Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 10
ARRÊT DU 23 SEPTEMBRE 2019
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/20906 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6MKI
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Juillet 2018 -Tribunal de Grande Instance de MEAUX - RG n° 17/01732
APPELANTE
SARL CPSI
Ayant son siège social [Adresse 6]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Fabien FOUCAULT de la SCP HARVING AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0111
INTIMEE
M. LE MINISTRE DES FINANCES DES COMPTES PUBLICS au nom de :
- LA DIRECTION RÉGIONALE DES DOUANES ET DROITS INDIRECTS DE PARIS EST [Adresse 4]
Ayant ses bureaux [Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentée par M. [Z] [G], inspecteur des douanes, en vertu d'un pouvoir spécial
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 03 Juin 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Edouard LOOS, Président
Mme Sylvie CASTERMANS, Conseillère
Mme Christine SIMON-ROSSENTHAL, Conseillère
qui en ont délibéré,
Un rapport a été présenté à l'audience par Madame Sylvie CASTERMANS dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.
Greffière, lors des débats : Mme Cyrielle BURBAN
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Edouard LOOS, Président et par Cyrielle BURBAN, Greffière à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
La société CPSI commercialise des pièces de machines ( manchons) importées de Nouvelle Zélande qui sont destinées à équiper des machines utilisées dans les industries chimiques et agro alimentaires.
Le 03 octobre 2013, le bureau de douane de Blanc-Mesnil a initié une enquête sur des importations de la société CPSI. Il a sollicité la communication des documents afférents aux déclarations d'importation souscrites du 13 octobre 2011 au 23 juin 2014.
Les enquêteurs ont saisi le service commun des laboratoires (direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et direction générale des douanes et droits indirects) qui a délivré deux rapports.
Par avis du 29 juillet 2014, l'administration de douanes a informé la société CPSI qu'elle remettait en cause la position tarifaire 8474 90 90 et la valeur déclarée qui n'avait pas intégré les frais de transport.
Le 30 septembre 2014, l'administration de douanes a émis un avis de mise en recouvrement pour un montant de 39 612 euros au titre des droits éludés.
La société CPSI a saisi la commission de conciliation et d'expertise douanière (CCDE) qui a confirmé la position de l'administration de douanes.
Par acte d'huissier du 10 mai 2017, la société CPSI a fait assigner l'administration de douanes devant le tribunal de grande instance de Meaux aux fins d'annulation du procès verbal du 18 septembre 2014 et de l'avis de mise en recouvrement.
Par jugement du 05 juillet 2018, le tribunal de grande instance de Meaux a :
- rejeté les exceptions de nullité soulevées par la société CPSI ;
- débouté la société CPSI de sa demande tendant à voir écarter l'avis de la commission de
conciliation et d'expertise douanière ;
- déclaré régulier et bien fondé l'avis de mise en recouvrement n° 778/14/71 du 30/09/14
d'un montant de 39 612 euros (32 963 euros au titre des droits de douane éludés et 6 649
euros au titre de la TVA) ;
- rejeté la demande d'annulation du procès verbal de constat du18 septembre 2014, l'avis
de mise en recouvrement n° 778/14/71 du 30/09/14 et la décision de rejet du 16/03/17 ;
- débouté la SARL CPSI du surplus de ses demandes ;
- débouté la SARL CPSI et l'administration des douanes de leur demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La société CPSI a interjeté appel du jugement.
Par conclusions du 03 juin 2019 la société CPSI demande de :
Infirmer le jugement du tribunal de grande instance de Meaux
Statuant à nouveau
* Juger que les droits de la défense et le principe du contradictoire n'ont pas été respectés par la douane qui a refusé d'accorder un délai à la société CPSI pour qu'elle fasse ses observations, sans motif valable ;
Annuler le procès-verbal du 18 septembre 2014, l'AMR n° 778/14/71 du 30 septembre 2014 et la décision de rejet du 16 mars 2017 ;
Ordonner le remboursement des droits de douane versés pour un montant de 39 612 euros
avec intérêts de retard au taux légal à compter de chaque versement ;
* Juger que la procédure menée devant la CCED n'a pas été, du fait de la douane, loyale
et transparente, ni respectueuse du principe de la contradiction au détriment de la société CPSI comme de la CCED ;
Ecarter des débats l'avis de la CCED et annuler la procédure ;
* Juger que les marchandises relèvent de la position 8474 90 90 et non pas des positions
3926 90 92, 6307 90 98 ou 7307 91 00 ;
Annuler le procès-verbal du 18 septembre 2014, l'AMR n° 778/14/71 du 30 septembre
2014 et la décision de rejet du 16 mars 2017 ;
Ordonner le remboursement des droits de douane versés pour un montant de 39 612 euros
avec intérêts de retard au taux légal à compter de chaque versement
Condamner la douane à payer à la société CPSI 5 000 euros au titre de l'article 700 du code
de procédure civile
Par conclusions du 3 juin 2019, la direction régionale des douanes et droits indirects de Parsi-Est demande à la cour de :
Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Condamner la société CPSI payer à 1'Admínistratíon des douanes une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
SUR CE,
Sur la régularité de la procédure
La société CPSI critique le jugement en ce qu'il a retenu que les droits de la défense et le principe du contradictoire avaient été respectés par les services de la douane. Elle fait grief aux services de la douane d'avoir refusé de lui accorder un délai pour qu'elle fasse ses observations, sans motif valable.
Aux termes de l'article 67 A du code des douanes, sous réserve des dispositions de l'article 67 B, toute décision prise en application du code des douanes communautaire lorsqu'elle est défavorable ou lorsqu'elle notifie une dette douanière, est précédée de l'envoi ou remise à la personne concernée d'un document par lequel l'administration de douanes fait connaître la décision envisagée, les motifs de celle-ci, la référence des documents et informations sur lesquels elle sera fondée ainsi que la possibilité dont dispose l'intéressé de faire connnaître ses observations dans un délai de trente jours à compter de la notification.
En l'espèce, les services de la douane ont adressé à la société CPSI, par lrar, leur avis de résultat de contrôle le 29 juillet 2014, dans lequel il a été précisé que la société disposait d'un délai de 30 jours pour communiquer ses observations jours à compter de la notification.
L'avis a été réceptionné le 31 juillet 2014 par une personne habilitée de la société. La responsable- administration des ventes a communiqué avec l'administration et transmis les pièces requises.
Le 20 août 2014, M. [B], représentant légal de la société CPSI a formé une demande de prorogation de délai, en invoquant le fait qu'il était en congés lors de la réception de l'avis.
Le 1er septembre 2014 l'administration a notifié un refus de prorogation. Le 02 septembre 2014, la société CPSI a été convoquée pour la rédaction de la notification du pv d'infraction. A la demande de M. [B], la convocation a été reportée à la date du 18 septembre 2014.
La rédaction du procès verbal de notification d'infraction est intervenue le 18 septembre 2014 et l`AMR a été émis le 30 septembre 2014. A cette occasion, la société CPSI n'a émis aucune contestation au fond. La contestation formée le 18 novembre 2014 ne contient pas davantage d'arguments au fond.
La société CPSI invoque une violation de ses droits, or le représentant légal savait que sa société faisait l'objet d'une enquête, il lui incombait donc en sa qualité de dirigeant de prendre les mesures nécessaires en son absence. De plus, la société CPSI disposait de personnel présent pouvant transmettre des observations.
Enfin, comme l' a retenu le tribunal, aucune observation n'a été formulée durant les douze jours qui se sont écoulés jusqu'au procès verbal de notification d'infraction, ni ultérieurement. Elle ne justifie d'aucun grief au fond. La demande n'étant pas fondée sur de justes motifs, c'est légitimement que l'administration n'a pas accueilli sa demande de prorogation.
S'agissant de la procédure devant la commission de conciliation et d'expertise douanière (CCDE) la société appelante soutient que la procédure n'a pas été loyale et transparente et que le respect du principe du contradictoire n'a pas été satisfait. Elle demande d'écarter l'avis de la CCED.
Selon les dispositions de l'article 445 du codes des douanes alors en vigueur, le recours à la CCED permet d'obtenir un avis consultatif sur la valeur ou l'origine des biens en litige. Cet avis ne lie pas le tribunal.
En l'espèce, la société appelante a saisi la CCED et a demandé à l'administration de la douane de ne pas prendre de décision avant l'avis de la commission.
Il ressort de la chronologie des actes que l`AMR a été émis le 30 septembre 2014, que la commission a rendu son avis qui a invalidé l'espèce tarifaire déclarée par la société CPSI, le 07 mars 2017, que la direction régionale de Paris Est a rejeté la contestation de l'AMR le 16 mars 2017.
Il est constant que l'administration a suspendu la procédure de poursuite et accordé le délai requis alors qu'elle n'y était pas obligée.
La commission a rendu son avis dans des conditions qu'elle a estimée régulières, puisqu'elle a retenu l'affaire et rendu son avis. Les allégations relatives à un comportement déloyal des services de la douanes sont donc dépourvues de valeur probante. En outre, il sera observé qu' aucune voie de recours n'est ouverte à l'encontre des avis rendus par la CCED. Il convient de confirmer la décision déférée sur ce point.
Sur le fond
La société CPSI soutient que les marchandises relèvent de la position 8474 90 90 et non pas des positions 3926 90 92, 6307 90 98 ou 7307 91 00 ; que les caratérisitiques techniques des manchons démontrent que leur destination est celle de la position 8474 ; que le critère de la destination après importation confirme le classement ; que l'utilisation doit être exclusive ou principale et non spécifique et unique.
Les produits importés sont des cylindres constitués en matière plastique, synthétique tissé ou en acier pour les brides de serrage. Ils sont utilisés comme manchons ou raccords sur des machines industrielles.
Aux termes des règles de classement tarifaire, la marchandise est classée comme partie de la machine si elle est exclusivement ou principalement destinée à une machine.
Le classement d'une marchandise d'emploi général doit s'effectuer au regard de ses caractéristiques et propriétés objectives.
En l'espèce, deux produits importés ont été soumis à une analyse technique, un produit en plastique et un produit en synthétique. Il résulte des analyses réalisées par le service commun des laboratoires le 29 juillet 2014 et de l'avis la commission de conciliation en date du 07 mars 2017, que les marchandises importées par la société CPSI sont des produits, dénommés connecteurs, qui se placent entre une machine et son contenant et permettent le transfert des matériaux. L'analyse de ces produits a conduit le laboratoire puis la commission au constat que les manchons ne sont pas indispensables au fonctionnement mécanique des machines relevant de la position 8474.
La société CPSI échoue donc à démontrer que le manchon est exclusivement ou principalement destiné à une machine classée à la position 8474, dès lors que les fiches techniques des produits ne précisent pas les caractéristiques des machines sur lesquelles ils peuvent être assemblés. De plus, la société CPSI ne démontre pas la destination exclusive ou principale des pièces importées aux machines. Il est établi au contraire que le fonctionnement de la machine n'est pas conditionné par la présence d'un manchon dont la fonction est essentiellement de permettre le transfert.
La société CPSI invoque la jurisprudence de la CJUE selon laquelle la destination d'un produit peut constituer un critère objectif de classification pourvu que la destination des marchandises soit inhérente à leur propriété. Cependant comme le souligne la direction régionale des douanes, ce critères est subsidiaire, il ne peut que conforter un ensemble d'éléments objectifs, qui dans le cas présent, ne sont pas rapportés.
Il s'ensuit que la décision déférée sera confirmée en toutes ses dispositions.
La société CPSI partie perdante, au sens de l'article 696 du code de procédure civile, sera tenue de supporter la charge des entiers dépens
Il paraît équitable d'allouer à la direction régionale des douanes et droits indirects de Parsi-Est la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a dû exposer en cause d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
CONDAMNE la société CPSI payer à l'administration des douanes une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société CPSI aux entiers dépens.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
C. BURBAN E. LOOS