Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 6
ARRET DU 18 SEPTEMBRE 2019
(n° , 2 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/03712 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B23YC
Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Février 2017 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° 13/02122
APPELANT
Monsieur [B] [M]
[Adresse 1]
Représenté par Me Jean-luc BERNIER DUPREELLE, avocat au barreau de PARIS, toque : R046
INTIMÉES
AMA [H] [A]
[Adresse 2]
Représentée par Me Loïc TOURANCHET, avocat au barreau de PARIS, toque : K0168 substitué à l'audience par Me Jérémie THIERRY, avocat au barreau de PARIS
SAS HOPITAL EUROPEEN DE PARIS GVM CARE & RESEARCH
[Adresse 3]
Représentée par Me Loïc TOURANCHET, avocat au barreau de PARIS, toque : K0168
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Juin 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Hélène GUILLOU, Présidente de chambre
Madame Anne BERARD, Présidente de chambre
Madame Elisabeth MEHL-JUNGBLUTH, Conseillère
Greffier : Madame Martine JOANTAUZY, lors des débats
ARRÊT :
- contradictoire,
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
- signé par Madame Hélène GUILLOU, présidente de chambre et par Madame Pauline MAHEUX, greffière, présente lors de la mise à disposition.
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE :
Monsieur [B] [M] a été engagé le 10 janvier 1994 sous contrat de travail à durée indéterminée par la clinique [Établissement 1] devenue ensuite l'hôpital [Établissement 2] ci dessous dénommée [Établissement 3] qui relève de la convention collective de l'hospitalisation privée à but lucratif du 18 avril 2002, en qualité d'adjoint responsable administratif de nuit.
Toujours en poste au moment de la saisine du conseil de prud'hommes de Bobigny le 21 mai 2013 il exerçait des fonctions de standardiste de nuit aux urgences et détenait ou avait détenu des mandats de délégué du personnel, de membre du CHSCT et de délégué syndical.
Il a sollicité des rappels de salaire au titre de la privation de son temps de pause, de contreparties financières en repos compensateurs et majorations attachées aux heures supplémentaires, de paiement de ses heures de délégation incluant les temps de trajet pour les exercer, et de primes de fin d'année pour une partie de l'année 2011 et les années 2012 et 2013.
L'[Établissement 3] a fait l'objet de l'ouverture d'une procédure collective le 22 janvier 2014.
Un plan de continuation a été arrêté par le tribunal de commerce de Bobigny le 20 mai 2015.
Par jugement du 16 février 2017, le conseil de prud'hommes de Bobigny a débouté Monsieur [M] de l'ensemble de ses demandes et l'[Établissement 3] de sa demande reconventionnelle. Monsieur [M] a été condamné aux entiers dépens.
Le 9 mars 2017, Monsieur [M] a interjeté appel du jugement.
Dans ses dernières conclusions, auxquelles la cour fait expressément référence, remises au greffe et notifiées par réseau privé virtuel des avocats le 20 mars 2019, Monsieur [M] conclut à l'infirmation du jugement et sollicite la condamnation de l'[Établissement 3] à lui verser les sommes suivantes :
- 5 702,63 euros à titre de rappel de salaire au titre du temps de pause non attribué,
- 36 553,49 euros au titre de la majoration pour heures supplémentaires des heures de délégation pour la période de l'année 2009 à l'année 2018,
- 3 466 euros à titre de régularisation des rémunérations afférentes aux heures passées en réunions de représentants du personnel, des heures de délégation et le paiement des temps de trajet liés aux mandats exercés, pour la période de l'année 2009 à l'année 2018,
- 11 608,80 euros au titre du différentiel de la prime de nuit pour la période de l'année 2009 à l'année 2018,
- 95 552,08 euros au titre des repos compensateurs dus en dépassement du contingent annuel autorisé d'heures supplémentaire pour la période de l'année 2009 à l'année 2018,
- 6 498,90 euros au titre de la prime de fin d'année 2012 à 2014 et pour une partie de l'année 2011,
- et ordonner la remise des bulletins de salaires rectifiés,
- 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions, auxquelles la cour fait expressément référence, remises au greffe et notifiées par réseau privé virtuel des avocats le 17 mai 2019, l'[Établissement 3] et Maître [H] [A], administrateur judiciaire, concluent à la confirmation du jugement et, dès lors, demande à la cour de débouter Monsieur [M] de l'ensemble de ses demandes et de le condamner à 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS
Sur le rappel de salaire de temps de pause de nuit depuis avril 2015
Aux termes de l'article L3121-33 du code du travail dès que le temps de travail quotidien atteint 6 heures le salarié bénéficie d'un temps de pause d'une durée minimale de 20 minutes.
En l'espèce par courrier du 19 octobre 2012 l'employeur a informé le salarié de son nouveau planning de 20 heures à 8 heures incluant une pause de 20 minutes à prendre entre 2h et 2 heures 20.
Monsieur [M] soutient qu'il était seul à son poste de standardiste de nuit et dans l'impossibilité matérielle de s'absenter et donc de prendre une quelconque pause, compte tenu, notamment, de sa surcharge de travail de l'absence de local.
Les dispositions de l'article L3171-4 du code du travail relatives à la répartition de la charge de la preuve des heures effectuées entre l'employeur et le salarié ne sont pas applicables à la preuve du respect des dispositions relatives au temps de pause.
Aussi en l'absence d'un texte spécial applicable, il convient de se référer au droit commun de la preuve, et de faire peser exclusivement sur l'employeur la charge de la preuve d'établir qu'il a mis en place une organisation interne permettant à son salarié de prendre sa pause de manière effective.
L'absence de preuve n'est pas démontrée par celle de l'inexistence d'un local particulier de repos même si l'article 53-7 de la convention collective prévoit la mise à disposition de cet élément de confort aux travailleurs de nuit ou par celle de l'impossibilité pour le salarié de sortir de l'établissement.
Cette preuve n'est pas plus apportée par celle des efforts entrepris par l'employeur pour améliorer la situation et tendre vers la possibilité de prendre une pause dans de meilleures conditions matérielles.
Elle impose de démontrer que l'organisation du travail permettait à Monsieur [B] [M] en sa qualité de standardiste de nuit dont la fiche de poste précise qu'il avait pour tâche « d'animer l'équipe paramédicale, gérer les unités de soins et organiser la prise en charge globale du patient pour garantir la qualité et la continuité des soins la nuit en conformité avec les bonnes pratiques et la règlementation existant », de s'absenter et de vaquer librement à ses occupations
L'[Établissement 3] explique que pour faire un roulement et permettre aux personnels travaillant de nuit de prendre leur pause l'ensemble des services était organisé en deux équipes comprenant chacune au moins deux salariés et que de surcroit le personnel soignant de chacun des différents services (urgence-médecine chirurgie et mère enfant) était mobile.
Mais les attestations qu'elle produit pour en justifier ne visent pour la plupart que le travail des infirmiers et soignants et les plannings mensuels sur lesquels figurent nominativement les infirmiers diplômés d'État (IDE) et les aides-soignants (AS) programmés au sein des différents services.
Ces plannings ne font pas ressortir de manière précise la répartition de ce personnel soignant au sein des équipes de jour et de nuit qui se relaient suivant les tranches horaires prévues au sein de l'établissement, de sorte qu'il n'est pas même possible de vérifier avec exactitude si le personnel soignant en poste la nuit avait la possibilité de prendre son temps de pause dans le respect des dispositions tant conventionnelles que légales en vigueur.
Dans tous les cas ces planning n'incluent pas le poste de standardiste de nuit de Monsieur [B] [M].
Et lorsque madame [V] cadre santé affirme que « le personnel paramédical est réparti en deux équipes de 12 heures d'amplitude » elle ne donne pas la composition d'une équipe ce qui ne permet pas d'exclure que Monsieur [B] [M] était, comme il le soutient, seul dans son équipe la nuit.
Si quelques attestions de salariés visent le personnel paramédical pour affirmer qu'il avait la possibilité de prendre un pause, il faut constater qu'elles sont particulièrement sommaires sur les conditions dans lesquelles ils ont été amenés à constater que « le personnel paramédical est en nombre suffisant pour prendre une pause » et qu'elles ne visent pas particulièrement Monsieur [B] [M] ou le poste de responsable administratif qu'il occupait.
En outre la présence et le rôle d'un responsable administratif adjoint de nuit et supérieur hiérarchique du personnel soignant « qui n'est pas rattaché à un service de soins particulier et travaille en collaboration avec chacun d'eux qui pouvait intervenir à la place d'un salarié quand celui-ci prend sa pause, si cela est nécessaire » ainsi que le développe l'employeur dans ses conclusions ne sont confirmés par aucune pièce du dossier.
L'organisation mise en place par l'employeur pour permettre à Monsieur [B] [M] de quitter son poste manque donc de clarté et de rigueur et la cour ne peut en déduire si au delà du personnel soignant la mobilité et la disponibilité du personnel au sein des différents services de l'hôpital permettait au standardiste de nuit de prendre sa pause sans violer les impératifs de l'entreprise tenant à assurer la continuité des soins et la sécurité des patients admis aux urgences.
En conséquence ce temps de travail doit être rémunéré comme du temps de travail effectif et l'[Établissement 3] ne pouvait payer le salarié présent 12 heures par nuit seulement sur la base de 11 heures 40.
Dans des calculs particulièrement détaillés qui ne font pas l'objet de critiques et que la cour reprend sur la base de 13 nuits mensuelles ( 3 nuits, sur 4,33 semaines), des taux horaires du salaire au cours de la période de janvier 2015 à décembre 2018 il ressort une créance de 4 461,60 euros outre congés payés afférentes de 446,16 euros à laquelle se rajoute une créance de 722,61 euros outre congés payés afférents de 72,26 euros pour la pause non prise pendant les nuits de vacations supplémentaires qui sont pour partie majorées pour jours fériés travaillées .
Ainsi la créance de Monsieur [B] [M] est d'un total de 5 702,63 euros y compris les congés payés.
Sur la majoration pour heures supplémentaires au titre des heures de délégation
Au titre de ses différents mandats successif ou simultanés, membre du comité d'entreprise ( 20 heures par mois de juin 2015 à décembre 2018), représentant syndical délégué auprès du CE (20 heures par mois de janvier 2009 à juin 2010), délégué du personnel (20 heures par mois de mai 2010 à mai 2015, 15 heures par mois de juin 2015 à décembre 2018) délégué syndical ( 25 heures par mois de septembre 2011 à mai 2015- 15heures par par mois de juin 2015 à décembre 2018) ou membre du CHSCT (20 heures par mois de novembre 2012 à mai 2015) Monsieur [B] [M] a effectué des heures de délégation.
Selon l'article L 2125-57 du code du travail le temps passé en heures de délégation est de plein droit considéré comme du temps de travail et payé à l'échéance normale.
Si le salarié les prend en dehors de ses heures de travail elles constituent des heures supplémentaires et sont rémunérées avec les majorations habituelles de 25 et 50 %.
Celles-ci ne sont autorisées que si les nécessités du mandat exigent qu'elles soient prises en dehors des heures de travail.
En l'espèce il faut constater que le travail de nuit de Monsieur [M] ne lui permettait pas d'assister aux réunions du comité d'entreprise, de délégués du personnel ou du CHSCT auxquelles sa présence est attestée par le contenu des comptes rendus de réunions se déroulant toujours de jours ni de rencontrer le personnel de jour et que donc les nécessités de son mandat exigeaient qu'il réalise la majorité de ses heures de délégation de jours au delà de son temps de travail et donc qu'elles soient rémunérées en heures supplémentaires.
S'agissant du quantum de celles-ci Monsieur [M] fait valoir que l'[Établissement 3] ne conteste pas la réalisation de ces heures indiquées sur de nombreux bons de délégation quand l'employeur lui répond que ces bons n'ont pas été signés et ne lui sont pas opposables, que le crédit d'heures mensuel ne pouvait être dépassé qu'à charge pour le salarié de démontrer l'existence de circonstances exceptionnelles.
Mais de fait la société n'a jamais contesté la réalisation de ces heures qui apparaissent sur les bulletins de salaire du salarié à côté d'autres heures supplémentaires sur une ligne « heures complémentaires » et les bons de délégation particulièrement détaillés ne font que les corroborer.
Ces heures « complémentaires » sont nécessairement des heures supplémentaires en ce que le salarié travaillant à temps plein de nuit et était payé par ailleurs pour 151,67 heures de travail.
En conséquence c'est à tort que l'employeur ne leur pas appliqué les majorations légales afférentes aux heures supplémentaires.
Le salarié fixe le montant de ses prétentions dans la limite de la période de prescription quinquennale en vigueur à l'époque des faits et courant à compter du 1 er janvier 2019 compte tenu de la date de saisine du conseil de prud'hommes.
En reprenant les sommes accordées sur les bulletins de paie et leur appliquant les majorations légales la cour aboutit à la somme de 36 553,49 euros réclamée par Monsieur [B] [M].
En conséquence le jugement du conseil de prud'hommes est infirmé et l'[Établissement 3] est condamnée à payer à Monsieur [B] [M] ce montant.
Sur la régularisation des rémunérations afférentes aux temps de trajet liés aux mandats de Monsieur [M] .
L'exercice d'un mandat de représentation ne doit conclure à aucune perte de rémunération de sorte que le temps de trajet, pris en dehors de l'horaire normal de travail et effectué en exécution des fonctions représentatives, doit être rémunéré comme du temps de travail effectif pour la part excédant le temps normal de déplacement entre le domicile et le lieu de travail
Les dispositions de la convention collective de l'hospitalisation privée à but lucratif articles 33.1 et 3, prévoient ainsi spécifiquement que les temps de trajet pour se rendre aux réunions organisées par l'employeur constituent du temps de travail effectif et n'ont pas à être déduites du nombre d'heures de délégation dont disposent les membres des institutions représentatives du personnel.
Monsieur [M] sollicite le paiement d'autres temps de trajet postérieurs que la l'[Établissement 3] n'a pas rémunérés.
Les plannings mensuels détaillés du salarié produits pour toute la période 2009 à 2015 auxquels sont joints les bons de délégation adressés à l'employeur par le salarié distinguent les heures de délégation et les heures de réunions, du CE ou des délégués du personnel dont il ressort qu'elles se sont tenues en dehors des horaires de travail du salarié et exèdent dès lors son temps normal de déplacement en ce qu'il n'avait aucun déplacement sur son lieu de travail à faire de jour en dehors de l'exercice de son mandat.
Ces trajets doivent dès lors lui être rémunérés en temps de travail effectif.
Reprenant alors les dates de réunions à l'initiative de l'employeur indiqués sur ces plannings à compter du 1 er janvier 2009 et un temps de trajet de 1 heure aller retour du domicile du salarié à [Localité 1] dans les Hauts de Seine à l'entreprise pour fixer le temps de travail effectif à rémunérer ainsi que le taux horaire applicable au cours de chaque période considérée et vérifiant ainsi les calculs détaillés opérés par le salarié qui ne font pas l'objet de contestation sur ce point, la cour aboutit à la somme totale de 3 466 euros.
En conséquence le jugement du conseil de prud'hommes est infirmé et l'[Établissement 3] condamnée à payer à Monsieur [B] [M] ce montant.
Sur le différentiel de la prime de nuit
L'article 82-1 de la Convention collective met en place une prime spécifique aux travailleurs de nuit et qui se calcule comme suit :
« Les salariés affectés au poste de travail de nuit percevront pour chaque heure effectuée entre 19 heures et 8 heures une indemnité égale à 10 % du salaire horaire.
Le salaire correspondant de base au calcul de cette indemnité est le salaire mensuel conventionnel correspondant au coefficient d'emploi. »
Monsieur [M] soutient qu'il lui est versé chaque mois à ce titre une somme forfaitaire insuffisante de 113, 56 euros qui apparaît en « indemnité conventionnelle de nuit » sur ses bulletins de paie et sollicite le paiement de la différence avec la prime de nuit réellement due.
L'employeur explique que la prime conventionnelle a été transformée en une prime de nuit mensualisée, d'un montant identique pour tous les salariés employés de nuit de 113,56 euros qui apparaît sur les bulletins de paie de Monsieur [B] [M] et qu'à cette prime d'origine conventionnelle se rajoute une seconde prime intitulée « prime roseraie nuit » mise en place par l'accord d'établissement du 25 mai 1999 toujours versée malgré la dénonciation de cet accord en octobre 2004 à l'ensemble des salariés travaillant de nuit à compter de novembre 2004.
Il soutient que les deux primes qui sont appliquées uniquement au personnel de nuit ont le même objet et doivent s'ajouter, que la somme des deux primes dépassant largement le montant de la prime de nuit conventionnelle dont la base de calcul est le salaire conventionnel, il a satisfait à son obligation conventionnelle et que la demande de l'appelant doit en conséquence être rejetée comme étant mal fondée.
Mais des termes de la convention collective il ressort que la prime de nuit conventionnelle a pour objet de compenser la contrainte d'un travail de nuit.
L'accord d'établissement sur la réduction et l'aménagement du temps de travail signé le 25 mai 1999 prévoit une indemnité compensatrice de réduction du temps de travail (ICRTT) destinée à maintenir la rémunération salariale sur une base de 39 heures pour les salariés de jour alors travaillant 35 heures, et sur une base de 42 heures pour les salariés de nuit alors travaillant 39 heures.
L'article XIII A de cet accord précisant les modalités de calcul de l'indemnité compensatrice pour les salariés de jour et pour les salariés de nuit dispose que l'ICRTT et l'ICRTT HS nuit s'ajoutent au salaire indiciaire proratisé sur la base de 35 heures et précise que "S'y ajouteront toutes les primes spécifiques dans l'établissement incluses dans le contrat de travail, non proratisées, ainsi que les primes conventionnelles indexées sur la valeur du point (nuit, dimanche).".
L'article XIII B prévoit l'intégration de l'ICRTT dans le salaire indiciaire de chaque salarié avec majoration de son taux horaire tandis l'article XIII C énonce à propos de l'évolution de l'ICRTT HS nuit :
« Transformation en prime roseraie nuit ( s'ajoutant à la prime conventionnelle à due concurrence de la moitié de son montant au 1er juillet 2000 et du solde au 1er juillet 2001)
Cette prime de nuit roseraie suivra en % les augmentations de la valeur du point conventionnel à partir du 2 juillet 2001.".
Il est en outre précisé plus loin que l'ICRTT et l'ICRTT HS nuit ne rémunèrent pas le travail effectif du salarié mais servent à compenser l'effet de la réduction du temps de travail sur le salaire mensuel du salarié.
A la différence de l'indemnité compensatrice de réduction du temps de travail des salariés de jour, l'indemnité compensatrice de réduction du temps de travail des salariés de nuit dite ICRTT H.S nuit n'a donc pas été intégrée au salaire de base mais s'est transformée en prime Roseraie nuit, les salariés continuant à percevoir la valeur de leurs heures travaillées sous cette forme.
La prime Roseraie nuit qui compense l'effet de la réduction du temps de travail sur le salaire mensuel, ne rémunère pas le travail effectif du salarié, tandis que la prime prévue à l'article 82-1 de la convention collective compense la contrainte du travail de nuit.
Les dispositions conventionnelles distinguent clairement l'objet de chacune des deux primes de nuit qui ne peuvent être confondues et l'interprétation qu'en fait l'intimé est inexacte.
Or, les primes prévues par un accord collectif ou la convention collective, comme les gratifications contractuelles, présentent un caractère obligatoire pour l'employeur et peuvent se cumuler si elles n'ont pas le même objet et la même cause.
Le différentiel de prime de nuit sollicité sur le fondement de l'article 82-1 de la convention collective applicable, qui aux termes de cet article doit être de 10 % du salaire conventionnel de base, est en conséquence dû par l'intimé depuis l'année 2009 ce qui conduit à une créance au 31 décembre 2018 de 11 608,80 euros.
Sur le repos compensateur.
L'article L. 3121-11 du code du travail dispose que des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d'un contingent annuel défini par une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche qui fixe l'ensemble des conditions d'accomplissement d'heures supplémentaires au-delà du contingent annuel ainsi que les caractéristiques et les conditions de prise de la contrepartie obligatoire en repos due pour toute heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent annuel.
Cette convention ou cet accord collectif peut également prévoir qu'une contrepartie en repos est accordée au titre des heures supplémentaires accomplies dans la limite du contingent.
À défaut d'accord collectif, un décret détermine ce contingent annuel et les caractéristiques et les conditions de prise de la contrepartie obligatoire en repos pour toute heure supplémentaire accomplie au-delà du contingent annuel.
L'article D. 3121-14-1 du même code énonce que le contingent annuel d'heures supplémentaires prévu à l'article L. 3121-11 est fixé à 220 heures par salarié.
Monsieur [M] soutient qu'il a pu dépasser le contingent annuel sans bénéficier d'un repos compensateur équivalent à 100 % et forme une demande indemnitaire en contrepartie sur la période 2009 à 2018.
L'employeur lui répond que certaines heures supplémentaires ne s'imputent pas sur le contingent annuel d'heures supplémentaires car effectuées dans le cadre de travaux urgents déterminés à l'article L. 3132-4 du code du travail pour organiser des mesures de sauvetage pour prévenir des accidents imminents ou réparer des accidents survenus au matériel aux installations ou aux bâtiments pour assurer la continuité du service.
Mais si l'ont retient que les heures supplémentaires ne concernent qu'incidemment le temps de pause que le salarié n'a pu prendre pour assurer la continuité du service de santé et que cette impossibilité résulte d'un manquement récurrent de l'employeur à organiser le service et que par ailleurs et pour l'essentiel les heures supplémentaires sont en lien avec l'exercice des mandats par un salarié travaillant de nuit il apparaît que la réalisation de ces heures n'entrent pas le cadre des dispositions de l'article L3132-4 du code du travail invoquées et que l'ensemble de celles -ci peut être inclus dans le nombre d'heures ouvrant droit à repos compensateurs.
En conséquence il est fait droit à droit à la demande d'indemnisation du salarié réparant pour la période de 2009 à 2018 le défaut de repos compensateur sur l'intégralité des heures supplémentaires dépassant le contingent annuel de 220 heures.
Pour calculer ce dépassement le salarié a établi un tableau détaillé qui ne fait pas l'objet de critique.
Reprenant ces calculs qui font une juste appréciation de ses droits la cour aboutit pour ces 10 années au total de 95 552,08 euros réclamé.
En conséquence l'[Établissement 3] est condamnée à payer à Monsieur [B] [M] ce montant à titre de dommages et intérêts.
Sur la demande de rappel de salaire au titre de la prime de fin d'année jusqu'en 2014.
L'[Établissement 3] soutient que le versement de la prime de fin d'année d'un montant maximum de un mois de salaire, se fondait sur un usage qui a fait l'objet d'une dénonciation régulière démontré par le procès verbal de réunion du comité d'entreprise du 12 octobre 2011.
Le salarié lui oppose que ce versement reposait sur un accord collectif d'entreprise sur les salaires du 5 février 2009 et ne pouvait dès lors être supprimé par l'une des parties que dans le cadre d'une dénonciation régulière et la mise en place d'un nouvel accord; que cette dénonciation a été réalisée dans un accord de révision du 24 février 2015 signé par l'[Établissement 3] qui mentionne que « la prime de fin d'année est supprimée et remplacée par l'attribution de divers avantages... ».
Monsieur [B] [M] réclame en conséquence le paiement de la prime de fin d'année jusqu'à la fin de l'année 2014.
A supposer que le versement de la prime de fin d'année reposait sur un usage et non sur l'article 4 de l'accord collectif relatif à la négociation annuelle sur les salaires signé le 5 février 2009 qui prévoit le versent d'une prime de fin d'année pour tout le personnel ainsi que le soutient la société elle ne pouvait pour autant y mettre fin sans justifier qu'elle l'a dénoncé au salarié.
Or si elle produit la copie d'un document intitulé 'dénonciation à chaque salarié' il apparaît que ce doucument n'est pas nominativement adressé à Monsieur [B] [M] et n'est pas daté.
Ainsi la preuve d'une dénonciation individuelle n'est pas rapportée.
C'est donc à bon droit que Monsieur [B] [M] réclame la poursuite de cet usage de 2011 jusqu'à l'accord de révision du 24 février 2015 pour un montant total de 6 498,90 euros.
L'[Établissement 3] Roseraie sera condamnée aux dépens et versera à Monsieur [B] [M] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
INFIRME le jugement en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau et ajoutant,
CONDAMNE l'[Établissement 3] à verser à Monsieur [B] [M] les sommes suivantes :
- 5 702,63 euros à titre de rappel de salaire pour le temps de pause,
- 36 553,49 euros au titre de la majoration pour heures supplémentaires des heures de délégation pour la période de l'année 2009 à l'année 2018,
- 3 466 euros à titre de régularisation des rémunérations afférentes aux temps de trajet liés aux mandats exercés, pour la période de l'année 2009 à l'année 2018,
- 11 608,80 euros au titre du différentiel de la prime de nuit pour la période de l'année 2009 à l'année 2018,
- 95 552,08 euros au titre des repos compensateurs dus en dépassement du contingent annuel autorisé d'heures supplémentaire pour la période de l'année 2009 à l'année 2018,
- 6 498,90 euros au titre de la prime de fin d'année des années 2012 à 2014 et pour une partie de l'année 2011,
Ordonne la remise d'un bulletin de salaires rectifié,
CONDAMNE l'[Établissement 3] à payer à Monsieur [B] [M] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
CONDAMNE l'[Établissement 3] aux dépens de première instance et d'appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE