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29/11/2018 | FRANCE | N°18/05223

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 8, 29 novembre 2018, 18/05223


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE


délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











COUR D'APPEL DE PARIS





Pôle 4 - Chambre 8





ARRÊT DU 29 NOVEMBRE 2018





(n° , 5 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/05223 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5H45





Décision déférée à la cour : jugement du 21 février 2018 -juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris - RG n° 17/80422









APPELANTE





Sa Cardif Assurance Vie, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliée en cette qualité audit siège


N° SIRET : [...]


[...]





représentée par Me Bruno ...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 8

ARRÊT DU 29 NOVEMBRE 2018

(n° , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/05223 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5H45

Décision déférée à la cour : jugement du 21 février 2018 -juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris - RG n° 17/80422

APPELANTE

Sa Cardif Assurance Vie, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliée en cette qualité audit siège

N° SIRET : [...]

[...]

représentée par Me Bruno X... de la Scp Granrut Société d'Avocats, avocat au barreau de Paris, toque : P0014

INTIMÉ

Le comptable responsable du Service des impôts des particuliers de [...]

[...]

représenté par Me Alain Y... de l'AARPI Grynwajc - Y..., avocat au barreau de Paris, toque : P0211

PARTIE INTERVENANTE

Sa Bnp Paribas, agissant poursuites et diligences de son directeur général domicilié en cette qualité audit siège

N° SIRET : [...]

[...]

représentée par Me Brigitte Z..., avocat au barreau de Paris, toque : L0020

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 novembre 2018, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Emmanuelle Lebée, présidente, et M. Gilles Malfre, conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Mme Emmanuelle Lebée, présidente

M. Gilles Malfre, conseiller, chargé du rapport

Mme Fabienne Trouiller, conseillère

Greffier, lors des débats : M. Sébastien Sabathé

ARRÊT : - contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Emmanuelle Lebée, présidente et par M. Sébastien Sabathé, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

M. A... est redevable de la somme de 129 340 euros auprès du service des impôts des particuliers de [...] , au titre de l'impôt sur le revenu. En l'absence de paiement de cette dette, le comptable public a délivré le 31 août 2016 un avis à tiers détenteur (ATD) entre les mains de la société Cardif Assurance-Vie, le débiteur ayant souscrit trois contrats d'assurance-vie rachetables auprès de cette société, sous les numéros 244673, 244674 et 305536.

Le tiers saisi a exécuté cet ATD s'agissant des deux premiers contrats mais par lettre du 13 septembre 2016, a indiqué au comptable public ne pouvoir procéder au versement immédiat des sommes dus dans le cadre du troisième contrat, dans la mesure où la créance du souscripteur ne deviendra exigible qu'au jour du dénouement à l'initiative du souscripteur ou au terme du contrat. C'est dans ces conditions que le comptable a fait assigner la société Cardif Assurance-Vie devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Paris, par acte du 8 février 2017, sur le fondement de l'article R. 211-9 du code des procédures civiles d'exécution, le défendeur soutenant alors devant le premier juge que le contrat d'assurance-vie saisi était nanti au profit de la Bnp Paribas depuis le 2 décembre 2012.

Par jugement du 21 février 2018, la société Cardif Assurance-Vie a été condamnée à payer au saisissant l'intégralité des fonds versés par M. A... sur le contrat n°305536 dans la limite de la valeur de rachat des droits à la date de la notification de l'avis à tiers détenteur, outre la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Cardif Assurance-Vie a relevé appel de ce jugement, selon déclaration du 9 mars 2018, intimant la comptable responsable du Sie de [...] .

Par ordonnance du 13 juin 2018, le premier président de la cour d'appel de Paris a ordonné le sursis à exécution du jugement entrepris considérant que : « dès lors que l'ATD est postérieur au nantissement au profit de la banque, le nantissement confère au créancier nanti une priorité de paiement que l'ATD, délivré postérieurement à la constitution du nantissement ne peut remettre en cause ».

Dans ses dernières conclusions signifiées le 16 octobre 2018, la société Cardif Assurance-Vie poursuit, à titre principal, l'infirmation du jugement entrepris, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de dommages-intérêts du comptable public et, par conséquent, demande à la cour de constater que le contrat d'assurance-vie Bnp Paribas Multiplacements n° 00305536 a été nanti par M. A... au profit de la Bnp Paribas le 2 décembre 2012, et, en conséquence, constater l'absence d'effet immédiat de l'ATD. Subsidiairement, elle entend que les effets de l'ATD soient limités à la somme égale à la valeur de rachat du contrat au jour de la réception de cet avis à tiers détenteur. Dans tous les cas, elle demande à la cour de condamner le comptable public à lui payer la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions signifiées le 17 octobre 2018, le comptable public demande à la cour de confirmer le jugement et, subsidiairement, de condamner l'appelante à lui verser l'intégralité des fonds à hauteur de la valeur de rachat au jour de la notification de l'ATD, pour la fraction excédant le montant du prêt nanti restant à rembourser par M.A... à la Bnp Paribas. En tout état de cause, il conclut au débouté des demandes des autres parties et entend que l'appelante soit condamnée à lui payer la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions du 21 juin 2018, la Bnp Paribas, intervenant volontairement à l'instance, poursuit l'infirmation du jugement et la condamnation de toute partie succombante à lui payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles.

SUR CE

Sur l'intervention volontaire de la Bnp Paribas :

Au dispositif de ses conclusions, la Bnp Paribas entend être reçue en son intervention forcée alors qu'elle n'a été ni intimée ni assignée en intervention forcée, ayant de sa propre initiative, décidé d'intervenir à l'instance.

En application de l'article 554 du code de procédure civile, elle sera dans tous les cas reçue en son intervention, qui est volontaire, dans la mesure où, en sa qualité de créancier nanti, elle a un intérêt à intervenir à la présente procédure.

Sur l'effet immédiat de l'avis à tiers détenteur :

À l'appui de son appel, la société Cardif Assurance-Vie soutient que si l'ATD produit un effet attributif immédiat, il peut être différé, notamment lorsque le contrat d'assurance-vie objet de l'avis a été nanti, d'une part, parce que l'article L. 263-0 A du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction issue de la loi du 6 décembre 2013, prévoit que l'ATD ne peut être exécuté que dans la limite de la valeur de rachat du contrat au jour de la notification de l'avis à tiers détenteur, d'autre part, parce que l'article L. 273 A du même livre énonce que l'ATD peut s'exercer sur les créances conditionnelles ou à terme et que, dans ce cas, les fonds sont versés au comptable public chargé du recouvrement lorsque ces créances deviennent exigibles, qu'en l'espèce, en raison du nantissement consenti à la Bnp Paribas, la créance de M. A... sur la société Cardif Assurance-Vie n'est pas exigible.

L'appelante ajoute qu'en application de l'article 2361 du code civil, le nantissement d'une créance, présente ou future, prend effet entre les parties et devient opposable aux tiers à la date de l'acte, qu'en l'espèce, le nantissement est antérieur à l'ATD et est donc opposable au fisc.

Elle soutient encore que la doctrine de l'administration fiscale, telle que publiée au bulletin officiel des finances publiques du 28 août 2017, énonce qu'en présence d'un acte de nantissement régulièrement et valablement constitué, l'ATD ne produira pas ses effets, qu'en transférant la faculté de rachat de son contrat à la Bnp Paribas, M. A... a renoncé à la possibilité d'effectuer un rachat sur son contrat et a ainsi transféré sa créance éventuelle vis-à-vis de l'assureur à l'établissement bancaire, que le comptable public ne peut donc prétendre pouvoir effectuer un rachat sur le contrat de M. A... aux lieux et place de celui-ci.

La Bnp Paribas soutient les moyens de l'appelante, ajoutant que l'assuré, M.A... a par hypothèse renoncé à la faculté de rachat, en acceptant de nantir le contrat au bénéfice de Bnp Paribas, nantissement qui est opposable aux tiers.

Le comptable public observe que l'argumentation développée par la société Cardif Assurance-Vie ne tient pas compte du privilège du Trésor public des articles 1920 et suivants du code général des impôts, qui prime le droit du créancier nanti. Il rappelle que ce privilège s'exerçant « avant tout autre », le créancier nanti ne saurait prétendre primer l'administration fiscale et priver l'ATD de tout effet attributif. En matière de contributions directes et de taxes assimilées, il souligne que le privilège accordé par l'article 1920 est un privilège de premier rang, dont les articles 2331 et 2375 du code civil déterminent le classement et que si le privilège général du Trésor peut être primé par certains privilèges généraux et sûretés spéciales, tel n'est pas le cas du nantissement.

Par ailleurs, si l'appelante s'appuie sur le BOFIP du 28 août 2017 pour tenter de faire échec à l'ATD, l'intimé relève qu'un contribuable ne saurait se prévaloir d'une interprétation postérieure aux poursuites dès lors que la doctrine administrative entre en application le jour de sa publication, outre que la doctrine fiscale ne peut être opposée à l'administration que par les contribuables qui forment un recours de plein contentieux fiscal à la suite d'un rehaussement d'imposition ou qui ont spontanément appliqué cette doctrine, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Ainsi que l'a exactement relevé le premier juge et que le soutient à bon droit le comptable public, il résulte de l'article 1920 du code général des impôts que le privilège du Trésor en matière de contributions directes et taxes assimilées s'exerce avant tout autre sur les meubles et effets mobiliers appartenant aux redevables en quelque lieu qu'ils se trouvent. En l'espèce, le Trésor poursuit le recouvrement d'impôts sur le revenu, soit des contributions directes. Si l'article 2332-1 du code civil prévoit que les privilèges spéciaux priment les privilèges généraux, ce texte réserve les dispositions contraires. Il en résulte que le privilège du Trésor pour les contributions directes, bien que général, doit, en raison de son rang qui s'exerce avant tout autre, primer le nantissement de la créance du souscripteur sur l'assureur au profit de la banque, quelle que soit la date à laquelle ce dernier a été constitué et que le Trésor, en raison de l'effet attributif de l'ATD, exerce ainsi immédiatement la faculté de rachat du contrat d'assurances aux lieu et place de la banque ou du souscripteur. Par ailleurs, l'appelante n'est pas fondée à opposer au Trésor une doctrine postérieure à l'ATD et qui n'était en outre que le reflet de la jurisprudence à la date de sa publication.

Il convient donc de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a, en application de l'article R. 211-9 du code des procédures civiles d'exécution, condamné l'assureur à payer au comptable public le montant de la créance de celui-ci dans la limite de la valeur de rachat des contrats d'assurance-vie souscrits par le redevable de l'imposition.

Sur les dommages-intérêts pour résistance abusive sollicité par le comptable public :

Si l'appelante sollicite confirmation du débouté de cette demande par le premier juge, le comptable public ne sollicite pas infirmation de ce chef devant la cour, de sorte que le jugement ne peut qu'être confirmé sur ce point.

Sur les autres demandes :

Au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, la société Cardif Assurance-Vie sera condamnée à payer au comptable public la somme de 4 000 euros. La Bnp Paribas sera déboutée de sa demande de condamnation présentée à ce titre, sa demande d'infirmation du jugement n'étant pas accueillie.

PAR CES MOTIFS

Reçoit la Sa Bnp Paribas en son intervention volontaire ;

Confirme le jugement ;

Condamne la Sa Cardif Assurance-Vie à payer au service des impôts des particuliers de [...] la somme de 4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile';

Déboute la Sa Bnp Paribas de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile';

Condamne la Sa Cardif Assurance-Vie aux dépens.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 18/05223
Date de la décision : 29/11/2018

Références :

Cour d'appel de Paris G8, arrêt n°18/05223 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2018-11-29;18.05223 ?
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