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21/05/2019 | FRANCE | N°17/07398

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 10, 21 mai 2019, 17/07398


Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10



ARRÊT DU 21 MAI 2019



(n° , 1 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/07398 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3MFD



Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Avril 2017 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VILLENEUVE SAINT GEORGES - RG n° 16/437





APPELANTE



Madame [O] [H]

[A

dresse 1]

[Adresse 1]



Représentée par Me Hugues BOUGET, avocat au barreau de PARIS, toque : E1752







INTIMEE



SCP FIRCOWICZ BADUFLE MONTEIRO

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Repr...

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 10

ARRÊT DU 21 MAI 2019

(n° , 1 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/07398 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3MFD

Décision déférée à la Cour : Jugement du 03 Avril 2017 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VILLENEUVE SAINT GEORGES - RG n° 16/437

APPELANTE

Madame [O] [H]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Hugues BOUGET, avocat au barreau de PARIS, toque : E1752

INTIMEE

SCP FIRCOWICZ BADUFLE MONTEIRO

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Françoise PELLETIER de la SCP LEFEVRE PELLETIER ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0238

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Mars 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Véronique PAMS-TATU, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Véronique PAMS-TATU, Président de Chambre

Madame Françoise AYMES-BELLADINA, Conseiller

Madame Florence OLLIVIER, Vice Président placé faisant fonction de Conseiller par ordonnance du Premier Président en date du 17 décembre 2018

Greffier, lors des débats : Mme Nadia TRIKI

ARRET :

- Contradictoire

- par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Véronique PAMS-TATU, Président de Chambre et par Monsieur Julian LAUNAY, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSÉ DU LITIGE

Mme [H] a été embauchée, le 12 octobre 1993, par la SCP [V], titulaire d'une étude de notaire aux droits de laquelle s'est trouvée la SCP Fircowicz, Badufle et Monteiro en 2012, date à laquelle son père Monsieur [S] [H] est parti à la retraite. Celle-ci a a obtenu le diplôme de premier clerc de notaire le 5 décembre 1996 et celui de notaire en 2012.

Elle soutient qu'à la prise de fonction des nouveaux notaires, fin 2012, elle a connu des modifications profondes de son travail par l'attribution de la gestion de l'activité des ventes en état futur d'achèvement (VEFA), qu'elle s'est vue retirer ses dossiers habituels et confier la gestion de l'activité VEFA de Me [C]. qu'elle a été victime de faits de harcèlement moral et/ou discriminatoires entraînant une dégradation de sa santé, ainsi que d'une différence de traitement non justifiée.

Mme [L], collaboratrice de Mme [H], a été en congé du 7 mai au 12 septembre 2014 du fait de sa grossesse, et a été remplacée par Mme [U].

Mme [H] a été placée en arrêt pour maladie à compter du 12 juin 2014 et ne s'est plus représentée à son poste.

Le 1er avril 2015, elle a saisi le conseil de prud'hommes de Créteil d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail.

Par jugement du 23 juin 2016, celui-ci s'est déclaré territorialement incompétent et a désigné le conseil de prud'hommes de Villeneuve Saint Georges.

Le 12 avril 2017, Mme [H] a été placée en invalidité.

Lors de la visite de reprise du 24 mai 2018, le médecin du travail a conclu à son inaptitude, son maintien dans un emploi étant gravement préjudiciable à sa santé, en un seul examen, avec dispense de reclassement.

Mme [H] a été licenciée par lettre du 28 juin 2018 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Par jugement du 3 avril 2017, le conseil de prud'hommes de Villeneuve Saint Georges a :

'dit qu'il avait lieu d'écarter les pièces 1, 34, 37, 38 et 40 du dossier de la SCP Fircwiz Badufle et Monteiro ;

'dit que Mme [H] ne rapportait pas la preuve de l'existence des griefs invoqués par elle ;

'débouté Mme [H] de sa demande de résiliation judiciaire et de l'ensemble de ses demandes.

Celle-ci a interjeté appel par voie électronique le 23 mai 2017 de cette décision qui lui avait été notifiée le 24 avril 2017.

Dans des conclusions déposées par voie électronique, auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions, elle sollicite de voir :

'juger que la SCP a manqué gravement à ses obligations contractuelles,

'prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur,

'condamner la SCP à lui payer diverses sommes à titre de rappel de salaire au 9 janvier 2017, prime d'assiduité pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2012, prime exceptionnelle pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2013, dommages et intérêts au titre de la nullité de la convention de forfait jours, à titre d'heures supplémentaires, congés payés afférents, indemnité pour défaut de repos compensateurs et congés payés afférents, indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, rappel de salaire pour non-respect du principe « travail égal salaire égal », congés payés afférents, dommages-intérêts pour harcèlement moral et comportement discriminatoire, exécution déloyale du contrat de travail, non-respect des obligations en matière de représentation du personnel, licenciement sans cause réelle et sérieuse, rappel d'indemnité de préavis, congés payés afférents, et au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le montant des sommes réclamées est précisé au dispositif des conclusions

Dans des conclusions déposées par voie électronique, auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions, l'intimée conclut à la confirmation du jugement, au débouté de Mme [H] des demandes nouvelles formulées devant la cour et plus généralement de toutes ses demandes, et à sa condamnation à lui payer 2500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Mme [H] sollicite la résiliation judiciaire de son contrat de travail en invoquant divers manquements de l'employeur.

Sur la classification de Mme [H] et les rappels de salaire afférents

Mme [H] fait valoir qu'elle est restée notaire assistant, statut cadre niveau 1, de la convention collective du notariat alors qu'elle justifie de plus de 20 ans d'expérience, et a obtenu un diplôme de droit des affaires en 1997 et un DESS de droit notarial en 1999, ces 2 diplômes de 3e cycle étant équivalents au diplôme de notaire, qu'elle justifie donc d'une expérience professionnelle d'au moins 5 ans, et qu'elle a en outre obtenu le diplôme supérieur du notariat en septembre 2012.

Selon l'article 15 de la convention collective du notariat, « Tout salarié titulaire du DESS de droit notarial, du mastere mention ou spécialité droit notarial, ou du diplôme d'aptitude aux fonctions de notaire (DAFN) et dont le contrat de travail est conclu notamment en vue de l'obtention du diplôme supérieur notariat ou du certificat de fin de stage du DAFN doit être classé T2, sans que son coefficient puisse être inférieur la 2e année à 160. Tout salarié titulaire du diplôme d'aptitude aux fonctions de notaire et du certificat de fin de stage ou du diplôme supérieur de notariat doit être classé C1 ».

Ainsi, l'obtention du DESS de droit notarial en 1999 est sans incidence sur la classification revendiquée. Quant au diplôme supérieur du notariat, il ne permet que de se voir attribuer la classification C1 que Mme [H] possédait déjà.

Les niveaux 1 (C 1), 2 (C 2) et 3 (C 3) sont ainsi définis par la convention collective :

« C1. - Coefficient : 220.

Contenu de l'activité : définition et réalisation, par lui-même ou par délégation, des travaux dans le respect des orientations données.

Autonomie : travaux menés sous la conduite d'un notaire ou d'un cadre confirmé.

Étendue et teneur des pouvoirs conférés : réception de la clientèle dans les limites de ses attributions. Autorité sur le personnel dont il a la charge et auxquelles il apporte une aide technique.

Formation : diplôme de Premier Clerc, diplôme de l'Institut des métiers du notariat ou diplômes équivalents.

Expérience : selon ses attributions, expérience professionnelle pratique notariale d'au moins 4 années.

Exemple d'emploi : cadre polyvalent dans un office à structure simplifiée, clerc spécialiste, responsable d'un service à développement limité : expertise, négociation etc. selon l'orientation des activités de l'office. »

« C2. - Coefficient : 270.

Contenu de l'activité : mise au point de dossiers complexes ou de conception difficile. Conduite d'un secteur dont il assure le développement selon la délégation reçue.

Autonomie : large autonomie.

Etendue et teneur des pouvoirs conférés : autorité sur le personnel de son secteur.

Formation : diplôme de notaire ou diplôme équivalent.

Expérience : selon ses attributions, expérience professionnelle ou pratique notariale d'au moins 4 années permettant d'assurer la conduite de son secteur dans le cadre de la délégation reçue du notaire et de prendre les initiatives nécessaires.

Exemple d'emploi : responsable d'un service juridique ou technique tel que le droit de la famille, service comptable ou d'un service spécialisé tel que l'expertise, la négociation et la gestion' »

« C 3. - Coefficient : 340

Contenu de l'activité : conduite de l'office ou d'une partie importante de celui-ci.

Autonomie : large délégation de pouvoir.

Étendue et teneur des pouvoirs conférés : prise des initiatives requises par les circonstances en l'absence du notaire. Réception de toute la clientèle. Autorité sur le personnel qu'il anime et coordonne.

Formation : diplôme de notaire ou diplôme équivalent.

Expérience : selon ses attributions, expérience professionnelle ou pratique notariale de 5 années au moins après l'obtention du diplôme de notaire d'un diplôme équivalent, lui permettant d'exercer des activités de même niveau que celle de notaire' »

Mme [H] ne justifie pas avoir été en charge de plusieurs dossiers complexes ou de conception difficile, d'avoir eu une autorité sur le personnel de son secteur. Elle n'avait, en effet, sous son autorité qu'une seule collaboratrice. La SCP relève d'ailleurs que Me [H] n'a au cours de sa présence au sein de la SCP pas modifié la classification de sa fille.

Il résulte en outre des pièces versées aux débats que Mme [H] avait des difficultés à gérer ses dossiers :

'lettre de Monsieur [X] du 25 juillet 2014 se plaignant de l'ignorance de Mme [H] de la procédure à suivre dans son dossier et son manque de diligence malgré ses relances ;

'lettre de Mme [J] du 26 mai 2014 (l'acquéreur de l'appartement de sa mère lui ayant indiqué comme notaire, Mme [H], ayant finalement décidé de changer de notaire ne pouvant obtenir papiers et renseignements, pas plus que le nouveau notaire ce qui a motivé Mme [J] à venir chercher son dossier afin que la promesse de vente puisse être signée) ;

'lettre de Monsieur [K] du 3 juin 2014 ;

'lettre de Mme [B] du 24 juin 2014 se plaignant du comportement de Mme [H] à son égard et indiquant refuser que Mme [H] prenne en charge ses dossiers à l'avenir.

Il s'ensuit que Mme [H] ne peut prétendre à une classification supérieure à la classification C1.

Sur le non versement de la prime d'assiduité pour l'année 2012 et le versement partiel de la prime exceptionnelle pour l'année 2013

La prime d'assiduité a pour objet de récompenser la présence des salariés.

Mme [H] sollicite le paiement de cette prime pour 2012 au motif qu'elle n'a pas été absente pendant cette année et compare sa situation à celle de Mme [G] qui a perçu la prime alors qu'elle a été en congé pour maladie en 2013.

Il résulte en effet des bulletins de salaire de Mme [G] que celle-ci a été absente pour maladie entre le 15 janvier et le 8 février 2013 et a perçu intégralement la prime d'assiduité. Cependant, Mme [H] a pris un congé sans solde du 14 mars au 17 avril 2012, qui ne peut être assimilé à un congé pour maladie. Elle ne pouvait donc prétendre au paiement de cette prime.

Mme [H] réclame en outre le versement intégral de la prime exceptionnelle pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2013.

En 2012, Mesdames [M] et [R] ont reçu la somme de 1569,82 euros à ce titre et Mesdames [H] et [G], celle de 1962,30 euros.

En 2013, Mesdames [M] et [R] ont reçu une prime exceptionnelle de 1569,82 euros et Mme [H] n'a reçu qu'une prime de 400 euros alors qu'elle avait établi en 2013 172 actes et que Mme [M] n'en avait réalisé que 126.

Le paiement partiel de la prime exceptionnelle est ainsi établi. Il sera fait droit à la demande en paiement de ce rappel de prime.

Sur le principe « à travail égal, salaire égal »

Selon l'article L. 1132'1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l'article premier de la loi numéro 2088'496 du 27 mai 2008, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L. 3221'3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat.

Cette interdiction, qui se combine avec le principe d'égalité de salaire figurant à l'article L. 3221'2 est précisée par les articles L. 1142'1 et suivants et vise notamment le recrutement, déroulement de la carrière, l'accès à la formation et la rémunération.

Mme [H] invoque une disparité de rémunération en se comparant à Mesdames [M] et [G], qui avaient comme elle, le même statut cadre niveau 1.

A titre d'exemple, celles-ci percevaient pour la rémunération mensuelle brute :

3859,81 euros pour Mme [H]

3871,03 euros pour Mme [M]

4036,78 euros pour Mme [G]

sur la période du 1er avril 2012 au 28 février 2013 ;

3982,11 euros pour Mme [H]

4162,41 euros pour Mme [M]

4160,03 euros pour Mme [G]

sur la période du 1er octobre 2013 au 30 septembre 2014 ;

4009,49 euros pour Mme [H]

4189,34 euros pour Mme [M]

4187,86 euros pour Mme [G]

à compter du 1er octobre 2014

soit une différence mensuelle de :

179,85 euros bruts avec Mme [M]

178,37 euros bruts avec Mme [G]

Mme [H] avait été embauchée en 1993

Mme [M] avait été embauchée en 2010

Mme [G] avait été embauchée en 1988.

Ainsi, l'ancienneté de Mme [G] était supérieure de 5 ans à celle de Mme [H] mais Mme [H] avait 17 ans d'ancienneté de plus que Mme [M].

Mme [H] a obtenu :

'le diplôme 1er clerc de notaire fin 1996,

'un diplôme de droit notarial des affaires et un DESS en droit notarial obtenu à l'université de [Établissement 1] respectivement en 1997 et 1999,

'le diplôme supérieur du notariat en 2012.

L'employeur soutient que la différence de traitement est justifiée par le fait que Mme [M] aurait réalisé un meilleur chiffre d'affaires que Mme [H].

Cependant, cette dernière fait remarquer qu'il résulte du tableau produit par lui que sur les 5 premiers mois de l'année 2014, les chiffres d'affaires des deux salariées étaient pratiquement les mêmes, que celui de Mme [H] était même, certains mois, supérieur à celui de Mme [M] et qu'en 2013 le chiffre d'affaires réalisé par Mme [H] (301 514 euros) était supérieur à celui réalisé par Mme [M] (298 023 euros).

En outre, il résulte du document produit par l'employeur intitulé ''seuil de rentabilité en 2011'' que si, sous le nom de Mme [H], figure le nom de sa collaboratrice, Mme [L], ce même tableau comporte aussi, sous le nom de Mme [M], la mention « JP » de sorte que l'employeur ne peut soutenir qu'à la différence de Mme [H], Mme [M] travaillait seule.

Quant à l'ancienneté de Mesdames [H] et [G] respectivement (21 ans et 25 ans), elle n'était pas de nature à justifier une différence de traitement, d'autant que l'employeur n'établit pas par des éléments objectifs que les dossiers traités par Mme [G] étaient plus complexes que ceux traités par Mme [H].

S'agissant de l'argument selon lequel Mme [R] percevait la même rémunération que Mme [H], il est inopérant dans la mesure où Mme [H] est titulaire de plusieurs diplômes universitaires ainsi que du diplôme supérieur de notaire alors que Mme [R] n'est titulaire que du diplôme de premier clerc.

Il convient donc d'infirmer le jugement et d'accorder à la salariée un rappel de salaire à compter du 1er mai 2012 jusqu'à fin novembre 2014, celle-ci ayant été placée en arrêt pour maladie à compter du 14 juin 2014 et ne produisant pas de bulletin de salaire après novembre 2014.

Il est donc dû à Mme [H] la somme de 5538,44 euros outre les congés payés afférents.

Sur la convention de forfait

Par avenant du 1er février 2005, une convention de forfait de 215 jours a été signée.

Toutefois, Mme [H] n'a pas bénéficié d'entretien spécifique sur l'organisation et la charge de travail et il n'a été établi aucun document de contrôle de suivi régulier de l'organisation travail ; il s'ensuit que cette convention de forfait est nulle et que la salariée est en droit de solliciter le paiement d'heures supplémentaires.

Elle produit un décompte de ses horaires journaliers et 5 courriels dont l'employeur fait remarquer à juste titre que celui du 26 juillet 2013 comporte une date qui ne figure pas dans les tableaux d'horaires communiqués et qu'il en est de même des 3 courriels du 4 juin 2014.

La société fait en outre observer qu'il convient de tenir compte des RTT dont Mme [H] a bénéficié. Elle produit les agendas de Mme [H] qui révèlent des incohérences avec les horaires invoqués par elle. Enfin, Mme [L] atteste que les signatures devaient avoir lieu pendant les horaires de l'étude (9 heures'12 heures/13h30'17h30), que le dernier rendez-vous ne devait pas se tenir après 16h30 et que la charge de travail de Mme [H] ne nécessitait de faire des heures supplémentaires.

Ainsi, l'exécution d'heures supplémentaires n'est pas établie.

La salariée sera déboutée de ce chef de demande. Elle sera également déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour nullité de la convention de forfait en l'absence de preuve d'un préjudice résultant notamment de l'absence d'accomplissement d'heures supplémentaires.

Sur le harcèlement moral ou à tout le moins le comportement discriminatoire de l'employeur et /ou attentatoire à la dignité et la réputation de la salariée

Mme [H] invoque divers manquements : celui relatif à la classification n'est pas établi, pas plus que celui concernant une surcharge de travail, en l'absence d'exécution d'heures supplémentaires. Il ne résulte non plus d'aucun élément que l'employeur pendant l'arrêt pour maladie de la salariée « a poursuivi son travail de sape et créé une situation de stress permanent » en ne remettant pas ou en remettant tardivement les bulletins de salaire et documents sociaux dont la salariée avait besoin ayant pour conséquence une dégradation de son état de santé « qui s'est soldée in fine par la déclaration d'inaptitude par le médecin du travail. »

Ainsi, l'existence de faits laissant présumer l'existence de faits de harcèlement moral n'est pas établie.

En revanche, le paiement partiel de la prime exceptionnelle en 2013 ainsi que l'inégalité de traitement retenus par la cour constituent un comportement discriminatoire. Il convient d'accorder à la salariée une somme de 2000 euros à titre de dommages-intérêts de ce chef.

Sur le non-respect des obligations de l'employeur en matière de représentation du personnel

Certes, la salariée, en arrêt pour maladie, n'a pas été informée de l'organisation des élections des délégués du personnel du 4 décembre 2014 et n'a pu y participer. Cependant, contrairement à ses allégations, il n'est nullement établi qu'elle ait été oubliée volontairement et, en tout état de cause, elle ne justifie pas d'un préjudice, n'ayant jamais au demeurant été candidate à ces élections.

Sur le comportement déloyal et de mauvaise foi de l'employeur dans l'exécution du contrat de travail

L'employeur n'a commis aucun manquement matière de classification. Par ailleurs, Mme [H] soutient, sans en rapporter la preuve, qu'il a omis de lui adresser ou lui a adressé de façon tardive des éléments administratifs nécessaires lors de son arrêt pour maladie, celui-ci au contraire justifiant avoir fait les diligences nécessaires.

Aucune exécution de mauvaise foi du contrat de travail n'est donc établie. La salariée sera déboutée de sa demande de ce chef.

Sur le non-respect de l'obligation de sécurité

La salariée soutient que l'employeur l'a soumise à un véritable harcèlement moral pendant l'exécution de son contrat de travail contraignant son médecin traitant à la placer d'urgence en arrêt pour maladie, n'a pris aucune mesure de nature à protéger sa santé physique et mentale et a continué à la maintenir sous pression pendant son arrêt de travail en ne lui remettant pas ou en lui remettant très tardivement ses bulletins de salaire et documents lui permettant d'être indemnisée par les organismes sociaux.

Cependant, la cour a retenu que la salariée n'établissait pas de fait laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral et que l'employeur avait fait diligence pour lui remettre les documents nécessaires pendant son arrêt travail.

Elle sera déboutée de sa demande de ce chef.

Les manquements retenus par la cour (non paiement de la prime d'assiduité, paiement partiel de la prime exceptionnelle et inégalité de traitement) sont suffisamment graves pour justifier la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur. Celle-ci produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et prend effet à la date du licenciement.

Compte tenu de l'ancienneté de la salariée, de sa rémunération et des circonstances de la rupture, il convient de lui accorder une somme de 50 000 euros à titre de dommages-intérêts.

La demande de remise sous astreinte des bulletins de salaire, d'un certificat de travail et d'une attestation Pole emploi ne figure pas dans le dispositif des conclusions. Elle est donc irrecevable.

Il est équitable d'accorder à la salariée une somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a débouté Mme [H] de ses demandes de rappel de salaire au titre de la classification, congés payés afférents, heures supplémentaires, congés payés afférents, indemnité pour défaut de repos compensateurs et congés payés afférents, indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, dommages-intérêts pour nullité de la convention de forfait, exécution déloyale et de mauvaise foi du contrat de travail, non-respect de l'obligation de sécurité de résultat et des obligations en matière de représentation du personnel, de résiliation judiciaire du contrat de travail et d'indemnité de préavis ;

Statuant à nouveau,

Prononce la résiliation du contrat de travail aux torts de la SCP Fircowicz, Badufle et Monteiro ;

Condamne la SCP Fircowicz, Badufle et Monteiro à payer à Mme [H] les sommes de :

- 50 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 12 028,47 euros bruts à titre d'indemnité de préavis

- 1202,54 euros à titre de congés payés afférents

- 5538,44 euros à titre de rappel de salaire pour non-respect du principe « à travail égal salaire égal »

- 553,84 euros au titre des congés payés afférents

- 1569,82 euros à titre de prime exceptionnelle pour l'année 2013,

- 2000 euros à titre de dommages-intérêts pour comportement discriminatoire

- 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Ordonne le remboursement par la SCP Fircowicz, Badufle et Monteiro aux organismes concernés des indemnités de chômage versées à la salariée du jour de la rupture au jour de l'arrêt dans la limite de 2 mois ;

Déboute Mme [H] du surplus de ses demandes ;

Condamne la SCP Fircowicz, Badufle et Monteiro aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 17/07398
Date de la décision : 21/05/2019

Références :

Cour d'appel de Paris L1, arrêt n°17/07398 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-05-21;17.07398 ?
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