Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 6
ARRET DU 17 JUIN 2020
(n° 2020/ , 2 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/01449 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B45TI
Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Décembre 2017 -Conseil de Prud'hommes - Formation de départage de PARIS - RG n° F16/02130
APPELANTE
Me [M] [F] (SCP B.T.S.G.) - Liquidateur judiciaire de SCP BTSG
[Adresse 3]
Représenté par Me François DUPUY, avocat au barreau de PARIS, toque : B0873
INTIMES
Monsieur [H] [G]
[Adresse 1]
Représenté par M. [K] [B] (Délégué syndical ouvrier)
Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA IDF OUEST représentée par son Directeur
[Adresse 2]
Représentée par Me Claude-marc BENOIT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1953
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Mars 2020, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Nadège BOSSARD, conseillère chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Anne BERARD, Présidente de chambre
Madame Nadège BOSSARD, Conseillère
Monsieur Stéphane THERME, Conseiller
Greffier : Madame Pauline MAHEUX, lors des débats
ARRÊT :
- contradictoire,
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, le prononcé de l'arrêt, initialement fixé dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, ayant été modifié en raison de l'état d'urgence sanitaire,
- signé par Madame Anne BERARD, Présidente de chambre et par Madame Pauline MAHEUX, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :
Monsieur [H] [G] a été embauché le 2 février 2010 par l'association Aviation Club de France selon contrat à durée indéterminée à temps partiel, en qualité de chef de partie principal, moyennant une rémunération mensuelle brute de 2.540 €.
L'association exerce trois activités principales :
- des activités associatives et caritatives : accès à des salons de lecture et de télévision et à une bibliothèque
- l'exploitation d'un bar-restaurant haut de gamme de 150 places assises,
- un cercle des jeux de hasard selon autorisation du Ministère d'intérieur depuis 1927.
Par avenant du 7 décembre 2010, M. [G] a été nommé au poste de principal collaborateur à temps plein moyennant une rémunération brute mensuelle de 5.000 €.
L'association a fait l'objet d'une fermeture administrative le l7 septembre 2014 pour des motifs découlant de saisies dans le cadre d'une enquête judiciaire visant trois de ses salariés.
Par ordonnance du juge d'instruction du tribunal de grande instance de Paris en date du 18 septembre 2014, M. [G] a été placé sous contrôle judiciaire avec interdiction de rentrer en contact avec les salariés de l'association Aviation Club de France ainsi qu'avec, notamment, M. [J], directeur des jeux, et interdiction de se rendre dans les locaux d'Aviation Club de France.
Selon avenant en date du 15 octobre 2014, M. [G] a été nommé membre du comité des jeux.
Sa dernière rémunération moyenne mensuelle calculée sur douze mois s'élevait à 6.912,15 €.
Une procédure de sauvegarde a alors été ouverte au bénéfice de l'association le 27 novembre 2014.
Puis par jugement en date du 19 février 2015, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la liquidation judiciaire de l'association défenderesse et a désigné la SCP BTSG prise en la personne de Me [M] en qualité de liquidateur judiciaire.
M. [G] a fait l'objet d'une procédure de licenciement dans le cadre de la liquidation judiciaire de l'association.
Le 22 mars 2015, il a accepté le contrat de sécurisation professionnelle qui lui avait été proposé le 5 mars 2013.
M. [G] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 25 février 2016 aux fins de voir condamner l'association Aviation Club de France à lui payer :
- 12.598,55 euros au titre des salaires de septembre, octobre et 15 jours de novembre,
- 1259,85 euros au titre des congés payés sur salaire :
- 8069,41 euros au titre du remboursement de salaire de décembre 2014 au 19 janvier 2015.
Par jugement du 13 décembre 2017, le conseil de prud'hommes a :
- dit que la créance de M. [G] à fixer au passif de l'association Aviation Club de France était limitée à la somme de 4561,92 euros de rappel de salaire pour la période du 1er au 18 septembre 2014,
- dit que cette somme produira des intérêts légaux à compter du 25 février 2016,
- débouté le salarié du surplus de leurs demandes,
- débouté Me [M] et l'AGS de leur demande de remboursement des salaires versés pour la période du 19 janvier 2015 au 4 mars 2015,
- donné acte à l'AGS de son intervention dans la limite de sa garantie légale,
- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement,
- condamné la SCP BTSG aux entiers dépens.
La SCP BTSG prise en la personne de Me [M] a interjeté appel le 9 janvier 2018.
La déclaration d'appel a été signifiée à M. [G] par acte d'huissier de justice en date du 16 mars 2018.
Selon ses dernières conclusions remises au greffe, signifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 12 mars 2018 et à M. [G] par acte d'huissier de justice en date du 16 mars 2018, auxquelles la cour se réfère expressément, la SCP BTSG prise en la personne de Me [M] demande de :
-de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a :
- débouté le liquidateur de toutes ses demandes et notamment de sa demande reconventionnelle,
- assorti la somme fixée au passif d'intérêts légaux à compter du 25 février 2016,
Et statuant à nouveau :
1. A titre principal :
- dire et juger que le contrat de travail de Monsieur [G] était suspendu à compter du 18 septembre 2014 en raison de son placement sous contrôle judiciaire avec interdiction de rentrer en contact avec le personnel de l'association jusqu'à la rupture du contrat de travail fixée au 26 mars 2015,
- dire et juger en conséquence qu'aucun salaire n'est dû pour cette période pendant laquelle le salarié n'a pas été en mesure de travailler pour son employeur,
- dire et juger qu'en conséquence M. [G] n'a acquis aucun congé payé pendant la période de suspension de son contrat de travail courant du 18 septembre 2014 au 26 mars 2015,
- dire et juger que l'ancienneté de M. [G] n'a pas couru pendant la période de suspension de son contrat de travail du 18 septembre 2014 au 26 mars 2015,
- dire et juger que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse,
- dire et juger que les intérêts au taux légal ne peuvent courir à compter du prononcé du jugement de liquidation judiciaire soit le 19 février 2015,
- en conséquence, débouter le salarié de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions initiales ;
Reconventionnellement :
- dire et juger que le liquidateur a versé indûment au salarié, des salaires pendant la suspension du contrat de travail,
- dire et juger que le liquidateur a versé indûment au salarié, des congés payés pendant la suspension du contrat de travail,
- dire et juger que le liquidateur a fait courir indûment l'ancienneté du salarié, pendant la suspension du contrat de travail,
- en conséquence, condamner M. [G] à rembourser à la SCP BTSG, prise en la personne de Me [M], en qualité de liquidateur de l'association Aviation Club de France, pour le compte du CGEA AGS :
o la somme de 9510 brut correspondant à un trop-perçu au titre des salaires pour la période courant du 19 janvier 2015 au 26 mars 2015,
o la somme de 860,70 euros correspondant à un trop perçu au titre de l'indemnité légale de licenciement pour la période du 18 septembre 2014 au 26 mars 2015,
o la somme de 4466,14 euros correspondant à un trop perçu au titre des congés payés pour la période du 18 septembre 2014 au 26 mars 2015,
- dire et juger que M. [G] n'est créancier d'aucune somme et que les fixations au passif précédemment intervenues sont des erreurs non créatrices de droit,
- condamner M. [G] à payer à la SCP BTSG, prise en la personne de Maître [M], es qualité de liquidateur de l'association Aviation Club de France, la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
A titre subsidiaire :
- dire et juger que M. [G] a atteint le plafond de garanti AGS en ce qui concerne le versement de ses salaires,
- constater que les sommes dépassant le plafond de garantie ont été ou seront fixées au passif de la société,
- mettre hors de cause l'AGS sur ce fondement.
Selon ses dernières conclusions remises au greffe, signifiées par le réseau privé virtuel des avocats au liquidateur judiciaire le 11 juin 2018 et auxquelles la cour se réfère expressément, l'AGS demande de :
Réformer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes en ce qu'il a :
- débouté l'AGS de sa demande reconventionnelle ;
- fixé au passif de l'association la somme de 4.561,92 €
En conséquence et statuant à nouveau,
A titre principal :
Donner acte à l'AGS du fait qu'elle s'associe aux explications de la société et de ses mandataires judiciaires concernant les conditions de la rupture du contrat de travail ;
Dire et juger que le licenciement pour motif économique de M. [G] est fondé ;
Dire et juger que le contrat de travail de M. [G] a été suspendu à compter du 18 septembre 2014, date de son placement sous contrôle judiciaire ;
En conséquence,
Débouter M. [G] de ses demandes ;
A titre reconventionnel :
Condamner M. [G] à rembourser à Maître [M], ès qualité, la somme de 9 510 euros bruts, à charge pour Me [M] de restituer les sommes recouvrées à l'AGS ;
Dire et juger que M. [G] n'est créancier d'aucune somme à l'encontre de Me [M] ;
Sur la garantie
Dire et juger que s'il y a lieu à fixation, celle-ci ne pourra intervenir que dans les limites de la garantie légale ;
Dire et juger qu'en application de l'article L.3253-8 5°, et lorsque le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de la société débitrice, la garantie de l'AGS ne couvre les créances de nature salariale éventuellement dues au titre de l'article L.622-17 du Code de commerce, que dans la limite d'un montant maximal correspondant à un mois et demi de travail à compter du 27 novembre 2014 ;
Dire et juger qu'en tout état de cause, la garantie prévue aux dispositions de l'article L.3253-6 du code du travail ne peut concerner que les seules sommes dues en exécution du contrat de travail au sens dudit article L.3253-8 du Code du travail, les astreintes, dommages et intérêts mettant en 'uvre la responsabilité de droit commun de l'employeur ou article 700 étant ainsi exclus de la garantie ;
Dire et juger qu'en tout état de cause la garantie de l'AGS ne pourra excéder, toutes créances avancées pour le compte du salarié, l'un des trois plafonds visé aux articles L.3253-17 et D.3253-5 du Code du travail.
Statuer ce que de droit quant aux frais d'instance sans qu'ils puissent être mis à la charge de l'UNÉDIC AGS.
M. [G] a constitué avocat le 6 novembre 2018 mais n'a pas conclu.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 10 février 2020.
MOTIFS :
Selon l'article 954 dernier alinéa du code de procédure civile, la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs.
M. [G] qui a constitué avocat mais n'a pas conclu est donc réputé s'approprier les motifs du jugement entrepris.
Le motif économique du licenciement n'est pas contesté.
Sur la fixation au passif de la liquidation judiciaire de la somme de 4561,92 euros de rappel de salaire pour la période du 1er au 18 septembre 2014 :
L'AGS demande que cette somme ne soit pas fixée au passif de liquidation judiciaire de l'association sans en expliciter le motif dans ses conclusions.
Il s'agit des salaires dus avant la suspension du contrat de travail et antérieurs à la sauvegarde judiciaire qui n'ont pas fait l'objet d'avance de l'AGS. Le liquidateur judiciaire ne conteste pas que ces salaires soient dus. C'est donc par une juste appréciation des éléments de la cause que le conseil de prud'hommes a fixé au passif de la liquidation judiciaire la somme de 4561,92 euros. Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.
Cette créance ne saurait produire intérêts au taux légal dans la mesure où la saisine du conseil de prud'hommes est postérieure au jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde en date du 27 novembre 2014, lequel interrompt le cours des intérêts en application de l'article L622-28 du code de commerce. Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.
Sur la demande de remboursement des salaires du 19 janvier 2015 au 4 mars 2015 avancés par l'AGS :
Il n'est pas contesté que le contrat de travail de M. [G] ait été suspendu du 18 septembre 2014 au 26 mars 2015 en raison de l'interdiction qui lui a été faite d'entrer en contact avec son employeur.
Le relevé de créance mentionne une somme de 8891,61 euros au titre des salaires pour la période du 19 janvier au 4 mars 2015 et la somme de 618,39 euros au titre de la même période. Ces sommes ont été avancées par l'AGS respectivement les 25 février 2015 et 25 mars 2015 qui les a remises au liquidateur lequel les a reversées au salarié.
Or, elles concernent une période au cours de laquelle le contrat de M. [G] était suspendu. Elles n'étaient donc pas dues.
L'AGS ayant indûment avancé la somme de 9.510 € à titre de salaires du 19 janvier 2015 au 4 mars 2015, elle est bien fondée à solliciter la condamnation de Monsieur [G] au remboursement de la somme de 9.510 € bruts à Me [M], ès qualité, à charge pour lui de restituer cette somme à l'AGS.
Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.
Sur la demande de remboursement du trop perçu au titre des congés payés :
En vertu de l'article L3141-1 du code du travail, le salarié a droit à un congé de deux jours et demi ouvrables par mois de travail effectif chez le même employeur.
La période de suspension du contrat de travail ne correspond pas à une période de travail effectif.
Or, L'AGS a versé la somme de 6690,68 (4517,73+ 2172,95) pour la période du 1er juin 2014 au 26 mars 2015.
La période du 18 septembre 2014 au 26 mars 2015 représente une somme de 4466,14 euros.
Dès lors, la somme de 4466,14 euros avancée à tort par l'AGS pour la période du 18 septembre 2014 au 26 mars 2015 doit être remboursée par M. [G] lequel est condamné à verser cette somme à Me [M], ès qualité, à charge pour lui de restituer cette somme à l'AGS.
Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.
Sur la demande reconventionnelle de remboursement du trop-perçu de l'indemnité légale de licenciement :
Selon l'article L1234-9 du code du travail dans sa rédaction applicable au présent litige, le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte une année d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.
Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire.
Selon l'article R1234-2 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, l'indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d'ancienneté, auquel s'ajoutent deux quinzièmes de mois par année au-delà de dix ans d'ancienneté.
L'ancienneté de M. [G] n'a pas couru pendant la période de suspension de son contrat de travail du 18 septembre 2014 au 26 mars 2015, elle est donc de 4 ans, 7 mois et 16 jours.
Le montant de l'indemnité légale qui lui était due s'élève à : 6396,77
(1/5 x 6912,15 x 4) + (1/5 x 6912,15 x 7/12) + (1/5 x 6912,15 x 16/365).
Or, il a reçu 7257,75 euros.
Le trop perçu s'élève à 860,98 euros. Toutefois, le liquidateur judiciaire et l'AGS limitent leur demande à 860,70 euros.
Monsieur [G] est en conséquence condamné à rembourser la somme de 860,70 euros trop perçue au titre de l'indemnité légale de licenciementt à verser cette somme entre les mains de à Me [M], ès qualité, à charge pour lui de restituer cette somme à l'AGS.
Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :
Le jugement entrepris étant infirmé sur les demandes de remboursement de trop perçus trouvant leur origine dans une erreur du liquidateur judiciaire due à une absence d'information quant à la suspension du contrat de travail de M. [G], ce dernier est condamné aux dépens.
Les circonstances de la cause conduisent à rejeter les demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR
INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a assorti d'intérêts la créance salariale fixée au passif de la liquidation judiciaire et en ce qu'il a rejeté la demande de remboursement de trop perçu,
LE CONFIRME en ses autres dispositions,
Statuant à nouveau,
DIT que la créance de 4561,92 euros fixée au passif de l'association Aviation Club de France ne produit pas d'intérêts,
CONDAMNE M. [H] [G] à rembourser à la SCP BTSG prise en la personne de Me [M], ès qualités, les sommes de :
- 9.510 € à titre de salaires du 19 janvier 2015 au 4 mars 2015,
- 4466,14 euros à titre de congés payés pour la période du 18 septembre 2014 au 26 mars 2015,
- 860,70 euros trop perçue au titre de l'indemnité légale de licenciement,
à charge pour la SCP BTSG prise en la personne de Me [M] de restituer cette somme à l'AGS,
REJETTE les demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE M. [H] [G] aux dépens d'appel.
LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE