Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 10
ARRÊT DU 01 JUILLET 2019
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/07669 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5P3A
Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Mars 2018 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 15/10920
APPELANTE
Madame [F] [H] épouse [P]
Demeurant [Adresse 4]
[Localité 8]
Représentée par Me Maryline LUGOSI de la SELARL Selarl MOREAU GERVAIS GUILLOU VERNADE SIMON LUGOSI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0073
INTIME
LE DIRECTEUR RÉGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES D'ILE DE FRANCE ET DU DÉPARTEMENT DE [Localité 9]
Pôle Fiscal Parisien 1, Pôle Juridictionnel Judiciaire
Ayant ses bureaux [Adresse 2]
[Localité 7]
Représenté par Me Guillaume MIGAUD, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC430
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 Avril 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Edouard LOOS, Président, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Edouard LOOS, Président
Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère
Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffière, lors des débats : Mme Cyrielle BURBAN
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Edouard LOOS, Président et par Mme Cyrielle BURBAN, Greffière à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Mme [U] [N] veuve [H] décédait le [Date décès 1] 2007, laissant pour lui succéder ses trois petits enfants, issus de ses deux enfants prédécédés. Les trois petits enfants étaient également légataires à titre particulier des immeubles dépendant de la succession. [F] [P] née [H] et [W] [R] née [H] étaient ainsi légataires indivises de deux immeubles de rapport, sis au 110 de la rue Orfila et au 7 de la villa Stendhal, dans le [Localité 10].
[W] [R] née [H] et [F] [P] née [H] déposaient conjointement une déclaration de legs particulier enregistrée le 23 mai 2008. Les immeubles du 110 de la rue Orfila et du 7 de la villa Stendhal étaient déclarés respectivement pour une valeur de 1 400 000 euros et de 1 300 000 euros, soit 700 000 euros et 650 000 euros pour la part revenant à [F] [P] née [H].
Le 18 octobre 2011, l'administration fiscale formulait une proposition de rectification de la valeur des biens susdits.
Dans sa réponse donnée le 14 juin 2012 aux observations du contribuable formulées les 16 novembre 2011 et 14 décembre 2011, l'administration fiscale maintenait partiellement les rectifications.
Aux termes d'un avis du 26 mars 2013, la commission départementale de conciliation de Paris proposait d'estimer la valeur vénale de la moitié indivise du 110 de la rue Orfila à 863 037 euros et celle du 7 de la villa Stendhal à 834 653 euros, estimations acceptées par l'administration fiscale.
Les rappels de droits de succession étaient mis en recouvrement le 22 novembre 2013, suivant avis n 13 11 00030, pour 130 601 euros de droits et 25 075 euros d'intérêts de retard.
Le 23 décembre 2013, puis le 26 janvier 2015, [F] [P] née [H] présentait une réclamation, que rejetait l'administration des impôts par lettre du 27 mai 2015.
Par exploit en date du 21 juillet 2015, placé le 23 juillet 2015, [F] [P] née [H] portait la contestation devant le tribunal de grande instance de Paris.
* * *
Vu le jugement prononcé le 14 mars 2018 par le tribunal de grande instance de Paris qui a :
- Dit et jugé régulière et bien fondée la procédure de rectification ;
- Débouté [F] [P] née [H] de sa demande de décharge des impositions et des intérêts de retard contestés ;
- Confirmé la décision de rejet du 27 mai 2015 ;
- Laissé à la charge de [F] [P] née [H] les frais irrépétibles par elle exposes
- Condamné [F] [P] née [H] aux entiers dépens.
Vu l'appel du jugement par Mme [F] [P] le 11 avril 2018,
Vu les conclusions signifiées par Mme [F] [P] le 03 janvier 2019,
Vu les conclusions signifiées par le DRFIP le 5 octobre 2018,
Mme [P] demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit:
- accueillir Mme [P] en ses demandes, les déclarer recevables et bien fondées ;
A titre principal :
- juger que la motivation de la proposition de rectification du 18 octobre 2011 a été faite en violation des dispositions des articles L.17 et L.57 du livre des procédures fiscales ;
- Dire et juger que la proposition de rectification du 18 octobre 2011 est irrégulière et qu'en conséquence, les impositions et les pénalités contestées sont irrégulières ;
A titre subsidiaire :
- Dire et juger que la valorisation des immeubles situés 110, rue Orfila à Paris (20ème) et 7, villa Stendhal à Paris (20ème) en application de la méthode d'évaluation par comparaison permet de fixer la valeur de ces immeubles respectivement à 1 400 000 euros et 1 300 000 euros ; que cette évaluation est corroborée tant par l'application de la méthode d'évaluation par le revenu que par la méthode d'évaluation par réajustement de la valeur vénale ; qu'ainsi, c'est à bon droit que l'immeuble situé 110, rue Orfila à Paris (20ème) et 7, villa Stendhal à Paris (20ème) ont été déclarés respectivement pour une valeur de 1 400 000 euros et 1 300 000 euros dans la déclaration de succession de Madame [U] [H].
- Prononcer la décharge des impositions et des intérêts de retard contestés ;
En conséquence :
- Infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Paris en date du 14 mars 2018 en ce qu'il a :
* Dit et jugé régulière et bien fondée la procédure de rectification ;
* Débouté Madame [P] née [H] de sa demande de décharge des impositions et des intérêts de retard contestés ;
* Confirmé la décision de rejet du 27 mai 2015 ;
* Laissé à la charge de Madame [P] née [H] les frais irrépétibles ;
* Condamné Madame [P] née [H] aux entiers dépens.
En tout état de cause :
- Condamner l'Etat à verser à Madame [P] la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
- Condamner l'Etat aux entiers dépens tant de première instance que d'appel
Le DRFIP demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :
Dire et juger Mme [F] [P] mal fondée en son appel du jugement rendu le 14 mars 2018 par le tribunal de grande instance de Paris,
La débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions,
Confirmer la décision de rejet du 27 mai 2015,
Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Rejeter la demande de paiement de la somme de 5 000 euros fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
SUR CE,
a) Sur la procédure de rectification
Considérant que, en application de l'article L.57 alinéa 1er du livre des procédures fiscales, 'L''administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation' ; que, selon les termes de l'article L. 17, alinéa 2, du même livre, l'administration est tenue d' apporter la preuve de l'insuffisance des prix exprimés et des évaluations fournies dans les actes ou déclarations ;
Considérant que Mme [P] prétend que la procédure de rectification de la valeur des biens hérités est irrégulière ; qu'elle soutient que l'administration ne justifie pas en quoi les termes de comparaison retenus étaient pertinents dans la mesure ou ils n'étaient pas intrinsèquement similaires alors que selon les termes de l'article L 57 al 1 du livre des procédures fiscales, l'administration est tenue d'indiquer dans la proposition de rectification les éléments chiffrés, et les termes de comparaison, avec suffisamment de précision de manière à permettre au contribuable de formuler ses observations ; que, suite à l'avis de la commission départementale de conciliation de Paris rendu le 26 mars 2013, seuls deux termes de comparaison ont été utilisés par l'administration alors qu'il convenait d'en présenter au moins 3 ;
Mais considérant que la proposition de rectification du 18 octobre 2011 est parfaitement conforme aux exigences légales ; que pour l'immeuble situé 110, rue Orfila à Paris (75020) ont été versés 3 termes de comparaison portant sur des immeubles intrinséquement similaires avec énumération de l'ensemble de leurs caractéristiques (date de mutation, références de publication de l'acte, situation de l'immeuble, composition et contenance, ancienneté, affectation, catégorie cadastrale , prix payé) ; que ces précisions se retrouvent également pour les 3 termes de comparaison se rapportant au bien immobilier situé [Adresse 5]) ; que Mme [P] a ainsi été parfaitement en mesure 'de formuler ses observations' ; qu'ensuite la commission de conciliation a retenu 2 termes de comparaison pour le bien situé 110, rue Orfila à Paris (75020) et 3 pour le bien situé [Adresse 6]) ; qu'après adoption de la méthode de comparaison et application d'un abattement de 30 % pour vétusté concernant le premier bien elle a proposé de chiffrer la valeur vénale de la moitié indivise à 715 417 euros pour le premier bien et à 834 653 euros pour le second bien, estimation acceptée par les services fiscaux ; que la procédure a ainsi été suivie de manière parfaitement régulière, les contestations soulevées n'étant pas fondées ;
b) sur la valeur vénale des 2 immeubles
Considérant que, à titre subsidiaire, Mme [P] prétend que les valeurs vénales des immeubles dans la déclaration de legs enregistrée le 23 mai 2008 étaient justifiées, cela par application des méthodes d'évaluation par comparaison, par le revenu, ou par réajustement de la valeur vénale ;
Considérant, sur la méthode d'évaluation par comparaison, que Mme [P] demande de prendre en compte 5 correctifs se rapportant à la localisation des biens comparés, à la présence ou non d'ascenseur, à la présence de locaux commerciaux, à l'état d'entretien, et enfin la situation de tutelle de la défunte présentant un risque de conflit qui justifierait l'application d'une décote de 5 % sur la valeur de chacun des immeubles litigieux ;
Considérant que, par de justes motifs que la cour adopte, les premiers juge ont procédé à un examen des termes de comparaison retenus par la commission de conciliation, se sont prononcés sur les correctifs invoqués par l'appelante et ont retenu les valeurs vénales proposées par ladite commission ; qu'il convient d'ajouter les éléments suivants :
* sur la localisation: les références fournies par l'appelante (pièce n° 8) sont totalement inopérantes puisqu'elles ne concernent pas des ventes d'immeubles entiers ni des prix de surface pondérée hors oeuvre ;
* sur la présence d'ascenseur : s'agissant de la rue Orfila , seul l'immeuble de comparaison situé au [Adresse 3] est doté d'un ascenseur .En toute hypothése , l'immeuble a fait l'objet d'une décôte de 30 % pour vétusté ;
* présence de locaux commerciaux : Le prix de vente retenu pour les 5 termes de comparaison a nécessairement pris en compte le fait que les locaux disposent d'une partie commerciale . Appliquer un coefficient de diminution du prix de vente reviendrait à tenir compte deux fois de la présence de locaux commerciaux
* l'état d'entretien : un taux de vétusté de 30 % a déjà été retenu pour l'immeuble de la rue Orfila.
* Si la défunte se trouvait sous un régime de tutelle, cette circonstance n'affecte aucunement la valeur du bien qui , au jour du décès donc de la transmission, est libre d'occupation.
Considérant, sur la méthode d'évaluation par le revenu, que Mme [P] prétend qu'il conviendrait d'appliquer un taux de capitalisation de 6,5 % pour tenir compte de la situation de certains locataires bénéficiant de baux sous le régime de la loi de 1948, et de l'état de vétusté du bien ;
Mais considérant que les baux soumis à la loi de 1948 ne concernent aucun logement de la rue Orfila et 2 logements sur 27 de la rue Standhal ; qu'il convient d'appliquer un taux de capitalisation de 4,5 % dont le tribunal a justement déduit qu'il conduisait à des valorisations des immeubles supérieurs à ceux retenus par la commission de conciliation ;
Considérant enfin, sur la méthode d'évaluation par réajustement d'une valeur antérieure, que Mme [P] prétend qu'il ressortirait de deux rapports d'experts des 11 janvier 2005, et [Date décès 1] 2007, que les valeurs déterminées selon cette méthode seraient très proches des valeurs vénales déclarées ;
Mais considérant que les services fiscaux relèvent justement que le 1er rapport établi par M. [K] s'attache à la situation des biens au 1er janvier 2001 alors qu'il convient d'apprécier leur situation en avril 2007; que le second rapport également établi par M. [K] invoque des prix de vente pour des cessions non datées et retient un prix au mètre carré largement inférieur à ces prix de cession; que les conclusions contenues dans ce rapport sont insusceptibles de remettre en cause les estimations auxquelles est parvenue la commission de conciliation ;
Considérant qu'il se déduit de ce qui précède que le jugement déféré doit être confirmé en toutes ses dispositions ; que la solution du litige conduit à débouter Mme [P] de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
REJETTE toutes autres demandes ;
CONDAMNE Mme [F] [P] aux dépens .
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
C. BURBAN E. LOOS