Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 10
ARRÊT DU 23 SEPTEMBRE 2019
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/18335 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6DYD
Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Juillet 2018 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 17/01100
APPELANTE
SA COFFIM
Ayant son siège social [Adresse 2]
[Localité 3]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Philippe ALBERT, avocat au barreau de PARIS, toque : B1104
Représentée par Me Bernard ALEXANDRE de la SELARL L.A, avocat au barreau de PARIS, toque : B1104
INTIME
MONSIEUR LE DIRECTEUR RÉGIONAL DES FINANCES PUBLIQUES D'ILE DE FRANCE ET DU DÉPARTEMENT DE PARIS
Pôle Fiscal Parisien 1, Pôle Juridictionnel Judiciaire
Ayant ses bureaux [Adresse 1]
[Localité 4]
Représenté par Me Guillaume MIGAUD de la SELARL ABM DROIT ET CONSEIL AVOCATS E.BOCCALINI & MIGAUD, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC430
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Juin 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Sylvie CASTERMANS, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Monsieur Edouard LOOS, Président
Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère
Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffière, lors des débats : Mme Cyrielle BURBAN
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Edouard LOOS, Président et par Mme Cyrielle BURBAN, Greffière à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Par actes en date du 07 mai 2004 enregistrés le 18 mai 2004 auprès du service des impôts des entreprises du [Localité 3], la société Coffim a acquis auprès de la SAS Uffi la totalité des parts de la SCI De [Adresse 5] pour un montant total de 4 669 860 euros, assortis d'un engagement de revendre la totalité des parts de la SCI dans un délai maximum de quatre ans.
La société Coffim s'est placée ainsi sous le régime des marchands de bien en application des dispositions de l'article 1115 du code général de impôts, et a bénéficié de l'exonération des droits d 'enregistrement sur cette acquisition.
La SCI De [Adresse 5] possédait, à la date d'acquisition des parts par la société Coffim un bien immobilier situé [Adresse 5], faisant de cette SCI une société a prépondérance immobilière.
Le 17 juin 2014, faisant suite à des opérations de vérification de comptabilité engagées par avis du 19 décembre 2013, l'administration fiscale notifiait à la société Coffim une proposition de rectification relative aux droits d'enregistrement, prononçant la déchéance du régime de faveur dont elle avait bénéficié lors de l'acquisition, la totalité des parts de la SCI De [Adresse 5] valorisées 21 la somme de 3 824 145 euros n'ayant pas été revendues à la date du 07 mai 2008.
Le montant des droits rappelés s'élevaient à la somme de 191 207 euros en application du taux de 5 % sur la somme de 3 824 145 euros et à la somme de 103 825 euros au titre des intérêts de retard.
Le 29 juillet 2014, la société Coffim a contesté cette proposition en soutenant qu'à la date du 07 mai 2008, tous les immeubles détenus par la SCI avaient été cédés, permettant la perception par l'administration fiscale de droits d'enregistrement et qu'elle n'avait pas cédé l'ensemble de sa participation dans le délai de 4 ans au motif que les associés minoritaires représentant 25 % du capital n'avaient pas accepté de céder leur participation, que ces éléments constituaient un cas de force majeure.
Le 10 septembre 2014, puis le 03 décembre 2014, l'administration fiscale rejetait la réclamation. Les droits et majorations ont été mis en recouvrement le 16 janvier 2015 à hauteur de 295 032 euros.
Le 19 mai 2016, la société Coffim a adressé une réclamation contentieuse avec demande de sursis de paiement. Le 17 novembre 2016 la direction générale des finances publiques, direction de contrôle fiscal d'île de France lui a notifié un rejet.
C'est dans ces conditions que par exploit en date du 16 janvier 2017, la société Coffim a fait assigner M. le directeur en charge de la direction de contrôle fiscal d'île de France, division juridique Est devant le tribunal de grande instance de Paris, afin de constater l'irrégularité de la procédure de vérification, et de prononcer la décharge de l'intégralité des droits d'enregistrement et majorations proportionnelle au titre de l'année 2004.
Par jugement en date du 13 juillet 2018, le tribunal de grande instance de Paris a :
- Débouté la société Coffim de l'ensemble de ses demandes ;
- Condamné la société Coffim aux entiers dépens.
La société Coffim a interjeté appel du jugement le 19 juillet 2018.
Par conclusions signifiées le 24 septembre 2018, la société Coffim demande à la cour de :
- Déclarer la SAS Coffim recevable et bien fondée en son appel,
- Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- Constater l'irrégularité de la procédure et l'annuler,
- Prononcer la décharge de l'intégralité des droits d'enregistrement de l'année 2004 et majorations ;
- Condamner l'administration au paiement de 2 000 euros au titre de l'article 700 du du code de procédure civile et aux dépens.
Par conclusions signifiées le 24 décembre 2018, la direction régionale des finances publiques, d'île de France et du département de Paris demande à la cour de :
- Débouter la société Coffim de toutes ses demandes, fin et conclusions ;
- Confirmer le jugement rendu le 13 juillet 2018 par le Tribunal de grande instance de Paris,
Et y faisant droit
- Condamner la société Coffim en tous les dépens de première instance et d'appel ;
- Condamner la société Coffim à verser à l'État la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile .
SUR CE,
Sur la régularité de la procédure
La société Coffim prétend que la procédure initiée à son encontre est irrégulière. Elle fait valoir que la procédure de rappels des droits d'enregistrement a pour origine la vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012.
Elle soutient que dans la mesure ou l'administration fiscale n'a pas visé les droits d'enregistrement au titre des années 2004 à 2008 dans l'avis de vérification préalable du 19 décembre 2013, la procédure ne peut relever des droits antérieurs à l'année 2011 et ultérieurs au 31 décembre 2012.
Elle fait valoir que le non respect d'une obligation qui date de 2008, aurait du nécessairement être adressé avant le début de contrôle.
La direction régionale des finances publiques d'Ile de France et du département de Paris réplique que les droits d'enregistrement litigieux n'avaient pas à être visés par l'avis de vérification de comptabilité en date du 19 décembre 2013. Elle fait valoir que ces droits de mutation ont été rectifiés à l'occasion d'un contrôle sur pièces ne nécessitant pas l'envoi préalable d'un avis de vérification ; qu'elle a respecté la procédure qu'elle a constaté dans ce cadre qu'au 07 mai 2008 la SA Coffim n'avait pas revendu la totalité de ses titres de la SCI de [Adresse 5].
Ceci étant exposé, aux termes de l'article 55 du livre des procédures fiscales lorsque l'administration constate une insuffisance, une inexactitude, dans les éléments servant au calcul des impôts, droits et taxes (..) les rectifications sont effectuées suivant la procédure de vérification contradictoire définie aux articles 57 à 61 du même code.
En l'espèce, lors de l'acquisition de parts de la SCI de [Adresse 5], la SA Coffim s'est engagée à vendre la totalité des parts acquises dans le délai de quatre ans, en contrepartie elle a bénéficié d'une exonération des droits d'enregistrement sur cette acquisition sur le fondement de l'article 1115 code général des impôts. Le délai de revente expirait le 07 mai 2008.
L'administration fiscale a adressé le 19 décembre 2013, un avis de vérification de comptabilité portant sur l'ensemble des déclarations fiscales ou opérations susceptibles d'être examinées, portant sur la période de 2011 à 2012. Dans le cadre de ses opérations de vérification, elle a constaté que la société Coffin étant toujours propriétaire des parts sociales de la SCI de [Adresse 5], ne s'était pas conformée à ses obligations.
L'administration a donc informé préalablement le contribuable qu'une vérification de comptabilité serait engagée à son encontre conformément aux dispositions de l'article 47 du livre des procédures fiscales. Elle a ensuite constaté au cours de cette vérification, une insuffisance au sens de l'article 55 précité. La remise en cause de l'application de ce régime de faveur a été notifiée par courrier du 17 juin 2014.
Au regard de ces éléments, l'administration a respecté les modalités exigées par les textes régissant la procédure de vérification. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré la procédure régulière.
Sur le bien fondé de l'imposition
La société Coffim prétend que la condition de revente prévue par l'article 1115 du code civil, pour bénéficier du régime de faveur concernant les droits d'enregistrement, a été respectée. Elle fait valoir qu'à la date du 07 mai 2008, l'ensemble des immeubles détenus par la SCI avait été vendu, mais qu'elle s'est heurtée à l'impossibilité matérielle de céder les titres de la SCI De [Adresse 5] en raison d'un blocage d'un associé minoritaire détenant 25 % des parts de la SCI, refusant de céder ses titres. Elle assimile ce blocage à un événement de force majeure.
La direction régionale des finances publiques, d'île de France et du département de Paris objecte que l'engagement de revente concernait les parts de la SCI De [Adresse 5] et non pas les immeubles détenus par cette SCI. Or, cette conditions n'a pas été remplie ce qui entraîne la remise en cause du régime de faveur prévu par l'article 1115 du code général des impôts.
Elle soutient que le blocage mis en avant par la société Coffim n'est pas un événement assimilable à la force majeure étant donné qu'il n'était pas imprévisible, extérieur et irrésistible. La DRFIP fait valoir que la société Coffim connaissait la répartition du capital lors de l'acquisition, et qu'elle ne justifie d'aucune démarche auprès des associés minoritaires.
Ceci exposé, aux termes de l'article 1115 du code général des impôts, les acquisitions d'immeubles ou parts de sociétés réalisées par un marchand de biens sont exonérées de droits et taxes de mutation si un engagement de revendre dans un certain délai est pris ; la remise en cause de l'exonération est encourue du seul fait de l'absence de revente dans le délai prescrit.
En l'espèce, l'engagement de revendre portait sur les parts acquises de la SCI et non sur des immeubles. La société Coffim invoque la force majeure provenant du blocage de la vente des parts de SCI par un associé minoritaire.
Il appartient à celui qui se prévaut d'un cas de force majeure d'en rapporter la preuve. La SA Coffim doit donc démontrer les caractères irresistible, imprévisible et insurmontable de l'événement dont elle se prévaut.
Or, en l'espèce la condition d'imprévisibilité n'est pas remplie, dans la mesure où la société Coffim connaissait dès le départ la composition du capital, savait qu'elle n'en détenait que 75 %, que dès lors elle pouvait prévoir l'aléa au jour où elle a pris son engagement. Au surplus, la SA Coffim ne verse aucun document justifiant de propositions de rachat des participations minoritaires.
Par conséquent l'une des conditions n'étant pas réalisée, le cas de force majeure n'est pas constitué, la société Coffin sera déboutée de ses demandes. Le jugement déféré sera confirmé dans toutes ses dispositions .
La société Coffin partie perdante, au sens de l'article 696 du code de procédure civile, sera tenue de supporter la charge des entiers dépens.
Il paraît équitable d'allouer à direction régionale des finances publiques, d'île de France et du département de Paris la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a dû exposer en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant,
DÉBOUTE la SA Coffim de toutes ses demandes ;
CONDAMNE la SA Coffim à payer à la direction régionale des fiances publiques d'Ile de France et du département de Paris la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la SA Coffim aux entiers dépens.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
C. BURBAN E. LOOS