RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 10
ARRÊT DU 09 MARS 2020
(n° , 8 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/21629 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6OZN
Décision déférée à la Cour : Jugement du 19 Septembre 2018 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 16/00199
APPELANTE
Madame [W] [B]
Domiciliée [Adresse 2]
[Localité 6]
Représentée par Me Anthony BEM, avocat au barreau de PARIS, toque : C2584
INTIMEES
SAS FRUCTUS PATRIMOINE
Ayant son siège social [Adresse 1]
[Localité 5]
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034
LA BANQUE POPULAIRE ALSACE LORRAINE CHAMPAGNE
Ayant son siège social [Adresse 3]
[Localité 4]
N° SIRET : 356 801 571
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Xavier DE RYCK, avocat au barreau de PARIS, toque : R018
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 06 Janvier 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Edouard LOOS, Président
Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère
Monsieur Stanislas de CHERGÉ, Conseiller
qui en ont délibéré,
Un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur [X] [V] dans les conditions prévues par l'article 785 du code de procédure civile.
Greffière, lors des débats : Madame Cyrielle BURBAN
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Edouard LOOS, Président et par Mme Cyrielle BURBAN, Greffière à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Mme [W] [B], kinésithérapeute, est entrée en relations avec la société Fructus Patrimoine, conseiller en gestion de patrimoine et en investissements financiers.
Le 25 septembre 2006, Mme [B] a écrit à la société Banque Populaire Lorraine Champagne (ci-après la société BPLC ) pour solliciter 'sur les conseils de Fructus Patrimoine' un prêt à 100 % aux fins de financer 1'achat d'un nouveau logement.
Préalablement, le ler septembre 2006. la société BPLC avait émis une offre de prêt d'un montant de 520.000 euros, d'une durée de 144 mois dont 143 mois en franchise de capital, au taux nominal de 4,2 %. Le contrat prévoyait, outre la souscription d'une assurance décès invalidité, un privilège de préteur de deniers, une hypothèque, la délégation imparfaite de trois contrats d'assurance vie souscrits auprès de la société AVIP, un engagement de verser annuellement 8.800 euros sur ces trois contrats, et que le produit de la vente de la '1ère maison sera affecté aux '3 contrats de capitalisation Avip'.
Le 10 octobre 2006, la société Fructus Patrimoine écrivait a Mme [B] que 'l 'obtention de votre crédit in fine était subordonné à la mise en garantie de contrats d'assurance vie'. Elle précisait que la somme devait s'élever à 250.000 euros provenant de la vente du pavillon de Mme [B] et que 'compte tenu de la somme en jeu je vous ai conseillé d'ouvrir 3 contrats. Ceci afin de vous laisser plus de liberté au débouclage du crédit à son échéance'. Elle indiquait également avoir fait ouvrir ces trois contrats auprès de la société AVIP pour obtenir les numéros de compte.
Un mandat d'arbitrage au profit de la société Fructus Patrimoine était signé le 25 septembre 2006, de même que trois bulletins d'adhésion et trois chèques de 5 000 euros au profit de la société AVIP et trois formulaires de délégation d'assurance vie.
Le 26 novembre 2006, la société Fructus Patrimoine indiquait a Mme [B] les démarches à accomplir auprès du notaire pour que les fonds soient versés.
Par lettre en date du 6 décembre 2006, la société BPLC a alerté Mme [B] sur la situation de son compte et lui a demandé de verser la somme de 3 644,16 euros.
Le l0 janvier 2007 les sommes de 55 000 euros , 75.000 euros et 105.000 euros ont été versées versées sur chacun des trois contrats AVIP .
Le 19 janvier 2007, la société Fructus Patrimoine a écrit à Mme [B] en lui indiquant que le complément de prix de la vente devait être placé en assurance vie (contrat Himalia), avec un rachat partiel programmé a mettre en place.
Le 29 janvier 2007 ont été souscrits un nouveau contrat Avip Multilib pour un montant de 50 000 euros et un contrat Himalia a été souscrit auprès de la société Générali Patrimoine pour la somme de 100.000 euros. Madame [B] a également consenti deux mandats d'arbitrage au profit de la société Fructus Patrimoine, portant sur ces contrats. Le 28 août 2008, la société Générali Patrimoine a confirmé a Madame [B] le versement complémentaire d'un montant de 33.000 euros sur le contrat Himalia.
Par lettre en date du 07 août 2007, la société BPLC a alerté Mme [B] de l'existence d'une situation 'd'irrégularité' sur son compte.
Selon offre acceptée portant la date du 15 juin 2008, Mme [B] a souscrit auprès de la société BPLC un nouveau prêt in fine destiné à financer des travaux dans sa résidence principale, d'un montant de 150 000 euros, au taux nominal annuel de 5,15 %, remboursable en 143 échéances avec franchise de capital et une échéance du solde, le contrat prévoyant notamment comme garantie la délégation d'un contrat d'assurance-vie Multilib pour un montant de 50 000 euros, outre un versement complémentaire de 10 000 euros et des versements annuels d'un montant de 3.700 euros. Le 13 juin 2008 était signée une délégation de 1'assurance vie mentionnée ci dessus au bénéfice de la société BPLC.
Le 06 août 2008, la société Fructus Patrimoine écrivait à Mme [B] au sujet d'un 'prêt travaux BPLC', recommandant la souscription d'un crédit in fine ainsi que la mise en place d'une garantie par le biais d'une délégation d'assurance vie sur 1'un des contrats Avip Multilib.
Madame [B] procédait à un remboursement anticipé d'un montant de 70 000 euros sur le prêt d'un montant de 520.000 euros au mois d'octobre 2012 suite a des échanges par courriels entre M. [F], la société Bplc et elle même.
Par courriel en date du 24 juillet 2014, M. [F] écrivait à M. [D] [C] et à Mme [E] [S] de la société Bplc, indiquant que Madame [B] 'veut rembourser son crédit in fine de 150 000 euros' et transformer le prêt dont le capital est de 451.692 euros en prêt amortissable tout en remboursant une partie. Il ajoutait 'il faut m'aider et voir si tu peux pas faire quelque chose sur les frais de remboursements anticipés sinon je vais être obligé de la dédommager,ce que j'ai déjà commencé'.
Par courriel en date du 16 novembre 2014, Monsieur [F] donnait instruction a Monsieur [C] de transférer 9 000 euros de son compte sur le compte de Madame [B], précisant 'cette somme est à considérer comme étant une contribution et un dédommagement à la renégociation de ses deux crédits'.
Par actes d'huissier en date du 28 décembre 2015 et du 04 janvier 2016 Mme [B] a fait assigner la société Fructus Patrimoine et à la société Bplc .
* * *
Vu le jugement prononcé le 19 septembre 2018 par le tribunal de commerce de Paris qui a statué ainsi qu'il suit :
Rejette les fins de non recevoir tirées de la prescription soulevées par les sociétés Fructus Patrimoine et Bplc ;
Dit que les sociétés Fructus Patrimoine et Banque Populaire Lorraine Champagne sont responsables, in solidum du préjudice de Madame [W] [B], fixé à la somme de 18 934 euros ;
Constate que la société Fructus Patrimoine a versé à Madame [W] [B] la somme de 9 000 euros en réparation dudit préjudice;
En conséquence, condamne in solidum les sociétés Fructus Patrimoine et Banque Populaire Lorraine Champagne à verser a Madame [W] [B] la somme de 9 934 euros au titre de dommages intérêts ;
Condamne in solidum les sociétés Fructus Patrimoine et Banque Populaire Lorraine Champagne aux dépens et au versement à Madame [W] [B] de la somme de 1 800 euros en application de 1'article 700 du code de procédure civile;
Ordonne l'exécution provisoire ;
Rejette le surplus des demandes.
Vu l'appel de Mme [B] le 02 octobre 2018 ;
Vu les dernières conclusions signifiées par Mme [B] le 5 décembre 2019,
Vu les dernières conclusions signifiées par la société Fructus Patrimoine le 18 juin 2019,
Vu les dernières conclusions signifiées par la BPLC le 18 mars 2019,
Mme [B] demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :
Vu les articles 1134, 1147, 1149 et 2224 du Code civil ;
Vu les articles 325-4 du règlement général de l'AMF,
Vu les articles L.541-8-1 et 325-5 à 325-9 du Code des marchés financiers,
Vu l'article L. 111-1 alinéa 1 et 311-9 ancien du Code de la consommation,
Sur l'appel formé :
Infirmer partiellement le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris, le
19 septembre 2018 ;
En conséquence :
Condamner solidairement la Bplc et la société Fructus Patrimoine à verser à Madame [B] la somme de 808 026,10 euros en réparation du préjudice financier subi par cette dernière ;
Condamner solidairement la Bplc et la société Fructus Patrimoine à verser à Madame [B] la somme de 50 000 euros, en réparation du préjudice moral subi par cette dernière ;
Sur l'appel incident formé,
Débouter la Bplc et la société Fructus Patrimoine de l'ensemble de leurs demandes incidentes
Confirmer partiellement le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Paris, le 19 septembre 2018 ;
En conséquence :
Constater que la société Fructus Patrimoine était tenue envers Madame [B] de lui délivrer des informations légales en sa qualité de conseiller en investissement financier ;
Constater que la société Fructus Patrimoine était tenue envers Madame [B] de lui faire signer une lettre de mission, définissant le cadre de son intervention ;
Constater que la Bplc a manqué à ses obligations d'information, de conseil et de mise en garde envers Madame [B] ;
Constater que la société Fructus Patrimoine a manqué à ses obligations de conseil et de
mise en garde envers Madame [B] ;
Constater que le montage financier réalisé par Madame [B] était manifestement
inadapté à son profil et à sa situation patrimoniale ;
La société Fructus Patrimoine demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :
Statuant sur l'appel principal de Madame [B]
La déclarer mal fondée.
La Débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions.
Statuant sur l'appel incident de la société Fructus Patrimoine
Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Déclarer à titre principal Madame [B] irrecevable en sa demande, pour cause de prescription et subsidiairement mal fondée en toutes ses demandes, fins et conclusions.
La condamner à verser à la société Fructus Patrimoine la somme de 3 000 euros, au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La condamner aux dépens d'appel.
Et plus généralement débouter toutes parties de toutes demandes contraires aux présentes
La société BPLC demande à la cour de statuer ainsi qu'il suit :
Statuant sur l'appel de Mme [B] :
Le déclarer mal fondé ;
Débouter l'appelante de toutes ses fins et prétentions ;
la condamner au paiement d'une indemnité de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
La condamner aux entiers frais et dépens de l'appel ;
Statuant sur l'appel incident de la concluante :
Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, et notamment en ce qu'il a rejeté l'exception de prescription et condamné la banque concluante in solidum avec la société Fructus Patrimoine ;
Déclarer la demande de Mme [B] prescrite ;
La Déclarer mal fondée ;
La Condamner au paiement d'une indemnité de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
La condamner aux entiers frais et dépens de l'appel incident.
SUR CE,
a) Sur la prescription
Mme [B] s'oppose à la fin de non recevoir soulevée par les intimées relative à la prescription de ses demandes . Elle approuve les premiers juges qui ont relevé que l'opération consistant en un prêt in fine, l'appréciation du dommage peut résulter de la vente d'un bien pour procéder à un remboursement anticipé intervenu en octobre 2012. L'action ayant été engagée par assignations des 28 décembre 2015 et 04 janvier 2016 ne serait dés lors pas prescrite.
Selon la société Fructus, Mme [B] lui fait grief de lui avoir conseillé la souscription de deux contrats de prêt in fine qui auraient été inadaptés à sa situation financière et qui se seraient révélés prétendument plus onéreux que la souscription de prêts amortissables. Le point de départ de la prescription doit être fixé au jour de l'octroi du crédit, date de la prétendue inexécution contractuelle commise par la société Fructus Patrimoine, à savoir le 1er septembre 2006 pour le prêt n° 1 de 520 000 euros et le 2 juin 2008 pour le prêt n°2 de 150 000 euros.
Selon la société BPALC, si la prescription n'a pas couru à compter de la conclusion des contrats en 2006 et 2008, elle a inévitablement couru à compter de février 2009, lorsque Mme [B] a été informée par les assureurs de la chute des rendements et de la valorisation des contrats d'assurance-vie, rompant l'équilibre entre les intérêts à payer et les rendements obtenus.
Ceci étant observé, le point de départ de la prescription de 5 ans prévue à l'article L. 110-4 du code de commerce court à compter de la réalisation du dommage ou de la date de sa révélation.
Dans la présente espèce, Mme [B] reproche aux intimés un montage financier inadapté à son profil et à sa situation personnelle. Mme [B] expose avoir conclu avec la BPLC le 1er septembre 2006 un premier prêt d'un montant d'un montant de 520 000 euros. Elle expose avoir ensuite conclu le 13 juin 2008 avec le même établissement bancaire un second prêt in fine d'un montant de 150 000 euros portant ainsi à 670 000 euros la somme remboursable à échéance, les placements en assurance vie souscrits pour permettent le paiement de la somme due se chiffrant à 433 000 euros . Elle expose avoir été contrainte de vendre 2 biens immobiliers pour procéder à un remboursement anticipé du 1er prêt ainsi ramené à 451 691 euros au lieu de 520 000 euros, un avenant à ce premier ayant finalement été conclu le 13 décembre 2014 pour le transformer en un prêt amortissable d'un montant de 255 583, 19 euros.
La connaissance par Mme [B] de son dommage a ainsi pu se situer au jour où elle a été contrainte de céder 2 biens immobiliers pour reéquilibrer son financement et réduire de 70 000 euros la somme restant due à l'échéance , les incidents de paiement antérieurs ne lui permettant pas nécessairement d'apprécier l'intégralité du dommage qu'elle allègue dans la présente procédure ; ces cessions étant intervenues en 2014, la prescription n'est pas acquise puisque Mme [B] assigné les sociétés Fructus Patrimoine et BPLC les 28 décembre 2015 et 04 janvier 2016.
Le jugement déféré doit être confirmé de ce chef.
b) Sur la responsabilité des sociétés Fructus Patrimoine et BPLC
Par de justes motifs que la cour adopte , les premiers juges ont considéré que la société Fructus Patrimoine , conseil en investissement financier au sens de l'article L.541-1 du code monétaire et financier, avait informé et conseillé Mme [B] pendant l'ensemble de l'opération et notamment lors de la conclusion des 2 prêts in fine du 1er septembre 2006 et du 13 juin 2008 et que sa responsabilité se trouvait ainsi engagée .
Concernant la banque BPLC, si effectivement le simple fournisseur de crédit n'est en principe pas tenu à une obligation de conseil sur l'opération envisagée , la situation de la présente est différente puisque la banque a proposé en 2006 un crédit in fine adossé à des contrats d'assurance vie, délégués à son profit, et s'est impliquée dans la conception de l'opération ayant une finalité patrimoniale à long terme et fiscale .
Les premiers juges ont ainsi justement retenu la responsabilité du conseil en investissement financier et de l'établissement bancaire.
c) Sur le préjudice
Mme [B] réclame des dommages et intérêts à hauteur de 808 026,10 euros en réparation du dommage financier qu'elle a subi outre 50 000 euros en indemnisation de son préjudice moral.
Elle expose qu'alors que M. [F] , gérant de la société Fructus Patrimoine , lui avait indiqué que ses gains annuels seraient de l'ordre de 6 % à 7 %, ils se sont finalement révélés catastrophiques, puisque sur les 300 000 euros placés pendant 8 ans au titre des placements nantis, ceux ci auraient dû s'élever à un montant de 444.000 € à percevoir alors qu'elle a uniquement perçu la somme de 310 283 euros . Concernant le prêt de 133 000 euros ayant fait l'objet du contrat Himalia , le solde disponible s'est chiffré à 1 959 euros.
Elle soutient que son préjudice ne peut être limité à une année ainsi que retenu par les premiers juges qui lui ont alloué 18 934 euros, mais aux 8 années durant lesquelles son préjudice s'est poursuivi. Elle évalue donc son préjudice financier à la somme de 808 026,10 euros résultant du décompte suivant :
(430 000 euros x 5,15 % x 8 ans) + 3 475 euros + 246 736,76 euros + 125 071,15 euros + 255 583,19 euros).
La société Fructus Patrimoine estime avoir accompli son devoir de conseil. Elle soutient que la solution proposée était parfaitement adaptée et de pratique courante, comme le souligne également la Banque Populaire, dans ses écritures : « Le montage conseillé par Fructus Patrimoine est classique et conforme aux standards en la matière pour un emprunteur de cet âge exerçant une profession indépendante (') et paraissait donc suffisamment équilibré sur le plan patrimonial (entre actifs et passifs) et sur le plan des flux financiers (..)'. Elle reproche aux premiers juges de s'être placés à posteriori dans le contexte de 2014 soit plusieurs années après la conclusion des prêts alors que les taux avaient connu une baisse historique . Elle expose également que Mme [B] a été confrontée à des difficultés financières à compter de 2013 .
La société BPLC conteste également le préjudice financier invoqué par Mme [B].
Ceci étant observé , la BPLC relève justement que le manquement à l'obligation de mise en garde n'est sanctionné que par l'indemnisation de la perte de la chance de ne pas contracter. Or l'investissement immobilier réalisé à [Localité 6] par Mme [B] et la vente de son autre bien immobilier ont été décidés par l'intéressée pour regrouper son domicile et son activité professionnelle, seul le montant du prêt et son caractère in fine étant critiqués. Ce montage répond à une double perspective fiscale et patrimoniale, les contrats d'assurance-vie pouvant être résiliés à tout moment et compensés avec les prêts avec perte de l'avantage fiscal.
Il doit être également relevé que le prêt in fine initial consenti le 1er septembre 2006 a donné satisfaction à Mme [B] puisqu'elle en a conclu un second le 13 juin 2008 répondant au même mécanisme . Les difficultés sont en lien avec les événements survenus postérieurement correspondant à l'effet cumulé d'une baisse des taux d'intérêts et des ressources de Mme [B] qui ne suffit pas à remettre en cause les choix initiaux de Mme [B] de conclure des prêts in fine ni de caractériser un quelconque manquement au devoir de conseil .
La banque relève également justement que , lors de l'acquisition de l'immeuble à [Localité 6] (94), le précédent immeuble n'était pas vendu et que Mme [B] aurait ainsi été contrainte de conclure un prêt relais . Elle a également bénéficié des avantages fiscaux liés aux contrats d'assurance-vie .
La somme de 9 000 euros versée par la société Fructus Patrimoine à Mme [B] en novembre 2014 à titre 'de contribution et de dédommagement à la renégociation des 2 crédits' ne constitue pas une reconnaissance de préjudice dans le cadre du présent litige.
Il se déduit de ce qui précède que Mme [B] ne justifie d'aucun préjudice ni financier ni moral. Le jugement déféré doit être infirmé de ce chef .
PAR CES MOTIFS :
La cour,
CONFIRME le jugement déféré en ce qu'il a dit l'action non prescrite ;
INFIRME le jugement déféré pour le surplus et statuant à nouveau:
DÉBOUTE Mme [B] de ses demandes de dommages et intérêts ;
CONDAMNE Mme [B] à verser sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile 2 500 euros à la société Fructus patrimoine et 2 500 euros à la société Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne ;
REJETTE toutes autres demandes ;
CONDAMNE Mme [B] aux entiers dépens.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
C. BURBAN E. LOOS