RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 29 Novembre 2019
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/12967 - N° Portalis 35L7-V-B7A-BZZJE
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 12 Septembre 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de MEAUX RG n° 14/00459
APPELANT
Monsieur [Z] [C]
[Adresse 1]
[Localité 1]
bénéficie de l'aide juridictionnelle totale accordée le 09 janvier 2017 par le BAJ de Paris sous le numéro 2016/050425
comparant en personne, assisté de Me Carole YTURBIDE, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 131
INTIMEE
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SEINE ET MARNE
[Adresse 2]
[Localité 2]
représentée par Me Amy TABOURE, avocat au barreau de PARIS
Monsieur le Ministre chargé de la sécurité sociale
[Adresse 3]
[Localité 3]
avisé - non comparant
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Septembre 2019, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Mme Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, conseillère, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Michel CHALACHIN, président de chambre
Madame Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, conseillère
Monsieur Lionel LAFON, conseiller
qui en ont délibéré
Greffier : Mme Venusia DAMPIERRE, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé
par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par monsieur Michel CHALACHIN, président de chambre et par Mme Venusia DAMPIERRE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur l'appel régulièrement interjeté par M. [Z] [C] à l'encontre du jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Meaux en date du 12 septembre 2016 dans un litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne (ci-après la caisse).
EXPOSE DU LITIGE
Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déférée à laquelle il est fait expressément référence à cet égard.
Il suffit de rappeler que M. [C] a été victime d'un accident le 6 mars 2012, reconnu accident du travail par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne. Il présentait une contusion de l'épaule gauche (en fait, l'épaule droite) avec pathologie de la coiffe des rotateurs et a été déclaré consolidé par la caisse le 21 juin 2014. Contestant cette décision, il a sollicité la mise en oeuvre d'une expertise technique confiée au Dr [K], lequel a confirmé cette date.
Entre-temps, M. [C] a présenté le 24 décembre 2013 un certificat de nouvelles lésions pour une rupture sus épineux droit et hernie discale cervicale que le service médical a refusé de prendre en charge au titre de l'accident le 13 janvier 2014. Le Dr [J], expert technique désigné, a confirmé l'absence de lien de causalité le 16 avril 2014. Puis, les 2 juillet 2014 et 30 janvier 2015, M. [C] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Meaux de deux recours contre deux décisions implicites de rejet de la commission de recours amiable.
Par un premier jugement du 18 janvier 2016, ce tribunal a joint les deux procédures et ordonné une expertise médicale confiée au Dr [U].
Par un second jugement rendu le 12 septembre 2016, ce tribunal a débouté M. [C] de ses recours, et laissé les frais d'expertise à la charge de la caisse.
Aux termes de ses conclusions soutenues oralement à l'audience par son conseil, M. [C] demande à la cour :
- le dire et juger recevable et bien fondé en son recours,
- lui reconnaître implicitement la nouvelle lésion,
- dire et juger que le rapport du Dr [U] ne respecte pas les dispositions des articles L.141-1 et suivants du code de sécurité sociale,
- dire que l'expert avait manifestement un conflit d'intérêt,
- dire et juger que la caisse n'a pas répondu dans les délais impartis par les textes,
- dire et juger que l'expertise n'est ni claire, ni explicite, ni dénuée d'ambiguïté,
En conséquence,
- ordonner une nouvelle expertise,
aux motifs que :
- le Dr [U] ne pouvait être désigné en qualité d'expert, ayant été le médecin conseil de M. [C] pour l'avoir assisté devant le tribunal du contentieux de l'incapacité,
- il soutenait alors le recours, et n'aurait jamais dû accepter la mission,
- en application de l'article R.411-10 du code de sécurité sociale, la caisse avait 30 jours pour se prononcer sur les nouvelles lésions, ce qu'elle n'a pas respecté,
- elle n'a pas non plus respecté le principe du contradictoire en ne lui permettant pas l'accès à son dossier,
- les médecins qui l'ont examiné ont toujours considéré que sa douleur était mixte, la pathologie de la coiffe des rotateurs étant plus importante que celle des cervicales,
- une hernie ayant été découverte au milieu des cervicales, c'est à tort que l'expert refuse l'imputabilité de la hernie à l'accident,
- les Dr [Z], [R] et [T], neurochirurgiens et orthopédiste, concluent le contraire,
- le Dr [U], simple rhumatologue, confond l'épaule gauche et droite
- il ne peut y avoir consolidation puisque de nouvelles pathologies apparaissent.
Aux termes de ses conclusions soutenues et complétées oralement à l'audience par sa représentante, la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne requiert de la cour la confirmation du jugement du 12 septembre 2016 et en conséquence, le débouté de M. [C] de toutes ses demandes,
faisant valoir que :
- M. [C] n'a pas contesté la désignation du Dr [U] et le jugement le désignant est devenu définitif,
- les articles R.141-1 alinéa 3 et R.141-4 du code de sécurité sociale excluent des fonctions d'expert le médecin qui a soigné la victime, ce qui n'est pas le cas,
- la date de consolidation a été fixée par avis médical et confirmée par les Dr [K] et [U],
- en l'absence d'élément médical nouveau, le jugement doit être confirmé sur ce point,
- le certificat médical initial de nouvelle lésion a été receptionné le 24 décembre 2013, le refus daté du 15 janvier 2014 est donc dans les délais,
- le service médical et le Dr [J] ont exclu la prise en charge de la nouvelle lésion au titre de l'accident, de même que le Dr [U],
- la hernie discale n'a jamais été mentionnée dans les certificats antérieurs au 24 décembre 2013,
- les certificats produits par M. [C] visent un rapport probable, et ont été vus par le Dr [U],
- ce dernier ne confond pas les membres mais reprend les termes du certificat médical initial du 6 mars 2012 rectifié le 9,
- en présence de trois avis concordants, il n'y a pas lieu à expertise.
Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d'autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.
SUR CE, LA COUR,
Il ne sera pas répondu aux demandes de constatations ou de «dire et juger» qui ne saisissent pas la cour de prétentions au sens de l'article 954 du code de procédure civile.
* Sur la désignation du Dr [U]
Le Dr [U] a été désigné en qualité d'expert par jugement du 18 janvier 2016. M. [C] ne démontre pas avoir demandé au tribunal un changement d'expert, ou interjeté appel de la décision. Dès lors, sa contestation sera rejetée, d'autant que si le médecin a pu effectivement l'assister devant le tribunal du contentieux de l'incapacité, il ne l'a jamais soigné au sens des articles R.141-1 alinéa 3 et R.141-4 du code de sécurité sociale.
* Sur la prise en charge implicite de la nouvelle lésion
L'article R.441-10 du code de sécurité sociale prévoit que la caisse dispose d'un délai de 30 jours à compter de la date à laquelle elle a eu connaissance de la déclaration d'accident et le certificat médical initial pour statuer sur le caractère professionnel de cet accident et qu'il en est de même pour la 1ère fois d'une lésion présentée comme se rattachant à un accident du travail... et en l'absence d'un telle décision, le caractère professionnel est reconnu.
En l'espèce, la caisse indique sans être démentie, avoir reçu le 24 décembre 2013, le certificat médical initial de nouvelle lésion établi le même jour. En conséquence, la décision de refus de prise en charge du 15 janvier 2014 ne peut être qualifiée de tardive. La demande de reconnaissance d'une décision implicite sera rejetée.
Par ailleurs, aucun texte ne prévoit la communication à ce stade du dossier à l'assuré, de sorte qu'on ne peut reconnaître une violation du principe du contradictoire.
* Sur la date de consolidation
Il convient de rappeler qu'en application de l'article L.321-1 du code de sécurité sociale, les indemnités journalières sont versées aux assurés qui se trouvent dans l'incapacité physique de travailler, et que cette incapacité s'analyse non pas dans l'inaptitude à reprendre son ancien emploi, mais dans celle d'exercer une activité salariée quelconque.
La consolidation correspond soit à la guérison sans séquelles, soit au moment où l'état de la victime est stabilisé définitivement, même s'il subsiste encore des troubles.
L'article L.141-2 précise que quand un avis technique a été pris, il s'impose à l'intéressé et à la caisse.
Enfin, l'article R.142-24-1 ajoute que quand le différend porte sur une décision prise après mise en oeuvre de la procédure d'expertise technique, le tribunal peut ordonner une nouvelle expertise si une partie en fait la demande.
Toutefois, l'article 146 du code de procédure civile dispose qu' une mesure d'instruction ne peut être ordonnée pour suppléer la carence d'une partie dans l'administration de la preuve.
En l'espèce, l'expert technique désigné en application des dispositions de l'article L.141-1 du code de la sécurité sociale, le Dr [K], a clairement énoncé que M. [C] était consolidé au 21 juin 2014.
Dans son rapport du 14 mars 2016, l'expert judiciaire désigné par le tribunal, le Dr [U], a repris ces mêmes conclusions. On ne saurait lui reprocher d'avoir relevé dans ses commémoratifs que les termes du certificat médical initial du 6 mars 2012 visaient l'épaule gauche puisque cela était bien le cas et que la rectification n'est intervenue que le 9. L'apparition d'une nouvelle pathologie, à la supposer établie, n'aurait aucune influence sur la date de consolition.
En conséquence, la contestation de la date de consolidation sera rejetée.
* Sur la nouvelle lésion
M. [C] a présenté le 24 décembre 2013 un certificat de nouvelle lésion pour une rupture sus épineux droit et hernie discale cervicale que le service médical a refusé de prendre en charge au titre de l'accident du 6 mars 2012.
En l'espèce, l'expert technique désigné en application des dispositions de l'article L.141-1 du code de la sécurité sociale, le Dr [J], a clairement énoncé qu'il n'existait pas de lien de causalité direct entre l'accident du 6 mars 2012 et les troubles invoqués le 24 décembre 2013.
Dans son rapport d'expertise du 14 mars 2016, le Dr [U] confirme cette absence de lien de causalité, précisant qu'il n'y a pas d'imputabilité à retenir selon la jurisprudence (délai, localisation, certificats, mécanismes lésionnels...).
Dès lors, les conclusions du rapport d'expertise confirment l'avis du médecin-conseil de la caisse et de l'expert technique, le Dr [J], qui avaient déjà exclu tout lien direct entre l'accident du 6 mars 2012 et la lésion du 24 décembre 2013.
Aucun des certificats médicaux produits postérieurement au rapport d'expertise ne vient affirmer le contraire.
Dans ces conditions, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé au vu des conclusions de l'expertise technique, que la lésion invoquée le 24 décembre 2013 ne pouvait être prise en charge au titre de l'accident du 6 mars 2012.
En conséquence, il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Confirme le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Déboute M. [C] de sa demande d'expertise,
Condamne M. [C] aux dépens d'appel.
La greffièreLe président