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22/01/2020 | FRANCE | N°18/26970

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 3 - chambre 1, 22 janvier 2020, 18/26970


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











COUR D'APPEL DE PARIS





Pôle 3 - Chambre 1





ARRÊT DU 22 JANVIER 2020





(n° , 9 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/26970 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6ZZE





Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Septembre 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 17/03693








APPELANTS





Monsieur

J..., S..., V... T...


né le [...] à PARIS (75016)


[...]


[...]





Monsieur A..., V... T...


né le [...] à PARIS (75016)


[...]


[...] )





représentés par Me Karine ALTMANN, avocat au barreau de PARIS, toque : E2070


ayant pour ...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 3 - Chambre 1

ARRÊT DU 22 JANVIER 2020

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/26970 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6ZZE

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Septembre 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 17/03693

APPELANTS

Monsieur J..., S..., V... T...

né le [...] à PARIS (75016)

[...]

[...]

Monsieur A..., V... T...

né le [...] à PARIS (75016)

[...]

[...] )

représentés par Me Karine ALTMANN, avocat au barreau de PARIS, toque : E2070

ayant pour avocat plaidant Me Bernard DUMONT, avocat au barreau de FONTAINEBLEAU

INTIME

Monsieur Y..., V... T...

né le [...] à NEUILLY SUR SEINE (92)

[...]

[...]

représenté par Me Frédéric BURET, avocat au barreau de PARIS, toque : D1998

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 17 Décembre 2019, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Dorothée DARD, Président

Mme Madeleine HUBERTY, Conseiller

Mme Catherine GONZALEZ, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme Madeleine HUBERTY dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.

Greffier lors des débats : Mme Emilie POMPON

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Mme Dorothée DARD, Président et par Mme Emilie POMPON, Greffier.

***

PRÉTENTIONS DES PARTIES ET PROCÉDURE

H... M... veuve de V... T..., domiciliée à Paris, est décédée le [...]. Elle a laissé pour lui succéder ses trois fils :

- J... T...,

- A... T...,

- et Y... T....

Il dépendait de la succession, la propriété de 5/8ème des lots 3037 et 3091 dépendant d'un immeuble sis [...] , ainsi que la propriété des lots 5, 19 et 31 de la copropriété d'un immeuble, sis [...] dont la défunte était usufruitière.

Selon un protocole en date du 17 octobre 2015, les trois héritiers ont réparti entre eux les biens immobiliers dans les termes suivants :

'Les soussignés conviennent expressément et irrévocablement d'évaluer les biens et droits immobiliers sis à [...] , à la valeur de 810 000€ et les biens et droits immobiliers sis à [...] à la valeur de 180000€.

Ils conviennent expressément et irrévocablement, aux fins de partage de l'indivision, des attributions suivantes :

A/ A Monsieur Y... T... l'usufruit sa vie durant des biens et droits immobiliers sis à [...] pour la valeur fiscale de 405 000€, de sorte qu'il est redevable d'une soulte d'un montant de 75 000€,

B/ A Monsieur J... T... la moitié en nue propriété des biens et droits immobiliers sis à [...] pour la valeur fiscale de 202 500€ et la pleine propriété des biens et droits immobiliers sis à [...] pour sa valeur, soit 180 000€, de sorte que J... T... est redevable d'une soulte d'un montant de 52 500€.

C/ A Monsieur A... T... la moitié en nue propriété des biens et droits immobiliers sis à [...] pour la valeur fiscale de 202 500€ de sorte qu'il reçoit une soulte de 127 500€.

Le montant des frais de partage évalués à 46 000€ sera réparti par 1/3 entre les soussignés de sorte que le financement de chacun des soussignés s'établit de la manière suivante :

Monsieur Y... T... : 75 000€ + 15 400€ = 90 400€ à régler,

Monsieur J... T... : 52 500€ + 15 400€ = 67 900€ à régler,

Monsieur A... T... : 127 500€ - 15400€ = 112 100€ à recouvrer.

Les soussignés conviennent expressément et irrévocablement de laisser à la charge de la succession les frais inhérents aux deux biens et droits immobiliers faisant l'objet des présentes jusqu'au 1er octobre 2015.

A compter de cette date du 1er octobre 2015, Monsieur Y... T... et J... T... prendront à leur charge exclusive tous les frais inhérents aux biens et droits immobiliers qui leur sont attribués.

Enfin, les parties soussignées feront leur affaire personnelle du partage du mobilier se trouvant dans les deux biens et droits immobiliers faisant l'objet des présentes.

Fait à [...], le 17 octobre 2015'.

Monsieur Y... T..., qui habite l'appartement parisien, n'a pas réglé la soulte, ni la part des frais lui incombant, malgré les multiples relances qui lui ont été adressées par Maître C..., notaire.

Par acte d'huissier en date du 22 février 2017, Messieurs J... et A... T... ont assigné Monsieur Y... T... devant le tribunal de grande instance de Paris, aux fins de nullité du protocole et pour voir ordonner l'ouverture des opérations de comptes liquidation et partage de la succession de leur mère H... M....

Dans son jugement rendu le 28 septembre 2018, le tribunal de grande instance de Paris a statué en ces termes :

- Déboute Messieurs J... et A... T... de toutes leurs demandes;

- Rejette la demande de Monsieur Y... T... au titre de ses frais d'instance non compris dans les dépens;

- Condamne Messieurs J... et A... T... aux dépens.

Messieurs J... et A... T... ont régulièrement interjeté appel par déclaration en date du 27 novembre 2018.

***********************

Dans leurs conclusions régularisées le 23 février 2019 Messieurs J... et A... T... formulent les prétentions suivantes :

- Les déclarer recevables et bien fondés en leur appel à l'encontre du jugement rendu le 28 septembre 2018 en ce qu'il les a déboutés de toutes demandes et condamnés aux dépens;

- Infirmer ledit jugement;

- Prononcer la résolution de la convention signée par les parties le 17 octobre 2015 en raison de la carence persistante de Monsieur Y... T... à en permettre l'exécution, conformément à l'article 1184 ancien du code civil;

- Ordonner en conséquence l'ouverture des opérations de comptes liquidation et partage de l'indivision successorale consécutive au décès de Madame veuve T..., leur mère, et de l'indivision conventionnelle existant entre eux;

- Désigner Maître P... S... C..., notaire au O...F..., à cette fin, ou tel notaire qu'il plaira à la cour de désigner;

- Ordonner la licitation préalable des deux biens immobiliers en dépendant, à savoir :

. l'appartement sis à [...] ,

. et l'appartement sis à [...] ,

sur les mises à prix respectives de 50 000€ pour le premier bien et de 200 000€ pour le second,

suivant le cahier des charges qui sera rédigé par le notaire désigné par la cour,

- Condamner Monsieur Y... T... à payer à Messieurs J... et A... T..., la somme de 900€ chacun par mois, à titre de provision sur l'indemnité d'occupation depuis le 17 octobre 2015;

- Dire non fondées les demandes de dommages intérêts ou indemnités au titre de l'article 700 du code de procédure civile formées par Monsieur Y... T...,

- Condamner Monsieur Y... T... à payer à Messieurs J... et A... T... une somme de 4000€ chacun par application de l'article 700 du code de procédure civile;

- Condamner Monsieur Y... T... aux dépens de première instance et d'appel.

Messieurs J... et A... T... font valoir que :

' leur action en résolution de la convention est recevable en cause d'appel dès lors que l'action en nullité entreprise en première instance et l'action en résolution tendent aux mêmes fins puisqu'il s'agit d'obtenir l'anéantissement rétroactif de l'acte conclu le 17 octobre 2015. Il ne peut être soutenu que leur demande en première instance aurait été limitée à l'ouverture des opérations de comptes liquidation et partage dès lors qu'une telle demande impliquait nécessairement le rejet de la convention du 17 octobre 2015, laquelle n'avait pas été exécutée par Monsieur Y... T.... La validité de la convention et son exécution étaient au coeur des débats de première instance.

' l'intention des parties était de régulariser rapidement l'acte authentique puisqu'il avait été convenu que les charges des attributions convenues incomberaient aux attributaires désignés à compter du 1er octobre 2015. C'est Monsieur Y... T... qui a bloqué la concrétisation du partage en ne répondant pas au notaire et en se contentant de profiter du bien indivis principal dans lequel il demeure. Cette inexécution prolongée d'un engagement essentiel de la convention justifie de façon incontestable la résolution de la conventions sur le fondement de l'article 1184 ancien du code civil. Cette inexécution n'est aucunement contestée par Monsieur Y... T... qui se contente d'invoquer son état d'invalide comme si cet état pouvait le dispenser de respecter ses obligations.

' depuis la date de la convention, ils sont privés de la jouissance du bien ce qui justifie que l'intimé soit condamné à leur payer à chacun une somme de 900€ à titre d'indemnité d'occupation sur la base d'une valeur locative mensuelle estimée à 2700€.

***********************

Dans ses conclusions régularisées le 17 janvier 2019, Monsieur Y... T... formule les prétentions suivantes :

- Déclarer Messieurs J... et A... T... irrecevables en leurs prétentions, fins et conclusions;

- Les en débouter purement et simplement;

- Débouter Messieurs J... et A... T... de l'intégralité de leurs demandes nouvelles;

- Confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 28 septembre 2018 par le tribunal de grande instance de Paris,

En conséquence et y ajoutant,

- Dire et juger que le protocole d'accord du 17 octobre 2015 a réglé le partage de la succession;

- Condamner solidairement Messieurs J... et A... T... à lui payer une somme de 100 000€ à titre de dommages intérêts sur le fondement des articles 1240 et suivants du code civil;

- Condamner solidairement Messieurs J... et A... T... à lui payer une somme de 15000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile;

- Les condamner en tous les dépens, avec distraction.

Monsieur Y... T... fait valoir que :

' Ni l'assignation du 22 février 2017, ni les conclusions régularisées le 13 novembre 2017 par Messieurs J... et A... T... ne comportent une quelconque demande de résolution de la convention du 17 octobre 2015. Ce n'est qu'en appel que Messieurs J... et A... T... ont présenté une telle demande. Il s'agit d'une demande nouvelle en cause d'appel qui est irrecevable au visa de l'article 564 du code de procédure civile.

' le protocole ne saurait être annulé pour aucune cause de nullité prévue par le code civil, car celui-ci a l'autorité de la chose jugée au sens de l'article 2052 ancien du code civil.

' les appelants se sont accaparés le mobilier de la succession et procèdent à son encontre par la voie d'un acharnement démesuré en sollicitant la résolution du protocole alors qu'il est reconnu invalide. Une telle attitude justifie qu'ils soient condamnés à lui payer une somme de 100 000€ à titre de dommages intérêts.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure a été prononcée le 3 décembre 2019.

CELA ETANT EXPOSE, LA COUR,

C'est en raison de l'absence de règlement par Monsieur Y... T... de la soulte (75000€) et de la part des frais lui incombant(15400€) en vertu du protocole signé le 17 octobre 2015 (pièce 2 intimé), que le 22 février 2017, Messieurs J... et A... T... ont engagé à son encontre une action en justice ayant pour objet l'ouverture des opérations de comptes liquidation et partage de l'indivision successorale consécutive au décès de H... M..., survenu le [...], et de l'indivision conventionnelle existant entre eux (achat par les trois frères de l'immeuble Parisien, tandis que leur mère achetait l'usufruit).Cette indivision comprend notamment un bien immobilier sis [...] et un autre bien immobilier, sis [...] ).

L'intérêt de la demande d'ouverture des opérations de comptes liquidation et partage suppose que les biens immobiliers indivis n'ont pas déjà été partagés, ce qui implique de considérer, d'une façon ou d'une autre, que le protocole du 17 octobre 2015 est non avenu ou anéanti. En l'occurrence, la lecture des motifs du jugement dont appel met en évidence que la demande d'ouverture des opérations de comptes liquidation et partage s'est trouvée fondée sur la nullité supposée du protocole. La demande a été rejetée parce que le premier juge a retenu qu'il n'existait aucune cause de nullité de la convention parmi les moyens invoqués, en soulignant que l'absence de paiement de la soulte constituait une inexécution de la convention et non une cause de nullité.

Par application de l'article 565 du code de procédure civile 'les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent'.

Au cas particulier, Messieurs J... et A... T... sollicitent toujours l'ouverture des opérations de comptes liquidation et partage de l'indivision existant entre eux suite au décès de leur mère, ce qui suppose toujours l'anéantissement préalable du protocole du 17 octobre 2015. Cet anéantissement est désormais recherché, non plus sur le fondement d'une quelconque nullité de la convention, mais par la voie de la résolution de la convention pour inexécution, au visa de l'ancien article 1184 du code civil, étant souligné que cette inexécution avait déjà été évoquée en première instance mais que ses incidences juridiques n'avaient été appréhendées qu'au travers d'une demande de nullité.

Il s'en déduit que la demande de résolution de la convention du 17 octobre 2015 tend aux mêmes fins que les prétentions énoncées en première instance, puisqu'il s'agit encore de fonder la demande d'ouverture des opérations de comptes liquidation et partage de l'indivision existant entre les trois frères, cette demande ne pouvant aboutir que s'il y a anéantissement préalable du protocole de répartition des biens immobiliers.

La fin de non recevoir invoquée sur le fondement de l'article 564 du code de procédure civile doit donc être rejetée.

Par application de l'article 2044 ancien du code civil 'la transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître'.

La lecture du protocole révèle qu'il a eu pour objet la répartition de droits immobiliers indivis à l'exclusion d'un litige déjà né ou d'un litige qui risquait de naître. Il n'a d'ailleurs pas été fait mention de concessions réciproques.

Monsieur Y... T... ne peut donc pas prétendre que les prétentions des appelants seraient irrecevables pour l'autorité de la chose jugée attachée au protocole.

Ce protocole ne constitue qu'une convention destinée à faire cesser une indivision immobilière et se trouve en tant que telle soumise aux articles 1134 et 1184 de l'ancien code civil qui disposent que les conventions doivent s'exécuter de bonne foi (ce qui a été rappelé dans le premier jugement) et qu'elles peuvent être résolues 'pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement'.

Le caractère inégalitaire en nature du partage prévu par le protocole s'est trouvé compensé par les soultes qui ont été prévues, le partage des frais ayant été convenu de façon strictement égalitaire. L'absence de règlement de la soulte à la charge de Monsieur Y... D..., ainsi que des frais lui incombant, malgré les nombreuses relances du notaire, porte directement atteinte à l'essence de la convention en ce qu'elle met en cause la répartition des droits de chacun dans les biens indivis.

Si Monsieur Y... D... n'a pas contesté l'absence de règlement de la soulte et des frais lui incombant, il n'a aucunement explicité son attitude puisqu'il s'est contenté de produire des comptes rendus opératoires du 26 juin 1991 (pièce 4-1 intimé) et 22 mars 2006 (pièce 4-2 intimé) ainsi qu'un compte rendu de consultation de l'hôpital SAINT ANTOINE en date du 5 novembre 2018 (pièce 4-3 intimé) et de communiquer la carte d'invalidité qui a été établie à son profit le 11 octobre 2016 (pièce 3 intimé). Tous ces documents afférents à son état de santé ne sont pas de nature à démontrer qu'il serait dans l'impossibilité matérielle d'assumer les obligations qu'il a souscrites, en pleine connaissance de cause (maladie diagnostiquée en 1985), le 17 octobre 2015. Monsieur Y... D... n'a produit aucun document afférent à sa situation matérielle.

La défaillance constatée aux obligations convenues dans le protocole est donc grave, prolongée et ne peut être justifiée par la situation médicale invoquée.

La résolution du protocole du 17 octobre 2015 doit donc être prononcée à la date de cet arrêt.

Le protocole étant anéanti, Messieurs J... et A... T... sont bien fondés à solliciter l'ouverture des opérations de comptes liquidation et partage de l'indivision existant entre eux suite au décès de leur mère survenu le [...] et de façon conventionnelle.

Maître P... S... C... notaire au O... F... ayant présidé à la conclusion du protocole dont la résolution a été prononcée, il apparaît opportun, pour prévenir toute suspicion de défaut de neutralité à l'égard du notaire, de désigner le président de la chambre interdépartementale des notaires de Paris pour procéder aux opérations avec faculté de déléguer tout membre de sa compagnie à cet effet.

Monsieur Y... T... n'a pas indiqué être opposé à la vente sur licitation sollicitée par les appelants, ni aux mises à prix proposées, dans le cas où le protocole serait résolu. Il apparaît, d'autre part, que les deux appartements de 2 pièces (Trouville) et 3 pièces (Paris), soumis au régime de la copropriété (pièces 2 et 3 appelants) ne sont pas partageables entre les trois héritiers. Il convient donc d'ordonner la licitation préalable des biens immobiliers indivis sur les mises à prix proposées et sur le cahier des charges qui sera rédigé par le conseil des appelants, selon les modalités fixées au dispositif de cet arrêt.

Par application de l'article 815-9 du code civil 'l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité'.

Monsieur Y... T... n'a pas contesté avoir la jouissance exclusive des lieux, depuis le 17 octobre 2015 et cette situation se trouve confortée par l'adresse figurant sur la carte d'invalidité qui lui a été délivrée le 11 octobre 2016, par le compte rendu de consultation de l'hôpital SAINT ANTOINE en date du 5 novembre 2018 et même par le compte rendu opératoire de l'hôpital SAINT ANTOINE en date du 22 mars 2006, qui a trait à la situation existant antérieurement au protocole.

L'indemnité d'occupation ne peut cependant être réclamée directement par les indivisaires, car c'est l'indivision qui en est créancière. Elle a évidemment vocation à être prise en compte dans les opérations de comptes et liquidation des droits de chacun des indivisaires, même si les appelants n'en bénéficient pas immédiatement. Messieurs J... et A... T... doivent donc être déboutés de cette prétention.

Monsieur Y... T... doit être débouté de sa demande de dommages intérêts puisqu'il succombe en ses prétentions tendant à la confirmation du jugement et, qu'au surplus, il ne justifie ni d'une faute qui serait imputable aux appelants ni du préjudice qui lui aurait été causé en raison de cette faute supposée, étant souligné que la demande d'exécution d'un accord dûment signé ne peut caractériser un acharnement à son encontre.

Il est équitable de condamner Monsieur Y... T... à payer à Messieurs J... et A... T... une somme de 4000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a mis les dépens à la charge de Messieurs J... et A... T... qui ont alors succombé dans leurs prétentions. Mais les dépens d'appel incombent à Monsieur Y... T... qui succombe à son tour dans l'ensemble de ses prétentions.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

INFIRME le jugement en toutes ses dispositions sauf pour les dépens ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DÉCLARE Messieurs J... et A... T... recevables en l'ensemble de leurs prétentions ;

PRONONCE, à la date de cet arrêt, la résolution du protocole du 17 octobre 2015 pour inexécution par Monsieur Y... D... des obligations lui incombant ;

ORDONNE, en conséquence, l'ouverture des opérations de compte liquidation et partage de l'indivision successorale et conventionnelle existant entre Messieurs Y..., J... et A... T... ;

DÉSIGNE le président de la chambre interdépartementale des notaires de Paris pour procéder à ces opérations avec faculté de déléguer tout membre de sa compagnie à cet effet ;

DIT que les parties devront communiquer au greffe du tribunal (2ème chambre) le nom du notaire commis par la chambre des notaires ;

RAPPELLE que les parties devront remettre au notaire commis toutes les pièces utiles à l'accomplissement de sa mission ;

RAPPELLE que le notaire commis devra dresser un projet d'état liquidatif dans le délai d'un an à compter de sa désignation, ce délai étant suspendu en cas d'adjudication jusqu'à la réalisation définitive de celle-ci ;

COMMET tout juge de la 2ème chambre pour surveiller ces opérations ;

RAPPELLE qu'à défaut pour les parties de signer cet état liquidatif, le notaire devra transmettre au greffe de la 2ème chambre un procès verbal de dires et son projet de partage ;

ORDONNE préalablement à la mise en oeuvre des opérations de comptes liquidation et partage de l'indivision, la vente sur licitation en audience de criées du tribunal judiciaire de Paris, en présence de l'ensemble des parties ou celles-ci dûment appelées, après accomplissement des formalités légales de publicité

' des lots n°3037 et 3091 constitués d'un appartement de deux pièces sis au 1er étage du bâtiment [...], et parking, dépendant d'un ensemble immobilier sis [...] , cadastré section [...] pour une superficie de 2ha43a et40ca,

sur la mise à prix de 50 000€,

' des lots n° 5, 19 et 31 constitués d'un appartement de trois pièces au 3ème étage du bâtiment A, outre une resserre au sous-sol et un emplacement de voiture au sous-sol n°7 sis [...] , cadastré section [...] pour une contenance de 6a15ca,

sur la mise à prix de 200 000€,

' selon le cahier des conditions de vente qui sera rédigé par le conseil des appelants, ou par tout avocat du même barreau, qui s'y substituerait, pour chacun de ces deux biens immobiliers ;

AUTORISE tout huissier de justice, choisi par l'avocat rédacteur du cahier des conditions de vente à pénétrer dans les lieux (tant à [...] qu'à Paris) avec l'accord des occupants et, à défaut, à une date fixée par l'huissier, préalablement notifiée aux occupants, si besoin avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier si nécessaire, pour :

- dresser un procès verbal de description des lieux de leur composition, et de leur superficie avec l'assistance éventuelle d'un technicien de son choix, de décrire les conditions d'occupation de l'immeuble, de relever l'identité des occupants et de mentionner les droits dont ils se prévalent ;

- faire établir tous diagnostics techniques nécessaires à la vente ;

DIT que le procès verbal de description et les diagnostics seront annexés au cahier des conditions de vente ;

AUTORISE tout huissier de justice choisi par le conseil rédacteur du cahier des conditions de vente à faire visiter les lieux, selon les modalités arrêtées avec l'accord des occupants et, à défaut d'accord, dans le mois précédant la vente un maximum de 2 heures par jour du lundi au samedi entre 9h et 12heures et entre 14h et 18 heures;

Vu les articles 1377 et 1274 du code de procédure civile,

DIT que la publicité de la vente sera effectuée de la manière suivante (pour les deux biens) :

. une annonce légale dans les AFFICHES PARISIENNES;

. une annonce légale dans le PARISIEN édition régionale;

. une annonce sur le site LICITOR;

DIT qu'une annonce légale paraîtra en outre dans le journal OUEST FRANCE édition régionale pour le bien sis à [...] ;

DIT que 100 affiches à main seront en outre distribuées sur place pour le bien immobilier de [...] ;

RENVOIE les parties à poursuivre les opérations de partage devant le notaire commis une fois les licitations intervenues ;

DÉBOUTE Messieurs J... et A... T... de leurs prétentions en paiement par Monsieur Y... T... de la somme de 900€ par mois à chacun d'entre eux à titre de provision à valoir sur les indemnités d'occupation dues depuis le 17 octobre 2015 pour la jouissance privative de l'appartement sis [...] ;

DÉBOUTE Monsieur Y... T... de ses prétentions indemnitaires ;

RAPPELLE qu'à tout moment les parties peuvent préférer la voie d'un partage amiable à celle d'un partage judiciaire ;

CONDAMNE Monsieur Y... T... à payer à Messieurs J... et A... T... une somme de 4000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Monsieur Y... T... aux dépens d'appel.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 3 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 18/26970
Date de la décision : 22/01/2020

Références :

Cour d'appel de Paris E1, arrêt n°18/26970 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-01-22;18.26970 ?
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