Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 4
ARRET DU 27 MAI 2020
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/02187 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5BFB
Décision déférée à la Cour : Jugement du 31 Octobre 2017 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 17/01093
APPELANTE
Madame [P] [R] épouse [S]
[Adresse 3],
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Rachel SPIRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0335
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2017/060344 du 14/02/2018 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)
INTIMEE
SARL NEOMENAGE
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représentée par Me Julien WETZEL, avocat au barreau de PARIS, toque : E1065
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 24 Février 2020, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Olivier MANSION, conseiller, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Monsieur Bruno BLANC, président
Madame Marianne FEBVRE-MOCAER, conseillère
Monsieur Olivier MANSION, conseiller
Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, le délibéré ayant été prorogé jusqu'à ce jour.
- signé par Bruno BLANC, Président et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
EXPOSÉ DU LITIGE :
Mme [S] (la salariée) a été engagée le 19 avril 2012 par contrat à durée indéterminée à temps partiel en qualité d'aide ménagère par la société Neoménage (l'employeur).
Elle a été licenciée le 17 mars 201 pour insuffisance professionnelle.
Estimant ce licenciement infondé, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes qui, par jugement du 31 octobre 2017, a rejeté toutes ses demandes.
La salariée a interjeté appel le 30 janvier 2018, après notification du jugement le 18 décembre 2017.
Elle demande, au regard d'un licenciement, selon elle, sans cause réelle et sérieuse, paiement des sommes de :
- 16.946,72 € de rappel de salaires pour la période de mars 2014 à mai 2016,
- 1.694,67 € de congés payés afférents,
- 8.000 € de dommages et intérêts pour privation des majorations légales des heures complémentaires, à titre subsidiaire,
- 10.000 € de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail,
- 51,69 € de rappel d'heures complémentaires,
- 5,17 € de congés payés afférents,
- 81,02 € de rappel sur sanctions pécuniaires illicites,
- 8,10 € de congés payés afférents,
- 4.364,88 € d'indemnité pour travail dissimulé,
- 10.000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- la capitalisation des intérêts dus au taux légal,
- 4.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de son conseil,
et réclame la délivrance sous astreinte de 300 € par jour de retard et par document, des bulletins de salaire et 'documents de fin de contrat', la cour se réservant le droit de liquider l'astreinte, ainsi que, sous la même astreinte, de régulariser sa situation auprès des organismes sociaux.
L'employeur conclut à la confirmation du jugement et sollicite paiement de 2.500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Il sera renvoyé pour un plus ample exposé du litige aux conclusions des parties échangées par RPVA les 11 octobre 2018 et 29 novembre 2019.
MOTIFS :
Sur la requalification du contrat à temps partiel en contrat à temps complet :
L'article L. 3123-14 du code du travail alors applicable dispose que le contrat de travail à temps partiel est un contrat écrit mentionnant notamment la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois, les modalités selon lesquelles les horaires, pour chaque journée travaillée, sont communiquées par écrit au salarié et les limites dans lesquelles peuvent être effectuées des heures supplémentaires.
A défaut d'écrit ou de ces mentions, le contrat peut être requalifié en contrat à temps complet.
Il en va de même lorsque le salarié est dans l'impossibilité de prévoir son rythme de travail et reste constamment à la disposition de l'employeur.
Il s'agit alors d'un présomption simple supportant la preuve contraire par l'employeur.
Par ailleurs, il appartient au salarié de démontrer qu'il s'est tenu à la disposition de l'employeur pendant les temps non travaillés.
En l'espèce, la salariée indique que jusqu'en mars 2015, le contrat ne prévoyait pas la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine et entre les semaines du mois et que la modification n'était pas notifiée sept jours au moins avant sa mise en oeuvre.
Enfin, il est ajouté que les plannings mensuels faisaient l'objet de modifications multiples sans respect d'un délai de prévenance.
Elle ajoute qu'à partir de mai 2015, le temps de travail a été annualisé mais demeurait soumis à de fortes variations.
Le contrat de travail prévoit une durée hebdomadaire de trois heures portée à neuf heures par avenants successifs pour les années 2012, 2013 et 2014 (jusqu'en octobre).
Des avenants sont intervenus les 1er décembre 2013, 1er mars et 1er novembre 2014, 1er mars 2015 et 1er mai 2015 pour modifier la durée du travail qui restait à temps partiel.
Aucun de ces contrats ne prévoit de répartition hebdomadaire.
Les plannings prévisionnels produits, signés par la salariée, (pièce n°21) pour les années 2013 ( à partir de mai) à 2015 incluse, ont été communiqués au moins sept jours avant le début du mois et prévoient une répartition du temps de travail dans la semaine.
Il n'en va pas de même pour les années antérieures (pièce n°11 de la salariée), quant au délai de prévenance.
Par ailleurs, la salariée pour la période d'avril 2012 à mai 2015 où la requalification peut être envisagée, ne démontre pas être restée à la disposition de l'employeur en dehors du temps travaillé et rémunéré.
Il est établi qu'elle travaillait, au moins en 2014, pour un autre employeur (pièce n°35).
Il en résulte que la demande de rappel de salaire ne peut prospérer, ce qui implique la confirmation du jugement.
Sur les dommages et intérêts relatifs aux heures complémentaires :
Il est demandé des dommages et intérêts pour privation des majorations légales des heures complémentaires, l'employeur ayant eu recours à 93 avenants pour modifier la durée du contrat de travail dans le seul but d'éviter de payer ces majorations.
L'employeur soutient que cette demande est nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile.
La salariée indique que cette demande est accessoire à la demande principale de rappel de salaire découlant de la requalification demandée.
Force est de constater que cette demande de dommages et intérêts est formée à titre subsidiaire, en cas de rejet de la demande de requalification, et n'a pas été présentée devant le conseil de prud'hommes.
Elle ne constitue pas l'accessoire de la demande principale portant sur un rappel de salaire à la suite de la requalification demandée du temps partiel en temps complet, s'agissant d'une demande de dommages et intérêts, donc de nature différente qui ne tend à la même fin, et qui résulte de l'exécution du contrat de travail à temps partiel.
La demande est donc nouvelle et partant irrecevable à hauteur d'appel.
Sur le rappel d'heures complémentaires :
La salariée soutient qu'elle a accomplie, sur l'année 2015, 4,89 heures complémentaires qui n'ont pas été rémunérées.
Elle se réfère à un décompte précis du temps de travail effectué, page 18 des conclusions.
L'employeur se reporte au télé-contrôle mis en place dans la société pour demander le rejet de la demande, en soulignant qu'elle a été présentée en cause d'appel pour la première fois, page 26 de ses conclusions.
L'employeur demande le rejet de cette demande et non son irrecevabilité.
Toutefois, cette irrecevabilité sera prononcée d'office, s'agissant d'une demande nouvelle présentée la première fois à hauteur d'appel.
Sur le licenciement :
La lettre de licenciement datée du 17 mars 2016 (pièce n°2) reproche à la salariée une insuffisance professionnelle consistant en une mauvaise qualité des prestations effectuées, une impossibilité de communication et une absence injustifiée le 22 septembre 2015.
Ce dernier grief, qui n'a pas déjà été sanctionné par la lettre du 28 septembre 2015 (pièce n°16), ne peut constituer une insuffisante professionnelle.
Le deuxième grief n'est pas démontré par l'employeur et ne peut résulter du refus de recevoir un document en main propre.
Sur le premier grief, l'employeur produit des mails de clients mécontents (pièces n°11 à 17) qui retracent des manquements relatifs au repassage non effectué ou mal réalisé, au matériel cassé, aux lumières non éteintes et au travail bâclé.
Il en résulte que le licenciement est fondé, ce qui entraîne la confirmation du jugement sur ce point.
Sur les autres demandes :
1°) L'exécution déloyale du contrat de travail n'est pas établie faute pour la salariée de démontrer un préjudice moral et de santé spécifique ou encore une usage abusif par l'employeur de son pouvoir disciplinaire.
Il en va de même pour le manquement allégué aux dispositions de l'article L. 6321-1 du code du travail, lequel ne prévoit pas d'obligation pour l'employeur de lutter contre l'illettrisme mais seulement de proposer des formations à ce titre.
La demande de dommages et intérêts sera donc rejetée.
2°) L'indemnité pour travail dissimulé n'est pas due au regard de ce qui précède et alors que la salariée ne démontre pas l'intention frauduleuse de l'employeur.
3°) La salariée demande le remboursement des retenues effectuées pour départ anticipé sans autorisation, s'agissant, selon elle, d'une sanction pécuniaire prohibée au sens de l'article L. 1331-1 du code du travail.
L'employeur souligne que les retenues sont proportionnées à l'absence de travail et résultent à la fois des plannings et du télé-contrôle effectué par la salariée elle-même.
L'article L. 1331-2 du code du travail interdit les amendes et autres sanctions pécuniaires.
Ne constitue pas une telle sanction la retenue sur salaire effectuée en raison de l'absence du salarié et à proportion de celle-ci.
Ici, le départ anticipé se traduit pas une absence de travail pendant la durée prévue, de sorte que les retenues effectuées sont fondées et ne peuvent donner lieu à remboursement.
4°) Les demandes de remise de documents, de régularisation auprès des organismes sociaux et de paiement des intérêts au taux légal deviennent sans objet.
5°) Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes.
La salariée supportera les dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS :
La cour statuant publiquement, par décision contradictoire :
- Dit que la demande subsidiaire de Mme [S] tendant au paiement de 8.000 € de dommages et intérêts pour privation des majorations légales des heures complémentaires est irrecevable comme nouvelle à hauteur d'appel ;
- Dit que les demandes de Mme [S] tendant au paiement de 51,69 € de rappel d'heures complémentaires et de 5,17 € de congés payés afférents, sont irrecevables comme nouvelles à hauteur d'appel ;
- Confirme le jugement du 31 octobre 2017 ;
Y ajoutant :
- Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
- Condamne Mme [S] aux dépens d'appel ;
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT