Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 1
ARRÊT DU 23 NOVEMBRE 2018
(no , pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : No RG 16/11224 - No Portalis 35L7-V-B7A-BY3NL
Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Avril 2016 -Tribunal de Grande Instance d'EVRY - RG no 14/04410
APPELANTE
SA ALLIANZ IARD agissant poursuites et diligences en la personne de son Directeur Général domicilié
[...]
SIRET No : 542 110 291 04757
Représentée par Me Dominique Y... de l'AARPI Dominique Y... - Sylvie E... , avocat au barreau de PARIS, toque : L0069
Ayant pour avocat plaidant, Me Bruno Z..., avocat au barreau de PARIS, toque : E1230
INTIMES
Monsieur romain A...
né le [...] à Etampes (91150)
Madame emilie B...
née le [...] à noisy le grand (91160)
Demeurant [...]
Représentés tous deux par Me Pascal HORNY de la SCPHORNY /MONGIN/SERVILLAT, avocat au barreau d'ESSONNE
Monsieur K... G...
Demeurant [...]
DÉFAILLANT
Madame Maria H... J...
Demeurant [...]
DÉFAILLANTE
SARL IDE@L IMMO prise en la personne de son gérant y domicilié
[...]
SIRET No: 491 648 952 00027
DÉFAILLANTE
SA GROUPAMA ASSURANCE CREDIT
[...]
SIRET No: 380 810 283 00016
Représentée par Me Charlotte BELLET de la SCP BOURGEON MERESSE GUILLIN BELLET etamp; ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0166
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 17 Octobre 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposé, devant M. Dominique GILLES, Conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. Claude CRETON, Président
Mme Christine BARBEROT, Conseillère
M.Gilles DOMINIQUE, Conseiller etgt;
Greffier, lors des débats : Mme Nadia TRIKI
ARRÊT :
- DÉFAUT
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M.Claude CRETON, Président et par Mme Nadia TRIKI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire..
***
FAITS etamp; PROCÉDURE
Suivant acte authentique du 30 juin 2010 conclu par l'entremise de l'agence immobilière Ide@l Immo, M. A... et Mme B... ont acquis de M. G... et Mme H... J..., moyennant le prix de 195 000 €, un pavillon sis [...] .
A l'occasion de travaux de rénovation engagés en février 2011, ils se sont aperçus que la structure de ce pavillon était en bois, que les cloisons extérieures et intérieures étaient dégradées et attaquées par des capricornes, et ils ont obtenu, par ordonnance de référé du 13 septembre 2011, la désignation de M. I... en qualité d'expert à l'effet de décrire les
désordres.
Au vu du rapport de cet expert déposé le 21 octobre 2013, M. A... et Mme B... ont assigné, par actes extra-judiciaires des 2 et 5 mai 2014, M. G... et Mme H... J... et la société Ide@l Immo à l'effet de les voir condamner in solidum à indemniser leurs préjudices.
Selon actes extra-judiciaires des 21 et 24 novembre 2014, la société Ide@l Immo a appelé en garantie, son assureur de responsabilité civile, la société Allianz IARD, venant aux droits de la société AGF, et son garant financier, la société Groupama Assurance Crédit.
C'est dans ces conditions que, suivant jugement du 11 avril 2016, le tribunal de grande instance d'Évry a :
- condamné in solidum M. G... et Mme H... J... et la société Ide@l Immo à payer à M. A... et Mme B... la somme de 114 036,33 € TTC indexée sur l'indice BT 01 du coût de la construction à compter du 21 octobre 2013, date du dépôt du rapport d'expertise,
- condamné in solidum M. G... et Mme H... J... et la société Ide@l Immo à verser à M. A... et Mme B... la somme de 8 100 € au titre de leurs
frais de relogement et de déménagement,
- condamné in solidum M. G... et Mme H... J... et la société Ide@l Immo à payer à M. A... et Mme B... la somme de 1 500 € au titre de l'assurance dommages-ouvrage qu'ils devront souscrire pour la reconstruction,
- condamné les mêmes in solidum à payer à M. A... et Mme B... la somme de
1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- dit que la société Allianz IARD devrait garantir la société Ide@l Immo de ces condamnations,
- ordonné l'exécution provisoire.
La société Allianz IARD a relevé appel de ce jugement dont elle poursuit l'infirmation, concluant à sa mise hors de cause, demandant le bénéfice du plafond de garantie et de la franchise prévues à la police.
M. A... et Mme B... ont conclu à la confirmation du jugement, admettant le plafond de la garantie de l'assureur.
M. G... et Mme H... J..., régulièrement assignés, n'ont
pas constitué avocat.
La société Ide@l Immo, régulièrement assignée, n'a pas constitué avocat.
Par ordonnance du 20 avril 2017, le conseiller de la mise en état a dit irrecevables les
conclusions de la société Groupama Assurance Crédit.
Par arrêt du 02 mars 2018, la Cour a dit que la société Ide@l Immo avait manqué à son devoir de conseil et d'information envers les consorts A... B... et, avant dire droit, a sursis à statuer sur le surplus et a rouvert les débats à l'audience du 17 octobre 2018, en invitant les parties à conclure sur :
- le point de savoir si la faute de l'agence est en lien de causalité direct avec le préjudice des
acquéreurs ou bien si cette faute n'est en relation qu'avec une perte de chance pour ces derniers de ne pas acquérir le bien dont s'agit ou de n'en donner qu'un moindre prix, eussent-t'ils été correctement informés de son mode de construction en préfabriqué et non en parpaings,
- l'importance de cette perte de chance et son évaluation.
La société Allianz IARD par dernières conclusions du 09 octobre 2018 signifiées aux parties défaillantes, sauf à Groupama Assurance Crédit, demande à la Cour de :
- la mettre hors de cause,
- débouter la société Ide@l Immo des demandes dirigées contre elle,
- rejeter toute autre demande,
- subsidiairement, limiter sa garantie selon les termes de la police à raison du plafond de garantie de 100 000 € et de la franchise de 10 % du montant du montant du sinistre restant à la charge de l'assuré avec un maximum de 1 500 €,
- et dire que la perte de chance des consorts A... B... doit être qualifiée de faible et n'ouvre pas droit à une réparation de plus de 35 000 €,
- condamner in solidum les parties succombantes au dépens.
M. A... et Mme B... prient la Cour, par dernières conclusions signifiées du 9 octobre 2018 de :
- dire qu'ils sont bien fondés, au titre de la perte de chance, à demander 99% de l'évaluation des postes de préjudice évalués par le tribunal,
- dire que la société Allianz IARD devra garantir la société Ide@l Immo des condamnations
prononcées contre elle dans la limite de la somme de 100.000 € et la condamner in solidum
au paiement des condamnations dans cette limite,
- condamner la société Allianz IARD à leur payer la somme de 8.000 € au titre de l'article 700
du code de procédure civile, en sus des dépens.
SUR CE, LA COUR
La Cour a déjà jugé que la faute imputable à l'agent immobilier était que cette agence immobilière avait manqué à son devoir de conseil envers les acquéreurs, en ne les informant pas du mode constructif du bâtiment mis en vente, soit en préfabriqué et non en mode traditionnel comme annoncé faussement.
La société Allianz IARD prie la Cour de relever "que les deux fiches mentionnaient comme matériaux le parpaing, ce qui induisait dans l'esprit de non professionnels du bâtiment un tout en béton conforme au souhait des consorts A... B..., également attirés par le prix modeste pour une première acquisition qui a nécessité l'octroi d'un emprunt bancaire auquel était subordonnée la vente".
Il est établi en effet que les consorts A... B..., qui disposaient de moyens financiers modestes sans pour autant ne pas avoir les moyens d'acheter une maison en construction traditionnelle, ont acheté le bien en considération de son apparence d'immeuble construit en dur et de son bon état annoncé, ce qui limitait les travaux de rénovation qu'ils envisageaient. Dès lors, s'ils avaient pris le risque d'acquérir un pavillon à ossature bois, alors que tel n'était pas leur souhait et que rien ne les y obligeait, il est peu probable qu'ils l'auraient fait sans vérification de l'état de la structure.
La Cour dispose des éléments suffisants pour fixer la perte de chance à 90%.
Ainsi, sur la base du rapport d'expertise judiciaire exempt de critiques, les préjudices matériels découlant des travaux de démolition et de reconstruction propres à réparer le dommage s'évaluent à 90% de 114 063,33 €, soit 102 657 € outre indexation selon l'indice BT 01 à compter du 21 octobre 2013, date du dépôt du rapport d'expertise.
Sur la base de ce même rapport, les frais de relogement pendant travaux s'évaluent à 90% de 8 100 € soit 7 290 €.
Le coût de l'assurance dommages ouvrage obligatoire pour les travaux de reconstruction exactement évalué par le jugement entrepris à la somme de 1 500 € doit entraîner le versement de dommages-intérêts à hauteur de 90%, soit 1 350 €.
Il est établi que les consorts A... B... ont subi un préjudice moral du fait d'avoir dû vivre dans un immeuble dangereux au milieu des étais, d'avoir dû subir les tracas d'une procédure judiciaire pour être indemnisés, sachant qu'ils vont encore devoir déménager et assumer les soucis de lourds travaux. La perte de chance de ne pas subir un tel préjudice moral à cause du manquement de l'agent immobilier à son devoir d'information peut être évaluée à 90% de la somme de 5 000 € qui a été exactement estimée par les premiers juges, soit la somme de 4 500 €.
Le jugement sera donc réformé sur ces points.
Dès lors que le principe de la condamnation directe de l'assureur n'est pas contesté par celui-ci, il sera condamné in solidum avec l'assuré, mais seulement obligé dans les limites du contrat d'assurance opposables à l'assuré. Au vu de la police AGF IART no[...] produite aux débats, le plafond de garantie et la franchise opposés à l'assuré n'excèdent pas les prévisions contractuelles opposables à la SARL Ide@al Immo et il convient de faire droit à la demande de l'assureur sur ce point.
Toutefois, cette limitation n'est pas opposable à Groupama Assurance Crédit puisque les conclusions de la compagnie Allianz IARD ne lui ont pas été signifiées.
Il convient donc de confirmer le jugement entrepris pour le surplus.
La société Allianz IARD sera condamnée au dépens d'appel et versera aux consorts A... B... une somme de 6 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Réforme le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la SARL Ide@al Immo à payer aux consorts A... B... certaines sommes à titre de dommages-intérêts, et en ce qu'il a condamné la société Allianz IARD in solidum avec son assuré à les payer,
Statuant à nouveau :
Condamne la société Ide@l Immo à payer aux consorts A... B... les sommes suivantes à titre de dommages-intérêts pour la perte de chance causée par sa faute de ne pas avoir acquis la maison litigieuse, :
- 102 657 € outre indexation selon l'indice BT 01 à compter du 21 octobre 2013, date du dépôt du rapport d'expertise, au titre du coût des travaux de démolition et de reconstruction,
- 7 290 € pour les frais de relogement,
- 1 350 € pour l'assurance dommages ouvrage,
- 4 500 € pour le préjudice moral,
Dit que la société Allianz IARD est tenue in solidum avec la société Ide@l Immo, son assuré, du paiement des sommes ci-dessus, à raison de la police d'assurance AGF IART no [...] du 19 septembre 2006, et ce dans la limite du plafond de garantie de 100 000 € et avec application de la franchise de 10% du montant du sinistre comportant un maximum de 1 500 € restant à la charge de l'assuré,
Pour le surplus, confirme le jugement entrepris, y compris en ce qu'il a condamné l'assureur tenue à garantie aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile, sauf à dire que le plafond de garantie et la franchise ci-dessus s'appliquent également à ces condamnations,
Condamne la société Allianz IARD à verser aux consorts A... B... une somme de 6 000 € au titre del'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Allianz IARD aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT