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22/01/2019 | FRANCE | N°15/00683

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 8, 22 janvier 2019, 15/00683


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8



ARRÊT DU 22 Janvier 2019

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 15/00683 - N° Portalis 35L7-V-B67-BVQGO



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Septembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° 13/12325





APPELANTE

SA SERVICES PETROLIERS SCHLUMBERGER

[Adresse 1]

[Localité 1]r>
représentée par Me Bertrand OLLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0189







INTIME

M. [P] [S]

[Adresse 2]

[Localité 2]

comparant en personne, assisté de Me Julia FAB...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 8

ARRÊT DU 22 Janvier 2019

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 15/00683 - N° Portalis 35L7-V-B67-BVQGO

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Septembre 2014 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS section RG n° 13/12325

APPELANTE

SA SERVICES PETROLIERS SCHLUMBERGER

[Adresse 1]

[Localité 1]

représentée par Me Bertrand OLLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0189

INTIME

M. [P] [S]

[Adresse 2]

[Localité 2]

comparant en personne, assisté de Me Julia FABIANI, avocat au barreau de PARIS,

toque : P0525

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 22 Février 2018, en audience publique, devant la Cour composée de :

Catherine BEZIO, Présidente de chambre

Patricia DUFOUR, Conseiller

Nadège BOSSARD, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : Géraldine BERENGUER, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, prorogé ce jour.

- signé pour le Président empêché par Madame Patricia DUFOUR, Conseiller et par Madame Anna TCHADJA ADJE, Greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Après que Monsieur [P] [S] ait accepté la promesse d'embauche adressée par la société SERVICES PETROLIERS SCHLUMBERGER le 8 mars 2000 pour un emploi d'Ingénieur Data Management, statut cadre, position 1, grade 8, de la convention collective des Ingénieurs et Cadres de la métallurgie, moyennant une rémunération brute annuelle de 220.000 F, les parties ont signé un contrat de travail à durée indéterminée le 6 avril 2000 avec effet au 17 avril.

La société SERVICES PETROLIERS SCHLUMBERGER, ci-après la SA SPS, est une entité française du groupe SCHLUMBER spécialisée sans les services pétroliers.

A compter de l'année 2010, Monsieur [S] a émis le souhait de partir à l'étranger au sein du Groupe SCHLUMBERGER. La société SERVICES PETROLIERS SCHLUMBERGER a établi le 31 août 2010, un certificat de travail au nom du salarié et produit un solde de compte établi ultérieurement, soit le 8 octobre 2010, mais ne portant pas la signature du salarié.

A compter du 1er septembre 2010, Monsieur [S] a travaillé pour le compte du Groupe SCHLUMBERGER au Congo, les bulletins de salaire versés aux débats, émis en dollars américains, portant l'adresse de la société SCHLUMBERGER LOGELCO Inc.

Figurent au dossier un projet de contrat de travail à compter du 1er septembre 2010 émis au nom de la Société SCHLUMBERGER GLOBAL RESSOURCES, ci-après SGR, disposant d'une adresse aux Bermudes, ainsi qu'un avenant du même jour substituant à cette société, la société SCHLUMBERGER LOGELCO Inc., aucun des deux documents, écrits en langue anglaise, ne portant la signature de Monsieur [S].

Par courriel en date du 8 avril 2013, Monsieur [T] [N], son supérieur hiérarchique, faisant référence à un échange entre eux, a indiqué à Monsieur [S] la rupture de leur relation de travail avec effet au 15 avril. Par lettre datée du même jour, la société SCHLUMBERGER GLOBAL RESSOURCES informait officiellement Monsieur [S] de la fin de son contrat pour le 15 avril suivant.

Rentré en France le 15 avril 2013, Monsieur [S] a saisi le juge des déférés du conseil de prud'hommes de Paris aux fins de le voir condamner la société SPS à lui remettre les documents de fin de contrat afin de lui permettre de s'inscrire à Pôle emploi, sous astreinte de 1.000 € par jour de retard, une indemnité de non-concurrence, une provision correspondant à trois mois de salaire, le tout sous astreinte de 1.000 € par jour de retard dans le paiement à compter de la décision.

Par ordonnance en date du 8 juillet 2013, le conseil, statuant en la formation de référé, a dit que l'appréciation de la recevabilité de la demande excédait les pouvoirs de la formation de référé, décision confirmée par la cour d'appel le 13 mars 2014, la décision ayant au surplus, débouté Monsieur [S] de sa demande d'expertise en l'absence d'éléments probants sur la nature du lien existant entre l'appelant et l'intimée à compter du 1er septembre 2010.

Monsieur [S] a formé un pourvoi à l'encontre de la décision. La cour de cassation, par décision en date du 20 octobre 2015, a dit n'y avoir lieu à statuer au motif que le pourvoi était devenu sans objet à la suite de la décision, au fond rendue le 3 septembre 2014 par le conseil de prud'hommes de Paris.

Parallèlement à la procédure de référé, Monsieur [S] a saisi le conseil de prud'hommes le 6 août 2013 d'une demande tendant, en son dernier état, à le voir :

- prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail pour manquement aux obligations de rapatriement et de réintégration,

- subsidiairement, dit que la rupture du contrat produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamner la SA SERVICES PETROLIERS SCHLUMBERGER au paiement de rappel de salaire, des indemnités afférentes au licenciement sans cause réelle et sérieuse, des dommages et intérêts pour perte de retrait, pour absence de remise des documents sociaux conformes,

- ordonner la remise des documents sociaux conformes, sous astreinte de 1.000 € par jour de retard,

- condamner la défenderesse aux dépens et au paiement de la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 3 septembre 2014, le conseil de prud'hommes a :

- prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail à effet du 15 avril 2013,

- condamné la SA SERVICES PETROLIERS SCHLUMBERGER au paiement des sommes suivantes :

** 35.055 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

** 3.505 € au titre des congés payés afférents,

** 58.425 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

Avec intérêts au taux légal à compter de la réception par la défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation,

** 175.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

** 11.685 € à titre de dommages et intérêts pour absence de remise des documents sociaux conformes,

Avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision,

- condamné la SA SERVICES PETROLIERS SCHLUMBERGER aux dépens et au paiement de la somme de 700 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 14 janvier 2015, la SA SERVICES PETROLIERS SCHLUMBERGER a fait appel de la décision, procédure enregistrée sous le numéro 15/00683.

Le 11 février 2015, Monsieur [S] a fait appel de la décision, procédure enregistrée sous le numéro 15/01706.

La SA SERVICES PETROLIERS SCHLUMBERGER demande à la cour :

- d'infirmer le jugement déféré dans son intégralité,

A titre principal,

- de constater qu'elle n'a pas la qualité de maison mère,

En conséquence,

- de constater que les dispositions de l'article L. 1231-5 du code du travail ne sont pas applicables,

- de débouter Monsieur [S] de sa demande de réintégration juridiquement mal fondée,

- de le débouter de l'ensemble de ses demandes,

A titre subsidiaire,

- de limiter Monsieur [S] dans sa demande de rappel de salaires,

- de le débouter de ses demandes d'indemnité de licenciement et de paiement des stock-options,

- de limiter l'indemnité compensatrice de préavis à la somme de 24 .999 €,

- de limiter l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 50.000 €,

- de débouter Monsieur [S] de ses autres demandes,

- de le condamner aux dépens et au paiement de la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur [S] demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la résiliation judiciaire de son contrat de travail avec effet aux torts exclusifs de la SA SPS avec effet au 15 avril 2013,

- condamner la société au paiement des indemnités afférentes au licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- l'infirmer s'agissant des sommes accordées à ce titre,

Statuant à nouveau,

- fixer son salaire mensuel à la somme de 29.899 €,

A titre principal,

- constater que le contrat de travail signé le 6 mars 2000 n'est pas rompu,

- dire que la SA SPS n'a pas respecté ses obligations de rapatriement et de réintégration, telles que prévues par le convention collective applicable,

- prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de la SA SPS,

- condamner la société au paiement des sommes suivantes :

** 89.667 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

** 8.966,70 € au titre des congés payés afférents,

** 154.342 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

** 717.347 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

** 30.989,58 € à titre de rappel sur la rémunération variable due au titre de l'exercice 2013,

** 16.939 € au titre de l'intéressement dû pour l'exercice 2013,

A titre subsidiaire, pour le cas où la cour considérerait que le contrat de travail le liant à la société SPS a été rompu :

- constater qu'elle était tenue à son égard à une obligation de rapatriement et de réintégration sur le fondement de l'article L. 1231-5 du code du travail,

- condamner, en conséquence, la SA SPS au paiement des sommes suivantes :

** 89.667 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

** 8.966,70 € au titre des congés payés afférents,

** 154.342 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

** 717.347 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

** 30.989,58 € à titre de rappel sur la rémunération variable due au titre de l'exercice 2013,

** 16.939 € au titre de l'intéressement dû pour l'exercice 2013,

** 89.667 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

** 8.966,70 € au titre des congés payés afférents,

** 154.342 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

** 717.347 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

** 30.989,58 € à titre de rappel sur la rémunération variable due au titre de l'exercice 2013,

** 16.939 € au titre de l'intéressement dû pour l'exercice 2013,

En tout état de cause,

- constater que la SA SPS n'a pas dénoncé unilatéralement la clause de non-concurrence contractuellement prévue,

- dire et juger qu'il a droit à titre de contrepartie financière de cette clause, à une indemnité correspondant à 60% de son dernier salaire, soit une somme de 215.204 €,

- condamner la SA SPS à lui payer les sommes de :

** 1.425.815 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice lié à l'absence de bénéfice de la retraite internationale mise en place par le groupe SCHLUMBERGER,

** 25.433,24 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice lié à la perte de chance d'exercer ses stock-options,

** 179.836 € à titre de dommages et intérêts en l'absence de remise des documents de fin de contrat, et à tout le moins, confirmer le montant alloué par les premiers juges à hauteur de 11.685 €,

- assortir les condamnations des intérêts au taux légal et ordonner leur capitalisation sur le fondement de l'article 1154 du code civile,

- condamner la SA SPS aux dépens et au paiement de la somme de 5.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIVATION :

Aux fins d'une bonne administration de la justice, il convient d'ordonner la jonction des procédures 15/00683 et 15/01706 sous le numéro 15/00683.

Sur la rupture du contrat de travail conclu entre Monsieur [S] et la société SPS à la date du 31 août 2010 ;

Selon les dispositions de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause, « les conventions légalement formées tiennent lieu de lois à ceux qui les ont faites », texte auquel revoie implicitement l'article L. 1221-1 du code du travail qui dispose que « le contrat de travail est soumis aux règles du droit commun ».

Par ailleurs, l'article L. 1234-20 alinéa 1er dispose du code du travail dispose que « Le solde de tout compte établi par l'employeur et dont le salarié lui donne reçu, fait l'inventaire des sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail » et il résulte de l'application de ce texte qu'en l'absence de signature du salarié, le solde de tout compte ne produit aucun effet.

En l'espèce, la SA SPS soutient que le contrat de travail qui la liait à Monsieur [S] s'est achevé le 31 août 2010 lorsque celui-ci est parti pour occuper une fonction au sein d'une des sociétés du Groupe au Congo et qu'aucune demande ne peut donc être formée à son encontre au-delà de cette date.

Pour ce faire, elle expose qu'elle ne pratique pas le système de « l'expatriation » et que lorsque les membres de son personnel partent travailler à l'étranger, ils cessent tout lien avec elle et entrent dans la catégorie du personnel du Groupe Schlumberger qui travaille sous le statut d' « International Mobile » en devenant salarié de l'entité Schlumberger qui emploie cette catégorie de salariés, la société Schlumberger Global Ressources ' SGR ' lesdits salariés bénéficiant d'un statut leur permettant d'effectuer une carrière internationale sans changement d'employeurs et avec une continuité des avantages sociaux.

Monsieur [S] conteste toute rupture du contrat de travail et soutient que celui-ci était était suspendu.

Il s'avère, toutefois, sans que d'ailleurs Monsieur [S] ne remette en cause son effectivité, que le contrat de travail qu'il a signé avec la SA SPS après en avoir paraphé toutes les pages, comporte une clause intitulé « Mobilité 'Transfert » selon laquelle :

« Notre société fait partie d'un Groupe de dimension mondiale dont l'objectif est d'assurer un meilleur service à la clientèle. En conséquence, vous pourrez faire l'objet d'une mutation, d'un détachement ou d'un transfert.

Pour les besoins du présent contrat :

- La mutation s'entend de l'affectation du salarié en tout lieu nécessaire à l'accomplissement de son travail,

- Le détachement s'entend de la mise à disposition temporaire du salarié au sein d'une entité du Groupe Schlumberger, ce détachement faisant l'objet d'un avenant contractuel organisant le détachement et le retour au sein de l'entreprise. Cependant le détachement peut se terminer par un transfert, tel que celui définit ci-dessous.

- Le transfert s'entend d'un changement d'employeur accompagné ou non d'un changement de métier. En cas de transfert à l'intérieur du Groupe Schlumberger, le présent contrat sera rompu et aucune indemnité ne sera versée lors de la rupture amiable pour le temps passé dans les autres sociétés du Groupe Schlumberger ainsi que pour le temps passé dans la société Services Pétroliers Schlumberger.

Lorsque le présent contrat cessera par transfert auprès d'une autre société du Groupe la clause de non-concurrence, ci-dessous stipulée, sera neutralisée ».

En l'espèce, il apparaît que la SA SPS ne peut justifier de la signature de Monsieur [S] sur le solde de tout compte qu'elle affirme lui avoir transmis. Dès lors, le solde de tout compte n'a produit aucun effet et, en tout état de cause, ne peut justifier de la rupture amiable du contrat de travail à compter du 31 août 2010.

Au surplus, il apparaît que selon les termes de l'article L 1231-1 du code du travail « Le contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié « ou d'un commun accord », dans les conditions définies par les dispositions du présent titre », et notamment de celles fixées par les dispositions de l'article 1237-11 qui fixe les modalités selon lesquelles l'employeur et le salarié peuvent convenir en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie, cette rupture ne pouvant, toutefois, résulter que de la signature d'une convention signée par les parties.

Nonobstant l'absence de signature du solde de tout compte par Monsieur [S], il convient de constater que faute de justifier de la signature d'une convention de rupture signée par les parties avec effet au 31 août 2010, la SAS SPS ne peut se prévaloir de la rupture amiable du contrat de travail la liant à l'appelant avec effet au 31 août 2010.

Sur la poursuite du lien de subordination entre Monsieur [S] et la SA SPS à compter du 1er septembre 2010 :

Monsieur [S] soutient que la SA SPS affirme, sans le démontrer, qu'il a fait l'objet d'un transfert et non d'un détachement à l'intérieur du groupe. Toutefois, il n'apporte aucun élément matériel probant justifiant du respect des modalités du détachement, telles que fixées par la clause « Mobilité - Transfert » de son contrat de travail, et en particulier de la signature d'un avenant le mettant à la disposition temporaire d'une entité du Groupe Schlumberger et organisant son retour au sein de la SA SPS.

Dès lors, et au vu des pièces communiquées par les parties, il convient de considérer que son départ dans un société du Groupe sise au Congo correspond à un transfert.

En l'espèce, il n'est pas contesté que Monsieur [S] a, à compter du mois de septembre 2010, pris ses fonctions au sein de la société SCHLUMBERGER LOGELCO Inc. sise au Congo, et qu'il a travaillé pour cette société sans que soit établi de contrat de travail, l'appelant déclarant avoir refusé de signer le contrat de travail tel que proposé par la société SCHLUMBERGER GLOBAL RESSOURCES, ci-après société SGR, sise aux Bermudes, qui, ainsi que le justifie l'intimée, est la structure internationale qui gère les salariés du groupe en fonction à l'étranger et qui ont le statut de « International Mobile ». D'ailleurs, il est justifié que le 10 mai 2010, en vue de son départ à l'étranger, Monsieur [S] a signé un document intitulé « SSLB INTERNATIONL Enrollment Form », document destiné aux « International MOBILE Employees ».

Il s'avère, néanmoins, que Monsieur [S] soutient que, contrairement à ce qu'affirme la SA SPS, il a continué à être sous un lien de subordination avec cette dernière et que le contrat de travail s'est poursuivi durant son activité au Congo.

Pour ce faire, il expose qu'en tant que Marketing Manager CWA/Directeur Marketing Afrique Centre Ouest, il appartenait:

- à l'équipe de [A] [F], EAF Marketing Manager/ Directrice Marketing Europe Afrique, salariée de la société STS, filiale à 100% de la société SPS,

- et à celle de Monsieur [T] [N], GeoMarket Manager CWA/ Directeur Général Afrique Centre Ouest, Directeur Général de la société SCHLUMBERGER LOGELCO,

et que Monsieur [T] [N] et Madame [F] reportaient directement à Monsieur [T], Président de la zone Europe Afrique et salarié de la société STS, ce qui, selon lui, établit qu'il avaient deux supérieurs hiérarchiques.

Il considère que le lien le rattachant à Madame [F] n'était pas seulement fonctionnel dès lors qu'en sa qualité de Directrice Marketing Europe Afrique, elle dirigeait son équipe composée des différents directeurs Marketing des différentes zones dont elle avait la responsabilité mais qu'elle fixait, par zone géographique, les objectifs annuels, en contrôlait la réalisation ainsi que l'activité de ses collaborateurs directs, dont lui-même, par le biais de reporting mensuels et trimestriels et qu'elle procédait à leur évaluation de sorte qu'elle exerçait un véritable pouvoir de direction.

Au surplus, l'appelant déclare que Monsieur [T] [N] avait un rôle plus restreint car son rôle n'était pas de fixer les objectifs marketing de la zone Europe Afrique, mais seulement de définir une stratégie locale tous « corps de métier » confondus.

La SA SPS conteste que tout lien de subordination entre Madame [F] et l'appelant et expose que les objectifs de ce denier étaient définis et contrôlés dans leur réalisation par Monsieur [T] [N], que ce dernier était seul chargée de l'appréciation de ses performances et que les primes, augmentations de salaires et promotions étaient formalisées par ce directeur qui le rémunérait sur son budget.

Elle considère, dès lors que, compte-tenu des relations fonctionnelles entre Monsieur [N] et Monsieur [S], celui-ci ne peut se prévaloir d'un lien contractuel entre la société STS, et a fortiori avec la SA SPS.

Il résulte de l'application de l'article L. 1221-1 du code du travail, que le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

En l'espèce, Monsieur [S] justifie de ses échanges par mail, durant son activité professionnelle au Congo, concernent ses relations avec [L] [I], conseiller des prestations différées au sein de l' International Support Center de la société SGR ainsi que des courriels que lui adressait Madame [F].

S'il s'avère que l'appelant communique peu de courriels échangés avec Monsieur [T] [N], l'intimée justifie de nombreux échanges par courriels que celui-ci a eus avec Monsieur [S], qui établissent qu'il lui donnait des consignes, lui demandait de rendre compte de ses activités et que c'était lui, en sa qualité de Manager du Géomarché de l'Afrique Centrale et de l'Ouest, qui établissait l'évaluation de performance et le plan de développement.

Au surplus, les documents concernant le montant des rémunérations annuelles de l'appelant à compter de son départ au Congo mentionnent bien que son « manager » est Monsieur [T] [N], que les augmentations dont a bénéficié l'appelant résultaient de ses résultats tels qu' appréciés par ce dernier et des recommandations qu'il pouvait faire. Au surplus, il apparaît que c'est Monsieur [T] [N] qui, dans un courriel du 8 avril 2013 adressé à l'issue d'un entretien avec le salarié, lui a confirmé la fin de la relation de travail au 15 avril suivant, même si formellement la lettre d'information sur la date de rupture des relations a été adressée par la société SGR le 8 avril 2013.

S'agissant des relations avec Madame [F], et contrairement à ce que soutient Monsieur [S], il résulte des courriels transmis, d'une part que les échanges proviennent uniquement de courriels adressés par celle-ci et qu'elle agissait ainsi au titre de ses fonctions de « marketing manager » pour l'Afrique centrale et occidentale et que la teneur de ses courriels traduit uniquement l'exercice d'une responsabilité purement fonctionnelle à l'égard de ses interlocuteurs, action totalement étrangère à l'exercice de tout pouvoir hiérarchique.

Dès lors, il convient de considérer que Monsieur [S] n'était que sous la direction effective de Monsieur [T] [N], qui était salarié d'une filiale du Groupe Schlumberger sans lien avec la SA SPS, autre filiale du Groupe SCHLUMBERGER.

En l'absence de preuve de tout lien de subordination entre Monsieur [S] et la SA SPS ou une de ses filiales à compter du 1er septembre 2010, il convient de considérer que son contrat de travail ne s'est pas poursuivi avec la SA SPS au-delà du 31 août 2010.

Dès lors, l'appelant doit être débouté de l'ensemble de ses demandes à l'égard de la SA SPS relatives à une rupture du contrat de travail à la date du 15 avril 2013, cette dernière étant totalement étrangère aux modalités de rupture de la relation de travail par Monsieur [T] [N], salarié de la société SCHLUMBERGER INGELCO Inc et la société SGR.

Sur le manquement de la SA SPS de son obligation de rapatriement et de réintégration:

Monsieur [S] soutient que la SA SPS a manqué à ses obligations telles qu'elles résultent des dispositions de l'article 1231-5 selon lesquelles:

« Lorsqu'un salarié engagé par une société mère a été mis à la disposition d'une filiale et qu'un contrat de travail a été conclu avec cette dernière, la société mère assure son rapatriement en cas de licenciement par la filiale et lui procure un nouvel emploi compatible avec l'importance de ses précédentes fonctions en son sein ».

Au surplus, il résulte de l'application de ce texte que lorsqu'un salarié a été engagé par une société ayant pour mission de gérer le personnel des différentes sociétés d'un groupe, l'article L. 1231-5 est inapplicable à cette société lorsqu'elle ne forme pas avec les sociétés employant le salarié une société unique d'un point de vue économique.

En l'espèce, et ainsi que le soutient à juste titre la SA SPS, il s'avère que Monsieur [S] n'apporte aucun élément matériel probant établissant que la SAS SPS est la société mère et que la société SGR, structure gérant les salariés en mobilité internationale est une filiale de cette dernière. De même, il ne justifie pas que la société SCHLUMBERGER LOGELCO, au sein de laquelle il a travaillé jusqu'au 15 avril 2013 sous le pouvoir hiérarchique de Monsieur [T] [N], est une filiale de la SA SPS.

Il en résulte que la SA SPS n'était tenue à aucune obligation de rapatriement et de réintégration à l'égard de Monsieur [S] à l'issue de sa rupture de sa relation de travail avec la société SCHLUMBERGER LOGELCO.

En conséquence, il est débouté de sa demande de résiliation judiciaire avec effet au 15 avril 2013 pour manquement à l'obligation de rapatriement et de réintégration, formée à l'encontre de la SA SPS. Le jugement déféré est infirmé en ce qu'il a:

- prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur [S] avec effet au 15 avril 2015,

- a fixé son salaire brut mensuel moyen à la somme de 11.685 €,

- condamné la SA SPS à lui payer les sommes suivantes:

** 35.055 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

** 3.505,50 € au titre des congés payés afférents,

**175.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail signé entre la SA SPS et Monsieur [S]:

Selon les dispositions de l'article L.1231-1 du Code du travail 'Le contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié ou 'd'un commun accord', dans les conditions prévues par les dispositions du présent titre.

Ces dispositions ne sont pas applicables pendant la période d'essai'.

L'employeur disposant de la possibilité de licencier le salarié, seul ce dernier dispose de la capacité de solliciter la résiliation judiciaire du contrat de travail et il relève du pouvoir souverain du juge d'apprécier si l'inexécution, par l'employeur, de certaines de ses obligations résultant d'un contrat synallagmatique, présente une gravité suffisante pour en justifier la résiliation.

Il s'avère que la charge de la preuve de l'imputabilité de la rupture incombe au demandeur, que les juges peuvent se fonder sur de simples présomptions et que, s'il est fait droit à la demande du salarié et que la résiliation judiciaire du contrat de travail est prononcée, celle-ci produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou d'un licenciement nul si la résiliation a pour origine des faits de harcèlement moral.

En l'espèce, il résulte des éléments de la procédure et ainsi qu'il a été exposé ci-dessus, que la relation de travail entre la SA SPS et Monsieur [S] s'est achevée le 31 août 2010, qu'aucune convention de rupture amiable n'a été signée entre les parties, que Monsieur [S] ne s'est plus tenu à la disposition de la société à compter du 1er septembre 2010 puisqu'il a pris ses fonctions dans une filiale du Groupe Schlumberger au Congo après avoir été rattaché pour sa gestion à la société SGR, chargée de gérer les salariés en mobilité à l'étranger.

Au vu des éléments produits, il convient de considérer que la SA SPS a manqué à ses obligations en laissant perdurer le contrat de travail de Monsieur [S] alors que la relation de travail était achevée.

Dès lors, il convient de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail liant Monsieur [S] et la SA SPS avec effet au 31 août 2010 aux torts exclusifs de cette dernière et de dire qu'elle produira les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Au moment de son licenciement, Monsieur [S] avait une ancienneté de 10 années et 4 mois et son salaire brut mensuel moyen était de 8.333 €.

Sur le fondement de l'article L. 1234-5 du code du travail, la SA SPS est condamnée à lui payer la somme de 24.999 € à titre d'indemnité compensatrice ce préavis, outre celle de 2.499,90 € au titre des congés payés afférents.

Si la SA SPS affirme qu'en application du statut « International Mobile » Monsieur [S] devrait percevoir de la société SGR une indemnité de rupture correspondant à la somme de 81.880,45 US dollars, intégrant son indemnité de licenciement au vu de l'intégralité de sa carrière au sein de Groupe, soit à compter du 17 avril 2000, elle ne justifie pas du paiement effectif de la somme.

Dès lors, en l'absence d'éléments probants et de décompte précis sur l'indemnité conventionnelle de licenciement due pour la période du 17 avril 2000 au 31 août 2010, le jugement déféré est confirmé en ce qu'il a condamné la SA SPS au paiement de la somme de 58.425 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement.

Au vu des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, Monsieur [S] bénéficie d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Au vu des pièces produites aux débats qui établissent que son départ en mobilité à l'étranger a permis à Monsieur [S] d'augmenter sa rémunération de façon substantielle de puisqu'il revendique lui-même un salaire mensuel moyen de 29.899 € , la cour fixe son préjudice pour son licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 50.000 € et condamne la SA SPS au paiement de cette somme à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La qualité d'employeur de la SA SPS à son égard s'étant achevée le 31 août 2010, Monsieur [S] est débouté de ses demandes au titre de l'intéressement dû au salarié pour l'année 2013 et des dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de l'absence de bénéfice de la retraite internationale mise en place par le Groupe SCHLUMBERGER,

S'agissant des dommages et intérêts réclamés en réparation du préjudice lié à la perte d'exercice des stock-options, et ainsi que le soutient à juste titre la SA SPS, faute de justifier de l'effectivité du préjudice dont il se prévaut, Monsieur [S] est débouté de sa demande formée à hauteur de 25.433,24 €.

Pour ce qui est de la demande formée pour un montant de 215.204 € pour préjudice liée à l'absence de dénonciation unilatérale par la SA SPS de la clause de non-concurrence, il s'avère que, compte-tenu de la résiliation judiciaire du contrat de travail avec effet à compter du 31 août 2010, Monsieur [S] ne peut justifier d'aucun préjudice à titre. Il est donc déboutée de sa demande.

De même, compte-tenu de sa prise de fonction dans une filiale du Groupe Schlumberger sise au Congo dès les premiers jours de septembre 2010, faute pour Monsieur [S] de pouvoir justifier d'un préjudice résultant de l'absence de remise des documents de fin de contrat, il est débouté de ce chef de demande de dommages et intérêts.

Les créances de nature salariales de Monsieur [S] porteront intérêts au taux légal à compter du 9 août 2013, date de réception par la SA SPS de sa convocation devant le bureau de conciliation et à compter de la présente décision pour les créances de nature indemnitaire.

Sur le fondement de l'article 1243-2 du code civil, les intérêts au taux légal seront capitalisés dès qu'ils seront dus pour une année entière.

La SA SPS doit remettre à Monsieur [S] les documents sociaux conformes à la présente décision.

Au vu des éléments de la présente procédure, chaque partie supportera la charge de ses propres dépens.

Monsieur [S] et la SA SPS sont déboutés de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, LA COUR,

- ordonne la jonction des procédures 15/00683 et 15/01706 sous le numéro 15/00683.

- infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a condamné la SA SERVICES PETROLIERS SCHLUMBERGER au paiement de la somme de 58.425 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement.

Statuant à nouveau sur ces dispositions et y ajoutant,

- prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur [P] [S] aux torts exclusifs de la SA SERVICES PETROLIERS SCHLUMBERGER avec effet au 31 août 2010,

- dit que la résiliation judiciaire produit els effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- condamne la SA SERVICES PETROLIERS SCHLUMBERGER à payer à Monsieur [S] les sommes suivantes:

** 24.999 € à titre d'indemnité compensatrice ce préavis,

** 2.499,90 € au titre des congés payés afférents,

** 50.000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- dit que les créances de nature salariales de Monsieur [S] porteront intérêts au taux légal à compter du 9 août 2013, date de réception par la SA SPS de sa convocation devant le bureau de conciliation, et à compter de la présente décision pour les créances de nature indemnitaire et que les intérêts seront capitalisés dès qu'ils seront dus pour une année entière,

- déboute Monsieur [S] de ses autres demandes,

- ordonne à la SA SERVICES PETROLIERS SCHLUMBERGER de remettre à Monsieur [S] les documents sociaux conformes à la présente décision,

- dit que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens,

- déboute Monsieur [S] et la SA SERVICES PETROLIERS SCHLUMBERGER de leur demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE CONSEILLER

P/ LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 8
Numéro d'arrêt : 15/00683
Date de la décision : 22/01/2019

Références :

Cour d'appel de Paris K8, arrêt n°15/00683 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-01-22;15.00683 ?
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