RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 9
ARRÊT DU 12 Décembre 2018
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/08871 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZD52
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 Mai 2016 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° 15/08948
APPELANTE
COMITE CENTRAL DU GROUPE PUBLIC FERROVIAIRE VENANT AUX DROITS DU COMITE CENTRAL D'ENTREPRISE DE LA SNCF
[...]
N° SIRET : 329 596 985 00013
représentée par Me Caroline X..., avocat au barreau de REIMS substitué par Me Guillaume Y..., avocat au barreau de REIMS
INTIME
Monsieur Azziz Z...
Bâtiment D appt 14
Cité Henri Barbusse
[...]
comparant en personne, assisté de Me Emmanuel A..., avocat au barreau de PARIS, toque : B0062
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Septembre 2018, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Carole CHEGARAY, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Graziella HAUDUIN, président
Madame Carole CHEGARAY, conseiller
Madame Séverine TECHER, vice-président placé
Greffier : Mme Fanny MARTIN, lors des débats
ARRET :
- contradictoire
- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.
- signé par Madame Graziella HAUDUIN, Présidente et par Madame Marine BRUNIE, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Suivant contrat à durée indéterminée du 31 mars 1989, M. Azziz Z... a été engagé en qualité de responsable atelier imprimerie par le Comité Central d'Entreprise de la SNCF aux droits duquel vient le Comité Central du Groupe Public Ferroviaire dit CCGPF.
Le 1er mars 2008, il a été promu au poste de responsable du patrimoine régional (coefficient 172) sur le village de vacances de Saint-Mandrier. Sa rémunération mensuelle brute moyenne s'élevait à 2 969,70 euros, en ce compris l'avantage en nature constitué d'un logement situé au sein du village mis à sa disposition gratuitement.
Les relations contractuelles sont régies par la convention collective d'entreprise du comité d'entreprise SNCF.
Par lettre signifiée par voie d'huissier le 9 juillet 2014, M. Azziz Z... a été convoqué à un entretien préalable fixé à Paris le 17 juillet avec mise à pied conservatoire. Celui-ci étant en arrêt maladie jusqu'au 20 juillet 2014 et hospitalisé du 15 au 18 juillet 2014, il a à nouveau été convoqué par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 août 2014 à un entretien préalable fixé à Saint Mandrier le 19 août 2014.
Le 12 septembre 2014, le CCGPF lui a notifié une rétrogradation disciplinaire au poste de bibliothécaire 1, catégorie employé 3, coefficient minium de 141, à Paris, soit une rémunération mensuelle brute de 2 235,85 euros. Un avenant à son contrat de travail à durée indéterminée a été régularisé en ce sens par les parties à effet du 6 octobre 2014.
M. Azziz Z... a saisi le conseil de prud'homme de Paris le 17 juillet 2015 en annulation de cette sanction, en paiement d'un rappel de salaires d'octobre 2014 à février 2016 et de congés payés afférents, de frais de déménagement, d'un rappel de l'avantage en nature pendant 6 mois, d'un rappel de prorata de prime de fin d'année, d'un rappel d'heures supplémentaires, de dommages-intérêts pour préjudice moral et d'un article 700 du code de procédure civile. Il a également demandé son rétablissement sous astreinte dans un poste de qualification et rémunération équivalentes à son précédent emploi.
Le CCGPF a conclu au rejet des demandes et sollicité une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement du 10 mai 2016, le conseil de prud'hommes de Paris a :
- annulé la sanction de rétrogradation prise à l'encontre de M. Azziz Z...,
- condamné le CCGPF à payer à M. Azziz Z... les sommes suivantes :
* 8 808,15 euros à titre de rappel de salaire entre octobre 2014 et février 2016
* 776,82 euros à titre de gratification de fin d'année
avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation soit le 21 juillet 2015,
* 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- ordonné en application de l'article 515 du code procédure civile que la décision soit assortie de l'exécution provisoire en toutes ses dispositions,
- ordonné au CCGPF de rétablir M. Azziz Z... dans un poste de qualification et rémunération équivalentes à son précédent emploi sous astreinte de 50 euros par jour, à compter de l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la notification du jugement, et a limité l'astreinte prononcée à trois mois,
- débouté M. Azziz Z... du surplus de ses demandes,
- débouté le CCGPF de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné le CCGPF au paiement des dépens.
Selon un avenant du 1er juin 2016, M. Azziz Z... a été réintégré dans la catégorie socioprofessionnelle qu'il occupait avant la notification de sa rétrogradation et maintenu avec son accord dans l'emploi de bibliothécaire 1 au sein du service du livre et des bibliothèques, établissement situé [...].
Par déclaration au greffe du 18 juin 2016, le CCGPF a interjeté appel du jugement du conseil du prud'hommes.
Par conclusions visées par le greffe le 20 septembre 2018 et soutenues oralement à l'audience, auxquelles il est expressément fait référence, le Comité Central du Groupe Public Ferroviaire dit CCGPF venant aux droits du CCE de la SNCF demande à la cour de:
Vu les articles 1332-2, 1222-1 du code du travail,
Vu les articles 1109, 1134, 1273 du code civil (en leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016),
Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 10 mai 2016,
Vu les pièces produites telles que visées au bordereau annexé,
Sur la sanction de rétrogradation,
- confirmer le jugement en ce qu'il a admis que la procédure entreprise était parfaitement régulière,
- infirmer le jugement en ce qu'il a annulé la sanction de rétrogradation,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné le CCGPF :
* au paiement de 8 808,15 euros au titre du rappel de salaire entre octobre 2014 et février 2016,
* au paiement de 776,82 euros à titre de rappel de gratification annuelle,
* au rétablissement de M. Azziz Z... à un poste équivalent sous 30 jours suivant jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard dans la limite de 3 mois,
Et statuant à nouveau,
- dire et juger que la sanction notifiée le 12 septembre 2014 est justifiée,
- condamner M. Azziz Z... à restituer les sommes versées ci-dessus visées,
- ordonner la restitution des rémunérations indûment versées depuis le jugement du conseil de prud'hommes du 10 mai 2016, soit la somme de 400,65 euros /mois,
- condamner M. Azziz Z... à payer au CCGPF :
* 5 208,45 euros au titre de la restitution du rappel de salaire indûment versé
* 388,41 euros au titre du prorata de gratification annuelle indûment versé,
Sur les autres demandes,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. Azziz Z... de ses demandes de :
* remboursement de frais de déménagement,
* rappel d'avantage en nature pendant 6 mois,
* rappel d'heures supplémentaires,
* dommages-intérêts pour préjudice moral,
- condamner M. Azziz Z... à payer au CCGPF la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, les entiers dépens de la présente instance, en sus de ceux de première instance et y compris les frais d'une éventuelle exécution forcée, et les intérêts de retard,
- débouter l'intimé de toutes fins et conclusions plus amples ou contraires.
Par conclusions visées par le greffe le 20 septembre 2018 et soutenues oralement à l'audience, auxquelles il est expressément fait référence, M. Azziz Z... demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
* annulé la sanction de rétrogradation prise à son encontre,
* condamné le CCGPF à lui payer les sommes suivantes :
- rappel de salaires (octobre 2014/ février 2016) : 8 808,15 euros, outre 880,81 euros au titre des congés payés afférents,
- rappel prorata gratification de fin d'année (année 2014 et 2015) : 776,82 euros,
- 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
* ordonné au CCGPF de rétablir M. Azziz Z... dans un poste à Paris de qualification et rémunération équivalentes à son précédent emploi occupé à Saint Mandrier, sous astreinte de 50 euros par jour à compter de l'expiration d'un délai de 30 jours suivant la notification du jugement et dans la limite de 3 mois,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. Azziz Z... de ses demandes au titre de :
* remboursement des frais de déménagement,
* rappel d'heures supplémentaires,
* rappel de l'avantage en nature pendant 6 mois,
* dommages et intérêts pour préjudice moral,
Statuant à nouveau,
- condamner le CCGPF à payer à M. Azziz Z... les sommes suivantes :
* remboursement des frais de déménagement : 3 750 euros,
* rappel de l'avantage en nature pendant 6 mois (article 48.3 CCN) : 1 999,20 euros,
* rappel d'heures supplémentaires (année 2014) : 636,72 euros outre 63,72 euros au titre des congés payés afférents,
* dommages et intérêts pour préjudice moral : 10 000 euros,
* rappel de salaire (mars à mai 2016) : 1 201,95 euros outre 120,19 euros au titre des congés payés afférents,
- condamner le CCGPF à payer à M. Azziz Z... la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile avec intérêts de plein droit au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir et anatocisme suivant les prescriptions de l'article 1154 du code civil,
- condamner le CCGPF aux entiers dépens.
MOTIFS
La lettre recommandée avec accusé de réception du 12 septembre 2014 après avoir détaillé les circonstances dans lesquelles se sont déroulés le 4 juillet 2014 les faits reprochés à M. Azziz Z..., à savoir un comportement particulièrement violent et agressif à l'égard du directeur assorti de menaces de mort, relate les explications de l'intéressé : " Lors de notre entretien du 19 août 2014, vous avez reconnu que vous vous étiez emporté et que vous aviez jeté les clés des locaux techniques de la piscine en direction de M. B... depuis l'escalier surplombant la piscine. En revanche, vous avez nié catégoriquement avoir proféré des menaces à l'encontre de M. B.... Vous avez également affirmé avoir été insulté et menacé de licenciement par M. B.... Enfin vous avez expliqué que M. B... avait provoqué cette situation, en cherchant délibérément à vous mettre en colère et en vous retirant une partie de vos responsabilités. Après une interruption de séance effectuée à votre demande, vous avez conclu l'entretien en indiquant que vous souhaitiez poursuivre votre activité professionnelle au sein du CCE mais que vous jugiez totalement impossible toute reprise du travail sur le site de St Mandrier".
La lettre poursuit en faisant référence au rapport établi par M. C..., responsable du service vacances familiales, à l'issue du déplacement qu'il a organisé à Saint Mandrier du 8 au 10 juillet 2014, ainsi que les témoignages concordants produits par les salariés ayant assisté aux faits, précision faite que "les différents témoignages ne font pas état ni d'insultes ou de menaces à votre encontre, ni de menaces à l'encontre de M. B...". Elle conclut : "Un tel comportement, violent et agressif, est parfaitement inadmissible. Votre attitude et vos propos, dont les salariés et les vacanciers ont été témoins, ont porté atteinte à l'intégralité morale de M. B... et ont fortement perturbé le fonctionnement du village (...) Nous avons pris note de vos explications. Toutefois, compte tenu de la gravité des faits, nous vous informons que nous avons décidé de vous notifier par la présente une rétrogradation disciplinaire, sous réserve de votre acceptation expresse dans les formes et conditions ci-après décrites (...) Nous attirons votre attention sur le fait que le niveau de sanction choisi par nos soins tient compte de votre ancienneté".
M. Azziz Z... sollicite l'annulation de cette sanction de rétrogradation aux motifs de l'inobservation du délai d'un mois prévu par l'article L.1332-2 du code du travail, de l'obtention illicite de la signature de l'avenant du 12 septembre 2014, du caractère injustifié de ladite sanction subsidiairement de son caractère disproportionné.
Sur le délai de notification de la sanction disciplinaire du 12 septembre 2014 :
Aux termes de l'article L 1332-2 du code du travail, "lorsque l'employeur envisage de prendre une sanction, il convoque le salarié en lui précisant l'objet de la convocation, sauf si la sanction envisagée est un avertissement ou une sanction de même nature n'ayant pas d'incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l'entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié (...)
Au cours de l'entretien, l'employeur indique le motif de la sanction envisagée et recueille les explications du salarié.
La sanction ne peut intervenir moins de deux jours ouvrables ni plus d'un mois après le jour fixé pour l'entretien. Elle est motivée et notifiée à l'intéressé".
Il est constant que lorsque l'employeur accède à une demande expresse du salarié de reporter l'entretien ou lorsque, informé par le salarié du fait que celui-ci est dans l'impossibilité de s'y rendre, il décide de le reporter, le délai d'un mois court alors à compter de la date fixée pour le nouvel entretien.
M. Azziz Z... fait valoir qu'une première convocation lui a été adressée pour un entretien fixé au 17 juillet 2014 puis une seconde pour un nouvel entretien prévu le 19 août 2014 ; que la sanction lui a été notifiée le 12 septembre 2014, soit plus d'un mois après le premier entretien du 17 juillet 2014, alors qu'il n'avait pas formé de demande de report, son arrêt de travail pour maladie pendant cette période l'autorisant à sortir sans restrictions d'horaires, et que son bulletin d'hospitalisation du 15 au 18 juillet 2014 a été transmis à l'employeur le 21 juillet 2014, soit après la date du premier entretien préalable ; que le report de l'entretien ayant été effectué de la seule initiative de l'employeur, il ne saurait faire courir un nouveau délai d'un mois, si bien que la notification de la rétrogradation intervenue au-delà du délai d'un mois est irrégulière.
Le CCGPF fait état dans sa lettre du 7 août 2014 tendant à la convocation du salarié à un nouvel entretien de ce que : "vous nous avez transmis le 7 juillet 2014 un certificat d'arrêt de travail pour accident de travail du 7 au 20 juillet inclus. L'arrêt précisait que les sorties étaient autorisées sans restriction d'horaires. Le 15 juillet 2014, vous nous avez informés que vous ne vous présenteriez pas à l'entretien fixé au 17 juillet 2014 étant hospitalisé à partir du 15 juillet 2014 (...). Le 21 juillet 2014, vous nous avez transmis un bulletin d'hospitalisation du 15 au 18 juillet 2014".
Il s'avère que M. Azziz Z... ne s'est pas présenté à l'entretien du 17 juillet 2014 et que le CCGPF a reçu, le 21 juillet 2014, le bulletin d'hospitalisation de celui-ci établi le 18 juillet pour la période du 15 au 18 juillet, confirmant ainsi l'information que lui avait donnée préalablement le salarié et étant observé que les bulletins de situation sont toujours établis à la sortie de l'hospitalisation. Il en résulte que l'employeur a bien été informé par le salarié du fait qu'il était dans l'impossibilité de se rendre à l'entretien du 17 juillet 2014, pour être hospitalisé à cette date, et que c'est à bon droit qu'il a décidé de reporter l'entretien, après avoir reçu une prolongation d'arrêt de travail jusqu'au 5 septembre, à la date du 19 août et au village vacances de Saint Mandrier afin d'éviter tout déplacement à l'intéressé. Il convient de relever que M. Azziz Z... s'est rendu à l'entretien du 19 août au cours duquel il était assisté d'un délégué du personnel et délégué syndical.
En conséquence, la notification de la sanction le 12 septembre 2014, moins d'un mois après l'entretien préalable du 19 août 2014, est régulière ainsi que l'ont décidé les premiers juges.
Sur la signature de l'avenant du 12 septembre 2014 :
M. Azziz Z... fait valoir qu'il était en arrêt de travail du 8 juillet au 20 juillet 2014 pour dépression ; que cet arrêt a été par la suite prolongé du 21 juillet au 5 novembre 2014 pour le même motif ; que compte tenu de la fragilité de son état de santé psychologique et de la menace de licenciement, son consentement a été altéré au moment de la signature de l'avenant litigieux.
Le CCGPF soutient au contraire que M. Azziz Z... a apposé une signature éclairée et parfaitement consentie, ayant disposé de plusieurs jours de réflexion et reconnaissant de plus fort les faits qui lui étaient reprochés.
La lettre du 12 septembre 2014 énonce expressément : "Compte tenu de la protection attachée actuellement à votre contrat de travail, il vous appartient d'accepter, ou non, la sanction disciplinaire qui vous est proposée sous la forme de la signature, ou non, de l'avenant au contrat de travail que nous joignons à la présente notification. Si vous acceptez cette sanction disciplinaire, nous vous demandons de nous retourner un exemplaire de votre avenant dûment signé dans un délai de 15 jours à compter de la présentation de cette lettre.
Nous vous devons de vous préciser que tout refus de votre part d'accepter les termes de la rétrogradation disciplinaire qui vous est proposée, autorise l'employeur à reprendre à votre encontre la procédure disciplinaire initialement engagée".
Il s'avère que M. Azziz Z... a retourné par lettre recommandée avec accusé de réception du 25 septembre 2014 l'avenant signé et précédé de la mention "lu et approuvé" -préalablement daté par l'employeur du 12 septembre 2014- dans lequel figurent précisément son nouvel emploi avec ses attributions, son lieu de travail, ses conditions d'hébergement, sa rémunération et la durée du travail.
S'il est justifié que M. Azziz Z... était à cette période en arrêt maladie pour un syndrome anxio-dépressif, il n'est pas démontré en quoi son état de santé aurait altéré son consentement, la seule invocation d'une vulnérabilité psychologique étant insuffisante à caractériser un vice du consentement. Par ailleurs, la mise à pied conservatoire notifiée le 9 juillet 2014 et l'indication selon laquelle en cas de refus de la sanction, l'employeur reprendrait la procédure disciplinaire initialement engagée en vue d'une éventuelle sanction pouvant aller jusqu'au licenciement ne peuvent être assimilées à des pressions, s'agissant de l'exercice par l'employeur de son pouvoir disciplinaire sans abus d'aucune sorte.
C'est donc en parfaite connaissance de cause que M. Azziz Z... a signé l'avenant entérinant sa rétrogradation disciplinaire qu'il a ainsi acceptée et qu'il n'est plus fondé à remettre en cause.
Le jugement entrepris qui a fait droit à la demande d'annulation de la sanction du salarié sera infirmé de ce chef. L'arrêt infirmatif comportant de plein droit obligation de restitution et constituant le titre exécutoire ouvrant droit à celle-ci, il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes de remboursement des sommes versées au titre de l'exécution provisoire. En revanche, M. Azziz Z... devra être condamné à rembourser à son employeur les rémunérations qu'il a indûment perçues à la suite de son rétablissement dans son poste à hauteur de 400,65 euros par mois, soit la somme de 5 208,45 euros telle qu'en l'état arrêtée par le CCGPF outre celle de 388,41 euros au titre du prorata de gratification annuelle, et qui correspond au vu des écritures à la période du prononcé du jugement jusqu'à la date des conclusions du 22 juin 2017,
Sur les demandes financières de M. Azziz Z... :
Compte tenu de ce qui précède, il convient de débouter M. Azziz Z... de ses demandes relatives à son rétablissement dans un poste de qualification et de rémunération équivalentes, aux rappels de salaires depuis le mois de mars 2016 et au paiement de dommages-intérêts pour préjudice moral résultant de la sanction.
M. Azziz Z... demande le remboursement de ses frais de déménagement en application de la convention collective nationale. L'employeur s'y oppose. L'article 47 de la convention collective prévoit la prise en charge des frais de déménagement sur la base du devis le moins cher et sur présentation de la facture acquittée "en cas de mutation nécessitée par les besoins du service". Tel n'est pas le cas d'une mutation ordonnée à titre disciplinaire. De plus, la rétrogradation dont le salarié a fait l'objet lui a été notifiée sous réserve de son acceptation de conditions précises parmi lesquelles les frais de déménagement étaient à sa charge. Il sera débouté de ce chef.
M. Azziz Z... sollicite également le rappel de l'avantage en nature pendant six mois en application de la convention collective. L'employeur s'y oppose. L'article 48-3 de la convention n'attribue d'indemnité compensatrice pour une durée de 6 mois maximum du fait de la perte de l'avantage en nature logement dont le salarié bénéficiait auparavant que " dans le cas d'une mutation à l'initiative de l'employeur". Tel n'est pas le cas en l'espèce, s'agissant d'une mesure disciplinaire dont le comportement de M. Azziz Z... est à l'origine. Par ailleurs, l'avenant au contrat à durée indéterminée du 12 septembre 2014 signé par M. Azziz Z... stipule expressément que "compte tenu des nouvelles fonctions de celui-ci, l'avantage en nature logement cesse à compter du 13 octobre 2014. Par conséquent, M. Azziz Z... devra se loger par ses propres moyens". Cette demande sera donc rejetée.
Enfin M. Azziz Z... demande un rappel d'heures supplémentaires effectuées sur l'année 2014 soit 59h 12 x 10,77 euros (valeur du point) qu'il n'a pu récupérer puisqu'il a été en arrêt de travail à compter du 7 juillet 2014. A l'appui de sa demande, il produit une copie d'écran de son compteur de gestion de temps faisant apparaître un solde d'heures supplémentaires pour l'année 2014 de 59 h 12. L'employeur oppose que M. Azziz Z... n'était pas autorisé à effectuer des heures supplémentaires sans l'accord préalable de son responsable hiérarchique, lesquelles en l'espèce ne lui ont pas été commandées.
Il est constant que pour refuser de payer les heures supplémentaires, l'employeur doit prouver que le salarié les a effectuées contre son avis.
En l'espèce, l'existence et le nombre des heures supplémentaires allégués par le salarié ne sont pas remis en cause par l'employeur.
Certes, le règlement intérieur du comité central d'entreprise de la SNCF du 10 janvier 2008 prévoit que "les salariés peuvent être conduits à effectuer des heures supplémentaires demandées par la hiérarchie, dans le cadre des dispositions légales et conventionnelles en vigueur. Les dépassements d'horaire effectués hors de ce cadre ne sont pas autorisées" et un mail du 22 avril 2008 de la direction -dont M. Azziz Z... a été destinataire en copie- rappelle que "les heures supplémentaires ne sont autorisées qu'avec l'accord préalable du responsable hiérarchique et à la condition qu'elles fassent l'objet d'une récupération dans les meilleurs délais".
Il résulte toutefois de la production de la copie d'écran du compteur de gestion de temps du salarié émanant du CCGPF que l'employeur avait connaissance des heures supplémentaires effectuées et qu'il ne s'y est pas opposé. Il s'avère que M. Azziz Z... n'a pu les récupérer comme il l'avait fait l'année passée en raison de son arrêt de travail ayant débuté le 7 juillet 2014. Il sera donc fait droit à la demande à hauteur de 636,72 euros (59h 12 x 10,77 euros) outre 63,67 euros au titre des congés payés afférents.
Sur les autres demandes :
M. Azziz Z... qui succombe sera condamné à supporter la charge des dépens de première instance et d'appel.
Compte tenu des conditions respectives des parties, il apparaît équitable de laisser à la charge de chacune d'elles les frais irrépétibles qu'elles ont exposés à l'occasion de l'instance.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a débouté M. Azziz Z... de ses demandes de remboursement de frais de déménagement, de rappel d'avantage en nature pendant six mois, de dommages-intérêts pour préjudice moral,
Statuant à nouveau :
Dit que la sanction notifiée le 12 septembre 2014 est fondée,
Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande du Comité Central du Groupe Public Ferroviaire en remboursement des sommes versées au titre de l'exécution provisoire,
Condamne en revanche M. Azziz Z... à rembourser au Comité Central du Groupe Public Ferroviaire les salaires indûment perçus à hauteur de 400,65 euros par mois, soit 5 208,45 euros au titre de la période du 10 mai 2016 au 22 juin 2017, et la somme de 388,41 euros au titre du prorata de la gratification annuelle indûment versé pour la même période,
Dit que ces sommes seront assorties des intérêts au taux légal à compter du 20 septembre 2018, date de la demande en restitution du Comité Central du Groupe Public Ferroviaire à M. Azziz Z...,
Déboute M. Azziz Z... de ses demandes de rappel de salaires depuis le mois de mars 2016 et de rétablissement dans un poste à la qualification et à la rémunération équivalentes à son précédent emploi,
Condamne le Comité Central du Groupe Public Ferroviaire à payer à M. Azziz Z... la somme de 636,72 euros au titre des heures supplémentaires outre celle de 63,67 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation, soit le 21 juillet 2015,
Y ajoutant :
Déboute le Comité Central du Groupe Public Ferroviaire de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. Azziz Z... aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIERLE PRESIDENT