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05/11/2019 | FRANCE | N°17/08311

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 05 novembre 2019, 17/08311


Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRÊT DU 05 NOVEMBRE 2019



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/08311 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3ROK



Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Mai 2017 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F16/04349





APPELANT



Monsieur [P] [R]

[Adresse 3]

[Loc

alité 5]

Représenté par Me Iris NADJAR, avocate au barreau de PARIS





INTIMÉE



SA PIERRE & VACANCES CONSEIL IMMOBILIER

[Adresse 8]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Cécile FO...

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRÊT DU 05 NOVEMBRE 2019

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/08311 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3ROK

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Mai 2017 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F16/04349

APPELANT

Monsieur [P] [R]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Iris NADJAR, avocate au barreau de PARIS

INTIMÉE

SA PIERRE & VACANCES CONSEIL IMMOBILIER

[Adresse 8]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Cécile FOURCADE, avocat au barreau de PARIS, toque : E1815

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Septembre 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Anne HARTMANN, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Anne HARTMANN, présidente

Madame Sylvie HYLAIRE, présidente

Monsieur Didier MALINOSKY, vice-président placé

Greffier, lors des débats : Mme Martine JOANTAUZY

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

- signé par Anne HARTMANN, Présidente de chambre et par Mathilde SARRON, Greffière, présent lors de la mise à disposition.

FAITS, MOYENS ET PRETENTIONS

M. [P] [R] né le [Date naissance 2] 1979 a été embauché par la SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier (PVCI en abrégé) suivant contrat de travail à durée indéterminée à compter du 5 janvier 2010, en qualité de Chargé d'affaires, statut employé.

La fonction consistait principalement selon l'article 2 du contrat de travail, à prospecter, tant de sa propre initiative que sur les indications et instructions de l'employeur, les personnes physiques et privées susceptibles d'acquérir des biens, droits immobiliers et locaux de toute nature donnant vocation à la jouissance totale ou partielle, dans le cadre des mandats de vente reçus par l'employeur sur tous les sites en France, en Espagne et en Italie ainsi que les contrats d'assurance vie commercialisés par l'employeur, à rechercher toutes les informations concernant les personnes intéressées, à négocier avec eux, recueillir la signature des promesses de cession des droits et à assister les services de PVCI.

La relation de travail était soumise aux dispositions de la convention collective de l'Immobilier ; la société PVCI emploie plus de 11 salariés ( 114 selon mention sur l'attestation ASSEDIC délivrée au salarié) .

La rémunération de M. [P] [R] était composée d'un minimum garanti annuel de 12.590 euros brut comprenant les congés payés, versé en 12 mois et d'une partie variable « constituée du taux minimum de commission applicable sur le montant TTC de la vente portant sur les biens et droits immobiliers de 0,80 %, de commissions complémentaires et de bonus liés à des objectifs contractualisés pour chaque exercice dans un avenant ; l'ensemble de la rémunération étant basée sur les résultats du salarié, le fixe annuel étant un minimum garanti qui constitue une avance sur commissions compensables sur les commissions dues ou à venir.

Le 5 janvier 2010, a été signé entre les parties un avenant complémentaire de rémunération pour l'exercice allant du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2010 prévoyant un taux de commissions complémentaires s'ajoutant au taux minimum du contrat suivant l'origine du contact ainsi que le taux des commissions ne s'ajoutant pas au taux minimum du contrat (0,80 % ) ; l'avenant prévoyait par ailleurs les seuils minimum de «CA» ou de nombre de ventes pris en compte pour le calcul du bonus ; il est indiqué que les taux sont appliqués sur le montant TTC des ventes et que si les seuils et objectifs minimum pour l'attribution de ces bonus sont atteints en cours d'exercice, leur versement s'effectuera à la fin de chaque trimestre civil sur la base des signatures d'actes authentiques enregistrées pour les biens immobiliers ou des souscriptions enregistrées pour les contrats d'assurance vie.

Dans le dernier état de ses fonctions M. [P] [R] a perçu une rémunération mensuelle brute moyenne de 6.814,28 euros calculée de janvier à décembre 2014 et au cours de l'année 2015 dans le cadre de son droit de suite la somme globale de 32019,17 euros arrêtée au mois d'août 2018 soit répartie sur 12 mois une moyenne de 2668,26 euros incluant l'indemnité de congés payés .

M. [P] [R] a été élu suppléant à la délégation unique du personnel en 2011 et membre de la délégation du personnel au CHSCT ; son mandat d'élu à la délégation du personnel devait prendre fin le 12 novembre 2015.

Par courrier en date du 5 décembre 2014 remis en main propre à son employeur M. [P] [R] a écrit : « Je soussigné [P] [R], vous informe par la présente de ma décision de quitter mon poste de chargé d'affaires au sein de l'équipe [Adresse 9]. Après avoir informé mes supérieurs hiérarchiques directs, [G] [B] et [E] [D], et sauf contrordre de votre part, je quitterai mes fonctions après un délai d'un mois à compter d'aujourd'hui. Cordialement ».

La SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier a accusé réception le 7 janvier 2015 indiquant prendre acte de la démission du salarié en précisant « votre préavis d'une durée de trois mois prendra fin le 04 mars 2015 au soir, date à laquelle vous cesserez de faire partie des effectifs. Nous acceptons de faire droit à votre demande de dispense de préavis. Aussi vous cesserez de travailler dans l'entreprise et de percevoir votre rémunération le 05 janvier 2015».

Le 22 mars 2016, M. [P] [R] a adressé un courrier au Directeur général de la société PVCI mentionnant en objet « Réclamation de salaires ( commissions, bonus et congés) impayés» dans lequel il indique «(...) J'ai dû prendre la décision de quitter l'entreprise suite à un différend salarial, différend qui après de multiples réclamations n'est toujours pas résolu. Cette situation n'ayant maintenant que trop duré, je souhaite trouver une issue amiable favorable rapidement à défaut de quoi, je me verrai dans l'obligation d'entamer une démarche auprès du Conseil des prud'hommes».

Dans ce courrier il évoque le non paiement de ses commissions sur trois ventes du programme des Senioriales d'[Localité 7] et le fait que le motif invoqué pour lui refuser le paiement de ces commissions est abusif puisqu'il fait dépendre leur paiement de la non résiliation ou annulation du contrat par la société PVCI.

Le 21 avril 2016, M. [P] [R] a saisi le conseil des prud'hommes de Paris qui par jugement rendu le 18 mai 2017 a statué comme suit:

-Déboute M. [P] [R] de l'ensemble de ses demandes;

-Déboute la SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

-Condamne M. [P] [R] aux dépens.

Par déclaration par voie électronique le 13 juin 2017, M. [R] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Aux termes de conclusions régulièrement notifiées par voie électronique en date du 06 avril 2018 Monsieur [P] [R] qui sollicite en tout état de cause le rejet des demandes reconventionnelles de la société intimée, demande à la cour d'infirmer le jugement et statuant à nouveau de condamner la SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier à lui payer les sommes de :

9 541,54 euros bruts à titre de rappel de commissions plus 954,15 euros bruts pour congés payés afférents

6 502,01 euros bruts à titre de rappel de bonus annuel sur chiffre d'affaires plus 650,20 euros bruts pour congés payés afférents

Il demande par ailleurs de :

- juger que son départ de la société s'analyse en une prise d'acte de la rupture du contrat de travail qui doit produire les effets d'un licenciement nul

- fixer la moyenne des salaires à la somme de 8 285,19 euros bruts

- de condamner la SA Pierre & Vacances Conseil Immoilier à lui verser les sommes de :

8 285,19 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis plus 828,51 euros bruts pour congés payés afférents

10 356,49 euros à titre d'indemnité de licenciement

50 000 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement nul

132 563,04 euros à titre d'indemnité pour violation du statut protecteur

5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile

Suivant conclusions régulièrement notifiées par voie électronique le 31 octobre 2017 la SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier demande à la cour de dire :

- qu'elle n'a commis aucun manquement dans le cadre de l'exécution du contrat de travail de M. [P] [R]

- qu' aucun rappel de commission ou de bonus ne reste dû

- que la démission de M. [P] [R] en date du 5 décembre 2014 est claire et non équivoque;

En conséquence, de :

- débouter M. [P] [R] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

- confirmer le jugement et en tout état de cause :

- dire que la prétendue prise d'acte de la rupture du contrat de travail produit les effets d'une démission

À titre subsidiaire, si la cour estimait bien fondées les demandes de M. [P] [R], elle demande d'en limiter le quantum aux sommes suivantes :

- indemnité compensatrice 6.814,29 euros bruts correspondant à un mois de salaire moyen de janvier à décembre 2014 plus les congés payés afférents

- indemnité de licenciement : 8.517,85 €

- dommages-intérêts pour licenciement illicite : 22.308,03 euros correspondant aux salaires perçus au cours des six derniers mois précédant sa démission

-indemnité éventuellement allouée pour violation du statut protecteur 4.997,14 € bruts, compte tenu de l'abus de droit et de l'absence de démonstration d'un préjudice particulier.

À titre reconventionnel, elle demande de condamner M. [P] [R] à lui payer la somme de 6.814,29 euros au titre du préavis non exécuté , de le condamner aux dépens et à lui verser la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère aux conclusions écrites régulièrement communiquées.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 20 mars 2019.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de rappel de commissions et de bonus sur le chiffre d'affaires

L'article 3 du contrat de travail mentionne que le règlement des commissions s'effectue de la manière suivante :

- une avance sur commission d'un montant de 50 % de la commission totale payable à la fin du mois suivant, pour les promesses de cession ou contrats de réservation signés pendant le mois civil

- la commission sera payable sous déduction de l'avance à la fin du mois suivant pour les actes régularisés pendant le mois civil, l'avance n'étant définitivement acquise qu'après complète régularisation de l'acte de cession par acte authentique

- toute résiliation ou annulation de promesse de cession ou de contrat de réservation à l'initiative de l'une ou l'autre des parties pour quelque cause que ce soit, fait perdre tout droit à commission, l'avance étant imputée sur les droits à commission du ou des mois suivants. Toute demande de rappel de commissions devra intervenir auprès de la société dans un délai de trois mois maximum à compter de la fin du mois suivant la complète régularisation de la cession par acte authentique.

M. [P] [R] expose que la SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier se prévalant de l'annulation de leur réservation en 2014 par deux clients qu'il avait prospectés (dossier [Z] concernant un lot en vente partenaire et dossier [N] concernant deux lots en vente directe ) qui avaient donné lieu au versement de l'avance sur commission en novembre et décembre 2012 pour le dossier [Z] et en novembre 2012, février 2013 et février 2014 pour le dossier [N], il s'est vu reprendre lesdites avances qui ont été déduites sur ses bulletins de salaire en avril 2014 pour 927,13 euros (dossier [Z]) et 4093,65 euros en août 2014 pour le dossier [N] et n'a ainsi perçu ni le complément de commission correspondant soit 50 % ni le bonus annuel sur chiffre d'affaires auquel il aurait pu prétendre en intégrant ces ventes de sorte qu'il évalue le total de son préjudice à la somme de 17 647,91 euros .

Il ajoute et justifie par la production des échanges de mails, la tenue d'entretien avec sa hiérarchie (directeur général adjoint en septembre 2014), la décision commune du salarié et de l'employeur de consulter le responsable du service juridique et des relations sociales sur leur point de divergence concernant le droit à reprise des commissions en litige ( mail du 20 novembre 2014 de [L] [X], responsable droit social & relations social France - Direction des RH Groupe à M. [P] [R]) que dès mars 2014, il a protesté contre ces reprises de commissions considérant que la clause contractuelle lui faisant perdre tout droit à commission en cas de résiliation ou d'annulation de cession ou de contrat de réservation à l'initiative de l'une ou l'autre des parties pour quelque cause que ce soit est illégale et doit être frappée de nullité ;

Devant la cour, il reprend le même moyen en soutenant que ladite clause contractuelle est nulle en ce qu'elle ne distingue pas selon les causes d'annulation et prévoit un décommissionnement automatique, quel que soit le motif d'annulation de la réservation ce qui fait peser sur le salarié une incertitude quant à sa rémunération alors qu'il a parfaitement exécuté sa mission ;

Il fait en outre valoir que la SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier a cependant déjà maintenu des commissions sans reprise sur des dossiers annulés comme ce fut le cas du dossier ST Cast (et qu'en toute hypothèse, à supposer la clause contractuelle contestée, licite et applicable, l'annulation des contrats sur lesquels porte la reprise litigieuse des commissions, résulte d'un comportement fautif de la société PVCI (retard au démarrage de l'opération, non respect des délais contractuels de signature chez le notaire) .

La SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier rétorque qu'elle n'a fait qu'appliquer la clause contractuelle du contrat de travail, acceptée par le salarié qui a signé, qui lui permettait la reprise des avances sur commissions ainsi qu'elle l'a longuement expliqué à M. [P] [R], que cette clause de bonne fin est régulière, qu'elle a d'ailleurs été appliquée plusieurs fois au cours de la relation contractuelle ( 15 fois selon elle suivant la liste qu'elle verse aux débats, sept fois seulement selon M. [P] [R]) mais en tout état de cause plusieurs fois ainsi qu'il l'a reconnu à la barre devant le Conseil des prud'hommes qui l'a relevé dans son jugement) sans que M. [P] [R] trouve à redire sur cette application et élève de protestation.

Elle ajoute que contrairement à ce que soutient M. [P] [R], elle ne peut pas unilatéralement annuler ou résilier les contrats de ventes et le priver des commissions correspondantes et que si elle a maintenu les commissions dans le dossier [Localité 10] ou [Localité 6], c'est uniquement parce que la réalisation du projet immobilier a été annulée et qu'elle en était responsable, ce qu'elle a confirmé dans son mail versé aux débats du 6 février 2014 à l'ensemble des chargés d'affaires (mail versé aux débats).

S'agissant des deux dossiers sur lesquels a été exercé le droit de reprise ([Z] et [N]), la société PVCI indique que comme le reconnaît lui-même M. [P] [R], les projets n'ont pas été annulés et sont toujours en cours et que ce sont les acheteurs qui ont résilié leur contrat et que rien ne permet de dire, de caractériser et de retenir que c'est la société PVCI qui est responsable des retards pris dans l'achèvement des travaux et que son comportement a été fautif.

Enfin, la SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier relève que la demande de M. [P] [R] concernant le bonus est non fondée, qu'il correspond à une projection de l'appelant puisqu' en aucun cas il ne pouvait lui être versé, le bonus étant calculé sur le montant des actes notariés et que les deux acheteurs ont annulé leur vente.

Il résulte des clauses contractuelles et de l'avenant que les taux de commissions portent sur le montant total TTC de la vente et article 3.2 du contrat de travail que l'avance sur commission n'est définitivement acquise qu'après complète régularisation de l'acte de cession par acte authentique, que par ailleurs le versement des bonus (article 2 C de l'avenant) se fait sur la base des signatures d'actes authentiques enregistrés pour les biens immobiliers ou des souscriptions enregistrées pour les contrats d'assurance vie.

En l'espèce, les dossiers [Z] et [N] avaient donné lieu au versement d'une avance sur commission; par suite de la résiliation de leur réservation par les clients, aucun acte de cession authentique n'a jamais été signé de sorte que contractuellement l'avance sur commission n'a pas pu être acquise définitivement à M. [P] [R], la condition conférant un caractère définitif à la somme perçue ne s'étant pas réalisée.

M. [P] [R] conteste le caractère licite de la reprise de l'avance sur commissions qui lui avait été payée dans ces deux dossiers en soutenant que la clause 3.2 dernier paragraphe du contrat de travail «toute résiliation ou annulation de promesse de cession ou de contrat de réservation à l'initiative de l'une ou l'autre des parties pour quelque cause que ce soit, fait perdre tout droit à commission, l'avance étant imputée sur les droits à commission du ou des mois suivants» est illicite au motif qu'elle ne distingue pas selon les causes d'annulation ;

Cependant, le droit à la commission définitive est soumis à une condition de bonne fin à savoir la signature de l'acte authentique enregistré ; contrairement à ce que soutient l'appelant, le versement de la commission et de la réalisation de la cession ou de la vente par acte authentique ne dépend pas seulement de la SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier et la clause litigieuse dont il conteste la licité n'est pas potestative dans la mesure où elle ne fait pas dépendre son versement de la seule volonté de la SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier qui n'édite rien à son profit exclusif.

En l'espèce, ce sont les époux [Z] et [N] qui ont renoncé à leur projet ainsi que le rend possible la clause litigieuse comme cause de non acquisition de l'avance de commission perçue par le salarié, la faculté de résiliation ou d'annulation étant réciproque dans le respect de l'équilibre du contrat entre le client et la SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier.

Dans le cas présent, ce qui a empêché que la condition pour l'acquisition définitive de l'avance sur commission et l'ouverture du droit au paiement du bonus et du solde de la commission se réalisent, c'est l'absence de régularisation de l'acte authentique puisque les clients avaient renoncé à la vente sans qu'il y ait lieu de rechercher les raisons de leur renonciation et en tout état de cause de juger si leurs motifs étaient ou non justifiés ou abusifs, ce point ne concernant que les rapports entre les clients et la SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier.

Il y a lieu de juger que la SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier a pu légitimement mettre en oeuvre la clause 3.2 pour exercer la reprise des avances sur commissions, le fait que la société ait dans une autre hypothèse payé à 100 % les commissions aux chargés d'affaires, sans reprise, ne constituant pas un précédent ou un usage dont M. [P] [R] puisse valablement se prévaloir dans la mesure où le cas est étranger à la présente affaire puisque la SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier avait renoncé à un projet immobilier sur lequel les chargés d'affaires avaient pris quelques réservations et que le projet n'avait pas vu le jour faute d'atteindre certains seuils de réalisation.

Il s'ensuit que M. [P] [R] doit être débouté de ses demandes de rappel de commissions, congés payés afférents, rappel de bonus annuel sur chiffre d'affaires et congés payés afférents et le jugement confirmé de ce chef.

Sur la demande de requalification de la démission en prise d'acte de rupture

M. [P] [R] remet en cause sa démission en expliquant que c'est en raison des manquements de la SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier constitués par la reprise de ses commissions en 2014 concernant les dossiers [Z] et [N], il ajoute ne pas avoir donné sa démission mais seulement avoir fait part à son employeur de sa décision de quitter PVCI et soutient que c'est bien le litige salarial qui l'opposait à son employeur depuis plusieurs mois au sujet de la reprise de ses commissions qui l'a contraint à quitter la société, il invoque et justifie en les versant aux débats, les différents échanges de mails avec sa hiérarchie depuis mars 2014 faisant part de son désaccord sur la reprise de ses commissions.

La SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier rétorque qu'aucun manquement grave ne peut lui être reproché et que rien n'empêchait la poursuite du contrat de travail, elle soutient que M. [P] [R] a purement et simplement démissionné, qu'il a demandé à être dispensé d'une partie de son préavis et qu'il a d'ailleurs immédiatement retrouvé un emploi au sein d'une autre société qu'il a rejoint à l'issue de son préavis écourté, elle produit le profil Linkedin de M. [P] [R] qui mentionne qu'il est conseiller commercial et financier depuis janvier 2015 chez Nexity.

La décision du salarié de remettre sa démission doit procéder d' une volonté claire et non équivoque. Lorsque le salarié remet en cause sa démission en raison de faits ou manquements imputables à son employeur et lorsqu'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, le juge doit l'analyser en une prise d'acte qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits et manquements invoqués étaient de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail, ou dans le cas contraire d'une démission

En l'espèce, après avoir fait part à l'employeur le 5 décembre 2014 de sa décision de quitter son poste le 5 janvier 2015, le 11 décembre 2014, il écrivait par mail à [L] [X], direction des ressources humaines Groupe et responsable droit social avec copie à ses supérieurs hiérarchique, avec en objet : Désaccord sur reprise de commissions et mise en oeuvre de la clause de bonne fin « Tu es sans doute déjà informé, j'ai pris acte de ces réponses et comme les commissions restent pour moi un élément essentiel du contrat de travail j'ai pris la décision de quitter PVCI » ;

Compte tenu des divergences de vue et d'interprétation qui existaient depuis mars 2014 et du mail du 20 novembre 2014 faisant part de la position de l'employeur ( mail de [L] [X] à M. [P] [R]) au sujet du caractère justifié de la reprise des avances sur commissions, il y a lieu de retenir que la lettre du 5 décembre 2014 revêt un caractère équivoque même si l'employeur verse aux débats un mail du Directeur régional des Ventes Ile de France daté du 6 juin 2016 qu'il convient toutefois d'accueillir avec circonspection puisque ne répondant pas aux formes légales, évoquant un entretien avec M. [P] [R] le 4 décembre 2014 au cours duquel ce dernier lui aurait avoué sa lassitude et une envie de changer d'environnement professionnel et avait déjà trouvé un poste dans une autre société dont il n'avait pas donné le nom.

Il ressort du dossier que l'employeur n'a fait qu' appliquer les clauses contractuelles comme elles l'avaient été plusieurs fois au cours des années passées sans contestation du salarié même si cette absence de contestation antérieure ne privait pas le salarié de le faire pour l'avenir; toutefois les positions étant bien arrêtées de part et d'autre, seule la saisine de la juridiction ou le choix d'un arbitre pouvait permettre aux parties de se départager quant à la licéité de la clause contestée par M. [P] [R], sans pour autant empêcher la poursuite du contrat de travail comme cela avait été le cas à l'occasion des reprises antérieures de commissions;

L'application de bonne foi par la SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier des clauses du contrat de travail relatives à la reprise des commissions ne pouvant pas dans ces conditions être jugée constitutive de manquement grave de nature à justifier la démission de l'appelant qui doit être débouté de sa demande de requalification en prise d'acte de rupture.

Il y a lieu en conséquence de juger que c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté la demande de requalification de la démission ainsi que les demandes à caractère financier qui en découlent relatives à l'indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, à l'indemnité de licenciement et à la demande de dommages intérêts pour licenciement nul et violation du statut protecteur.

Sur la demande de la SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier

La SA Pierre & Vacances Conseil Immobilier a fait droit à la demande de dispense de préavis de M. [P] [R], sa demande en paiement du préavis non exécuté est non fondée et doit être rejetée.

Sur les demandes accessoires

Chacune des parties succombe au moins partiellement en sa demande, chacune d'elle conservera la charge des frais irrépétibles qu'elles a exposés.

M. [P] [R] succombe en son appel, il supportera la charge des dépens.

PAR CES MOTIFS

CONFIRME le jugement déféré;

Et y ajoutant :

REJETTE toutes autres demandes des parties.

DIT que chacune des parties conservera la charge de ses frais irrépétibles

CONDAMNE M. [P] [R] aux dépens .

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 17/08311
Date de la décision : 05/11/2019

Références :

Cour d'appel de Paris L2, arrêt n°17/08311 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-11-05;17.08311 ?
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