance du terme, qu'elle ne l'a pas informé et a annulé le découvert autorisé, tout en sollicitant la garantie de la CEGC, et ne laissant les cotisations d'assurance être prélevées sans qu'elle ne cherche jamais à contacter son client, l'avocat de ce dernier, sa fille ou la mandataire qu'il avait désignée, sa fille ayant été désireuse de vendre le bien pour désintéresser la banque,

- que la régularité de la procédure de déchéance n'est pas établie puisqu'elle a été réceptionnée par le vaguemestre de la prison après qu'un seul mois pour la régularisation lui a été octroyé, qu'elle est donc nulle ainsi que ses conséquences,

- que si la déchéance du terme est nulle, l'assurance souscrite trouvera application puisque la fin des garanties n'existe qu'en cas de déchéance régulière alors que la banque n'a pas fait procéder aux examens complémentaires demandés qui pouvaient être faits en détention, que les fonds ont été débloqués sans assurance et sans accord du client sur ce point, que la banque a manqué à son obligation d'information et de conseil,

- que sans déchéance, la caution ne serait pas intervenue, avec légèreté et sans solliciter aucun document, et que l'assurance aurait couvert le risque, le préjudice de 300 000 euros étant constitué par le jugement du 26 août 2010 'en cas d'exécution intérêts compris', outre 60000 euros pour procédure abusive et extorsion de fonds, de sorte qu'ils demandent à la cour :

d' 'INFIRMER le jugement rendu le 30 août 2016 en ce qu'il a :

dit que la caducité du jugement du 26 août 2010 n'est pas encourue,

débouté les consorts X... de leurs demandes dirigées contre la CEGC,

dit que vu l'autorité de la chose jugée attachée au jugement rendu le 26 août 2010, déboute les consorts X... à l'encontre de la Caisse d'épargne CPAC,

Condamné la BDAF au remboursement des échéances de l'assurance prélevées sur le compte de Monsieur Dominique X... soit 1 000 € jusqu'au 30 octobre 2009,

Débouté les consorts X... du surplus de leurs demandes et condamné ces derniers au partage des dépens.

EN CONSEQUENCE,

. PRONONCER la caducité du jugement rendu le 26 août 2010 ;

. DIRE ET JUGER que la BANQUE DES ANTILLES FRANÇAISE a commis des fautes

engageant sa responsabilité,

. DIRE ET JUGER que le lien de causalité est constaté,

. DIRE ET JUGER que le préjudice de des consorts X... est caractérisé ;

EN CONSEQUENCE,

. PRONONCER la nullité de la déchéance du terme du contrat de prêt souscrit le 14 février 2008 entre Monsieur Dominique X... et la BANQUE DES ANTILLES FRANÇAISES portant le n° 003324201, en date du 14 décembre 2009,

EN CONSÉQUENCE, ORDONNER la prise en charge par la garantie décès souscrite par

Monsieur Dominique X... du prêt restant du au jour de son décès ;

SI PAR EXTRAORDINAIRE, la nullité de la déchéance du terme du contrat de prêt souscrit le 14 février 2008 entre Monsieur Dominique X... et la BANQUE DES ANTILLES FRANÇAISES portant le n° 003324201, en date du 14 décembre 2009, n'était pas prononcée,

CONDAMNER solidairement la CAISSE D'EPARGNE PROVENCE ALPES CORSE VENANT AUX DROITS DE LA BANQUE DES ANTILLES FRANÇAISES et la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS à verser aux consorts X... la somme de 360 000 euros TROIS CENT SOIXANTE MILLE EUROS à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi par la faute de la banque ;

Si la caducité du jugement du 26 août 2010 est prononcée,

CONDAMNER solidairement la CAISSE D'EPARGNE PROVENCE ALPES CORSE VENANT AUX DROITS DE LA BANQUE DES ANTILLES FRANÇAISES et la COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS à verser aux consorts X... la somme de 60 000 euros SOIXANTE MILLE EUROS à titre de dommages et intérêts subi par la faute de la banque ;

CONDAMNER les intimés au remboursement de la totalité des intérêts prélevés sur le compte de Monsieur Dominique X... ;

DÉBOUTER les intimés de l'intégralité de leurs demandes,

CONDAMNER solidairement LA CAISSE D'EPARGNE PROVENCE ALPES CORSE

VENANT AUX DROITS DE LA BANQUE DES ANTILLES FRANÇAISES ET LA

COMPAGNIE EUROPÉENNE DE GARANTIES ET CAUTIONS subrogée dans les droits

de LA BANQUE DES ANTILLES FRANÇAISES à verser aux consorts X... la somme de 5.000 € chacun au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.'

Par ses dernières conclusions en date du 16 février 2018, la Compagnie Européenne des Garanties de Caution qui fait valoir :

- que le moyen tiré de la caducité du jugement sur le fondement de l'article 478 du code de procédure civile, seulement soulevé par les conclusions du 3 mars 2016, est irrecevable en tant qu'il constitue une exception de procédure devant être invoquée in limine litis en vertu des articles 73 et 74 du code de procédure civile, qu'il en est de même de l'exception de nullité de l'assignation ayant conduit à ce jugement, qui est au demeurant de pure forme sur l'appartenance du conseil à constituer au barreau de Pointe-à-Pitre et non Fort-de-France,

- subsidiairement, que l'article 478 est inapplicable en ce que ce jugement n'est pas réputé contradictoire au seul motif qu'il est susceptible d'appel puisque Dominique X... avait été cité à personne comme cela résulte de sa lecture et de celle de la copie de l'acte,

- plus subsidiairement, que l'exception tirée du caractère non avenu d'un jugement relève du juge de l'exécution et non d'une juridiction statuant au fond,

- que le jugement du 26 août 2010 est désormais définitif et donc revêtu de l'autorité de la chose jugée sans pouvoir être remis en cause par le biais d'une action en responsabilité dès lors qu'il a été signifié à l'un des cohéritiers solidaires par exploit du 30 mai 2011 et est ainsi opposable aux autres,

- qu'en sa qualité de caution, elle ne vient pas aux droits et obligations de la banque dont elle se distingue mais qu'elle est seulement subrogée dans ses droits et actions selon l'article 2305 du code civil en vertu d'un droit propre et sans qu'elle ait à répondre des éventuelles fautes de le banque puisqu'elle ne peut se voir opposer un défaut tiré du rapport originel entre le créancier et le débiteur,

- que les fautes reprochées à la banque par les consorts X... sont infondées en fait, de sorte qu'elle sollicite de la cour :

- qu'elle déclare les consorts X... irrecevables en leurs exceptions,

- subsidiairement, qu'elle rejette celle fondée sur l'article 478 du code de procédure civile,

- plus subsidiairement, qu'elle se déclare incompétente pour statuer sur une demande fondée sur l'article 478 du code de procédure civile,

- qu'elle confirme, en conséquence le jugement entrepris sur l'absence de caducité,

- en tout état de cause, qu'elle la mette hors de cause et confirme le jugement qui les a déboutés de toutes leurs prétentions,

- qu'elle les condamne solidairement à lui payer la somme de 3000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ses dernières conclusions en date du 26 janvier 2017, la Caisse d'Epargne Provence-Alpes-Côtes d'Azur venant aux droits de la société Banque des Antilles Françaises expose :

- que les pièces non communiquées en appel doivent être rejetées,

- que les consorts X... ne sauraient revenir sur l'autorité de la chose jugée par le jugement du 26 août 2010, dès son prononcée d'après l'article 480, par le biais d'une action en responsabilité, que le jugement n'est pas non avenu puisque son caractère réputé contradictoire n'est pas dû au seul fait qu'il est susceptible d'appel puisque Dominique X... a été cité à personne,

- que la nullité de forme de l'assignation introductive d'instance ne peut être soulevée pour la première fois en cause d'appel, sans l'avoir été in limine litis, qu'aucun texte ne sanctionne l'erreur sur l'indication du barreau auprès duquel l'avocat constituant doit être inscrit, que la nullité du jugement ne peut être demandée qu'en exerçant les voies de droit adéquates, ce que les consorts X... se sont abstenus de faire,

- subsidiairement, qu'elle a remis à Dominique X... une notice d'assurance qui prévoit dûment la possibilité de l'exigence d'une visite médicale mais qu'il n'y a pas donné suite, sans doute en raison de son incarcération dont elle n'est pas responsable,

- qu'ils ne démontrent pas de préjudice en lien avec une faute reprochée dès lors que l'assurance n'aurait pas pu garantir les causes du prêt puisqu'elle prenait fin avec la déchéance du terme qui a été prononcée alors qu'il y avait des impayés et 9 mois avant le décès de Dominique X... alors qu'il avait déjà été condamné au profit de la CEGC, de sorte qu'elle demande à la cour :

- d'écarter des débats les pièces non communiquées,

- de confirmer le jugement,

- de débouter les consorts jacquet de leurs demandes,

- de les condamner à lui payer la somme de 5000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- à titre infiniment subsidiaire, si le jugement était déclaré caduc, de la mettre hors de cause, faute d'intérêt à agir et de préjudice des appelants.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 février 2018.

MOTIFS

C'est par offre du 25 février 2008 acceptée par Dominique X... le 8 mars 2008, que la BDAF lui a accordé un crédit immobilier d'un montant de 150000 euros remboursable en 240 mensualités de 1073,38 euros au taux nominal hors assurance de 5,40 %, destiné à l'acquisition d'un appartement situé [...]

Sur la communication des pièces

Si la CEPAC a conclu, dans ses seules écritures du 26 janvier 2017, que les appelants n'ont pas communiqué 'leur pièce', elle ne désigne pas la où les pièces qui n'auraient pas été communiquées, de sorte que sa demande tendant à voir écarter 'les pièces qui n'ont pas été communiquées régulièrement et dans un délai suffisant en cause d'appel' est indéterminée.

Si l'on considère que son expression 'la pièce' désigne effectivement la seule pièce nouvelle en cause d'appel figurant au bordereau des premières conclusions des appelants - soit l'assignation du 16 mars 2010 devant le juge de l'exécution - il doit être relevé qu'en tout état de cause, elle a été communiquée par la CEGC en pièce 4 à l'appui de ses conclusions du 5 janvier 2017 puis par la CEPAC elle-même, de sorte qu'elle est régulièrement produite aux débats.

La CEPAC n'a formé aucun incident ni conclu à nouveau après les secondes conclusions des appelants du 13 février 2018, qui comportent le bordereau de pièces, ainsi réputées communiquées en vertu de l'article 961 alinéa 21 du code de procédure civile qui dispose 'la communication des pièces produites est valablement attestée par la signature de l'avocat destinataire apposée sur le bordereau établi par l'avocat qui procède à la communication'.

En tout état de cause, si la communication de pièces doit être simultanée au dépôt des conclusions, il n'y a pas lieu d'écarter les pièces qui y contreviennent s'il est démontré que le destinataire de la communication avait été mis, en temps utile, en mesure de les examiner, de les discuter et d'y répondre, ce qui est le cas en l'espèce puisque la CEPAC a conclu y compris sur l'assignation du 16 mars 2010.

En conséquence, il y a lieu de rejeter cette prétention de la CEPAC.

Sur le fond

Il résulte de la lecture du jugement et des explications des parties que les consorts X... ont introduit une action indemnitaire contre la BDAF aux droits de laquelle vient la CEPAC et contre la CEGC et que ce n'est qu'en réplique à l'invocation de l'autorité de la chose jugée du jugement du 26 août 2010 les ayant condamnés à payer les causes du prêt à la CEGC dont la garantie avait été mobilisée par la banque, qu'ils ont fait valoir la caducité de cette décision, puis en réplique aux arguments de leurs contradictrices faisant valoir que la caducité n'était pas encourue au motif que Dominique X... avait été assigné à personne, qu'ils ont invoqué la nullité de cette assignation du fait de la mauvaise désignation du barreau auquel devait appartenir l'avocat auquel ce dernier pouvait recourir.

Il n'en ressort pas moins du déroulement du litige et du dispositif des conclusions des consorts X..., au sens de l'article 954 du code de procédure civile, qu'ils demandent, à titre principal, que soit reconnue la responsabilité de la CEPAC venant aux droits de la BDAF, à l'exclusion de celle de la CEGC, et qu'ils ne font valoir la caducité du jugement du 26 août 2010 que pour s'opposer à l'autorité de sa chose jugée.

Or, contrairement à ce qu' a jugé le tribunal, l'autorité de la chose jugée par cette décision dans le litige ayant opposé la caution aux consorts X... ne peut être opposée à ces derniers par la banque, qui n'était pas partie à l'instance, en vertu de l'article 1351 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 qui dispose notamment 'qu'il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties'.

En outre, la caducité du jugement pour défaut de signification dans le délai de six mois n'est encourue en vertu de l'article 478 du code de procédure civile que lorsqu'il est qualifié de réputé contradictoire au seul motif de ce qu'il est susceptible d'appel et non lorsque le défendeur non comparant a été touché à personne.

Or, en l'espèce, Dominique X... a été touché à personne par l'assignation du 16 mars 2010 et les consorts X... se sont abstenus, au moyen d'un appel dirigé contre le jugement consécutif du 26 août 2010 nécessairement formé devant la cour d'appel de Basse-Terre, de faire juger nulle l'assignation - et, au demeurant, le jugement lui-même.

En conséquence, il y a lieu d'examiner les demandes indemnitaires des consorts X... contre la CEPAC sans qu'il soit besoin ni ne puisse être fait droit à la demande tendant à voir reconnaître la caducité du jugement.

Il doit être ajouté que c'est à tort que l'irrecevabilité du moyen tiré de la caducité du jugement est invoquée au motif qu'il s'agirait d'une exception de procédure devant être soulevée avant toute défense au fond en vertu des articles 73 et 74 du code de procédure civile puisque le moyen n'est pas relatif à la présente procédure, seule concernée par ces dispositions, mais au litige distinct ayant conduit au jugement du 26 août 2010.

Il ressort des pièces versées aux débats que Dominique X... avait sollicité la souscription d'une assurance en renseignant la demande individuelle d'affiliation auprès de la compagnie AGF Outre-mer, le 14 février 2008, conformément aux exigences du contrat de crédit qui en faisait une condition de son octroi.

Un courrier de la BDAF au notaire du 21 avril 2008 énonce que les fonds de 150000 euros ont été virés sur le compte notarial puisque 'il se trouve que le déblocage a été exécuté, alors que nous n'avions pas la réponse de l'assurance' et sollicite que le 'dossier soit mis en attente' mais il est constant qu'il était trop tard, la vente ayant déjà eu lieu le 25 mars précédent, selon les mentions figurant dans la procuration pour revendre du 13 mars 2010.

La BDAF a donc débloqué les sommes sans avoir vérifié que le prêt était effectivement garanti par une assurance conformément aux stipulations contractuelles et elle ne justifie aucunement avoir averti Dominique X... de cette circonstance, au moment du virement des fonds, ou même ses héritiers postérieurement - lesquels indiquent l'avoir appris du notaire chargé du règlement de la succession - à telle enseigne, d'ailleurs, que c'est la société de recouvrement mandatée par la banque, la société Océor, qui a sollicité, le 29 octobre 2009, la société AGF Outre-mer sur les modalités de garantie d'assurance-groupe, ce ensuite de quoi il a été répondu à la BDAF, par courriel du 24 novembre 2009 du service médical de l'assureur, que 'la demande d'assurance (...) n'a pas été mise en place car nous n'avons jamais reçu les examens de souscription nécessaires à l'étude de ce dossier'.

En outre et comme l'a relevé le tribunal, la BDAF a néanmoins perçu indûment les cotisations d'assurance alors que la garantie n'était pas accordée, ce qui n'a permis ni à Dominique X... ni à ses héritiers et notamment à sa fille, qui a partiellement géré ses affaires pendant son incarcération comme la banque le savait, de soupçonner un défaut d'assurance.

La lettre de déchéance du terme adressée par la société de recouvrement mandatée par la banque à Dominique X... le 14 décembre 2009, dont l'accusé de réception a été signé par la vaguemestre pénitentiaire, cite une mise en demeure préalable du 29 octobre précédent qui n'est pas produite aux débats bien qu'admise par les consorts X... qui la datent d'un mois auparavant.

Si les consorts X... sollicitent la nullité du prononcé de la déchéance du terme, ils n'en tirent aucune conclusion quant à l'éventuelle continuation de l'exécution du contrat, qui en est pourtant l'effet essentiel, puisque c'est seulement aux fins de voir 'en conséquence' prendre en charge le paiement des causes du prêt par l'assurance dès lors que, selon eux, la garantie n'aurait pas été éteinte précisément par la déchéance du terme selon les stipulations la police.

Toutefois, il ressort clairement de ce qui précède que la garantie n'a jamais été accordée et, en tout état de cause, l'assureur n'est pas attrait au litige, de sorte que cette demande ne peut qu'être déclarée irrecevable.

C'est néanmoins fautivement que la banque a procédé de la sorte sans adresser également une mise en demeure préalable à Mme Danièle F... à laquelle Dominique X..., incarcéré, avait donné procuration sur ses comptes en le faisant savoir à la banque ou encore à l'avocat de Dominique X... qui lui avait adressé cette procuration par courrier bien antérieur du 21 juillet 2008, de même qu'un mandat pour le compte de Dominique X... alors qu'en sa qualité d'avocat, il ne lui était pas nécessaire d'en justifier.

Il résulte des manquements de la banque ayant consisté à débloquer les fonds objets du prêt sans assurance contrairement aux stipulations contractuelles, à poursuivre néanmoins l'exécution du contrat sans alerter son cocontractant de cette circonstance, ni ses héritiers après son décès, à prononcer la déchéance du terme sans mettre en demeure les mandataires de l'emprunteur incarcéré en dépit des demandes de ce dernier, à mandater une société de recouvrement sans l'informer du défaut de garantie d'assurance, à recourir au cautionnement dans ces circonstances, dès le 2 février 2010, de la société CEGC sans prendre plus attache avec son client, un préjudice transmis aux consorts X... qui les contraint à faire face au paiement des causes du prêt sans garantie d'assurance.

Compte tenu de ce que la somme due à la date du décès de M. X... au [...] était, selon le décompte, de 164759 euros, il y a lieu de condamner la banque à leur payer la somme de 170 000 euros de dommages-intérêts.

En revanche, ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, bien que sollicitant une condamnation indemnitaire solidaire de la CEGC dans le dispositif de leurs conclusions, les consorts X... n'étayent aucun grief qui soit imputable à cette dernière et doivent donc être déboutés de leurs prétentions contre elle.

Il y a lieu de condamner la Caisse d'Epargne Provence-Alpes-Côtes d'Azur venant aux droits de la société Banque des Antilles Françaises à payer à Mme Cécile X... et MM. E... et Julien X... la somme totale de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et l'équité commande de ne pas prononcer d'autre condamnation de ce chef.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf sur les chefs du dispositif relatifs au désistement envers la Caisse régionale de Crédit Agricole ;

Et statuant à nouveau pour le surplus,

Déboute la Caisse d'Epargne Provence-Alpes-Côtes d'Azur venant aux droits de la société Banque des Antilles Françaises de sa demande tendant à voir écarter des pièces des débats ;

Rejette la fin de non recevoir opposée par la CEGC à la demande tendant au prononcé de la caducité du jugement du 26 août 2010 ;

Déclare Mme Cécile X... et MM. E... et Julien X... irrecevables à solliciter la prise en charge par la garantie décès souscrite par Dominique X... du prêt restant dû au jour de son décès ;

Dit que la Caisse d'Epargne Provence-Alpes-Côtes d'Azur venant aux droits de la société Banque des Antilles Françaises a commis des fautes dans l'exécution du contrat de prêt consenti à Dominique X... ;

Condamne la Caisse d'Epargne Provence-Alpes-Côtes d'Azur venant aux droits de la société Banque des Antilles Françaises à payer à Mme Cécile X... et MM. E... et Julien X..., en leurs qualités d'indivisaires successoraux de Dominique X..., la somme de 170 000 euros de dommages-intérêts ;

Déboute Mme Cécile X... et MM. E... et Julien X... de toutes leurs demandes à l'égard de la Compagnie Européenne des Garanties de Caution et du surplus de leurs prétentions ;

Dit sans objet les demandes tendant à la constatation de la caducité du jugement du 26 août 2010 et au prononcé de la nullité de la déchéance du terme du 14 décembre 2009;

Condamne la Caisse d'Epargne Provence-Alpes-Côtes d'Azur venant aux droits de la société Banque des Antilles Françaises à payer à Mme Cécile X... et MM. E... et Julien X... la somme totale de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute la Compagnie Européenne des Garanties de Caution de ses demandes au titre des frais irrépétibles ;

Condamne la Caisse d'Epargne Provence-Alpes-Côtes d'Azur venant aux droits de la société Banque des Antilles Françaises aux dépens qui seront recouvrés comme il est dit à l'article 699 du code de procédure civile par Maître Chloé Z....

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 16/18469
Date de la décision : 15/06/2018

Références :

Cour d'appel de Paris I6, arrêt n°16/18469 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-06-15;16.18469 ?
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