Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux conseils le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 4
ARRET DU 15 JANVIER 2020
(n° ,5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 17/07509 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3MTO
Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Avril 2017 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 17/01005
APPELANTE
Madame [W] [G] [H]
[Adresse 1]
[Localité 1]
Représentée par Me Isabelle VOLKRINGER, avocat au barreau de PARIS, toque : G0757
INTIMEE
SA [Localité 2]
[Adresse 2]
[Localité 2]
Représentée par Me Stéphane PENAFIEL, avocat au barreau de PARIS, toque : G0585
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 Novembre 2019, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Bruno BLANC, Président et Madame Soleine HUNTER FALCK, conseiller
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Monsieur BLANC Bruno, président
Madame HUNTER FALCK Soleine, conseiller
Madame FEBRE-MOCAER Marianne, conseiller
Greffier, lors des débats : Madame Frantz RONOT
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Bruno BLANC, Président et par Victoria RENARD, Greffière présent lors de la mise à disposition.
La SA [Localité 2] qui a une activité de conception, fabrication, commercialisation d'articles de cristal et autres, est soumise à la convention collective nationale de la fabrication du verre à la main ; elle comprend au moins 11 salariés.
Mme [W] [G] [H] née en 1959 a été engagée par contrat à durée indéterminée par la société [Localité 2] à effet du 11.03.2002, avec une reprise d'ancienneté au 11.06.2011, en qualité de vendeuse catégorie 4 A Coefficient 160 à temps plein (35 heures par semaine). Il était prévu une rémunération annuelle brute de 18.720 € soit 1.407,52 € par mois outre une prime d'intéressement à la bonne marche de l'entreprise (PIBME), ainsi qu'une prime de 13è mois ; la salariée devait percevoir également une rémunération variable sur objectifs.
Par avenant signé le 27.02.2008, le lieu travail de la salariée a été transféré sur le stand [Localité 2] au sein des Galeries Lafayette Maison.
En mars 2012, Madame [W] [G] [H] a été promue au coefficient 190 4C sur l'emploi de démonstratrice.
La moyenne mensuelle des salaires de Mme [G] [H] s'établit à 1.962,94 € pour 152,25 heures.
Le 16.02.2011 un avertissement a été notifié à Madame [W] [H] [G] en raison de son comportement ; le 12.11.2012 la salariée a reçu un rappel à l'ordre en raison de propos tenus à l'égard du Directeur commercial France.
Madame [W] [G] [H] a été désignée déléguée syndicale en 2014.
Le 14.11.2014 le conseil des prud'hommes de Paris statuant en référé a rejeté une demande de communication des bulletins de paie des collègues de Madame [W] [G] [H] de même niveau ; cette décision est devenue définitive à la suite au désistement d'appel de la salariée.
Le 18.06.2015, le conseil des prud'hommes de Paris a été saisi par Madame [W] [G] [H] en annulation de l'avertissement qui lui avait été notifié le 16.02.2011. Le conseil de prud'hommes de Paris a prononcé la radiation de l'affaire le 13.12.2016 et celle-ci a été réinscrite au rôle le 07.12.2017, la salariée invoquant alors une inégalité de traitement, avec des demandes de rappels de salaire.
La cour est saisie de l'appel régulièrement interjeté le 24.05.2017 par Mme [G] [H] du jugement rendu le 24.04.2017 par le conseil de prud'hommes de Paris section Industrie qui a :
- Débouté Mme [G] [H] de l'ensemble de ses demandes,
- Reçu la société [Localité 2] en sa demande reconventionnelle et l'en a débouté,
- Condamné Mme [G] [H] au paiement des entiers dépens.
Vu les conclusions transmises par RPVA le 17.08.2017 par Mme [G] [H] qui demande à la cour :
- Réformer le jugement déféré, en date du 24 avril 2017.
Statuant de nouveau,
- Condamner la société [Localité 2] au paiement des sommes suivantes :
* 3.126,10 € - rappel de salaire sur la période du mois de juin 2012 au mois de décembre 2016
* 312,61 € - indemnité de congés payés sur rappel de salaire
* 277,93 € - Rappel 13ème mois sur la période du mois de juin 2012 au mois de décembre 2016
* 27,79 € - indemnité de congés payés sur rappel 13ème mois
* 3.262,67 € - Rappel de salaire sur prime d'ancienneté du mois de juin 2012 au mois de décembre 2016
* 326,67 € - indemnité de congés payés sur prime d'ancienneté
* 817,94 € - Rappel sur la PIBME
* 81,79 € - indemnité de congés payés sur la PIBME
* 20.000,00 € - Dommages intérêts pour inégalité de traitement injustifiée
* 3.000,00 € - Article 700 du CPC
* Intérêts au taux légal pour les rappels de salaire et de congés payés à compter de la demande, le 18 juin 2015
* Intérêts au taux légal pour les dommages-intérêts et pour article 700 du CPC, à compter de l'arrêt à intervenir
Vu les conclusions transmises par RPVA le 15.10.2017 par la société [Localité 2] qui demande de confirmer le jugement, de débouter l'appelante de toutes ses demandes et de condamner Mme [G] [H] à payer la somme de 1.000 € pour frais irrépétibles.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 05.11.2019 prise au visa de l'article 907 du code de procédure civile ;
Les parties entendues en leurs plaidoiries le 19.11.2019, la cour leur a proposé de procéder par voie de médiation et leur a demandé de lui faire connaître leur accord éventuel sous huit jours ; elle les a avisées qu'à défaut l'affaire était mise en délibéré ; aucun accord en ce sens n'ayant été donné dans le délai imparti, la cour vide son délibéré.
Pour un exposé complet des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, la cour se réfère aux conclusions écrites transmises par RPVA et dont un exemplaire a été déposé à l'audience de plaidoirie.
A l'issue de cette audience, les parties présentes ont été avisées que la décision était mise en délibéré pour être rendue par mise à disposition au greffe.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l'inégalité de traitement :
En application du principe "à travail égal, salaire égal", si rien ne distingue objectivement deux salariés'''même travail, même ancienneté, même formation, même qualification''ils doivent percevoir le même salaire. Ainsi comme c'est le cas en droit du travail, les décisions de l'employeur en matière salariale ne peuvent être discrétionnaires': elles doivent, en cas de contestation, reposer sur des éléments objectifs et vérifiables.
Le régime de la preuve en matière d'inégalité de rémunération est le même que celui prévu à l'article L.'1134-1 du Code du travail en matière de discrimination s'il appartient au salarié qui invoque une atteinte à ce principe de soumettre au juge des éléments de faits susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette différence.
Au soutien de sa demande, Madame [W] [G] [H] se prévaut de la rémunération perçue par sa collègue, Mme [Q] [P], embauchée à compter du 01.05.2003, un an après elle hors reprise d'ancienneté, en qualité de démonstratrice coefficient 160 comme elle ; la rémunération annuelle brute de base de sa collègue était alors de 21.600 € par an ce qui représentait un écart annuel avec la sienne de 2.880 € ; les autres conditions de rémunération correspondant au 13è mois, à la prime PIBME, aux primes d'intéressement étaient identiques.
Elle relève que sa collègue a été promue au coefficient 190 un an avant elle, et qu'elle a bénéficié d'une prime exceptionnelle en février 2011 puis en mars 2012 de 500 €.
Cette situation a eu pour incidence l'application d'un taux horaire inférieur et donc une rémunération inférieure.
Elle constate qu'à partir de février 2016, son propre taux horaire a progressé tandis que celui de sa collègue restait stable, elle bénéficiait donc d'un rattrapage.
Madame [W] [G] [H] en outre se prévaut de ses bonnes évaluations annuelles et du résultats de ses ventes annuelles toujours en tête de l'équipe de vente.
Ces éléments pris dans leur ensemble sont susceptibles de caractériser une inégalité de traitement.
De son côté, la SA [Localité 2] expose qu'à l'origine la différence de rémunération annuelle brute de base entre les deux salariées s'expliquait pas leur parcours professionnel antérieur puisque Mme [P] possédait alors une expérience de 13 années au sein de la société SHISEIDO où elle exerçait les fonctions de conseillère beauté avec le statut d'agent de maîtrise, alors que Madame [W] [G] [H] n'avait à son embauche qu'une expérience de quelques mois dans la vente et percevait un salaire moindre. Les deux salariés bénéficiaient cependant du même coefficient d'embauche mais avec un différentiel de salaire de 217 € correspondant à leurs expériences professionnelles différentes dans la vente, nonobstant une ancienneté légèrement différente.
Pour justifier le maintien d'un écart salarial, la SA [Localité 2] observe qu'il s'est fortement réduit ; il est en effet de 43,75 € par mois, en raison de la forte augmentation du salaire de base dont Madame [W] [G] [H] a bénéficié ; ainsi celle ci perçoit en décembre 2016, 1.962,74 € par mois et sa collègue 2.006,49 €.
La société invoque également les importantes primes variables perçues par Madame [W] [G] [H] qui résultent de sa seule activité mais qui ne peuvent être prises en compte dans le cadre d'une comparaison de rémunération ; cet élément n'est pas pertinent.
Madame [W] [G] [H] a été promue au coefficient 190 4C en mars 2012, soit une année après sa collègue.
La SA [Localité 2] expose en outre pour justifier le maintien de ce léger écart de rémunération, qu'il convenait de prendre en compte les compétences techniques mais aussi le comportement de l'intéressée ; Madame [W] [G] [H] s'était vue notifier des sanctions sous forme d'avertissements en 2006 et 201 ainsi qu'un rappel à l'ordre en 2012, sanctions anciennes mais qui peuvent être prises en compte pour justifier une différence de traitement. En ce qui concerne le chiffre d'affaires réalisé qui atteste certes des compétences techniques de la salariée, la société déclare qu'il conviendrait de prendre en compte l'exposition du point de vente ce qui n'est pas démontré.
Enfin, l'employeur démontre que parmi les autres vendeurs de l'équipe constituée de 13 vendeurs, seuls 4 ont un salaire de base supérieur, avec une ancienneté équivalente ou supérieure.
Il en ressort que, sur la période non prescrite, la SA [Localité 2] justifie par des éléments objectifs le faible écart de rémunération entre les deux salariées qui n'était pas important en 2012 et qui a encore depuis fortement diminué. Il y a lieu de rejeter toutes les demandes de Madame [W] [G] [H] tendant à un rappel salarial.
Par ailleurs, la faute de la société n'est pas établie ; il convient de rejeter également la demande de dommages intérêts pour le même motif, et de confirmer la décision rendue.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par mise à disposition, contradictoirement :
Déclare l'appel recevable ;
Confirme le jugement rendu le 24.04.2017 par le conseil de prud'hommes de Paris section Industrie ;
Rejette les autres demandes ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Condamne Mme [G] [H] aux dépens d'appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT