Grosses délivréesRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 3
ARRÊT DU 5 SEPTEMBRE 2018
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : 16/17305
Décision déférée à la Cour : Jugement du 4 Juillet 2016 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 10/14332
APPELANTE :
SARL DOMI-ALMA prise en la personne de ses représentants légaux
Immatriculée au RCS de Nanterre sous le numéro 410 638 290
[...]
Représentée par Me Luca F... de la SELARL PELLERIN - F... - GUERRE, avocat au barreau de PARIS, toque : L0018, avocat postulant
Assistée de Me Benoît G... SMITH LLP, avocat au barreau de PARIS, toque : J097, avocat plaidant
INTIMÉE :
SASU CLINIQUE DE L'ALMA prise en la personne de ses représentants légaux
Immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 582 026 241
166 rue de l'Université
[...]
Représentée par Me Denis E... H... E...-CAVARROC, avocat au barreau de PARIS, toque : A0550, avocat substitué par Me Isabelle X... de la SELAS Cabinet E...-CAVARROC, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 9 Avril 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Agnès THAUNAT, présidente de chambre
Madame Marie-Brigitte FRÉMONT, conseillère
Madame Sandrine GIL, conseillère
qui en ont délibéré
Greffière, lors des débats : Madame Anaïs CRUZ
ARRÊT :
- contradictoire,
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,
- signé par Agnès THAUNAT, présidente de chambre et par Cyrielle BURBAN, greffière, présente lors de la mise à disposition.
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FAITS ET PROCÉDURE:
Par acte sous seing privé du 7 juillet 1993, la SAS COMPAGNIE FONCIERE SAINT DOMINIQUE aux droits de laquelle se trouve la SARL DOMI-ALMA, a donné à bail à la SAS CLINIQUE DE L'ALMA un immeuble sis 166 rue de l'Université et [...], pour un usage de clinique.
Le bail a été conclu pour une durée de neuf ans à compter du 1er juillet 1993, moyennant un loyer annuel de 3.500.000 francs, limité à 2.600.000 francs du1er juillet 1993 au 30 juin 1994, à 2.900.000 francs du 1er juillet 1994 au 30 juin 1995 et à 3.200.000 francs du 1er juillet 1995 au 30 juin 1996.
Une clause d'échelle mobile figurait au bail.
Par jugement du 6 avril 2006, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Paris a fixé le loyer du bail renouvelé à compter du 1er juillet 2002 à la somme annuelle en principal de 872.467 euros.
En application de la clause d'échelle mobile stipulée au bail, le loyer fixé à 872.467 euros, hors taxes et hors charges, au 1er juillet 2002 a été porté à 1.128.084,40 euros, hors taxes et hors charges, au 1er juillet 2008, soit une augmentation de 29,30% depuis sa dernière fixation judiciaire.
Par acte d'huissier de justice du 31 mars 2009, la SAS CLINIQUE DE L'ALMA a fait délivrer à la SAS DOMI-ALMA une demande de révision du loyer en application de l'article L 145-39 du code du commerce et a demandé la fixation du loyer à la valeur locative soit à la somme annuelle de 800.000 euros, hors taxes et hors charges.
Par acte d'huissier de justice du 12 juillet 2010, la SAS DOMI-ALMA a fait délivrer à la SAS CLINIQUE DE L'ALMA une demande de révision du loyer en application de l'article L145-39 du code du commerce, résultant du jeu de la clause d'indexation, aux fins de voir fixer le loyer à la somme annuelle de 1.740.000 euros, hors taxes et hors charges.
Par mémoire préalable aux fins de révision du loyer, la SAS DOMI-ALMA a demandé la fixation du loyer à la somme annuelle de 1.740.000 euros à compter du 12 juillet 2010.
Par acte d'huissier de justice du 1er octobre 2010, la SAS DOMI-ALMA a assigné la SAS CLINIQUE DE L'ALMA devant le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir fixer le loyer révisé au 12 juillet 2010 à la somme annuelle de 1.740.000 euros, hors taxes et hors charges.
Par jugement du 30 mars 2011, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Paris a:
- dit que la demande en révision de la SAS CLINIQUE DE L'ALMA du 31 mars 2009 était recevable au regard des dispositions de l'article L145-39 du code de commerce,
- déclaré irrecevable la demande en révision présentée le 12 juillet 2010 par la SAS DOMI ALMA,
- désigné M. Marc-Olivier Y... en qualité d'expert aux fins de donner son avis sur la valeur locative des lieux pris à bail,
- fixé le loyer provisionnel pour la durée de l'instance au montant du dernier loyer contractuel,
- ordonné l'exécution provisoire de la décision.
M. Marc-Olivier Y... a déposé son rapport le 22 novembre 2013, estimant la valeur locative brute à la somme de 1.335.000€ ramenée à la somme de 1.135.000€ après application d'un abattement de 15% compte tenu des travaux de conformité mis à la charge du preneur.
Par un jugement avant dire droit en date du 1er juillet 2014, le juge des loyers commerciaux, en raison des écarts très importants entre les estimations des différents experts judiciaires et amiables, a désigné M. Hugues Z... comme expert, afin de déterminer la valeur locative des lieux loués au 31 mars 2009.
M. Hugues Z... a déposé son rapport le 7 juillet 2015 concluant à une valeur locative brute de 1.178.000€, ramenée à la somme de 1.025.000€, après application d'une majoration de 2% compte tenu d'une autorisation de sous-location partielle et d'un abattement de 15% pour travaux de mise en conformité à la charge du preneur.
Par jugement du 4 juillet 2016, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Paris' a :
au visa des rapports d'expertise de M. Marc-Olivier Y... et de M. Hugues Z...,
- Fixé à 1.025.000 euros en principal par an à compter du 31 mars 2009 le montant du loyer du bail révisé entre la SARL DOMI-ALMA et la SAS CLINIQUE DE L'ALMA pour les locaux situés 166 rue de l'Université et [...], toutes autres clauses et conditions du bail expiré demeurant inchangées,
- Déclaré la SARL DOMI-ALMA irrecevable en sa demande en paiement du différentiel de loyer,
- Condamné la SAS CLINIQUE DE L'ALMA à payer à la SARL DOMI-ALMA les intérêts au taux légal sur les arriérés de loyer à compter du 1er octobre 2010, date de l'assignation, pour les loyers échus avant cette date et à compter de chaque échéance contractuelle pour les loyers échus après la date de l'assignation,
- Dit que les intérêts échus et dus au moins pour une année entière produiront des intérêts, en application de l'article 1154 du code civil,
- Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision,
- Débouté les parties du surplus de leurs demandes,
- Partagé les dépens par moitié entre les parties, qui incluront le coût des deux expertises judiciaires.
Par déclaration du 9 août 2016, la société DOMI-ALMA a interjeté appel de ce jugement.
Dans ses dernières conclusions signifiées par le RPVA le 29 mars 2018, la société DOMI- ALMA demande à la cour de':
- Dire et juger la société Domi Alma recevable et bien fondée en son appel,
- Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Et statuant à nouveau,
- Dire et juger que par application des dispositions de l'article L. 145-39 du Code de commerce, le loyer des locaux à usage commercial situés 166 rue de l'Université et [...], doit être fixé à la valeur locative à compter du 31 mars 2009,
En conséquence,
- Fixer à 1.740.000 € Ht/HC par an hors taxes et hors charges le loyer dû, à compter du 31 mars 2009, par la société Clinique de l'Alma à la société Domi Alma au titre du bail portant sur lesdits locaux,
- ou subsidiairement à 1 602 000 € HT/HC par an
- ou plus subsidiairement encore à 1 522 100 € HT/HC
- Condamner la société Clinique de l'Alma au paiement des intérêts au taux légal sur les arriérés de loyer,
- Dire que ces intérêts seront capitalisés dans les conditions prévues par l'article 1154 du Code civil,
- Condamner la société Clinique de l'Alma au paiement de la somme de 50.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'au paiement des entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions signifiées par le RPVA le 20 mars 2018, la société CLINIQUE DE L'ALMA SAS demande à la cour de':
au visa des dispositions de l'article L.145-39 du Code de commerce,
- Recevoir la Société CLINIQUE DE L'ALMA en son appel incident,
- Y faisant droit,
- Infirmer le jugement entrepris.
- Fixer le loyer révisé à effet du 31 mars 2009 de l'immeuble situé 166 rue de l'Université et [...] à la date précitée à la somme de CINQ CENT SOIXANTE DIX NEUF MILLE EUROS (579.000 €) par an en principal, hors charges et hors taxes.
-Subsidiairement, fixer le loyer révisé à la somme de CINQ CENT SOIXANTE SEIZE MILLE EUROS (576.000 €) par an en principal, hors taxes et hors charges dans l'hypothèse où l'assurance de l'immeuble serait considérée comme à la charge de la Société locataire, ce que cette dernière conteste.
- Condamner la Sté DOMI ALMA au paiement des intérêts au taux légal sur les loyers trop perçus, conformément aux dispositions de l'article 1555 du Code Civil, de plein droit à compter de la date d'effet du nouveau loyer.
-.Dire que les intérêts échus depuis plus d'une année produiront eux-mêmes intérêts conformément aux dispositions de l'article 1154 du Code civil.
- Débouter la Société DOMI ALMA de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- Condamner la société DOMI ALMA au paiement d'une somme de 35.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
- La condamner aux entiers dépens incluant les frais des expertises de Monsieur Marc-Olivier Y... et de Monsieur Hugues Z....
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 5 avril 2018.
MOTIFS
Sur la fixation à la valeur locative du bail révisé
Par un jugement mixte en date du 30 mars 2011, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Paris a dit que la demande de révision présentée le 31 mars 2009 par la société CLINIQUE DE L'ALMA était recevable au regard des dispositions de l'article L145-39 du code de commerce.
Le jeu de la clause d'échelle mobile stipulée au bail ayant, en l'espèce, entraîné une variation du prix du loyer de plus du quart par rapport au prix précédemment fixé, le prix du loyer du bail révisé au 31 mars 2009 doit être fixé à la valeur locative en application de l'article L145-39 du code de commerce.
Sur la méthode d'évaluation
Il n'est pas contesté par les parties que la clinique de l'Alma est exploitée dans un immeuble monovalent au sens de l'article R145-10 du code de commerce, les locaux étant en effet aménagés en vu d'une seule et unique utilisation et étant dédiés à cet usage exclusif de clinique.
L'article R145-10 du code de commerce dispose que "le prix du bail des locaux construits en vue d'une seule utilisation, peut par dérogation aux articles L145-33 et R145-3 et suivants, être déterminé selon les usages observés dans la branche d'activité considérée."
A défaut d'usages particuliers, la règle générale de l'article L145-33 du code de commerce s'applique.
L'une des méthodes pour déterminer le prix du loyer d'une clinique était le prix au lit. Une autre méthode consistait à déterminer le prix en fonction de trois critères essentiels : le prix de journée (nuitée), le taux d'occupation et l'importance de l'établissement.
Depuis l'entrée en vigueur en mars 2005, de la réforme de la tarification dite T2A, le financement des établissements de soins privés est déterminé suivant les pathologies traitées et non plus en fonction des durées de séjours et des actes médicaux, dès lors, il n'existe plus d'usage en matière de fixation de loyer de locaux à usage de clinique, en effet cette nouvelle tarification a rendu impossible le recours à une combinaison du prix du lit, d'un taux sur les recettes et de la surface des locaux, puisque que ces paramètres ne sont plus opérants.
Les deux experts judiciaires préconisent d'appliquer la méthode métrique. La bailleresse accepte le recours à cette méthode, tandis que la locataire demande à ce qu'elle soit combinée avec une méthode fondée sur le chiffre d'affaires de l'exploitant en ne retenant que les GHS (groupe homogène de santé).
*Sur les caractéristique des locaux
La cour entend se référer à la description de locaux tel qu'elle figure au jugement entrepris, celle-ci n'étant pas remise en cause par les parties.
Sur la méthode métrique
*Sur la pondération des surfaces
Les deux experts judiciaires ont retenu une surface utile de 4.336m² et une surface pondérée de 3.927m²P.
Si la surface utile est acceptée par les parties, la société Clinique de l'Alma conteste la pondération retenue par les experts judiciaires en ce qui concerne la partie située au rez-de- chaussée destinée à l'accueil, à l'administration et à la maintenance affectée d'un coefficient de 1, alors qu'un coefficient de 0,7 serait, selon elle, plus approprié, ainsi que la pondération de la partie située au 8e étage , affectée à usage de bureaux, laquelle est mansardée, qui doit, selon elle, être affectée d'un coefficient de pondération de 0,6 et non de 0,7, proposé par les experts.
La cour relève qu'il est d'usage pour les cliniques de pondérer au coefficient de 1, la partie des locaux destinée à l'accueil, à l'administration et à la maintenance. Par ailleurs, la pondération au coefficient de 0,7, du 8e étage mansardé, est également conforme aux usages.
Dès lors, la surface pondérée de 3.927m²P doit être retenue.
* Sur la valeur locative :
- sur les prix pratiqués
Les experts judiciaires ont recherché des termes de comparaison pour des locaux similaires à usage de cliniques, dans Paris et la petite couronne, parmi des références issues tant du marché que des décisions judiciaires.
M. Marc-Olivier Y... a relevé des loyers judiciaires évoluant de 104,22 euros le m²P à 110 euros le m² P, et des loyers conventionnels variant de 221 euros le m²P à 530 euros le m²P pour des locations en renouvellement et de 211 euros le m²P à 259 euros le m²P pour des nouvelles locations.
M. Hugues Z... a relevé des loyers judiciaires évoluant de 220 euros le m²P à 280 euros le m²P , et des loyers conventionnels variant de 110 euros le m² P à 446 euros le m²P pour des locations en renouvellement et de 211 euros le m² P à 259 euros le m²P pour des nouvelles locations. L'expert se réfère, notamment, à deux références qu'il juge spécialement pertinentes car situées dans Paris : celle de 208 euros le m²P en 2008 pour la clinique Dautrancourt sise [...], s'agissant d'une fixation judiciaire, et celle de 310 euros le m²P en 2009 pour la clinique CMC PARIS (ex clinique du sport) sise [...].
La bailleresse conteste la pertinence des références produites compte tenu de leur éloignement des lieux loués, et souligne l'attractivité exercée sur la patientèle de l'emplacement de la clinique dont s'agit. Elle se réfère notamment au prix au m²P du loyer de la clinique du Trocadéro, sise [...], dont le loyer actuel est de 700€ le m²P et à l'évaluation proposée par ses experts amiables MM. A... et B.... La société locataire soutient que l'emplacement de la clinique n'a pas d'influence sur la valeur locative, le prix des actes étant fixé au plan national ; elle critique la référence de la clinique de Trocadéro, compte tenu des liens existant entre les bailleurs de la société Clinique de l'Alma et ceux de la clinique du Trocadéro (clinique Paul Doumer) ainsi que les conclusions des experts amiables A... et B..., notamment en ce que ces deux experts, font état de références relatives non seulement à des cliniques mais également à des bureaux.
La cour relève que dans la mesure où les cliniques doivent faire face à des contraintes de gestion, ont d'importants frais de personnel et sont soumises à une tarification à l'acte, leur activité est sans comparaison avec celle d'une activité de bureau. Dans ces conditions, les références relatives à des locaux dans lesquels est exercée une activité de bureau, doivent être écartées car elles ne sont pas pertinentes.
En conséquences, ne doivent être prises en considération que les loyers des biens dans lesquels s'exerce une activité de clinique. Cependant, il existe peu de références pour des biens à usage de clinique situés à Paris intra-muros, si bien que c'est à juste titre que les experts judiciaires proposent également des références pour des cliniques situées en proche banlieue.
Il est par ailleurs certain, que l'activité d'une clinique étant partiellement hôtelière, l'emplacement de celle-ci a une influence sur le prix du loyer, ce que confirment d'ailleurs les références produites, le montant des loyers des cliniques situées en banlieue-est, plus populaire, étant inférieur à celui du montant des loyers des cliniques, situées dans l'ouest de Paris, ou encore en proche banlieue-ouest, plus bourgeoise.
Les conclusions du rapport d'expertise amiable A..., ainsi que celles du rapport d'expertise amiable B... doivent être écartées dans la mesure où M. A... pour estimer à 400€ le m²P, le prix du loyer révisé et M. B... pour l'évaluer à une somme comprise entre 360€ et 380€ le m²P, ont pris en considération non seulement des références des loyers de cliniques, mais également des références relatives à des loyers de locaux ayant un autre usage comme les bureaux.
La référence au loyer de la clinique de Trocadéro doit être écartée dans la mesure où il s'agit d'une nouvelle location selon un bail conclu le 12 juin 2013, soit une date postérieure à la date de révision du bail dont s'agit.
L'expert judiciaire M.-O. Y... propose de retenir un prix au mètre carré pondéré de 340€ alors que l'expert judiciaire H. Z..., propose de retenir un prix au mètre carré pondéré de 300€.
La bailleresse demande de voir fixer le prix au mètre carré pondéré à 400 € et la société locataire à 280€.
Compte tenu du contexte socio-économique des [...] métropolitaine et notamment à Paris, de l'occupation de l'intégralité de la parcelle foncière, de l'état actuel de la clinique (sachant que les travaux constatés par l'expert judiciaire ne font pas accession au bailleur), de l'activité exercée (pôle chirurgical tous types ; pôle gastro-entérologie avec radiologie interventionnelle ; pôle dialyse ; pôle radiologie ), de la capacité d'accueil (112 lits, équipements, services), de l'absence de parking ou d'espaces verts accessibles aux patients, de l'évolution des marchés, des obligations respectives résultant du bail, de la destination des lieux, de la qualité de l'immeuble, de l'intérêt de l'emplacement, la clinique étant située dans un quartier prestigieux de [...], non loin du Champs de Mars, avec une patientèle aisée réputée bénéficier d'une bonne protection sociale et des caractéristiques des locaux sur lesquels porte le bail révisé, le prix unitaire de 300€ le mètre carré pondéré, retenu par le premier juge doit être approuvé soit une valeur locative annuelle globale de 1.178. 100 €.
Sur la méthode par le chiffre d'affaires
Selon cette méthode, un taux d'effort est rapporté au chiffre d'affaires.
La société locataire rappelle les conclusions de M. Bernard C..., son expert amiable, lequel après avoir indiqué que le chiffre d'affaires de la clinique s'élevait à la somme de 13.605.616€, auquel il a appliqué un taux d'effort de 7% , a indiqué que selon cette méthode le prix du loyer annuel était de 952.400€.
M. Z..., expert judiciaire, estime pour sa part que le recoupement par le chiffre d'affaires, au regard de la valeur locative sans prise en compte des clauses et conditions du bail, faisait ressortir un taux de 9,10%, et avec prise en compte des clauses et conditions du bail un taux de 7,90%, apparaissant justifiés pour une clinique 'ancienne', bénéficiant d'un bon emplacement à Paris.
La cour relève que l'expert C..., et l'expert Z... s'accordent sur le fait que le chiffre d'affaires à prendre en compte doit correspondre aux GHS, dialyses, suppléments divers, etc..., mais ne doit pas prendre en compte le coût des prothèses etc... qui sont refacturables à hauteur du prix remboursé par l'assurance maladie, cependant, la société locataire ne verse pas aux débats les éléments comptables permettant de vérifier les calculs de son expert amiable. Dans ces conditions, la cour retient le chiffre d'affaires de 13.000.000€, tel que proposé par l'expert judiciaire.
En conséquence, le recoupement par le chiffre d'affaires brut, hors clauses exorbitantes, fait ressortir un pourcentage de 9%, qui est conforme aux usages.
Sur les abattements et les majorations
En dehors des obligations respectives légales et d'usage, il est stipulé au bail des clauses exorbitantes du droit commun pouvant avoir une incidence sur la valeur locative.
La clause 8, au point 8-3 est rédigée de la façon suivante :'il est également convenu qu'au cas où l'administration, ou quelque autorité que ce soit, compte tenu de l'activité exercée dans les lieux, viendrait à exiger à un moment quelconque une modification du bien, objet du présent bail, tous les frais et conséquence de cette modification seront intégralement supportées par le preneur qui s'y oblige.'
Les mises en conformité des lieux loués ordonnées par l'administration étant normalement à la charge du bailleur, cette clause constitue un transfert de charge sur le preneur, d'autant plus important que ces dernières années les normes applicables aux établissements recevant du public se sont multipliées en ce qui concerne notamment l'accès aux locaux par les personnes à mobilité réduite, ainsi que la lutte contre les incendies.
Dès lors, il importe peu, qu'ainsi que le soutient le bailleur, une partie des travaux effectués par le preneur et exigés par l'administration ait eu pour origine la restructuration des locaux, les locaux pris en location, compte tenu de leur ancienneté, auraient en effet dû être mis aux nouvelles normes, même si le bâtiment n'avait pas été restructuré.
Le bailleur ayant conservé la charge des travaux relevant de l'article 606 du code civil, l'abattement de 15% proposé par l'expert et retenu par le premier juge est correct et doit être approuvé.
En conséquence, la valeur locative doit être fixée ainsi qu'il suit :
1.178. 100 €x0,85=1.001.385€ arrondie à 1.001.400€.
Le preneur sollicite un abattement en raison du risque que fait courir aux locaux loués la crue centennale ; ce à quoi s'oppose le bailleur.
C'est à juste titre que le premier juge a écarté l'abattement sollicité de ce chef, car il n'existe pas d'usage en la matière quant à la prise en compte de ce risque alors même que 20% du territoire parisien risquent d'être affectés par cette crue, étant observé que la clinique n'a jusqu'à présent souffert d'aucune inondation.
La société locataire demande un abattement en raison de l'assujettissement des loyers à la TVA, alors qu'elle ne peut elle-même prétendre qu'à une récupération très partielle de la TVA.
Les loyers des baux des cliniques étant généralement soumis à la TVA, il n'y a pas lieu de pratiquer un abattement de ce chef.
La société locataire sollicite encore la déduction de la prime d'assurance.
La cour relève qu'aucune clause du bail ne stipule que l'assurance de l'immeuble doit être remboursée au bailleur. Certes, l'article 13-2 du bail, précise que le preneur 'devra acquitter ou rembourser toutes primes ou surprimes d'assurance qui viendraient à être réclamées au bailleur du fait de son activité'. Cependant, cette clause ne transfère pas au preneur la charge de l'assurance d'immeuble, mais uniquement celui d'un surcoût lié à l'activité. Dans ces conditions, il n'existe pas, sur ce point, de clause exorbitante du droit commun devant être prise en considération pour fixer la valeur locative.
Le bailleur sollicite par ailleurs, une majoration de 2% compte tenu d'une clause permettant la sous-location.
La clause 9-1 du bail stipule que :
'le preneur devra occuper les lieux personnellement, et ne pourra, même temporairement, prêter les locaux donnés à bail, ni les sous-louer en tout ou partie.
Il est toutefois précisé que l'autorisation de sous-location au profit de l'exploitant du laboratoire d'analyses médicales, donnée au preneur par lettre du 4 décembre 1979, est maintenue dans les conditions fixées audit courrier par le CREDIT NATIONAL, aux droits duquel vient la COMPAGNIE FONCIERE SAINT DOMINIQUE '(à l'époque bailleur du local)
La cour relève que c'est à juste titre que le preneur fait valoir qu'il s'agissait d'une faculté de sous-location 'intuitu personae', laquelle a pris fin, à la suite de la conclusion le 5 avril 2007 d'un acte sous seing privé signé par la locataire principale et la sous-locataire, Mme D....
Dans ces conditions, aucune clause générale autorisant la sous-location n'existant au bail, et cette faculté ayant cessé à la date de fixation de la valeur locative, il n'y a pas lieu de majorer la valeur locative de ce chef et le jugement entrepris doit être infirmé de ce chef.
Le loyer du bail révisé sera en conséquence fixé à la somme arrondie de 1.001.400€ en principal par an à compter du 31 mars 2009 et la société bailleresse condamnée à payer, conformément à l'article 1155 du code civil, les intérêts au taux légal sur le différentiel de loyers à compter du premier mémoire en défense de la société locataire.
PAR CES MOTIFS
CONFIRME le jugement entrepris sauf en ce qui concerne le montant du loyer révisé et la charge du paiement des intérêts de retard sur le différentiel de loyers et le point de départ desdits intérêts de retard ;
l'INFIRME sur ces points ;
statuant à nouveau ;
FIXE à 1.001.400 euros en principal par an à compter du 31 mars 2009 le montant du loyer du bail révisé entre la SARL DOMI-ALMA et la SAS CLINIQUE DE L'ALMA pour les locaux situés 166 rue de l'Université et [...], toutes les autres clauses et conditions du bail expiré demeurant inchangées ;
FIXE le point de départ des intérêts dus par la société bailleresse sur le différentiel de loyers à compter du premier mémoire en défense de la société locataire ;
Y ajoutant,
DIT n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société bailleresse aux dépens de l'appel.
LA GREFFIERE LA PRÉSIDENTE