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07/05/2019 | FRANCE | N°17/07340

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 07 mai 2019, 17/07340


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 07 Mai 2019

(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/07340 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3L6L



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Mai 2017 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° F 15/11208





APPELANTE



SAS EURODIF

[Adresse 1]

[Adresse 1]



représentée par Me Eve DR

EYFUS, avocat au barreau de PARIS, toque : E1814 substitué par Me Eva CHEKROUN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1814





INTIME



Monsieur [U] [D]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

né le [Date ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 07 Mai 2019

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/07340 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3L6L

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 Mai 2017 par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS RG n° F 15/11208

APPELANTE

SAS EURODIF

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Eve DREYFUS, avocat au barreau de PARIS, toque : E1814 substitué par Me Eva CHEKROUN, avocat au barreau de PARIS, toque : E1814

INTIME

Monsieur [U] [D]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

né le [Date naissance 1] 1955 à [Localité 1]

représenté par Me Maï LE PRAT, avocat au barreau de PARIS, toque : J018 substitué par Me Wilfried LEVEQUE, avocat au barreau de PARIS, toque : J018

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 Mars 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Marie-Antoinette COLAS, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Antoinette COLAS, Président de Chambre

Madame Françoise AYMES-BELLADINA, Conseiller

Madame Florence OLLIVIER, Vice Président placé faisant fonction de Conseiller par ordonnance du Premier Président en date du 17 décembre 2018

Greffier : M. Julian LAUNAY, lors des débats

ARRET :

- Contradictoire

- par mis à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Antoinnette COLAS, Président de Chambre et par Monsieur Julian LAUNAY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [D] a été engagé par la SAS Eurodif en qualité de responsable de magasin, suivant un contrat de travail à durée indéterminée à compter du 12 avril 1986.

En dernier lieu, il a occupé le poste de directeur du magasin Eurodif situé à [Localité 2].

Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective nationale des maisons à succursales de ventes au détail d'habillement du 30 juin 1972.

Après avoir été convoqué pour le 29 mai 2015 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, la société Eurodif a notifié à Monsieur [D] son licenciement pour faute par lettre recommandée du 4 juin 2015.

Estimant ne pas avoir été rempli de ses droits salariaux et contestant le bien fondé de son licenciement, Monsieur [D] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris dès le 25 septembre 2015.

Par jugement du 3 mai 2017, le conseil de prud'hommes de Paris a condamné la société Eurodif à verser à Monsieur [D] les sommes suivantes :

-4325,20 € au titre de la rémunération variable outre les congés payés afférents,

-13 790,63 euros au titre d'un rappel de majoration de salaire sur les heures supplémentaires effectuées non payées pour la période de janvier à mai 2015 outre les congés payés afférents,

-33.037,90 euros au titre d'un rappel de majoration de salaire sur les heures supplémentaires effectuées non payées sur l'exercice 2014, les congés payés afférents,

- 29751 ,89 euros au titre des majorations de salaire sur les heures supplémentaires effectuées et non payées sur l'exercice 2013 outre les congés payés afférents,

- 31 353,56 euros au titre d'un rappel de majoration de salaire sur des heures supplémentaires effectuées non payées sur la période de juin à décembre 2012 outre les congés payés afférents,

- 6387 euros pour l'indemnisation des contreparties obligatoires en repos pour la période correspondante en 2015,

- 21286,41euros pour l'indemnisation des contreparties obligatoires en repos pour la période correspondante en 2014,

- 19317,38 euros pour l'indemnisation des contreparties obligatoires en repos pour la période correspondante en 2013,

- 12 028,14 euros pour l'indemnisation des contreparties obligatoires en repos pour la période correspondante en 2012,

- 10 090,38 euros au titre du complément de préavis outre les congés payés afférents,

- 41 242,24 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 500 € à titre de dommages-intérêts pour perte de chance,

- 183 701 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle sérieuse,

- 1000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Le conseil de prud'hommes a aussi ordonné le remboursement au Pôle Emploi des indemnités de chômage versées dans la limite de 3 mois et débouté les parties du surplus de leurs réclamations.

La société Eurodif a interjeté appel de la décision par une déclaration transmise au greffe de la cour par le réseau privé virtuel des avocats le 19 mai 2017.

Par des écritures remises par le réseau privé virtuel des avocats auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens invoqués, la société Eurodif sollicite l'infirmation du jugement, le débouté du salarié de l'intégralité de ses prétentions et la condamnation de ce dernier au paiement d'une indemnité de 2000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par des écritures remises par le réseau privé virtuel des avocats auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens invoqués, Monsieur [D] conclut à la confirmation des condamnations prononcées au titre de la rémunération variable, au titre de la convention de forfait tant pour les majorations de salaire relatives aux heures supplémentaires effectuées depuis 2012 que pour les contreparties obligatoires en repos, au titre du complément d'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents, au titre de l'aide du complément de l'indemnité conventionnelle de licenciement, au titre des frais irrépétibles de première instance mais à son infirmation pour le surplus.

Ses demandes devant la cour sont formulées aux termes des conclusions auxquelles il est expressément renvoyé.

L'ordonnance de clôture a été fixée au 11 décembre 2018.

MOTIFS

Sur les demandes au titre de l'exécution du contrat de travail ;

Sur les demandes de rappels de salaire au titre de la rémunération variable ;

Aux termes de l'avenant au contrat de travail du 1er mars 2000, la clause relative à la rémunération est rédigée dans les termes suivants :

« En contrepartie de son travail, Monsieur [D] percevra une rémunération mensuelle forfaitaire comprenant une partie fixe et partie variable :

- la partie fixe est égale à 24 050 francs y est incluse forfaitairement la prime d'ancienneté,

- la partie variable est fixée par magasin [....] pour le magasin de [Localité 2] il est de 0,4 %[...] pourra s'y ajouter une prime de fonction sur décision de la direction. Cette prime a un caractère provisoire et ne peut en aucun cas constituer un avantage acquis » .

Rappelant que l'employeur est tenu à une obligation de transparence le contraignant à communiquer au salarié les éléments servant de base de calcul à sa rémunération variable notamment, Monsieur [D] fait valoir qu'il n'a, malgré ses demandes, jamais été destinataire, au cours de la collaboration, des documents d'information lui permettant de vérifier les éléments ayant servi de base de calcul à sa rémunération variable constituée de primes aux intitulés divers.

Outre qu'il considère que les éléments produits au cours du débat judiciaire sont insuffisants et non étayés par des éléments comptables fiables, ce qui lui fait perdre une chance de pouvoir solliciter un rappel de rémunération conforme à la réalité, il sollicite, au vu des éléments transmis par la société, au regard des chiffres d'affaires réalisés sur le magasin [Localité 2], pour les années 2012, 2013, 2014 et 2015, divers rappels de salaires.

La société Eurodif conteste que le salarié ait jamais formulé une quelconque demande d'explication sur le montant des sommes qui lui étaient versées au titre de la rémunération variable.

Elle soutient que les objectifs de l'année à venir et les critères d'évaluation étaient systématiquement discutés au cours de l'entretien annuel d'évaluation tenu chaque année, que les parts variables ont été versées sur la base des documents contractuels et internes dont le salarié avait connaissance, a fortiori du fait qu'il était directeur du magasin, directement détenteur en cette qualité de toutes les informations à caractère financier puisqu'il les transmettait chaque semaine au siège.

Pour l'année 2012, Monsieur [D] relève que le tableau produit par la société fait état d'une rémunération variable de 8 % alors la part variable réellement perçue a été limitée à 7,50 % Il réclame 292,51 euros à ce titre.

Après avoir repris en détail les éléments de calcul relatifs aux objectifs à atteindre pour chacune des rubriques, la société considère que le salarié pouvait prétendre à une part variable correspondant à 7,5 % de sa rémunération, qu'il a été rempli de ses droits.

Pour l'année 2013, le salarié soutient que la société a encore commis la même erreur et réclame 146, 19 euros.

La société confirme que le salarié a été rempli de ses droits qu'il pouvait prétendre à une part variable de 1606 euros.

Pour l'année 2014, Monsieur [D] soutient que le chiffre d'affaires retenu est erroné, qu'il avait dépassé ses objectifs et réclame 3886,50 euros.

La société soutient qu'il a perçu une somme légèrement supérieure à celle à laquelle il pouvait prétendre puisqu'il devait recevoir une part variable d'un montant de 1606,18 euros correspondant à 2,75 % de sa rémunération de base.

Compte tenu des éléments communiqués de part et d'autre, des explications fournies, la cour relève que les premiers juges ont pertinemment analysé les pièces et tableaux produits et arrêté les rappels de salaire au titre des parts variables à la somme de 4325,20 euros outre les congés payés afférents .

La cour confirmera le jugement ayant alloué à Monsieur [D] une somme de 500 euros en réparation du préjudice résultant de le perte de chance de pouvoir vérifier la fiabilité des éléments communiqués à partir de documents comptables certifiés par un commissaire aux comptes.

Sur la convention de forfait ;

Toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires.

Outre qu'il considère que le dispositif prévu par l'avenant n° 42 du 5 juillet 2001 de la convention collective des maisons à succursales de ventes au détail d'habillement n'est pas suffisant pour garantir le droit au repos et à la préservation du droit à la santé, qu'il est donc fondé à solliciter la nullité de la convention de forfait signée, Monsieur [D] soutient que ladite convention individuelle de forfait lui est à tout le moins inopposable en ce qu'elle se limite à renvoyer à l'accord collectif sans préciser la rémunération forfaitaire correspondante ni les moyens de décompte et de contrôle mis en 'uvre par l'employeur.

La société Eurodif estime que la convention collective prévoit un dispositif complet relativement à la mise en place et au fonctionnement d'un forfait en jours dans les entreprises relevant de la branche, que le contrat de travail fait référence de manière précise à ces dispositions et plus spécialement à celles ayant trait aux garanties prévues.

Elle fait valoir que l'accord vise la catégorie de cadres autorisés à bénéficier du dispositif, le nombre maximal de jours pouvant être travaillés, les modalités de fixation de la rémunération, la tenue d'un décompte des jours de travail et de repos, le suivi de l'organisation du temps et de son impact sur le salarié, et le bénéfice des durées de repos hebdomadaires et quotidiens.

La société fait au surplus remarquer que les salariés étaient individuellement informés des modalités de fonctionnement du forfait en jours par une note interne qui leur était transmise tous les ans, qu'au surplus, les directeurs de magasins, dont Monsieur [D], réalisaient eux-mêmes régulièrement les plannings de leurs équipes.

Les dispositions de l'article 5 de l'avenant n° 42 de la convention collective des maisons à succursales de vente au détail d'habillement, qui, dans le cas de forfait en jours, se limitent à prévoir, que le décompte des journées travaillées ou des jours de repos pris est établi hebdomadairement par l'intéressé, que celui-ci transmet cette information à son responsable hiérarchique au titre de toutes les semaines pleines écoulées lors d'un mois considéré, au plus tard au début de chaque mois suivant, qu'à cette occasion, peut s'opérer le suivi de l'organisation du travail, le contrôle de l'application de l'accord et de l'impact de la charge de travail sur l'activité de la journée, sans prévoir expressément un entretien annuel pour évoquer l'organisation et la charge du travail du salarié, et qui se bornent à affirmer que « le cadre veillera lui-même concrètement au respect des dispositions légales et réglementaires en vigueur relative à la durée du repos hebdomadaire, du nombre maximum de jours de travail dans la semaine et de la durée minimale de repos quotidien », ne sont pas de nature à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié soumis au régime du forfait en jours.

Lorsque la convention de forfait contenue dans un contrat de travail ne remplit pas les conditions de validité imposées, elle doit être déclarée nulle

Il s'ensuit que la présente convention de forfait est nulle ainsi que l'a jugé à juste titre le conseil de prud'hommes aux termes du jugement entrepris qui sera confirmé sur ce point.

Sur la demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires ;

En présence d'une convention de forfait non valide, le salarié est en droit de revendiquer l'application des règles de droit commun de décompte et de rémunération du temps de travail.

Monsieur [D] soutient avoir accompli de nombreuses heures supplémentaires à l'occasion de l'exercice de ses fonctions.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Il incombe au salarié qui demande le paiement d'heures supplémentaires de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande.

Pour étayer sa demande de rappel de salaire pour les heures supplémentaires effectuées, Monsieur [D] expose qu'une journée de travail commençait à 8 heures pour se terminer à 19h30, que, déduction faite d'une pause déjeuner journalière d'une heure, il a effectué 10h30 de travail journalier, et ce, à raison de 5 jours hebdomadaires en sorte que le nombre d'heures supplémentaires accomplies s'élève à 17h30 par semaine.

Il communique aux débats un décompte prenant en compte les jours fériés non travaillés, ses jours de repos, ses périodes de congés.

Il produit également plusieurs témoignages :

Madame [S], employée de nettoyage, Madame [J] [X], employée de nettoyage Monsieur [Y] [W], chef de groupe, écrivent aux termes de leurs témoignages: «[...] Monsieur [D], prenait ses fonctions au plus tard à 8 heures ».

Monsieur [K] [O] témoigne que « Monsieur [D] est présent au magasin du lundi au samedi sauf le vendredi de 8 h à 19h30 ».

Les témoignages de Madame [B] et de Monsieur [Q] ne présentent aucune force probante dans ce débat, ces deux personnes se limitant à indiquer que Monsieur [D] était toujours présent à son poste à leur arrivée le matin.

Le salarié communique aussi quelques courriels écrits à 8h24, 8h48, 9h04,9h19.

Par le décompte, les explications fournies sur l'organisation de son activité, les courriels rédigés et envoyés avant l'ouverture du magasin et les témoignages communiqués, Monsieur [D] étaie suffisamment sa demande de rappel de salaire pour des heures supplémentaires afin de permettre à l'employeur de répondre.

Après avoir fait observer que Monsieur [D] n'a jamais sollicité de rappel de salaire pour des heures supplémentaires, la société Eurodif rappelle qu'il était investi d'une autonomie complète dans la gestion de son temps, relève qu'une arrivée antérieure à l'ouverture du magasin n'est nullement justifiée par l'activité professionnelle et encore moins sollicitée par elle. Elle précise en outre que les ouvertures et fermetures de magasins sont effectuées par roulement, par le chef de groupe, la directrice et les vendeurs, que les horaires d'ouverture et de fermeture du magasin étaient de 10 heures à 19 heures. Elle fait au surplus observer qu'elle n'a trouvé aucune communication de son collaborateur en dehors des horaires d'ouverture du magasin.

Au regard des éléments communiqués de part et d'autre, des explications fournies tant par le salarié que par l'employeur, la cour a la conviction, au sens des dispositions légales, que Monsieur [D] a effectué des heures supplémentaires, nécessaires à l'accomplissement de ses missions, avec l'accord au moins implicite de l'employeur dès lors qu'une convention de forfait en jours avait été initialement prévue, et ce, en tenant compte des jours fériés, des congés pris, dans les limites suivantes:

- 240 heures au cours de la période courant du mois de juin au mois de décembre 2012,

- 420 heures supplémentaires en 2013,

- 420 heures supplémentaires en 2014,

- 200 heures au cours de la période courant du mois de janvier au mois de mai 2015.

La cour arrête donc à la somme de 51 367,74 euros le montant du rappel de salaire à revenir Monsieur [D] pour les heures supplémentaires accomplies et ce, en tenant compte des majorations de 25 % et de 50 %. Les congés payés afférents seront également accordés.

Le jugement déféré sera réformé sur le quantum.

Sur la demande au titre des contreparties en repos ,

L'avenant n° 42 du 5 juillet 2001 relatif à l'aménagement et la réduction du temps de travail a arrêté le contingent annuel d'heures supplémentaires à 130 heures.

Le salarié qui n'a pas été en mesure, du fait de son employeur de formuler une demande de contrepartie en repos, a droit à l'indemnisation du préjudice subi, laquelle comporte à la fois le montant de l'indemnité de repos obligatoire et le montant de l'indemnité de congés payés afférents.

Les indemnités pour la contrepartie en repos et le montant des congés payés afférents seront arrêtées de la manière suivante ;

année

Mode de calcul

Montant de l'indemnité

Congés payés

Année 2012

[240 ' 130 = 110] x 32,09

3 529,90 euros

352,99 euros

Année 2013

[420-130=290]x 32,09

9 306,10 euros

930, 61 euros

Année 2014

[420-130=290]x32,36

9384,40euros

938,44euros

Année 2015

[200-130=70] x32,62

2283,40 euros

228,34 euros

L'indemnité pour la contrepartie obligatoire en repos sera donc globalement arrêtée à la somme de 24 503,80euros à laquelle s'ajoutera à celle relative aux congés payés à hauteur de 2450,38 euros

Sur la demande au titre du travail dissimulé ;

En application de l'article L. 8221-5 du code du travail, est réputé travail dissimulé, par dissimulation d'emploi salarié, le fait pour tout employeur de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité de déclaration préalable à l'embauche, de se soustraire à la délivrance de bulletins de paie ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

L'article L. 8223-1 du code du travail prévoit le versement au profit du salarié d'une indemnité forfaitaire correspondant à 6 mois de salaire.

Encore faut il que soit établi le caractère intentionnel de l'abstention en cause, observation étant faite que ce caractère intentionnel résulte d'une action en pleine connaissance de cause.

Dans le cas d'espèce, au regard de la convention de forfait mise en 'uvre en application d'une convention collective, l'intention frauduleuse n'est pas caractérisée.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur la demande de dommages-intérêts pour dépassement de la durée hebdomadaire maximale de travail et non respect des temps de repos :

S'appuyant tant sur les dispositions de l'article L. 3121'35 du code du travail et que sur celles prévues par l'article 3126'36 alinéa 1 dudit code, telles qu'applicables avant le 10 août 2016, Monsieur [D] sollicite des dommages-intérêts pour dépassement de la durée hebdomadaire de travail. Il explique qu'il lui arrivait même de travailler le jour de son repos, notamment au cours des périodes de soldes, ce qu'il n'étaie pas par les éléments communiqués.

La cour a retenu que la durée de travail calculée sur une période quelconque de 12 semaines consécutives a dépassé 44 heures hebdomadaires et ce, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 3121'36 alinéa 1er du code du travail dans sa version alors applicable.

Pour autant, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette prétention au motif que le salarié ne produit aucun élément pour objectiver et par suite, pour justifier le préjudice allégué

Sur le licenciement ;

En application des dispositions de l'article L. 1235 -1 du code du travail, en cas de litige, le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties...si un doute subsiste, il profite au salarié.

Aux termes de la lettre de licenciement du 4 juin 2015 qui circonscrit le litige, l'employeur fait état des griefs suivants :

« [...] vous êtes affecté depuis 15 ans sur le magasin de [Localité 2] où vous en avez la responsabilité en qualité de directeur de magasin, statut cadre. Depuis sa prise de fonction en janvier 2015, votre directeur régional a constaté de nombreux dysfonctionnements dans l'exécution de votre travail. Ces dysfonctionnements s'étant accrus ces dernières semaines.Le magasin dont vous avez la gestion en charge est le 2e du réseau en chiffre d'affaires et le premier de la région Sud-Est. Ce magasin clôture l'année 2014 avec la dégradation de chiffre d'affaires la plus importante de la société et perd plus de 200 keuros de contribution magasin[...]En tant que directeur de magasin, il vous appartient de mettre tout en 'uvre pour dynamiser le chiffre d'affaires, les ventes, de réduire les coûts.

Or, force est de constater que depuis l'arrivée de votre directeur régional, vous faites preuve d'une absence de préparation, d'analyse et ne répondez pas aux demandes de votre responsable hiérarchique.

1- Manque de préparation ou de prise de plans d'actions:

En raison de travaux sur le site de [Localité 2], un projet de liquidation a été décidé. Dès le 21 avril 2015, votre directeur régional est venu spécifiquement passer la journée avec vous pour échanger sur l'organisation de la liquidation qui doit commencer le 1er juin 2015. À cette occasion il vous a été demandé de préparer le déroulé de cette opération, acte important en termes de chiffre d'affaires et de stocks pour votre magasin comme pour l'entreprise. Devant votre manque de réponse, celui-ci vous a relancé par mail le 4 mai 2015 vous demandant un retour sur l'organisation de la liquidation. Puis la semaine suivante, devant votre silence, celui-ci a pris le dossier en main et a dû gérer l'organisation de la préparation allant jusqu'à animer avec vous la réunion du 13 mai 2015. Au cours de cette journée, il vous a été demandé, toujours dans le cadre de l'organisation de la liquidation, de recruter 3 collaborateurs pour le 26 mai 2015. Force est de constater que vous ne vous êtes absolument pas chargé d'appliquer les directives de votre supérieur et n'avez pas recruté de personnel mais en plus vous n'avez pas donné l'information à vos chefs de groupe lors de votre départ en congés. C'est votre directeur régional, lors d'une visite du 20 mai 2015 qui a dû s'en charger.

Enfin, vous êtes parti en congés payés le 16 mai 2015 suite à votre demande du 13 mai 2015 et n'avez pas organisé la gestion du gardiennage. C'est votre directeur régional s'apercevant que vous n'aviez pas travaillé ce point, pourtant demandé au préalable par votre hiérarchie, qui a dû s'en occuper le 29 mai 2015.

Ce manque de préparation, d'anticipation et d'organisation est une réitération des mêmes situations déjà survenues depuis janvier 2015 et constatées, notamment lors du projet d'aménagement des arts de la table en février 2015.

En effet, dès le 23 janvier 2015, soit près d'un mois avant le démarrage du projet, votre directeur régional vous remettait l'ensemble des informations, vous demandant de lui faire un retour sur l'organisation. Vous n'avez jamais répondu à cette demande. En outre, celui-ci vous avait donné comme consigne d'organiser un petit-déjeuner pour motiver et impliquer les équipes sur ce projet. Lors du démarrage de ce projet, aucune de ces directives n'était appliquée.

Ou encore lors d'une visite de votre directeur régional le 19 janvier 2015, vous lui annoncez que vous avez décidé de ne pas suivre les préconisations du service merchandising envoyées le 11 janvier 2015 et de ne pas implanter la nouvelle collection au motif que les soldes fonctionnent bien sur [Localité 2]. Par cette opposition volontaire, vous mettez votre directeur régional devant le fait accompli l'amenant à devoir prendre position dans l'urgence.

2- Manque de réponse aux demandes de votre hiérarchie:

Vous ne répondez pas ou quasiment pas aux demandes faites par votre hiérarchie que ce soit en termes de remontée d'information, de procédure ou de prise de plans d'action, ou alors celui-ci est contraint de vous relancer et vos réponses sont partielles et peu travaillées, voire parfois désinvoltes.

- 14 avril 2015, votre DR vous demande un retour sur le décalage de chiffre d'affaires de votre magasin : pas de retour de votre part,

- 16 avril 2015, votre DR demande un retour sur le décalage de performance de la semaine passée : pas de retour'relance de votre DR : pas de réponse,

- le 4 mai : demande de retour sur la préparation de la liquidation : pas de réponse,

- le 11 mai 2015, vous demande un retour sur les performances de la lingerie : pas de réponse,

- le 21 avril 2015, [...]relance pour obtenir une réponse.

Ce manque de réponse est généralisé sur tous les aspects de votre fonction. En effet, alors que la procédure « congés payés » prévoit pour tous les magasins, un retour pour le 14 mars et malgré les relances de votre DR vous avez transmis les éléments le 9 avril 2015 soit plus de 3 semaines après la date limite. En outre, votre document était incomplet et malgré une relance du 17 avril de la part de votre DR, les congés payés des encadrements du magasin n'étaient toujours pas positionnés au 20 mai 2015.

Concernant l'organisation des jours fériés, votre DR vous demande dès le mois de mars 2015 de lui faire un retour sur l'organisation des ouvertures des jours fériés. N'obtenant pas de réponse, celui-ci vous relance le 13 avril 2015. Pour seule réponse, vous lui indiquez que « votre magasin sera ouvert que si vous avez assez de volontaires » sans prendre aucun plan d'actions nécessaires et sans donner de lisibilité à votre hiérarchie.

Enfin, le 14 mai, après l'ouverture du jeudi de l'Ascension, vous informez le service paye ainsi que votre DR que 17 personnes ont travaillé ce jour férié, soit un nombre plus important que l'année passée alors que l'entreprise a pour objectif la réduction des frais de personnel et que le chiffre d'affaires généré a été plus faible que l'an passé.

Concernant la gestion des récupérations, votre DR vous demande courant mars de lui transmettre un planning prévisionnel des récupérations des heures de vos collaborateurs. Vous lui répondez « les heures seront récupérées quand tout le monde aura pris sa 5e semaine de vacances et que le moment sera plus favorable ». Ce genre de réponse qui ne donne aucune information pertinente et qui ne répond absolument pas à la demande de votre hiérarchie n'est pas acceptable au regard de votre poste et des résultats commerciaux de votre magasin.

Enfin, vous vous permettez de ne pas répondre aux mails de votre directeur régional, d'attendre ses relances voire de ne pas répondre à ses relances alors même qu'en charge de la compilation d'une donnée de gestion sur la région vous informez vos collègues et ce en toute autonomie « sachez une chose, je ne vous relancerai pas car j'ai d'autres choses à faire que d'attendre toute la journée -merci d'en prendre note ».

3- comportements inappropriés envers votre ligne hiérarchique

Lors de l'entretien que vous avez eu avec le directeur commercial le 16 mai 2015, vous avez tenu à l'encontre de votre hiérarchie des propos qui ne sont pas acceptable « Si [C] nous cherche des poux dans la tête, nous aussi on va lui en chercher »

Là encore cette attitude n'est pas isolée.

Le 17 mars 2015, alors que votre DR, toujours dans une optique de vous accompagner dans la dynamisation de votre chiffre d'affaires, demandait à un magasin de vous envoyer ses invendus, vous vous permettez de donner, devant votre collègue, des directives contraires à celles transmises par votre DR.

Cette attitude désinvolte montre une opposition claire avec votre ligne hiérarchique et n'est pas un cas isolé puisque vous aviez déjà eu une attitude inappropriée fin février 2015 en n'organisant par votre présence lors de la tournée de votre directeur de région avec la direction commerciale et la direction des ressources humaines alors qu'il vous avait précédemment donné l'information oralement. Vous vous êtes d'ailleurs permis d'écrire : ' il est regrettable que je n'ai pas été prévenu de votre visite vendredi (mon jour de repos). Encore une fois, nous ne sommes pas pris en considération par la direction', alors qu'à aucun moment, vous n'avez averti votre DR de votre absence pour raison de repos hebdomadaire, ni même ne lui avez demandé de décaler cette visite pour que vous soyez présent.

Votre commentaire est d'autant plus surprenant que lors de la visite de 2 membres de la direction merchandising sur votre magasin, afin de vous aider à implanter la nouvelle collection art de la table, vous êtes parti de votre point de vente à 14 heures, le laissant seul au motif que vendredi était votre jour de repos alors que vous aviez été informé au préalable de leur visite. [...]

Nous vous rappelons que conformément à votre contrat de travail, il vous appartient en qualité de directeur de magasin, statut cadre, d'appliquer sur votre magasin les directives données par votre responsable hiérarchique et devez respecter et appliquer la politique générale de l'entreprise ainsi que respecter l'ensemble des demandes de reporting de votre hiérarchie afin d'éviter tout type de dysfonctionnements au sein de votre magasin.

Votre ancienneté dans l'entreprise et dans votre fonction et votre statut de directeur de magasin ne sauraient vous autoriser à avoir cette attitude désinvolte et méprisante à l'égard de votre hiérarchie.

Or, depuis des mois vous confondez autonomie et indépendance notamment dans les remontées d'informations et des plans d'action demandés.

Enfin, sachez que si la direction peut pour faire avancer l'entreprise, accepter les remarques et objections des directeurs de magasin et notamment en raison de leur expérience et expertise, nous ne pouvons tolérer une telle volonté délibérée de vous opposer à l'entreprise et à sa ligne hiérarchique.

Au regard de la situation, nous vous notifions donc par la présente votre licenciement pour faute.[...] »

La société Eurodif indique que pendant de nombreuses années, le salarié a bénéficié d'un régime de faveur, voire de protection de la part de son supérieur hiérarchique, M. [N], qui couvrait ses manquements et insuffisances. Elle note que malgré cette relation privilégiée, Monsieur [N] avait recommandé à Monsieur [D] lors de l'évaluation de l'année 2013, de faire un effort sur le fait de rendre en temps et en heure des dossiers administratifs même si pour le salarié ils n'étaient pas importants.

Elle fait valoir qu'après le licenciement pour faute grave de M. [N], le salarié ayant assuré la transition dans l'attente du recrutement d'un nouveau directeur régional a relevé une situation de recul de l'activité du magasin de [Localité 2] en termes de chiffres d'affaires et a souligné lors de l'entretien annuel d'évaluation que les objectifs n'avaient pas été atteints. Elle ajoute que le nouveau directeur régional avait pour objectif de redynamiser le secteur dont il avait la responsabilité, que Monsieur [D] a considéré qu'il n'avait rien à apprendre du « petit nouveau », que confrontée aux manquements de celui-ci et à son comportement conflictuel, elle a été amenée à envisager la rupture de la relation contractuelle.

Après avoir énoncé qu'il n'avait jamais fait l'objet d'aucune sanction disciplinaire en 29 années d'ancienneté, qu'au contraire, ses qualités et compétences avaient été soulignées dans les divers comptes-rendus d'entretiens annuels, notamment des années 2005, 2006, 2009 et 2010 observation étant faite qu'il a connu deux directeurs régionaux différents Monsieur [F] et Monsieur [N] dont les appréciations sur ses compétences et qualités professionnelles étaient convergentes. Monsieur [D] note que Monsieur [Z] a, en 2014, souligné « sa bonne maîtrise du métier partie commerce RAS. Bonne connaissance de l'entreprise, doit encore plus déléguer avec la présence d'un troisième chef de groupe. Ne pas hésiter à déléguer encore plus l'administratif.[...] [U] est un directeur qui connaît bien son périmètre ' Satisfait d'avoir un flagship sur la région deuxième CA national ».

Plusieurs faits sont évoqués dans la lettre de licenciement.

1- La société Eurodif fait grief au salarié d'avoir fait preuve d'un manque de préparation ou de prise de plans d'actions pour assurer dans de bonnes conditions la liquidation du stock du magasin et ce, en dépit des demandes et consignes de son directeur régional.

Elle fait valoir que M. [H] s'est déplacé à [Localité 2] à deux reprises le 21 avril 2015 et le 13 mai 2015 pour préparer cet événement, alors que Monsieur [D] ne répondait pas à ses demandes ni ne mettait en application ses consignes et ce, malgré des demandes réitérées. Elle produit le courriel de Monsieur [H] en date du 4 mai 2015, resté sans réponse.

Elle ajoute qu'il avait été donné pour consigne à M. [D] de recruter 3 collaborateurs pour la journée du 26 mai 2015, que Madame [A], adjointe de M. [D] atteste qu'à la date du 20 mai 2015, elle n'avait reçu aucune information ni consigne de la part de celui-ci, qu'elle a repris le processus de recrutement à la demande de M. [H].

La société observe que le salarié a informé Monsieur [H] d'une demande de congés le 14 mai pour un départ effectif au 19 mai jusqu'au 27 mai suivant, mettant le directeur régional devant le fait accompli.

La société Eurodif expose que M. [D] avait déjà fait preuve d'un manque d'anticipation et de respect des consignes en février 2015 à l'occasion du projet d'aménagement des arts de la table.

Outre qu'il soutient n'avoir pas été destinataire du courriel du 21 avril 2015 en réalité adressé à M. [V], M. [D] renvoie au courriel du 9 mai 2015 aux termes duquel il demandait des palettes à M. [H] « pour anticiper la liquidation », explique que la présence de M. [H] aux réunions organisées pour la préparation de la liquidation ne révèle pas ses défaillances mais était inhérente aux responsabilités qui étaient les siennes.

Après avoir soutenu avoir lui-même donné des consignes pour le recrutement des 3 collaborateurs nécessaires, M. [D] conteste toute valeur probante au témoignage de Madame [A], lequel n'est pas conforme aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile et a été rédigé en janvier 2017 alors qu'elle était encore soumise à un lien de subordination.

S' agissant du solde de ses congés, M. [D] soutient avoir informé M.[H] de son intention de les prendre et fait valoir, d'une part qu'il les aurait perdus s'ils n'avaient pas été soldés avant le 31 mai et d'autre part, M. [H] n'a pas refusé cette demande de congés.

Outre que l'attestation de Madame [A], rédigée le 16 janvier 2017, soit près de deux années après les faits n'est pas conforme aux dispositions de l'article 202 du code de procédure civile, en ce qu'elle ne comporte pas la mention selon laquelle « l'auteur a connaissance qu'une fausse attestation l'exposait à des sanctions pénales », la cour relève qu'elle ne présente pas une valeur probante véritable dans la mesure où ce témoin était toujours, lors de sa rédaction,dans un lien de subordination à l'égard de la société Eurodif.

Il est par ailleurs avéré que les soldes de congés payés devaient être pris avant le 31 mai, qu'il incombait à l'employeur et donc au directeur régional d'exprimer au moins une réserve auprès du salarié et de prendre l'initiative de reporter les congés si la présence de Monsieur [D] au cours de cette période lui paraissait indispensable.

Le salarié soutient sans être utilement combattu que n'ayant plus accès à sa boîte professionnelle du fait de son licenciement, il est dans l'incapacité matérielle de produire les réponses qu'il avait apportées au directeur régional.

Un doute sur ce point, devant profiter au salarié subsiste puisque celui-ci a été dispensé d'exécuter son préavis en sorte qu'il n'avait plus accès à sa boite professionnelle pour trouver la trace des réponses qu'il soutient avoir adressées au directeur régional. Il fait remarquer avec pertinence que s'agissant du courriel du 4 mai 2015, aucune relance ne lui a été adressée que le directeur régional avait in fine obtenu des éléments de réponse à la question de l'organisation de la liquidation des stocks.

L'employeur ne justifie pas de ce manquement et ne peut donc arguer d'un manquement similaire remontant au mois de février lors de la manifestation sur « les arts de la table ».

2- Le 2e grief de l'employeur porte sur l'absence de réponses aux demandes du directeur régional. Plusieurs exemples sont visés dans la lettre de licenciement, tels que l'absence de réponse aux courriels des 14 avril 2015, 15 avril 2015, 21 avril 2015, 4 mai 2015 et 11 mai 2015.

Il fait valoir que M. [D] n'a d'abord pas répondu à la demande du directeur régional relative à une analyse précise et documentée de l'activité des divers magasins relevant de son périmètre de responsabilité et plus spécialement à la transmission d'un point relatif au chiffre d'affaires. Il fait observer que la réponse apportée par M. [D] après la relance du 21 mars 2015 est très limitée puisqu'il précise « la tendance à 12 heures moins pire que ces jours derniers seulement -13. 7 %[...] ».

En réponse aux demandes précises de l'employeur s'agissant de la raison pour laquelle les compteurs de certains collaborateurs en termes de bonification et des récupérations étaient trop élevés, M. [D] s'est limité à exprimer que « ces heures correspondent aux dimanches de décembre et de janvier, qu'elles seront récupérées quand tout le monde aura pris sa 5e semaine et que le moment sera plus favorable ».

L'employeur fait observer que les demandes du directeur régional portaient sur des points techniques, précis et chiffrés exigeant des réponses écrites et pas seulement orales, que les points hebdomadaires étaient établis par les 2 responsables et non par M. [D]. Il insiste également sur le manquement du salarié s'agissant de l'organisation des jours fériés et des congés payés, relève qu'il n'a pas répondu pour la date du 16 mars à la demande précise de M. [J] en date du 13 mars portant sur le nombre de collaborateurs présents pour les jours fériés, mais seulement le 13 avril 2015 et de façon très incomplète puisqu'il s'est limité à indiquer que les ouvertures programmées pour le 8 mai et le 14 mai « ne seront effectives que s'il y a suffisamment de volontaires ».

Monsieur [D] réplique qu'il a toujours répondu aux demandes sa hiérarchie soit par courriel, soit au cours d'un entretien téléphonique, soit au cours d'un échange physique. Il renvoie aux pièces adverses telles que le courriel envoyé le 7 mars 2015 aux termes duquel il demandait à M. [J] de revoir le budget de remplacement très insuffisant, en ce qu'il avait besoin de 1300 heures au grand maximum étalées sur 3 mois, à celui du 21 mars 2015 rédigé à 13 heures 31 en réponse à la demande formulée ce même jour à 12h44. Il allègue que du fait de son licenciement, il n'a plus accès à sa boîte e-mail et ne peut donc apporter les réponses faites aux demandes sa hiérarchie telles que listées dans la lettre de licenciement. Il fait observer que les reproches listés dans la lettre de licenciement ne lui ont pas été adressés au fur et à mesure, qu'il n'a jamais reçu de mise en garde ni d'avertissement.

S'agissant de l'organisation des dates de congés payés, il indique avoir lui-même demandé à M. [Y] le 4 mars 2015 des indications sur les dates précises des travaux pour organiser les congés payés du personnel au plus juste, qu'il n'a en réalité jamais reçu de réponse ce qui explique qu'il n'a adressé le planning des congés payés que le 9 avril 2015.

Il allègue par ailleurs avoir répondu dès le 16 mars 2015 à M. [J] sur les dates prévisionnelles d'ouverture du magasin de [Localité 2] durant les jours fériés ce dont il justifie puisqu'il produit le courriel adressé à celui-ci le 16 mars 2015 à 8h36, et explique avoir répondu dès le 13 avril 2015 à 18h51 à la demande de M. [J] du même jour à 18h08 pour les 2 dates des 8 mai et 14 mai 2015 ( l'échange de courriels est produit aux débats) . Il indique que le nombre limité de volontaires rendait incertaine l'ouverture du magasin à ces 2 dates rappelant l'usage en vigueur selon lequel seuls les salariés volontaires travaillent les jours fériés. Il indique qu'il était arrivé par le passé qu'un même nombre de personnes travaille des dimanches et des jours fériés ce dont il justifie pour le dimanche 29 juin 2014.

M. [D] fait également valoir que la gestion des récupérations était rendue compliquée par la volonté exprimée de la société de réduire au maximum les frais de personnel, les embauches de contrat de travail à durée déterminée, qu'il a aussi été à cet époque confronté à de nombreux arrêts maladie, justifie la réponse selon laquelle les jours de récupération seraient pris au cours d'une période moins difficile. Il fait observer que la société n'a reçu aucune plainte concernant la gestion des récupérations de la part du personnel et que le service des ressources humaines comme M. [J] avaient un accès intégral au planning des salariés et aux heures de récupération.

Compte tenu des éléments fournis de part et d'autre et du fait que M. [D] n'avait effectivement plus accès à sa boîte professionnelle une fois le licenciement prononcé, la cour observe que des réponses promptes ont été apportées à M. [J] par M. [D] à certaines de ses demandes, qu'un doute devant profiter au salarié subsiste sur le grief relatif à l'absence de réponse à d'autres sollicitations de M. [J].

3- S'agissant du comportement inapproprié de M. [D] à l'égard de son supérieur hiérarchique, la société Eurodif invoque un comportement irrespectueux voire agressif du salarié envers son supérieur hiérarchique et ce, sans justification ni légitimité.

La société renvoie au courriel que M. [D] a adressé M. [L] le 9 février 2015 aux termes duquel il expose « l'idéal serait de ne pas avoir de livraison le lendemain de l'inventaire. (...). Voilà, c'est la vie du terrain, enfin si on peut bien tenir compte de notre avis !!!! » Elle s'appuie encore sur un courriel de M. [D] en date du 28 février aux termes duquel il indique « je n'ai pas été prévenu de votre visite vendredi (mon jour de repos) j'avais pris des rendez-vous donc je n'ai pas pu me libérer. Encore une fois nous ne sommes pas pris en considération par la direction ».

Alors que M. [L] avait prévenu M. [D] par un mail du 5 février 2015 à 10h23 qu'il ne serait pas à [Localité 2] pour faire l'inventaire le soir même, celui-ci a répondu « pas de souci c'est dommage car je pense qu'il va y avoir du sport[...] si problème à [Localité 2], je vous préviens que je mets tout le monde dehors. »

Enfin, la société communique l'attestation de M. [V] qui précise que M. [D] a devant lui directement menacé son directeur régional dans les termes suivants « si c'est [C] qui nous cherche des poux dans la tête, nous aussi on va lui en chercher[...] ».

M. [D] conteste avoir tenu ces derniers propos et soutient que M. [V] ne présente des garanties d'impartialité requises dans la mesure où il était salarié de l'entreprise au moment de la rédaction de l'attestation. Il fait observer que la lettre de convocation à l'entretien préalable lui a été remise le 16 mai 2015 , soit le jour même au cours duquel les propos prêtés auraient été tenus .

S'agissant de la transmission de stocks d'invendus entre [Localité 3] et [Localité 2], il fait observer que M. [J] avait accepté le principe de cette transmission tout en laissant les 2 directeurs de magasins discuter ensemble, qu'il s'est donc autorisé à répondre qu'il 'pouvait tout prendre sauf les maillots de bain, qu'il en avait plein '.

En ce qui concerne son absence lors de la visite du directeur régional fin février 2015, M. [D] indique n'en avoir pas été informé, d'avoir constaté que ce déplacement devait être réalisé alors qu'il était en repos, qu'il ne pouvait pour des raisons personnelles se déplacer au magasin pour rencontrer sa hiérarchie.

S'agissant de ce dernier élément, la cour constate que M. [J] a effectivement organisé un déplacement à [Localité 2] un vendredi, soit un jour de congé du directeur du magasin. Cette absence ne peut pas être utilement reprochée au salarié.

S'agissant du transfert des stocks de [Localité 3] à [Localité 2], le courriel de M. [J] en date du 17 mars 2015 à 9h23 est rédigé de la manière suivante « [W] pouvez-vous vous assurer que le transfert sera nickel ' (...)transfère que les pièces que le magasin peut vendre (dépareillés et autres à passer en 4 magasins si cela n'est plus vendable....[....] je vous laisse en échanger ensemble ».

Ce même jour à 10 heures à 12 heures, M. [D] a répondu à M. [H], en mettant en copie le directeur de [Localité 3] « bonjour, tout sauf les maillots de bain, j'en ai plein .cordialement ».

La cour relève que M. [H] avait lui-même proposé une limite au transfert du stock aux pièces que le magasin pouvait vendre. En conséquence, la réponse de M. [D] relative aux maillots de bain dont il avait un stock très important n'était pas de nature à atteindre la légitimité et l'autorité du directeur régional.

Enfin, si la réflexion faite par M. [D] devant M. [V] était déplacée, elle n'était pas pour autant insultante et diffamatoire, observation étant faite le management réservé à M. [D] n'était pas exempt de maladresses.

Ainsi, était-il maladroit de la part du directeur régional d'organiser une réunion sur [Localité 2] un vendredi alors que la connaissance des plannings avait dû lui révéler l'absence du directeur du magasin ce jour-là, jour habituel de repos ce que le salarié a relevé à bon escient.

Dans ce contexte, compte tenu de l'ancienneté du salarié et en l'absence de tout antécédent disciplinaire de quelque ordre que ce soit, le licenciement de M. [D] ne repose sur aucune cause suffisamment sérieuse en sorte que le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

Sur les conséquences du licenciement dépourvu de cause réelle sérieuse ;

Sur le salaire de référence

Les parties s'accordent sur le fait que le salaire brut moyen calculé à partir des salaires perçus entre juin 2014 et mai 2015, ressort à 5171,79 euros par mois.

Il est exact qu'il faut réintégrer outre la part variable de la rémunération variable, le rappel de salaire pour des heures supplémentaires.

Au regard des éléments précédemment analysés, la cour arrête le salaire moyen sur les 12 derniers mois de la collaboration à la somme de 6944,39euros.

Sur les indemnités de rupture ;

Un solde d'indemnité compensatrice de préavis qui doit correspondre à la rémunération qu'il aurait perçue s'il avait travaillé ressort à la somme de 20833,17 euros. Compte tenu de la somme qui lui a été versée soit 14 841,42 euros la société Eurodif reste redevable d'une somme de 5991,75 euros, somme à laquelle il y a lieu d'ajouter les congés payés afférents, soit 599,17 euros.

De même, un reliquat d'indemnité conventionnelle de licenciement sera alloué.

Lors de la sortie des effectifs, l'ancienneté de Monsieur [D] s'élevait à 29 années, 4 mois, et 24 jours.

En application des dispositions conventionnelle, et prenant en compte la spécificité résultant de l'âge du salarié et son ancienneté supérieure à 20 années, selon laquelle l'indemnité et le plafond de 12 fois le salaire mensuel des 12 derniers mois précédent le licenciement sont augmentés de 50 % , l'indemnité ressort à 91245,45 euros. Compte tenu du fait que Monsieur [D] a déjà perçu la somme de 67 954,49 euros à ce titre, la société Eurodif est encore redevable de la somme de 23 290,96 euros.

Sur les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Compte tenu de l'effectif de l'entreprise, du montant de la rémunération versée à la salariée ( 6994,39euros), de son âge, soit à quelques années de sa retraite, de son ancienneté,(29 années 4mois et 24 jours), de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, la cour est en mesure d'allouer à Monsieur [D] une somme de 125 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera réformé sur ce point.

Sur la demande de dommages-intérêts pour les conditions vexatoires du licenciement,

La dispense d'exécution du préavis alors que le salarié avait collaboré au sein de la société Eurodif pendant plus de 29 années, qu'il avait dirigé le magasin présentant le deuxième chiffre d'affaires en importance a confirmé la remise en cause humiliante de ses compétences et ce, au vu et au su de ses collègues et collaborateurs.

Le préjudice résultant des conditions humiliantes et vexatoires de son licenciement sera justement réparé par l'allocation d'une indemnité de 2000 euros.

Le jugement sera réformé sur ce point.

Sur la demande de remise des documents sociaux ;

La demande de remise de documents sociaux conformes aux termes du présent arrêt est légitime. Il y sera fait droit, précision étant apportée que cette remise devra intervenir dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 1235 -4 du code du travail;

Dans les cas prévus aux articles L. 1235 - 3 et L. 1235-11 du code du travail, l'article L. 1235- 4 fait obligation au juge d'ordonner, même d'office, le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage.

Dans le cas d'espèce, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a ordonné le remboursement des indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de trois mois.

Sur les dépens et les demandes d'indemnités en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

La société Eurodif qui succombe dans la présente instance sera déboutée de sa demande à ce titre et condamnée aux entiers dépens.

L'équité commande tout à la fois de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a accordé à Monsieur [D] une indemnité de 1000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de lui allouer une nouvelle indemnité de 3000 euros sur le même fondement pour les frais exposés par lui en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a :

- jugé que la convention de forfait en jours était invalide et par suite nulle,

-retenu que la société Eurodif était redevable de diverses sommes au titre de la part variable de la rémunération, des heures supplémentaires, des repos compensateurs,

- condamné la société Eurodif à verser à Monsieur [D] un rappel de part sociales à concurrence de la somme de 4325,20 euros outre les congés payés afférents,

- alloué à Monsieur [D] une indemnité de 500 euros pour perte de chance de bénéficier d'une rémunération conforme,

- jugé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse,

-débouté Monsieur [D] de ses demandes d'indemnités pour le non respect de la réglementation de la durée du travail, pour travail dissimulé,

- alloué à Monsieur [D] une indemnité de 1000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné le remboursement des indemnités de chômage versées à Monsieur [D] à l'organisme concerné dans la limite de trois mois,

Le réforme sur le quantum de certaines des sommes allouées et pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société Eurodif à verser à Monsieur [D] les sommes suivantes :

- 51 367,74 euros euros au titre du rappel de salaire pour les heures supplémentaires, outre 5136, 77 euros au titre des congés payés afférents,

- 24 503,80 euros au titre des contreparties obligatoires en repos outre 2450,38 euros au titre des congés payés afférents,

- 5991,75 euros, euros au titre du reliquat de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 599,17 euros pour les congés payés afférents,

- 23 290,96 euros au titre du reliquat de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 125.000 euros au titre des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 2000 euros à titre de dommages-intérêts pour les conditions vexatoires du licenciement,

Rappelle que les créances salariales portent intérêts au taux légal à compter de la réception par la défenderesse de sa convocation devant le conseil de prud'hommes tandis que les créances indemnitaires portent intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant,

Ordonne la remise des documents de fin de contrat ( un bulletin de paye récapitulatif, une attestation destinée au Pôle emploi, un certificat de travail ) conformes aux termes du présent arrêt, dans un délai de deux mois à compter de sa notification,

Déboute les parties du surplus de leurs réclamations,

Condamne la société Eurodif à verser à Monsieur [D] 3000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Eurodif aux entiers dépens.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 17/07340
Date de la décision : 07/05/2019

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°17/07340 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-05-07;17.07340 ?
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