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12/06/2019 | FRANCE | N°18/07430

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 1, 12 juin 2019, 18/07430


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 3 - Chambre 1



ARRÊT DU 12 JUIN 2019



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/07430 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5PDZ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 Février 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 16/18351





APPELANTS



Monsieur [W] [JG]

né le [Date naiss

ance 6] 1951 à [Localité 19]

[Adresse 2]

[Adresse 2]



Madame [C] [TC]

née le [Date naissance 11] 1960 à [Localité 22] (PORTUGAL)

[Adresse 2]

[Adresse 2]



représentés par Me André HOZE, av...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 1

ARRÊT DU 12 JUIN 2019

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/07430 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5PDZ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 Février 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 16/18351

APPELANTS

Monsieur [W] [JG]

né le [Date naissance 6] 1951 à [Localité 19]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Madame [C] [TC]

née le [Date naissance 11] 1960 à [Localité 22] (PORTUGAL)

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentés par Me André HOZE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1008

INTIMES

Madame [E] [H] épouse [SU]

née le [Date naissance 9] 1960 à [Localité 18]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Madame [U] [H] épouse [R]

née le [Date naissance 8] 1962 à [Localité 18]

[Adresse 13]

[Adresse 13]

Monsieur [L] [H]

né le [Date naissance 1] 1965 à [Localité 18]

[Adresse 15] - SUISSE

représentés par Me Françoise HERMET LARTIGUE, avocat au barreau de PARIS, toque : C0716

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 09 Avril 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Dorothée DARD, Président

Mme Madeleine HUBERTY, Conseiller

Mme Catherine GONZALEZ, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme [M] [X] dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier lors des débats : Mme Emilie POMPON

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Dorothée DARD, Président et par Mme Emilie POMPON, Greffier.

***

[N] [JG], domicilié en dernier lieu à la maison de retraite sise [Adresse 10], est décédé le [Date décès 7] 2016, sans descendance.

Par testament authentique reçu le 17 décembre 2013 à la [Adresse 16] à Boulogne Billancourt (Hauts-de-Seine) par Maître [O] [HZ], notaire associé de la Scp Benoit [AJ] - Isabelle Lerminier Grandière - Isabelle [Adresse 21]), le défunt a institué légataires universels Mme [E] [H], Mme [U] [H], et M. [L] [H] à charge pour eux de délivrer divers legs particuliers à Mme [RV] [P] et ses enfants [I] et [D] [T], à Mme [C] [TC] et à son neveu et filleul, M. [W] [JG], ce testament révoquant toutes dispositions antérieures.

Par testament olographe daté du 1er avril 2014, le défunt a également institué M. [W] [JG] et Mme [C] [TC] comme légataires universels à charge pour eux de délivrer divers legs particuliers, à Mme [RV] [P] et ses enfants [I] et [D] [T], ainsi qu'à Mme [E] [H], Mme [U] [H] et M. [L] [H], ce testament révoquant toutes dispositions antérieures.

Par un codicille du 11 octobre 2014, [N] [JG] a confirmé la validité de son testament authentique du 17 décembre 2013. Ce codicille a été remis par Mme [K] [JG], après le décès de [N] [JG], à Maître [V] [AJ], notaire à [Localité 17] (Yvelines) qui a décrit et déposé ce testament par acte du 18 mars 2016.

Puis par écrits des 21 octobre et 9 décembre 2014, tous révoquant successivement toutes dispositions ultérieures, [N] [JG] a confirmé la validité de son testament olographe du 1er avril 2014.

Il a ensuite rédigé le dernier codicille suivant :

'Je soussigné [N] [JG] né le [Date naissance 4]/1926 à [Localité 14] confirme le testament authentique reçu par Me [HZ] le 17/12/2013, et je révoque toutes dispositions que j'aurais pu faire ultérieurement - Fait à Paris le 13 décembre 2014.

[Signé :] Bpilon'.

Le 31 janvier 2015, [N] [JG] a établi un mandat de protection future par lequel il a désigné M. [W] [JG], son neveu, comme mandataire.

Par ordonnances distinctes du 21 septembre 2015, le conseil de prud'hommes de Paris a ordonné à M. [W] [JG], ès qualités de mandataire de protection future de [N] [JG] de payer à Mmes [C] [TC] et [G] [F] la somme respective de 12.000 euros et 8.000 euros à titre de provision et de leur remettre à chacune un certificat de travail et une attestation employeur destinée au pôle emploi.

Par ordonnance du 12 octobre 2015, le juge des tutelles du tribunal d'instance de Paris 17ème a autorisé M. [W] [JG] en qualité de mandataire de [N] [JG], en vertu du mandat de protection future précité, à vendre un bien immobilier, propriété de [N] [JG], à savoir un appartement sis [Adresse 5] au prix total de 320.000 euros, payable au comptant à la signature de l'acte authentique.

Par assignation en la forme des référés en date du 18 mai 2016, M. [W] [JG] et Mme [C] [TC] ont assigné Mme [E] [H], Mme [U] [H] et M. [L] [H] devant le président du tribunal de grande instance de Paris aux fins de désignation d'un administrateur provisoire à la succession de [N] [JG] aux fins de gérer tant activement que passivement les biens dépendant de cette succession.

Le 14 juin 2016, un protocole d'accord a été signé entre M. [W] [JG], Mme [C] [TC], Mme [E] [H] épouse [SU], Mme [U] [H] épouse [R] et M. [L] [H] autorisant notamment les trois derniers à signer au nom et pour le compte de la succession [JG] un mandat de gestion au profit du cabinet Safar et indiquant que Maître [AJ] et la Scp Besse Meunier Picard, désignés notaires de la succession, reçoivent mandat des parties notamment pour régler les dettes, faire procéder à tous inventaires, et de délivrer aux légataires particuliers les droits indivis sur la maison de Toulouse puis par provision à valoir sur l'ensemble des droits des parties la somme de 60.000 euros à Mme [TC], la jouissance de l'appartement [Adresse 3] à l'indivision [H] et la jouissance du lot [Adresse 12] à M. [W] [JG].

Par ordonnance en la forme des référés rendue le 24 janvier 2018, le président du tribunal de grande instance de Paris a notamment, sur assignation délivrée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 3], nommé Maître [Z] [S], administrateur judiciaire, à l'effet d'administrer provisoirement la succession de [N] [JG].

M. [W] [JG] et Mme [C] [TC] ont ensuite assigné Mme [E] [H] épouse [SU], Mme [U] [H] épouse [R] et M. [L] [H] devant le tribunal de grande instance de Paris pour voir trancher le litige résultant de leur désaccord quant à la validité des dernières volontés de [N] [JG].

Par jugement rendu le 23 février 2018, le tribunal de grande instance de Paris a :

- débouté M. [W] [JG] et Mme [C] [TC] de leur demande de nullité des testaments olographes des 11 octobre et 13 décembre 2014,

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toute autre demande,

- condamné M. [JG] et Mme [TC] aux entiers dépens.

Par déclaration en date du 9 avril 2018, M. [W] [JG] et Mme [C] [TC] ont interjeté appel de ce jugement.

Par leurs dernières conclusions signifiées le 7 novembre 2018, M. [W] [JG] et Mme [C] [TC] demandent à la cour de :

Vu les articles 901, 972 et 1001 du code civil,

- recevoir M. [JG] et Mme [TC] en leur appel et les déclarer bien fondés,

En conséquence,

- réformer le jugement entrepris,

Et, statuant à nouveau :

- déclarer nul et de nul effet le testament du 13 décembre 2014,

- dire que le seul testament du 1er avril 2014 est parfaitement valable,

- débouter les Consorts [H] de leur appel incident

En conséquence,

- confirmer le jugement en ce qu'il a estimé que Mme [TC] avait la capacité de recevoir et que partant le testament qui avait institué à son profit une libéralité ne pouvait être frappé de nullité,

En tout état de cause,

- mettre à la charge des intimés les éventuelles pénalités et majorations qui pourraient être réclamées par l'Administration fiscale en raison du retard apporté au dépôt de la déclaration de succession et au paiement des droits de succession,

- condamner solidairement les intimés à payer à M. [JG] et à Mme [TC] la somme de 6.000 euros chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner sous la même solidarité aux entiers dépens.

Par leurs dernières conclusions signifiées le 11 septembre 2018, Mme [E] [H] épouse [SU], Mme [U] [H] épouse [R] et M. [L] [H] demandent à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- débouté M. [JG] et Mme [TC] de l'intégralité de leurs demandes irrecevables et infondées,

- constaté que le testament du 17 décembre 2013 est parfaitement valable,

- constaté que le testament du 1 er avril 2014 est en revanche révoqué par le dernier acte sous seing privé établi par le défunt le 13 décembre 2014 et qu'en outre, il est entaché par l'incapacité d'une des légataires universels désignés de recevoir une quelconque libéralité, même par testament du défunt,

- rejeté la demande de nullité de l'acte du 13 décembre 2014, invoquée sans fondement,

Subsidiairement, dans l'hypothèse où la demande des appelants d'invalider le codicille du 13 décembre 2014 serait déclarée fondée,

Infirmant et réformant le jugement entrepris,

- déclarer, par application des articles L.116-4 du Code de l'Action Sociale et des Familles, L.7221-1 du Code du Travail et 911 du Code Civil, nul et de nul effet le testament du 1er avril 2014, l'un des deux légataires universels étant frappé d'incapacité de recevoir au jour du décès et le testament ne pouvant être mis en oeuvre sauf à heurter l'ordre public,

- dire que le testament instaurant deux légataires principaux indivis ne peut s'appliquer dès lors qu'un des deux légataires est frappé d'incapacité, sauf à dénaturer la volonté du testateur au profit d'un seul légataire qui ne peut revendiquer des droits qui seraient autres que ceux résultant de la volonté du testateur,

En tout état de cause,

Infirmant le jugement entrepris,

- déclarer que conformément au testament authentique du 17 décembre 2013, seul acte valable, confirmé comme dernières dispositions testamentaires par le défunt le 13 décembre 2014, sont légataires universels :

- Mme [E] [H] épouse [SU],

- Mme [U] [H] épouse [R],

- M. [L] [H],

à charge pour eux d'exécuter et de délivrer les legs particuliers prévus au testament du 17 décembre 2013, à l'exclusion du legs particulier au profit de Mme [TC],

- dire en effet que le legs particulier au profit de Mme [TC] aux termes du testament du 17 décembre 2013 se heurte à l'interdiction résultant des dispositions des articles L.116-4 du Code de l'Action Sociale et des Familles,

En conséquence,

Sur appel incident et en tout état de cause,

- décharger :

- Mme [E] [H] épouse [SU],

- Mme [U] [H] épouse [R],

- M. [L] [H],

de toute obligation au titre du legs nul au profit de Mme [TC],

En tout état de cause,

- condamner solidairement M. [W] [JG] et Mme [TC] à garantir les consorts [H] de toutes pénalités ou intérêts de retard au profit de l'Administration fiscale, à raison du retard apporté à la déclaration de la succession et à l'acquittement des droits en considération du litige qu'ils ont initié,

- condamner solidairement M. [W] [JG] et Mme [TC] à payer à :

- Mme [E] [H] épouse [SU],

- Mme [U] [H] épouse [R],

- M. [L] [H],

la somme de 20.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouter M. [W] [JG] et Mme [TC] de l'intégralité de leurs demandes, y compris au titre de l'article 700,

- condamner solidairement M. [W] [JG] et Mme [TC] aux entiers dépens de première instance et d'appel, lesquels pourront être recouvrés

par Maître Hermet-Lartigue, avocat, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR :

1°) Sur la demande tendant à la nullité du testament du 13 décembre 2014 :

Considérant que M. [W] [JG] et Mme [C] [TC] contestent la validité de l'écrit daté du 13 décembre 2014 soutenant que, comme les autres actes datant du 17 décembre 2013 et de la fin 2014 rétablissant les [H] dans leur qualité de légataires universels, il a été établi lors de séjours de [N] [JG] en clinique ou à l'hôpital ; qu'ils estiment qu'il résulte également du rapport d'expertise du docteur [A] du 23 avril 2015 que la dégradation des fonctions cognitives de [N] [JG] datait de plus d'un an et que ce rapport s'inscrit dans un contexte dans lequel l'état neurologique dégradé de [N] [JG] ne faisait aucun doute ;

Que les consorts [H] réfutent toute insanité de [N] [JG] ;

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 901 du code civil, pour faire une libéralité, il faut être sain d'esprit ; que la libéralité est nulle lorsque le consentement a été vicié par l'erreur, le dol ou la violence ;

Que l'insanité d'esprit visée par les dispositions précitées comprend toutes les variétés d'affections mentales par l'effet desquelles l'intelligence du disposant aurait été obnubilée ou sa faculté de discernement déréglée ; que la charge de la preuve de l'insanité d'esprit du testateur incombe à celui qui agit en nullité du testament ;

Considérant que M. [W] [JG] et Mme [C] [TC] soulignent, s'appuyant sur l'avis donné par rapport du 23 avril 2015 par le docteur [SL] [A] pour la mise en application d'un contrat de protection future de [N] [JG], que ce dernier connaissait une dégradation de ses fonctions cognitives depuis plus d'un an, ce qui est effectivement mentionné par ce médecin au titre des antécédents médicaux de l'intéressé ; que comme l'a justement relevé le jugement entrepris, le rapport du docteur [SL] [A], succinct, qui ne mentionne aucun avis ou examen médicaux relatifs aux capacités cognitives du défunt, est de ce fait insuffisant à rapporter la preuve de l'insanité alléguée courant décembre 2014 ; que le fait que le jugement entrepris conclut au caractère insuffisant de ce rapport, tout en rappelant les qualités professionnelles du docteur [SL] [A], le fait qu'il a examiné [N] [JG] et que son rapport mentionne les antécédents médicaux précités ne saurait entacher cette décision d'une quelconque contradiction comme l'affirment M. [W] [JG] et Mme [C] [TC] (page 16 conclusions appelants) ; qu'en effet, le rapport du docteur [SL] [A] qui conclut à l'affaiblissement par l'âge des fonctions mentales de [N] [JG] au terme de deux examens, ne précise nullement la nature desdits examens et que la lecture de son rapport montre qu'il n'est fait état que d'un seul examen réalisé à la [Adresse 20] ; que cet avis médical a par ailleurs été établi en application des dispositions de l'article 481 du code civil aux seules fins d'établir si [N] [JG] était, à l'époque de l'examen, dans l'une des situations prévues à l'article 425 du même code, soit dans l'impossibilité de pourvoir seul à ses intérêts en raison d'une altération médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l'expression de sa volonté ; qu'il n'avait ainsi pas vocation à rechercher l'origine des troubles du patient et leur progressivité, ni à éclairer sur son état antérieur ; que dans ces conditions, les seuls éléments factuels fournis par le docteur [SL] [A] pour illustrer la désorientation dans le temps et l'espace de [N] [JG] lors de son examen ne suffisent pas à démontrer qu'à la date du 13 décembre 2014, [N] [JG] n'était pas en mesure d'exprimer une volonté saine ;

Que selon également le certificat médical établi le 20 mars 2014 et le compte-rendu d'hospitalisation établi le 27 août 2014, bien que souffrant d'insuffisance cardiaque, d'arthrose des genoux et de la maladie d'Alzheimer, laquelle n'est d'ailleurs pas invoquée par les appelants au titre de la prétendue insanité d'esprit, l'état de santé physique et mental de [N] [JG] lui permettait de continuer à résider chez lui avec l'assistance d'une auxiliaire de vie 24h/24h, celui-ci refusant une prise en charge institutionnalisée ;

Que certes lors de son hospitalisation du 22 août 2014 au 27 août 2014 à la suite d'une agression subie à son domicile, il était mentionné sur le plan cognitivo-comportemental des troubles cognitifs connus avec désorientation temporo-spatiale, ainsi que des troubles antérogrades et praxiques, mais que ces constatations sont néanmoins insuffisantes pour caractériser une impossibilité pour [N] [JG] d'exprimer une volonté quant à la dévolution de ses biens ;

Qu'il ne résulte pas plus des pièces produites par les parties d'élément attestant d'une aggravation de l'état de santé de [N] [JG] le privant à la date du 13 décembre 2014 de toute capacité à tester valablement ;

Qu'en effet, la seule attestation de [Y] [B], orthophoniste, (pièce 12 appelants) indiquant qu'elle a rééduqué à son domicile [N] [JG] pour trouble mnésique du 2 juillet 2014 au 29 octobre 2014, sur prescription du docteur [J] [SD], neurologue, ne prouve pas l'insanité invoquée du défunt à la date du 13 décembre 2014 ;

Qu'au contraire, le 31 janvier 2015, soit quelques semaines après le codicille du 13 décembre 2014, [N] [JG] a établi un mandat de protection future et que sa capacité à exprimer valablement sa volonté et à signer ce mandat n'a été remise en cause ni par le juge des tutelles, ni même par le mandataire désigné, M. [W] [JG] ;

Que le codicille du 13 décembre 2014 ne comporte aucune incohérence sur le plan formel et est particulièrement précis ;

Considérant, en conséquence, que le jugement entrepris sera confirmé de ce chef ;

2°) Sur la demande tendant à voir dire que seul le testament du 1er avril 2014 est parfaitement valable :

Considérant que M. [W] [JG] et Mme [C] [TC] ayant été déboutés de leur demande de nullité du testament du 13 décembre 2014, le jugement entrepris ayant été confirmé de ce chef plus avant, ils seront également déboutés de leur demande tendant à voir dire que seul le testament du 1er avril 2014 est parfaitement valable, celui-ci étant antérieur au testament du 13 décembre 2014 qui confirme le seul testament authentique du 17 décembre 2013 et révoque toutes dispositions faites ultérieurement, étant souligné que si M. [W] [JG] et Mme [C] [TC] ont fait aux termes de leurs écritures l'analyse de ce testament authentique, ils ont précisé ne pas en poursuivre la nullité.

3°) Sur la demande tendant à voir dire que le legs particulier au profit de Mme [C] [TC] aux termes du testament du 17 décembre 2013 se heurte à l'interdiction résultant des dispositions des articles L.116-4 du code de l'action sociale et des familles et de décharger en conséquence Mme [E] [H] épouse [SU], Mme [U] [H] épouse [R] et M. [L] [H] de toute obligation du legs au profit de Mme [C] [TC] :

Considérant que les consorts [H] soutiennent qu'en application de l'article L.116-4 du code de l'action sociale et des familles, tel que modifié par la loi du 28 décembre 2015, Mme [C] [TC] ne peut bénéficier des dispositions libérales résultant des testaments des 17 décembre 2013 et 1er avril 2014 ;

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'alinéa 2 de l'article L. 116-4 du code de l'action sociale et des familles, créé par la loi n°2015-1776 du 28 décembre 2015, les salariés mentionnés à l'article L.7221-1 du code du travail accomplissant des services à la personne définis au 2° de l'article L.7231-1 du même code, ne peuvent profiter des dispositions à titre gratuit entre vifs ou testamentaires faites en leur faveur par les personnes qu'ils accueillent ou accompagnent pendant la durée de cet accueil ou de cet accompagnement ;

Que les salariés mentionnés à l'article L.7221-1 du code du travail, dans sa version en vigueur à la date du décès de [N] [JG], sont ceux employés par des particuliers à des travaux domestiques ;

Que les services à la personne définis au 2° de l'article L.7231-1 du même code, dans sa version en vigueur à la date du décès de [N] [JG], sont l'assistance aux personnes âgées, aux personnes handicapées ou aux autres personnes qui ont besoin d'une aide personnelle à leur domicile ou d'une aide à la mobilité dans l'environnement de proximité favorisant leur maintien à domicile ;

Considérant que la loi n°2015-1776 du 28 décembre 2015 précitée est applicable comme étant en vigueur au moment du décès de [N] [JG], intervenu le [Date décès 7] 2016 ; qu'il résulte des termes de cette loi que c'est au moment où la libéralité a été faite qu'il y a lieu de rechercher si le légataire avait une qualité l'empêchant, au jour du décès, de recevoir ;

Que Mme [C] [TC] ayant été engagée par [N] [JG] à compter de septembre 2013 en qualité d'auxiliaire de vie à domicile (pièce 19 intimés), il est établi et non contesté par les parties qu'elle était salariée de [N] [JG] à la date du testament authentique du 17 décembre 2013, le licenciement effectif de celle-ci étant intervenu le 15 avril 2015 (pièce 19 intimés) ;

Considérant, en conséquence, qu'il sera dit que le legs particulier au profit de Mme [C] [TC] aux termes du testament du 17 décembre 2013 se heurte à l'interdiction résultant des dispositions des articles L.116-4 du code de l'action sociale et des familles, que Mme [E] [H] épouse [SU], Mme [U] [H] épouse [R] et M. [L] [H] sont donc déchargés de toute obligation de délivrance du legs au profit de Mme [C] [TC], le jugement entrepris étant réformé de ce chef ;

4°) Sur les demandes relatives aux pénalités, majorations ou intérêts de retard au profit de l'Administration fiscale :

Considérant que M. [W] [JG] et Mme [C] [TC] soutiennent que l'obstination des consorts [H] les a empêchés de déposer auprès de l'Administration fiscale une déclaration de succession dans un délai raisonnable et d'en acquitter les droits afférents ; qu'ils estiment ainsi que les pénalités et majorations qui pourraient être réclamés en raison du retard apporté au dépôt de cette déclaration devront être mises à la charge des consorts [H] ;

Que les consorts [H] soutiennent également que le jugement entrepris a rejeté à tort leur demande de ce chef en estimant qu'il s'agissait d'une demande de dommages-intérêts pour procédure abusive, alors qu'ils considèrent que M. [W] [JG] et Mme [C] [TC] doivent réparer le préjudice causé par l'action qu'ils ont entrepris qui relève de leur responsabilité et a pour conséquence de paralyser la succession indépendamment du caractère abusif ou non ;

Considérant que le seul fondement possible à la demande formée de ce chef étant celui de la responsabilité délictuelle qui implique que la partie qui l'invoque démontre l'existence d'une faute, la preuve d'une telle faute n'est pas rapportée par les consorts [H], M. [W] [JG] et Mme [C] [TC] ayant pu valablement se méprendre sur l'étendue de leur droit ; qu'en conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande des consorts [H] ;

Qu'en outre, au regard des solutions apportées au litige, M. [W] [JG] et Mme [C] [TC] seront déboutés de leur demande de ce chef ;

PAR CES MOTIFS :

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qui concerne le legs à Mme [C] [TC],

Y ajoutant,

Dit que le legs particulier au profit de Mme [C] [TC] aux termes du testament du 17 décembre 2013 se heurte à l'interdiction résultant des dispositions des articles L.116-4 du code de l'action sociale et des familles ;

Dit que Mme [E] [H] épouse [SU], Mme [U] [H] épouse [R] et M. [L] [H] sont déchargés de toute obligation de délivrance du legs au profit de Mme [C] [TC] ;

Déboute M. [W] [JG] et Mme [C] [TC] de leur demande au titre des pénalités et majorations au profit de l'Administration fiscale ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par M. [W] [JG] et Mme [C] [TC], ainsi que par Mme [E] [H] épouse [SU], Mme [U] [H] épouse [R] et M. [L] [H] ;

Rejette toute autre demande ;

Condamne M. [W] [JG] et Mme [C] [TC] aux entiers dépens.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 18/07430
Date de la décision : 12/06/2019

Références :

Cour d'appel de Paris E1, arrêt n°18/07430 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-06-12;18.07430 ?
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